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La Malle Mystérieuse
La Malle Mystérieuse
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Livre électronique229 pages3 heures

La Malle Mystérieuse

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À propos de ce livre électronique

Le vendredi 26 juillet 1889, M. Toussaint-Augustin Gouffé, Huissier de Paris, doit se rendre comme tous les vendredi chez ses trois filles, 13 rue du Rougemont. Mais pour la première fois, le 27 juillet, celles-ci constatent son absence. Personne à son bureau ne sait où il est allé. M. Toussaint-Augustin Gouffé a disparu. Seule piste : le concierge des clercs a aperçu un homme pénétrer l'office de M. Gouffé...En maître incontesté du true crime, Pierre Bouchardon dévoile une affaire qui défraya la chronique parisienne et laissa perplexe les enquêteurs : crime, fugue ou suicide ?-
LangueFrançais
ÉditeurSAGA Egmont
Date de sortie8 nov. 2021
ISBN9788728078105
La Malle Mystérieuse

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    La Malle Mystérieuse - Pierre Bouchardon

    Pierre Bouchardon

    La Malle Mystérieuse

    SAGA Egmont

    La Malle Mystérieuse

    Image de couverture : Shutterstock

    Copyright © 1933, 2021 SAGA Egmont

    Tous droits réservés

    ISBN : 9788728078105

    1ère edition ebook

    Format : EPUB 3.0

    Aucune partie de cette publication ne peut être reproduite, stockée/archivée dans un système de récupération, ou transmise, sous quelque forme ou par quelque moyen que ce soit, sans l'accord écrit préalable de l'éditeur, ni être autrement diffusée sous une forme de reliure ou de couverture autre que dans laquelle il est publié et sans qu'une condition similaire ne soit imposée à l'acheteur ultérieur.

    Cet ouvrage est republié en tant que document historique. Il contient une utilisation contemporaine de la langue.

    www.sagaegmont.com

    Saga est une filiale d'Egmont. Egmont est la plus grande entreprise médiatique du Danemark et appartient exclusivement à la Fondation Egmont, qui fait un don annuel de près de 13,4 millions d'euros aux enfants en difficulté.

    A mon ami le docteur Charles Flandin.

    P. B.

    La Malle mystérieuse

    « Enfin, s’écria Derville, toutes les horreurs que les romanciers croient inventer sont toujours au-dessous de la vérité… »

    Balzac. Le Colonel Chabert.

    I

    Une étrange disparition

    C’était pendant l’Exposition de 1889.

    Le vendredi 26 juillet, M. Toussaint-Augustin Gouffé, titulaire d’une des importantes charges d’huissier de Paris, quitta son étude, 148, rue Montmartre, vers six heures et demie du soir. Il avait terminé ses affaires.

    Il n’alla pas loin.

    13, boulevard Montmartre, il s’attabla à la terrasse du café Véron, avec trois consommateurs qui s’y trouvaient déjà : Henri-Ernest Letestu, marchand d’objets de curiosité, Georges Dacosta, publiciste financier, et Paul-Pierre Martinet. Celui-ci, plus connu comme anarchiste que comme homme de lettres, s’était attiré, il n’y avait pas si longtemps, pour avoir pris part à une manifestation, place de l’Opéra, certains ennuis judiciaires. Bien que le connaissant à peine, Me Gouffé s’amusa à l’entendre développer ses théories subversives, et, comme il était, ce soir-là, de joyeuse humeur, il lui donna la réplique.

    Au bout d’un moment, Letestu tira sa montre et fit cette remarque : « Il est déjà sept heures dix. Ce n’est pas que je m’ennuie avec vous, mais je ne peux rester davantage. Vous venez, Dacosta ? » A ces mots, les quatre amis de rencontre levèrent le camp. Martinet demeura une minute encore, le temps d’achever sa consommation, et prit ensuite le chemin de la rue Réaumur. Les trois autres firent ensemble quelques pas sur le boulevard, mais, à l’angle de la rue Vivienne, Letestu et Dacosta arrêtèrent un fiacre, qui les conduisit à l’Exposition, où les attendait la femme du premier.

    Me Gouffé demeura seul.

    Veuf depuis déjà huit ans, il était père de trois grandes filles qu’il élevait fort bien. Sacrifiait-il à l’étymologie qui consacre le cinquième jour de la semaine à certaine déesse ? Toujours est-il que, le vendredi, il ne revenait jamais dîner à son domicile personnel, 13, rue de Rougemont. Parfois aussi, il découchait, mais sa chambre était placée de telle manière, qu’il pouvait entrer et sortir sans être vu. Du reste, pour que ses deux filles aînées qui habitaient l’appartement — la troisième achevait son instruction dans un couvent de la rue de Reuilly — ne s’aperçussent de rien, il était toujours de retour pour le petit déjeuner de huit heures.

    Il respectait son logis, comprenait ses devoirs et sauvait les apparences. Le vendredi excepté, il demeurait le soir à son foyer et, si des affaires le retenaient au dehors, ne fût-ce que quelques heures, il ne manquait jamais de prévenir, par carte-télégramme, sa fille Jeanne-Marie-Augustine, qui, bientôt majeure, tenait la maison avec beaucoup d’ordre. En tout, il était ponctuel et correct. La cuisinière, Mathilde Pagnon, épouse divorcée Antore, depuis sept ans à son service, et la gouvernante de Mlles Gouffé, Marie-Léontine Bullot, veuve Eicher, d’âge plus que canonique, en portaient témoignage.

    Pour la première fois, le samedi 27 juillet, Mathilde Pagnon constata, à l’heure du petit déjeuner, que la chambre de son maître était vide et que le lit n’avait pas été défait. Afin de donner le change aux jeunes filles et les convaincre que leur père, après avoir couché dans l’appartement, s’était absenté de bon matin, elle organisa une mise en scène. Elle ouvrit les draps, les brouilla, remplit d’eau savonneuse la cuvette et sema un peu de désordre. Mais le moment du repas de midi arriva, sans que le noctambule eût reparu ou donné de ses nouvelles.

    Inquiète, elle s’en fut, à deux heures du soir, 49, rue de Trévise, signaler cette absence insolite au beau-frère de Gouffé, M. Louis-Marie Landry.

    Ce dernier se rendit aussitôt, 148, rue Montmartre. Les clercs étaient présents, attelés à leur besogne quotidienne, mais un peu surpris de n’avoir pas vu leur patron depuis la veille au soir.

    Cependant, à l’ouverture de l’étude, toutes les portes avaient été trouvées closes. Dans la salle commune et dans le bureau particulier de l’officier ministériel, chaque chose était à sa place. Armoires, tiroirs et coffre-fort ne présentaient aucune trace d’effraction ni de fouille, et rien ne permettait de supposer que quelqu’un se fût introduit là, en l’absence du personnel. D’ailleurs, on retrouvait intacte, dans une des boîtes à couvercle d’un cartonnier, une somme de quatorze mille francs, en billets de banque, que l’huissier y avait glissée, sans plus de précaution, avant de sortir.

    Fallait-il déjà s’inquiéter ? Le beau-frère ne le pensa pas.

    Me Gouffé ne fuyait pas, bien au contraire, les aventures galantes. Il était libre et riche. Sans doute, avait-il poussé cette fois l’escapade au delà d’une nuit, et sa famille allait recevoir, d’une minute à l’autre, un message explicatif, où, pour sauver les apparences, il invoquerait quelque nécessité professionnelle.

    De toutes les hypothèses possibles, M. Landry n’avait voulu adopter que la plus rassurante et il se faisait fort de calmer, au prix d’une fable, les inquiétudes de ses nièces, quand il reçut une confidence qui lui donna à réfléchir.

    Claude Joly, le concierge du 148 de la rue Montmartre, le prit à part et lui tint ce langage :

    — Hier soir, vers neuf heures, pendant que ma femme était allée reconduire sa mère chez elle, je gardais la loge qui se trouve, comme vous savez, à l’entresol, quand on a sonné à la porte de la rue. J’ai tiré le cordon. Quelqu’un, coiffé d’un chapeau à haute forme, est passé devant moi. Grâce à la disposition de l’escalier, tout en lignes droites, je l’en ai vu gravir les marches par deux à la fois, comme M. Gouffé a coutume de le faire. Il s’est arrêté au premier étage. Puis, sans tâtonner, d’un seul tour de clef, il a successivement ouvert la grande serrure et le verrou de sûreté du cabinet de votre beau-frère. Le trousseau tintait dans sa main. Je n’ai pas douté alors que ce fut bien Me Gouffé, qui revient parfois, le soir, à son étude. Aussi, quand il est redescendu au bout de quatre ou cinq minutes, j’ai pris dans sa case le courrier apporté par le facteur à la dernière distribution et je le lui ai tendu au passage.

    « Eh bien ! monsieur, ce n’était pas Me Gouffé. « Mais je ne vous connais pas, m’écriai-je ! qui donc êtes-vous ?

    – Un employé de l’étude, me fut-il répondu sèchement ! Du reste, que vous importe ? Tirez-moi le cordon. »

    « Je n’en revenais pas. Pensez ! un homme qui entre comme chez lui, qui connaît les serrures ! Je suis resté à ma place, sans bouger, sans obéir. Mais l’inconnu a profité de mon trouble pour aller à la porte-cochère, en tourner la crémone, ouvrir les deux battants et gagner la rue. Reprenant mes esprits, j’ai couru sur ses traces. Personne. Nulle silhouette à l’horizon. Aucun bruit de pas sur le trottoir. Aucun fiacre en station ou prenant le départ.

    « Je me suis mis à la recherche d’agents et, presque tout de suite, j’ai pu en ramener deux. Ils se sont tenus dans la loge, pendant que je montais à l’étude, en me servant, pour y pénétrer, de la double clef dont je suis détenteur. Mais, là, je n’ai rien remarqué d’anormal.

    « A son retour, ma femme, à laquelle j’ai raconté l’incident, n’a pas paru, le moins du monde, inquiète : « C’est sans doute, m’a-t-elle dit, un ami de Me Gouffé qui sera monté chercher quelque chose là-haut. » Et elle a prononcé le nom de M. Laune, un banquier de Sèvres, qui est effectivement du dernier bien avec notre locataire. »

    M. Landry se demanda un moment si le concierge, dont il connaissait I'intelligence obtuse, ne s’était pas trouvé en présence de Gouffé luimême. La hâte et l’assurance dont avait fait preuve le visiteur, allant droit à la bonne porte et découvrant, sans essayage préalable, dans un trousseau de nombreuses clefs, les deux qui ouvraient les serrures, portaient assez la marque du maître de céans. Rien d’invraisemblable au surplus à ce que l’huissier, revenu pour une recherche rapide et urgente, eût dédaigné de prendre au passage un courrier de prospectus, et, pressé par le temps, eût ouvert lui-même la porte-cochère de la rue.

    Ce qui pouvait accréditer cette supposition, c’est que Joly, qui n’exerçait les fonctions de concierge qu’en l’absence de sa femme, occupait la loge depuis le début de l’année seulement. Porteur de pain de son emploi, en course la plus grande partie du jour, il connaissait à peine les locataires de l’immeuble.

    Par-dessus tout, l’absence du moindre indice de malveillance dans les lieux explorés semblait faire preuve qu’on était venu sans de louches intentions.

    Cependant, la nouvelle de la disparition de Gouffé courait déjà le boulevard dans le petit secteur où cet officier ministériel avait l’habitude de se montrer chaque soir après la fermeture de son étude. Quand M. Rémy-François Launé, qui, dès cinq heures du soir, transportait son quartier général entre la rue Montmartre et la rue de Richelieu, eut été mis au courant, on le vit pâlir et porter la main à son cœur. « Que me dites-vous là ? gémit-il d’une voix oppressée. Vous n’auriez pas dû m’annoncer la chose d’une façon aussi brutale. Cardiaque comme je suis, je pouvais en mourir du coup. »

    Cette manifestation fut jugée excessive et bien théâtrale. En somme, la disparition était trop récente encore pour provoquer une telle émotion, Pourquoi appréhender le pire ? L’huissier pouvait n'être qu’en bonne fortune. Qui sait même si, déjà, il n’avait pas regagné la rue de Rougemont, avec une histoire toute prête pour expliquer son absence ?

    Cependant, à huit heures du soir, il n’avait pas reparu. Perdant patience, n’étant plus assez rassuré lui-même pour tranquilliser ses nièces, dont les angoisses allaient croissant de minute en minute, le beau-frère prit le parti qui s’imposait. Il se rendit au commissariat de police du quartier Bonne-Nouvelle. Launé qui tint à l’y accompagner avait vu l’huissier pour la dernière fois, disait-il, le jeudi 25 juillet, à la brasserie Gutenberg, boulevard Poissonnière, à l’heure de l'apéritif.

    II

    Crime, fugue ou suicide ?

    Sans prendre encore l’événement au tragique, le commissaire, M. Michel-Emile Brissaud, le voulut prendre au sérieux.

    Il entendit avec quelque ampleur le parent et l’ami de Gouffé. Puis, sans désemparer, il convoqua, à onze heures du soir, le concierge du 148 de la rue Montmartre et le questionna d’une façon moins sceptique que Landry ne l’avait fait jusqu’alors. Si le témoin n’avait pas eu d’hallucination, son récit prenait une importance qu’on ne pouvait plus méconnaître et traçait même aux premières recherches la voie à suivre.

    Qui avait fait, la veille, une brève et furtive apparition, vers neuf heures du soir, dans le bureau de l’huissier ? Qui était monté tout droit à la porte réservée aux seuls intimes, trouvant du premier coup les bonnes clefs, ouvrant les serrures avec la même aisance que Gouffé luimême et entrant comme chez lui ? Sans doute, il ne semblait pas qu’on fût venu pour commettre un vol d’argent, du moment qu’aucun préjudice de ce genre n’avait été constaté. Et les recherches du malfaiteur avaient été bien rapides. Mais peut-être, dans un carton de l’étude, au fond d’un tiroir, sous une chemise de dossier, l’officier ministériel conservait-il une correspondance, un engagement, une reconnaissance de dette, d’autres documents encore, dont quelqu’un, connaissant la cachette, avait eu intérêt à s’emparer, pour son propre compte ou pour celui d’autrui ?

    Vol d’argent ? Non. Mais, hypothèse plus vraisemblable, vol de papiers.

    Malheureusement, le concierge n’était pas encore sorti de son état d’hébétude, qui semblait être chez lui une seconde nature, et c’est à peine s’il put fournir un vague signalement de l’inconnu.

    — Trente-cinq à quarante ans, dit-il. Vêtements très foncés. Bonne taille moyenne. Assez gros. Portant moustaches. Coiffé d’un chapeau à haute forme.

    C’était là une ombre chinoise plutôt qu’un portrait, et la silhouette avait le tort de s’appliquer à trop de gens.

    Pour chercher un homme, la police avait besoin de renseignements plus précis. Elle préféra chercher la femme.

    Interpellé à ce propos, Landry fit connaître que son beau-frère avait entretenu des relations durables avec deux demi-mondaines, dont il donna les noms. Mais, de ces liaisons anciennes, ne subsistaient plus que des cendres déjà refroidies. Sans doute, Gouffé, l’huissier boulevardier, était appelé souvent à exercer des poursuites dans le monde où l’on s’amuse. A ce titre, il disposait d’un pouvoir discrétionnaire pour refuser termes et délais. Mais il n’en abusait pas. On le disait conciliant, peu porté aux mesures extrêmes et mettant beaucoup de formes à faire usage du papier timbré. Il avait pour clientes inévitables, pour pénitentes, eût-on pu dire, car une étude d’huissier ressemble parfois à un confessionnal, certaines jolies femmes, et son tempérament le poussait à profiter des bonnes fortunes. Mais, c’étaient là amours à fleur de peau. Ni débauché à proprement parler, ni buveur, ni joueur, il était toujours demeuré un excellent père de famille.

    Le témoin vanta sa scrupuleuse probité et insista sur la prospérité, chaque jour croissante, de ses affaires.

    — A aucun moment, conclut-il, Gouffé n’a eu le dégoût de la vie. Si certaines infirmités, qu’il doit à l’arthritisme, ont pu l’affliger, il n’a jamais manifesté d’idées de suicide. Il incline plutôt vers l’optimisme et la bonne humeur. Son veuvage mis à part, il n’a du reste pas eu trop à se plaindre du sort. Sa montée vers la fortune a été rapide et je le crois incapable d’une escapade prolongée, car il aime trop ses filles pour les laisser aussi longtemps sans nouvelles. N’auraient-elles pas reçu sa lettre ? Je voudrais bien ne pas désespérer encore. Au fond, je ne sais plus que penser…

    Launé témoigna des mêmes inquiétudes. Avant de quitter le commissariat, il prit à part M. Brissaud et lui tint ce langage :

    — N’écrivez pas ce que je vais dire. Je suis, de longue date, l’ami de Gouffé ! J’ai été son compagnon de plaisirs et je connais à fond sa vie privée. Eh bien ! c’est du côté des femmes du monde galant qu’il faut, à mon avis, chercher le mot de l’énigme. Sans doute, à première vue, on pourrait songer à quelque vengeance, de la part de quelqu’un qu’il a poursuivi ou poursuit encore. J’ai une autre idée. Je crois fermement qu’avec la complicité d’une drôlesse, on l’a attiré dans un guet-apens et qu’on le séquestre en vue d’une extorsion de fonds. Une extorsion de fonds, je dis bien, car il n’emporte jamais que fort peu d’argent sur lui. Proie facile, il peut devenir ensuite un otage bon à conserver. On le sait riche, assez prompt à s’enflammer et capable, dans certains cas, d’accepter un rendez-vous dangereux. Autant de circonstances qui me font penser à un mauvais coup ! Peut-être encore, hier soir, se trouvant seul et s’ennuyant, est-il allé frapper à quelque porte, a-t-il troublé un tête-à-tête et payé cher alors sa malencontreuse visite ! Mais je ne puis guère vous guider dans vos recherches, car, parmi les amies que je lui connais, je n’en vois aucune, capable de se prêter à une machination ou de laisser accomplir un crime sous ses yeux.

    De la déposition de Landry, le commissaire de police avait retenu un détail intéressant et susceptible d’une prompte vérification.

    Le 26 juillet, aux environs de midi, un clerc de l’étude était allé, sur l’ordre de son patron, jeter au bureau de poste, place de la Bourse, une carte-télégramme ouverte et, en chemin, il avait commis l’indiscrétion d’en lire le texte. C’était, sur un ton amical, une invitation à dîner pour le jour même. Seulement, le messager trop curieux avait oublié le nom du destinataire ; il ne se rappelait que vaguement l’adresse : 5, boulevard Saint-Michel, croyait-il.

    Landry avait cherché en vain de qui il pouvait s’agir. Au 5 du boulevard Saint-Michel, où il s’était présenté aussitôt après avoir reçu la confidence du clerc, il avait vu successivement tous les locataires de l’immeuble, mais personne ne connaissait, fût-ce de nom, maître Gouffé.

    Questionné à son tour par M. Brissaud, Launé avait prononcé le nom d’un M. Florentin Delmas, propriétaire, en relations suivies avec l’huissier et ayant son domicile, non pas, 5, boulevard Saint-Michel, mais, 5, rue Herschel, dans le voisinage immédiat de ce boulevard.

    Delmas fut mandé au commissariat le 28 juillet. Il ne fit aucune difficulté pour reconnaître qu’il avait reçu, de Gouffé, une carte-télégramme, rédigée en ces termes :

    « Mon cher ami, je suis seul à dîner ce soir. Voulez vous venir avec moi ? Je serai ici jusqu'à six heures

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