Les Veillées des chaumières

En justes noces

La masse du château se distinguait à peine dans la brume de ce petit matin de l’hiver 1913. Rodolphe de Boulaincourt, fils du comte du même nom, apercevait vaguement la couleur rougeâtre des briques des deux imposantes ailes qui flanquaient le bâtiment principal. Aucune lumière n’était encore allumée, à part celles qui filtraient au travers des chiens-assis des fenêtres des domestiques, qui saillaient du toit d’ardoises. Du fond de son ébriété, le jeune homme pensa tout de même à contourner la bâtisse, pour ne pas faire crisser les graviers de la grande allée. Pestant contre l’humidité de l’herbe qui mouillait ses bottines, il accéléra le pas et entra dans la vaste demeure familiale par la porte de l’entrée de service dont il se félicitait d’avoir volé une clé. Titubant, il enfila le long corridor sombre qui desservait les cuisines, l’office, les bureaux du majordome et de l’intendante, la lingerie, bref tout ce qui fondait en grande partie le train de vie d’une famille noble et prospère, à laquelle il se félicitait d’appartenir. Dire que tout cela lui reviendrait un jour !

Puis il monta péniblement l’escalier irrégulier qui menait aux appartements des maîtres. Il pénétra dans le grand salon, par une discrète porte qui faisait le lien entre les deux mondes, parallèles mais bien distincts : celui, quasi souterrain, de la domesticité, et celui, lumineux et aéré, des maîtres. Il y avait cinq de ces portes, dissimulées derrière des tentures, dans l’immense rez-de-chaussée, par lesquelles entraient ou sortaient les employés.

Il traversa la pièce et se retrouva au bas du monumental escalier qui menait aux chambres de la famille et des invités, souvent nombreux, maculant au passage les tapis persans de ses bottes crottées. Il dut se tenir à la rampe de marbre pour ne pas tomber et parvint enfin à la porte de sa chambre qu’il ouvrit le plus précautionneusement possible. Avant de s’écrouler dans un fauteuil à côté d’une des fenêtres qui donnaient sur le parc devant la propriété, il jeta

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