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La tartine: Un histoire vraie
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La tartine: Un histoire vraie
Livre électronique107 pages1 heure

La tartine: Un histoire vraie

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À propos de ce livre électronique

Alain De Deyn ne connaissait pas grand-chose de l’histoire de son père. Il détenait seulement quelques souvenirs volés au hasard de conversations, surprises dans son enfance derrière la porte du salon de la maison familiale. Étranges et secrets chuchotements entre son père et un de ses amis, toujours le même. Après le décès de ses parents, Alain De Deyn a découvert, dans une grande caisse en carton, une foule de documents administratifs et judiciaires, ainsi que des coupures de journaux d’époque. Croisées à ses souvenirs, ces archives lui révélèrent le secret si bien gardé par son père, Nestor De Deyn.

À PROPOS DES AUTEURS

Alain De DeynA, fils d’un résistant rescapé des camps de concentration, est accompagné dans l’écriture par Donald George, philosophe et directeur de la Maison de la Francité.
LangueFrançais
Date de sortie6 mai 2021
ISBN9782931008683
La tartine: Un histoire vraie

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    Aperçu du livre

    La tartine - Alain De Deyn

    Couverture : Alain De Deyn Donald George, La tartine (Une histoire vraie), 180° (éditions)Page de titre : Alain De Deyn Donald George, La tartine (Une histoire vraie), 180° (éditions)

    www.180editions.com

    www.facebook.com/180editions

    www.instagram.com/180editions

    ISBN  : 978-2-931008-68-3

    Dépôt légal : D/2021/10.213/16

    Tous droits strictement réservés. Toute reproduction d’un extrait quelconque de ce livre par quelque procédé que ce soit, et notamment par photocopie, microfilm ou support numérique ou digital, sans l’accord préalable et écrit de l’éditeur, est strictement interdite.

    Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo.

    Toute l’histoire que vous allez lire dans les pages qui suivent est véridique. C’est l’histoire de Nestor De Deyn…

    ALAIN DE DEYN

    TABLE DES MATIÈRES


    Page de titre

    Page de copyright

    Exergue

    Les premiers pas

    Le front de l’Yser

    Retour de flamme(s)

    Les jeux d’enfants

    Le bruit des bottes

    La guerre des boutons

    Entre boutons et barreaux

    L’armée secrète

    Occupé !

    Le dilemme

    La solution

    L’entrée en résistance

    La mission de trop

    Une certaine idée de la justice

    Bonjour prison(s)

    Sept lieux de détention en trois ans et onze mois

    Saint-Gilles ou le simplet résistant

    Un aller simple

    Essen, simplement une halte-garderie

    Bochum, entre nuit et brouillard

    La tourbière d’Esterwegen

    La faim

    René

    L’infirmerie

    Les brutes et les truands

    Le début du tunnel

    La pause repas – Pas pour tout le monde

    Le bout du tunnel

    La nuit d’avant

    Le jour d’après

    La prison de Gross-Strehlitz

    Gross-Rosen, où l’on « conte » les morts

    Ravensbrück, où l’on décompte les vivants

    Les temps changent

    Retour vers le futur

    L’attente

    La route

    La route, encore

    La route, toujours

    L’approche

    Mère à l’horizon

    Retour à la réalité

    Boulevard des invalides

    Du pain sur la planche

    La vie en retour

    Le train-train

    À la vie – À l’amour

    Le chaud et le froid

    Renaissance

    Dilbeek – juillet 2020

    Annexes

    LES PREMIERS PAS



    Le front de l’Yser


    J’ai poussé mon premier cri le 4 janvier 1915. C’était (en quelque sorte et à mon corps défendant) un « cri de guerre ». Six mois auparavant en effet, alors que j’étais dans le ventre de ma mère, Gravilo Princip, un parfait inconnu à mes yeux encore jamais ouverts, assassinait le prince François-Ferdinand d’Autriche et son épouse la duchesse de Hohenberg à Sarajevo. Cet événement – finalement assez local – allait provoquer une série de réactions en chaîne de la part des grandes puissances européennes et mènerait l’Humanité à vivre la Première Guerre mondiale. Ma naissance se jumelait ainsi à celle d’un conflit international qui allait conduire à la mort dix millions d’êtres humains. Mes parents me baptisèrent Nestor, sans savoir que ce nom avait été porté par un des héros de la guerre de Troie, l’un des rares guerriers grecs à avoir connu un retour sans histoire de ses batailles.

    Mon père n’était pas présent à ma naissance. Quelques mois auparavant, lorsque la guerre avait éclaté en août 1914, il avait été réquisitionné et appelé à prendre les armes. Il avait 21 ans. Boulanger de métier, ses armes étaient couteaux, fourchettes, cuillères et spatules, et il fut directement affecté aux cuisines militaires de campagne, loin des premières lignes du combat. Confiné aux abords du front de l’Yser, ses supérieurs ne lui avaient pas permis de revenir pour se marier ni pour être aux côtés de ma mère lors de l’accouchement. Il m’a un jour confié que ses conditions de vie là-bas n’étaient pas à plaindre, en tout cas par rapport aux autres hommes qui vivaient dans le froid humide des tranchées sous la pluie des bombes et le feu des fusils… Sans oublier l’ypérite appelée aussi le « gaz moutarde », utilisé pour la première fois de l’histoire dans le cadre des combats. Mon père n’y était pas directement confronté. En léger retrait du front, il n’en voyait que les nuages jaunâtres. Il fallait constamment s’en éloigner et déplacer sa cuisine mobile en fonction de la direction du vent. C’était pour mon père une véritable chance de pouvoir se tenir à la lisière de la guerre chimique sans jamais être obligé d’y entrer. Les autres privilèges étaient liés à sa fonction de cuisinier : la chaleur à la proximité des fours à pain et des cuves servant à préparer la soupe, l’assurance d’être aux premières loges pour se nourrir et d’être placé dans des zones dites sécurisées.

    Mon père réussissait à trouver le temps d’écrire régulièrement. Uniquement à ma mère. Une fois par semaine. Le courrier arrivait toujours avec du retard, beaucoup de retard : plusieurs semaines, parfois plusieurs mois. Elle était devenue dépendante de ces courriers. Chaque lettre illuminait ses pupilles et distillait une lumière particulière que peignaient les cils lorsque ses paupières se refermaient le temps d’un instant. Ma mère m’a souvent raconté, durant mon enfance, ce qu’elle ressentait à chaque lecture et relecture des lettres que mon père lui écrivait. Celui-ci n’ayant jamais permission pour venir la voir, c’était le seul fil ténu qui la reliait à lui. En cette fin d’année 1914, elle avait 23 ans, Catherine, et le ventre gonflé par la chrysalide qu’elle portait en elle et qui m’enveloppait de son voile nymphal et protecteur, au fond de ce petit hôpital où elle avait eu le privilège de pouvoir accoucher grâce à l’entremise d’une tante religieuse qui y travaillait.

    Ma mère trouvait le contenu de ces lettres assez restrictif. Les jours qui y étaient décrits se ressemblaient dans l’horreur. Quelques années plus tard, encore adolescent, je les ai trouvées et les ai parcourues en cachette. Je me souviens y avoir lu qu’il était difficile de faire la cuisine en portant un masque à gaz, que la nourriture elle-même était probablement infectée par des particules chimiques et que les hommes avaient du mal à manger en gardant leur masque sur le visage. Même lorsqu’on était loin du front, le gaz était là, résiduel et diffus, mais bien présent. Dans les aliments, dans les vêtements. C’était les vomissements assurés, avec souvent la mort, au bout du bout.

    Au souvenir de la lecture de ces lettres, je me dis qu’elles devaient paraître à ma mère fort étranges, comme le fruit d’une écriture automatique qui mêlerait à chaque ligne l’horreur et l’amour, conjuguant le bruit des bombes aux battements du cœur de mon

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