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De pères inconnus
De pères inconnus
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Livre électronique287 pages4 heures

De pères inconnus

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À propos de ce livre électronique

Suite à une agression à l’âge de treize ans et demi, Judith se retrouve enceinte. Lorsque son père l’apprend et malgré les supplications de sa mère, non seulement il la chasse de la maison, mais de plus, il lui révèle qu’elle est une enfant trouvée, et elle quitte le foyer totalement désespérée. Après la naissance de sa fille, Judith devra affronter les nombreuses vicissitudes d’une vie d’errance sans perdre de vue le but qu’elle s’est fixée : retrouver son agresseur et se venger de lui. Une rencontre fortuite lui offre un foyer stable, mais son bonheur est de courte durée et elle devra affronter le malheur, soutenue par l’amour inconditionnel de Mathias, que pourtant elle ne cesse de repousser suite à un malentendu. Suivez cette héroïne sensible, fragile et forte à la fois dans sa lutte contre les aléas de la vie et son acharnement à offrir un bonheur sans nuage à sa fille.
LangueFrançais
Date de sortie26 oct. 2021
ISBN9782312084381
De pères inconnus

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    Aperçu du livre

    De pères inconnus - Sarita Mendez

    cover.jpg

    De pères inconnus

    Sarita Méndez

    De pères inconnus

    Roman

    LES ÉDITIONS DU NET

    126, rue du Landy 93400 St Ouen

    © Les Éditions du Net, 2021

    ISBN : 978-2-312-08438-1

    Chapitre 1

    Milieu des années 60.

    Judith avançait vite, pressée d’arriver chez elle. Elle arriva bientôt en vue du terrain vague qui allait devenir l’emplacement d’un supermarché et elle hésita quelques secondes. Il faisait nuit depuis quelques minutes et sa mère lui avait formellement interdit de traverser le terrain-même si cela raccourcissait considérablement le trajet-en raison des mauvaises rencontres qu’elle aurait pu y faire. Cependant, Judith avait pris énormément de retard chez son amie Maria, à laquelle elle avait dû expliquer plusieurs fois de suite la résolution du problème de mathématiques qu’elles devaient rendre à leur professeur le lendemain, avant qu’elle comprenne enfin la solution. Elle consulta une nouvelle fois sa montre, puis s’engagea résolument dans le terrain vague sans remarquer l’ombre qui la suivait depuis quelques minutes déjà, songeant :

    « Maman doit être très inquiète ! Il vaut mieux que je passe par là pour aller plus vite, tant pis, pour une fois ! »

    Elle avait presque atteint la moitié du terrain vague, éclairé faiblement par la seule lune qui était à demi-pleine et par quelques lampadaires assez éloignés les uns des autres, lorsqu’elle entendit un léger craquement derrière elle. Elle se retourna vivement, scrutant la nuit, cherchant à deviner si elle était bien seule. Ne distinguant rien elle se hâta un peu plus, le cœur battant, serrant un peu plus fort dans sa main la poignée de son cartable. Le craquement qu’elle avait entendu s’amplifia, se transformant bientôt en un bruit de pas et Judith sentit l’inquiétude l’envahir lorsqu’en se retournant une nouvelle fois, elle put distinguer une silhouette qui se dirigeait rapidement vers elle. Se remémorant les conseils que lui avait prodigués sa mère, Judith prit sa course vers l’autre extrémité du terrain, jetant de brefs regards en arrière afin de voir si elle était poursuivie ou non. Ses craintes furent justifiées lorsqu’elle constata que l’inconnu s’était mis à courir lui aussi. Soudain, Judith trébucha et se tordit la cheville en raison d’une dénivellation qu’elle n’avait pas remarquée, tout occupée qu’elle était à surveiller ses arrières et elle tomba lourdement sur le sol, perdant son cartable. Elle se releva aussitôt et laissa échapper un gémissement de douleur tant sa cheville la faisait souffrir. Elle se remit à courir tant bien que mal en boitillant, mais déjà, l’homme l’avait rattrapée et saisie par le bras. Judith se dégagea en criant :

    « Lâchez-moi, que me voulez-vous ?! »

    Il ricana :

    « Allons, allons, ma belle, n’aie pas peur et laisse-toi faire bien gentiment ! »

    « Laissez-moi tranquille, je vous en prie ! ».

    L’homme attira Judith à lui et l’embrassa violemment. Son haleine avinée fit reculer Judith qui le gifla et tenta une nouvelle fois de se dégager en suppliant :

    « Allez-vous en, lâchez-moi ! Je vais hurler ! »

    Il éclata de rire :

    « Tu peux toujours crier, personne ne t’entendra ! »

    La malheureuse Judith se mit alors à gigoter tout en hurlant à tue-tête. Furieux, son agresseur la frappa violemment jusqu’à ce qu’elle perdît connaissance. Lorsqu’il eut achevé d’assouvir ses bas instincts, l’homme se releva et contempla sa victime. Complètement dégrisé, il l’observa avec un peu plus d’attention et murmura d’un air horrifié :

    « Ce n’est qu’une enfant ! ».

    Il ramena sur elle ses vêtements déchirés, puis ôta sa veste et l’en recouvrit avant de se retourner et de quitter le lieu du drame en courant.

    Quelques minutes plus tard, Judith revint à elle et son corps endolori lui rappela l’horreur des instants qu’elle venait de vivre. Lorsqu’elle découvrit la veste de son agresseur étendue sur elle, son premier mouvement fut de la jeter au loin, mais elle se ravisa, songeant :

    « Non, je vais la garder, je le retrouverai et je lui ferai payer le mal qu’il m’a fait ! »

    Essuyant rageusement les larmes qui roulaient sur ses joues, Judith enfila la veste, récupéra son cartable, puis reprit la direction de son domicile en courant. Enfin, elle arriva chez elle et elle allait pénétrer directement dans sa chambre lorsque sa mère surgit de la cuisine en s’écriant :

    « Judith, c’est toi ?! Mais où étais-tu donc, j’étais très inquiète et… Mais qu’est-ce que tu as et d’où vient cette veste ? Et ces marques sur ton visage ?! Judith, tu es toute pâle, que t’est-il arrivé ?! »

    Incapable de garder son secret plus longtemps, la fillette laissa tomber son cartable et se jeta dans les bras de sa mère en sanglotant. De plus en plus inquiète, la mère de Judith la serra contre elle, puis lui ôta la veste et blêmit en découvrant les vêtements à demi déchirés de sa fille.

    « Seigneur, que s’est-il passé, Judith ??!! »

    En proie à une véritable crise de nerfs, l’enfant lui raconta l’agression et la malheureuse femme mêla ses larmes aux siennes en s’exclamant :

    « Mon Dieu, ma pauvre chérie ! Je t’avais pourtant dit de ne pas traverser ce terrain vague ! »

    Levant vers elle son visage baigné de larmes, Judith répondit en hoquetant :

    « Mais Maman, j’étais très en retard, et je ne voulais pas que tu t’inquiètes, alors j’ai pris le raccourci… Je ne voulais pas que cela arrive, Maman, je te jure que je ne le voulais pas !! »

    « Je sais, ma chérie, je sais ! Calme-toi, tu n’es pas responsable de ce qui t’est arrivé. Viens avec moi, il faut aller à la police ! »

    « Oh non, Maman, je t’en supplie, je ne veux pas y aller ! Tout le monde au collège va savoir ce qui m’est arrivé et j’aurai trop honte ! »

    Madame Leroy observa sa fille, imaginant ce qu’allait devenir sa vie lorsque son drame serait révélé dans la presse, les interrogatoires, les examens qu’elle devrait subir et qu’elle ressentirait comme autant d’humiliations, et elle décida en soupirant :

    « Très bien, Judith, nous n’irons pas. Va prendre une douche, je vais jeter cette veste et… »

    « Non, Maman, ne la jette pas ! »

    « Mais pourquoi donc ?! »

    « Je ne veux pas que tu la jettes ! »

    « Très bien, comme tu voudras… »

    « Oh, Maman, encore une chose… Surtout, ne dis rien à Papa, je t’en prie ! »

    Madame Leroy hocha la tête, embrassa sa fille et l’accompagna jusqu’à la salle-de-bains avant de retourner à la cuisine. Une fois seule dans sa chambre, Judith examina avec attention la veste de son agresseur, cherchant un indice quelconque et elle découvrit une photographie d’identité représentant un jeune homme d’une vingtaine d’années, aux cheveux blonds, aux yeux bleus et au sourire charmeur. Lorsque l’inconnu l’avait attaquée, une heure plus tôt, Judith se trouvait assez près de l’un des lampadaires éclairant le terrain vague et elle reconnut immédiatement son agresseur sur la photographie. Elle retourna celle-ci avec le secret espoir de trouver le nom de l’homme écrit au dos, mais rien n’était inscrit et elle la remit dans la poche intérieure de la veste, qu’elle rangea dans sa penderie. Un moment plus tard, Madame Leroy vint chercher sa fille pour le dîner et Judith s’installa en compagnie de ses parents. Son père remarqua :

    « Qu’est-ce que tu as, Judith, tu es bien pâle ! Et qu’est-ce que c’est que ces marques sur ton visage ?! »

    Madame Leroy devança sa fille en expliquant :

    « Judith était tellement absorbée par le livre qu’elle lisait tout-à-l’heure, qu’elle est venue jusqu’à la cuisine en continuant à lire et elle s’est cognée contre la porte ! »

    Judith renchérit :

    « Et en plus, je suis un peu fatiguée, Papa, ce n’est rien, ne t’inquiète pas. »

    Monsieur Leroy se contenta de ces explications et ils passèrent le reste du repas à discuter de choses et d’autres, avant de regagner leurs chambres respectives…

    Il était près de deux heures du matin lorsque Judith s’éveilla en hurlant de terreur, le front en sueur. La porte de sa chambre s’ouvrit, livrant passage à sa mère qui la serra dans ses bras en disant :

    « N’aie pas peur, ma chérie, je suis là, ce n’est qu’un mauvais rêve. »

    « Oh, Maman, c’est horrible, j’ai tout revu, je… »

    Monsieur Leroy pénétra dans la pièce en demandant d’un ton bourru :

    « Eh bien quoi, on ne peut plus dormir dans cette maison ?! Enfin, Judith, tu as passé l’âge des cauchemars, que je sache ! »

    Madame Leroy intervint :

    « Va te recoucher, chéri, je reste avec elle jusqu’à ce qu’elle se rendorme. »

    Monsieur Leroy repartit en bougonnant et la mère de Judith alla refermer la porte, puis s’étendit à côté de sa fille et la serra contre elle en disant :

    « Rendors-toi, ma chérie, je suis là. »

    Judith se blottit contre sa mère et, au bout d’un long moment, elle finit par se rendormir, tandis que sa mère priait silencieusement en laissant les larmes rouler sur ses joues…

    Le lendemain, au collège, Maria demanda à son amie Judith :

    « Ta mère ne t’a pas trop grondée pour ton retard d’hier soir ? »

    Judith répondit évasivement :

    « Non, non, tout s’est bien passé. »

    « Qu’est-ce-que tu as, Judith ? On dirait que tu es contrariée et je trouve que tu as mauvaise mine. »

    « Mais non, Maria, je t’assure que tout va bien. »

    Maria n’insista pas, mais elle remarqua que durant le reste de la journée, son amie resta morose et repliée sur elle-même, elle qui était d’habitude le boute-en-train de la classe.

    À la sortie, Judith se hâta de se diriger vers son domicile, évitant ses amies qui se demandaient toutes quelle mouche l’avait piquée. Les jours passèrent sans que l’attitude distante de Judith variât, bien que Madame Leroy entourât sa fille de toute son affection, cherchant à lui faire oublier l’affreux drame dont elle avait été victime…

    À mesure que les mois passaient, Madame Leroy remarquait que sa fille changeait peu à peu, mais sans parvenir à définir ce qui avait exactement changé en elle. Ce matin-là, alors que Judith s’apprêtait à pénétrer dans la cuisine afin de prendre son petit-déjeuner avec sa mère, son père étant déjà parti travailler, elle fut soudain prise d’un étourdissement et elle dut s’accrocher au chambranle de la porte afin de ne pas tomber.

    Madame Leroy se précipita vers elle en s’exclamant :

    « Judith, que t’arrive-t-il donc, ma chérie ?! »

    « Ce n’est rien, maman, j’ai juste la tête qui tourne un peu, mais cela va passer, ne t’inquiète pas. »

    La mère de Judith fronça les sourcils et l’aida à s’asseoir en demandant :

    « Est-ce la première fois que cela t’arrive, Judith ? »

    Judith hésita un instant, puis répondit :

    « Non, Maman, cela fait quelques temps que je ne me sens pas bien le matin quand je me lève, et quand je suis au collège, je suis obligée de demander la permission de sortir pendant les cours. »

    Madame Leroy se laissa tomber sur sa chaise en murmurant d’un air accablé :

    « Mon Dieu, ce n’est pas possible ! Finis vite ton petit-déjeuner, Judith, je crois qu’il est urgent que nous allions voir le médecin. »

    Elles se mirent à manger, et, un moment, plus tard, elles se trouvaient dans la salle d’attente du médecin de famille. À la fin de la consultation, Madame Leroy interrogea anxieusement le praticien :

    « Eh bien, Docteur ? »

    « Vous aviez raison, Madame Leroy, Judith est enceinte et il est trop tard pour tenter quoi que ce soit. »

    « Seigneur, que vais-je dire à son père ! Et elle, comment va-t-elle réagir ?! Elle est si jeune et si fragile ! »

    « Comment se fait-il qu’elle se soit… laissée tenter ?! »

    « Oh non, Docteur, vous n’y êtes pas du tout ! Judith a été victime d’un… »

    À ce moment-là, la jeune fille sortit du cabinet et sa mère s’interrompit. Le médecin lui tapota le bras en disant :

    « Je comprends, Madame Leroy, et je suis navré pour vous. »

    Elle hocha la tête et repartit avec sa fille. Lorsqu’elles furent dans la voiture, Judith demanda :

    « Alors, Maman, qu’est-ce que j’ai ? »

    Madame Leroy prit une profonde inspiration, puis répondit :

    « Tu vas avoir un bébé, Judith. »

    « Quoi ?! Mais Maman… »

    Elle s’interrompit soudain, puis murmura :

    « C’est… cet homme ? »

    « Oui, ma chérie, mais rassure-toi, nous ferons adopter le bébé dès sa naissance et… »

    « Non, Maman, je veux le garder ! »

    « Mais voyons, Judith, tu n’as pas voulu cet enfant et tu es beaucoup trop jeune pour l’élever, alors pourquoi veux-tu le garder ?!! Songe que si tu le gardes, tu seras obligée de quitter le collège, d’abandonner tes études ! Tu ne pourras jamais devenir vétérinaire, comme tu l’espérais ! Et que sera la vie de cet enfant, sans père et avec une mère qui aura à peine quinze ans de plus que lui ! »

    Judith embrassa sa mère, puis répondit :

    « Je suis désolée de te faire autant de peine, Maman, Mais je ne changerai pas d’avis. Je veux garder ce bébé et je l’élèverai tout comme toi tu m’as élevée. »

    Madame Leroy mit le contact en soupirant :

    « Très bien ma chérie, comme tu voudras. Sache que je serai là pour toi et que je t’aiderai si tu as besoin de moi… Je ne sais pas si ton père acceptera ta décision, mais s’il refuse, je ferai tout pour le faire changer d’avis. Après tout ce sera son premier petit-fils ! »

    Judith sourit :

    « Ou sa première petite-fille… Mais ne lui dis pas tout de suite, Maman, je préfère le lui annoncer moi-même. »

    Sa mère acquiesça d’un signe de tête et quitta sa place de parking…

    Deux mois passèrent encore, et ce soir-là, lorsque Judith pénétra dans la salle-à-manger après avoir terminé ses devoirs, son père s’écria soudain :

    « Approche-toi, Judith, que je te regarde. Il me semble que tu as grossi ! »

    Judith échangea un regard avec sa mère, puis répondit :

    « Je vais avoir un bébé, Papa. »

    Monsieur Leroy reposa brusquement le verre dont il s’apprêtait à boire le contenu en hurlant presque :

    « Veux-tu me répéter ça ?!! »

    Il s’était levé maintenant et ses yeux lançaient des éclairs tandis qu’il observait sa fille. Judith recula d’un pas en balbutiant :

    « Tu… Tu vas être grand-père, Papa. »

    Furieux, il lui asséna une gifle tellement violente qu’elle tomba assise sur le canapé. Madame Leroy s’interposa :

    « Arrête, Paul ! Tu es fou ! »

    « Tu oses protéger cette traînée alors qu’elle a déshonoré notre famille ??!! »

    « Ne l’insulte pas, Paul, ce n’est pas de sa faute ! »

    « Pas de sa faute ??!! C’est une garce ! Rends-toi compte, commencer à son âge !! »

    « Tais-toi, Paul, tu ne sais pas ce que tu dis ! Judith a été agressée un soir en rentrant du collège ! »

    « C’est ce qu’elle t’a fait croire, oui ! Je te l’avais bien dit que nous n’aurions pas dû la recueillir, cette nuit-là !! »

    Judith se releva et demanda d’une voix blanche :

    « Recueillie ? Comment ça, recueillie ?! »

    Les époux échangèrent un regard et Madame Leroy supplia :

    « Je t’en prie, Paul, ne dis rien ! »

    Il haussa les épaules, et, avec un sourire cynique, il répondit :

    « Oui, recueillie ! Et un soir de Noël, qui plus est ! Mathilde et moi revenions de la clinique, où nous avions perdu notre bébé, et nous avons entendu des gémissements en passant près de l’église. Nous nous sommes approchés et nous t’avons trouvée tout emmaillotée dans une poubelle… Tu avais à peine un mois… Je voulais te laisser là et rentrer chez nous, mais Mathilde a refusé. Elle était trop triste d’avoir perdu notre enfant et elle n’a pas hésité à te recueillir, si bien que personne dans notre entourage ne s’est jamais douté que tu n’étais pas notre fille… »

    Il s’interrompit, puis reprit avec violence :

    « Notre fille ! La belle affaire !! Nous aurions dû nous douter qu’elle tournerait mal puisque ses propres parents l’ont abandonnée ! »

    Mathilde Leroy était en larmes et elle s’écria :

    « Tais-toi, Paul, tais-toi ! Judith a toujours été notre fierté jusqu’à présent ! »

    « Ta fierté, Mathilde, pas la mienne ! Tu vas partir d’ici, Judith ! Immédiatement ! Je ne veux plus te revoir ici ! Ni toi, ni ton bâtard ! »

    « Paul ! Tu ne penses pas ce que tu dis !! »

    « Oh que si, je le pense ! Et je te conseille de te taire si tu ne veux pas que je te renvoie avec elle ! » C’était plus que ne pouvait en supporter la malheureuse Judith qui, éclatant en sanglots, courut s’enfermer dans sa chambre. Mathilde voulut la suivre, mais son mari la retint par le bras :

    « Si tu la suis, Mathilde, tu ne remettras plus jamais les pieds ici, c’est compris ?! »

    « Mais voyons, Paul, tu ne peux pas agir ainsi envers Judith ! Elle n’est pas responsable de ce qui lui est arrivé, enfin !! »

    « Ma décision est prise, Mathilde, et je ne reviendrai pas là-dessus, c’est compris ?! »

    « Mais où ira-t-elle ? Elle est si jeune ! »

    « Je me moque de l’endroit où elle ira, le plus loin possible d’ici !… Je lui laisse vingt minutes, pas une seconde de plus ! »

    Tournant les talons, il alla s’enfermer dans la cuisine, suivi par le regard désespéré de Mathilde. Celle-ci se hâta vers la chambre de Judith et trouva sa fille occupée à entasser quelques vêtements de rechange dans une petite valise, les larmes roulant sur ses joues. Elles tombèrent dans les bras l’une de l’autre en sanglotant et Judith demanda :

    « Est-ce que c’est vrai, tout ce qu’il a dit, Maman ? »

    Mathilde Leroy baissa la tête en murmurant :

    « C’est exact, oui, Judith. »

    La jeune fille redoubla de sanglots en disant :

    « Oh, Maman, pourquoi ne m’as-tu rien dit ?! »

    « Je ne voulais pas te faire de peine, ma chérie. Je… Je suis désolée de ce qui t’arrive, je ne pensais pas que ton père réagirait aussi mal ! Écoute, je vais partir avec toi et… »

    « Non, Maman, il ne faut pas que tu fasses cela, Papa te renverrait ! Tu dois rester avec lui ! »

    « Mais je ne peux pas te laisser partir seule dans ton état, Judith ! Où iras-tu ? »

    « Ne t’inquiète pas pour moi, Maman, tout ira bien. Ce soir, je dormirai chez Maria, je viens de lui téléphoner et ses parents sont d’accord. »

    « Tu… lui as dit ? »

    « Non, Maman, je lui ai dit que vous receviez des membres de la famille et que vous deviez discuter entre adultes. »

    Madame Leroy serra sa fille contre elle en murmurant :

    « Oh, ma chérie, comme je suis navrée… Attends, je reviens. »

    Elle quitta la pièce, revint quelques minutes plus tard et referma silencieusement la porte. Elle tendit alors à Judith une liasse de billets en disant :

    « Tiens, ma chérie, il y a là mille cinq cent francs que j’avais gardés en cas de coup dur. Cache-les dans ta valise et fais bien attention à ce que l’on ne te dérobe pas cet argent. »

    « Je ne veux pas te prendre ton argent, Maman ! »

    « Fais ce que je te dis, Judith, tu en auras besoin. J’ai encore autre chose pour toi. »

    De la poche de sa blouse, elle sortit une chaîne en or, au bout de laquelle était suspendu un médaillon représentant le visage de la vierge et au dos duquel étaient gravés un prénom et une date de naissance : « Judith, le 16-11-1964 ».

    Judith examina le bijou et sa mère lui dit :

    « Tu portais ce bijou autour du cou lorsque nous t’avons trouvée ; c’est le seul lien qui te rattache à ta véritable famille. »

    La porte de la cuisine qui s’ouvrait alerta Madame Leroy qui chuchota :

    « Va-t-en vite, ma chérie, j’ai peur qu’il te frappe à nouveau ! »

    Judith étreignit sa mère en sanglotant :

    « Je t’aime, Maman, et je t’aimerai toujours ! »

    « Prends bien soin de toi, ma chérie. »

    Elles s’embrassèrent tendrement, puis la malheureuse Judith enfila la veste de son agresseur par-dessus ses vêtements, prit son cartable et sa valise, et quitta la maison en relevant dignement la tête lorsqu’elle passa devant son père. Un moment plus tard, elle pouvait enfin laisser libre cours à son chagrin dans la chambre d’amis de l’appartement des parents de son amie Maria. Un moment après, la porte s’ouvrit doucement, livrant passage à celle-ci, qui s’assit sur le bord du lit en chuchotant :

    « Qu’est-ce qu’il y a Judith ? je t’ai entendue pleurer… »

    « Excuse-moi, Maria, je ne voulais pas te réveiller. Ne t’inquiète pas pour moi, je… C’était juste un mauvais rêve. Va te recoucher, je vais mieux maintenant. »

    Maria scruta son amie, puis quitta la chambre en lui souhaitant une bonne nuit.

    Le lendemain, lorsque Maria frappa à la porte de la chambre d’ami, elle n’obtint aucune réponse. Inquiète pour Judith, elle ouvrit la porte et resta pétrifiée sur le seuil en constatant que la chambre était vide. Elle se précipita à la cuisine en disant à sa mère :

    « Maman, Maman ! Judith a disparu ! »

    « Comment cela, disparu ?! »

    « Je suis allée la chercher pour que nous partions ensemble au collège, mais elle n’est plus là ! »

    « Mais peut-être est-elle déjà partie pour le collège, Maria. »

    « Ah oui, je n’y avais pas pensé ! »

    La fillette se hâta de prendre son petit-déjeuner, puis elle se mit en route pour le collège, et fut soulagée d’y retrouver son amie Judith, à laquelle elle s’adressa :

    « J’ai eu peur lorsque je ne t’ai pas vue ce matin, Judith ! Qu’est-ce qui t’a pris de partir aussi tôt de la maison ?! »

    « Eh bien, je… je ne voulais

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