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Les vraies vampires sont chanceuses
Les vraies vampires sont chanceuses
Les vraies vampires sont chanceuses
Livre électronique492 pages7 heures

Les vraies vampires sont chanceuses

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À propos de ce livre électronique

Au bout de 400 ans, on pourrait croire que je serais capable de reconnaître le danger à son
odeur…

Du sang d’humain, de groupe B, provenait de l’allée située derrière mon magasin. Une prêteuse sur gages nommée Lucky a été attaquée et laissée pour morte. Pour la sauver, moi, Glory Saint-Clair, j’ai accompli un acte auquel je n’avais jamais voulu recourir. J’ai transformé une humaine en vampire. Je ne peux pas dire que je le regrette. Je n’avais pas le choix. Je dirais pourtant que l’éternité aurait été plus sûre sans elle.

Les vampires préfèrent rester discrets. Pas Lucky. Qu’est-ce que ça peut faire que son ancien petit ami soit une séduisante vedette rock et qu’elle ait de très belles chaussures? Qui est mort et l’a transformée en reine des maudits? Non seulement son comportement fantasque attire tous les chasseurs de vampires des environs, mais en qui plus, il conduit son tueur potentiel à sortir de sa cachette, lui aussi.

La bonne nouvelle, c’est que le truand qui lui sert de père offre une grosse récompense à qui l’attrapera. La mauvaise, c’est que les mondes souterrains sont sur le point d’entrer en collision, et mes chances ne sont pas excellentes.
LangueFrançais
Date de sortie28 avr. 2017
ISBN9782897678258
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    Aperçu du livre

    Les vraies vampires sont chanceuses - Gerry Bartlett

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    Éloges pour

    Les vraies vampires voient large

    « C’est avec beaucoup de plaisir que l’on suit l’ancienne vampire Glory, qui survit dans un monde moderne tout en se démenant avec un amoureux, un autre qui aimerait l’être, des tueurs de vampires et les Vampires énergétiques. Tous en ont après elle pour des raisons différentes. Les amateurs de comédie paranormale débridée aimeront l’histoire amusante de Gerry Bartlett, mettant en scène une héroïne qui n’a jamais pardonné à Blade de l’avoir mordue au moment où elle était ballonnée. »

    Midwest Book Review

    « Extraordinaire… Plein d’humour et de piquant, le monde de Glory, avec son mystère et ses aventures, est un endroit que je suis impatiente de retrouver — et le plus tôt sera le mieux. »

    Fresh Fiction

    « Gerry Bartlett est l’auteure d’un livre hilarant dont je n’ai pas pu interrompre la lecture. Les vraies vampires vivent à fond est une réussite. »

    The Romance Reader Connection

    « Glory donne au pouvoir féminin une toute nouvelle signification, et notamment chez les morts-vivants. Quelle lecture amusante ! »

    All About Romance

    Copyright © 2008 Gerry Bartlett

    Titre original anglais : Real Vampires Get Lucky

    Copyright © 2017 Éditions AdA Inc. pour la traduction française

    Cette publication est publiée avec l’accord de Penguin Group Inc., New York, NY

    Tous droits réservés. Aucune partie de ce livre ne peut être reproduite sous quelque forme que ce soit sans la permission écrite de l’éditeur, sauf dans le cas d’une critique littéraire.

    Éditeur : François Doucet

    Traduction : Sophie Beaume (CPRL)

    Révision linguistique : Nicolas Whiting

    Correction d’épreuves : Nancy Coulombe, Féminin pluriel

    Conception de la couverture : Matthieu Fortin

    Photo de la couverture : © Thinkstock

    Mise en pages : Sébastien Michaud

    ISBN papier 978-2-89767-823-4

    ISBN PDF numérique 978-2-89767-824-1

    ISBN ePub 978-2-89767-825-8

    Première impression : 2017

    Dépôt légal : 2017

    Bibliothèque et Archives nationales du Québec

    Bibliothèque et Archives Canada

    Éditions AdA Inc.

    1385, boul. Lionel-Boulet

    Varennes (Québec) J3X 1P7, Canada

    Téléphone : 450 929-0296

    Télécopieur : 450 929-0220

    www.ada-inc.com

    info@ada-inc.com

    Diffusion

    Canada : Éditions AdA Inc.

    France : D.G. Diffusion

    Z.I. des Bogues

    31750 Escalquens — France

    Téléphone : 05.61.00.09.99

    Suisse : Transat — 23.42.77.40

    Belgique : D.G. Diffusion — 05.61.00.09.99

    Imprimé au Canada

    Participation de la SODEC.

    Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada (FLC) pour nos activités d’édition.

    Gouvernement du Québec — Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres — Gestion SODEC.

    Conversion au format ePub par:

    Lab Urbain

    www.laburbain.com

    Les vraies vampires ont des formes

    « Une lecture vive, impertinente, sexy… Dans cette nouvelle et formidable série, Gerry Bartlett met en scène une vampire irrésistible. »

    — Kimberly Raye, auteure à succès selon USA Today.

    « Drôle et sexy, Glory est une femme comme toutes les autres, mais avec des crocs. »

    — Nina Bangs, auteure à succès selon le New York Times

    « Glory, vampire enrobée, jaillit de la page dans cet épisode vivant, drôle et captivant de la mythologie vampire. »

    — Julie Kenner, auteure à succès selon USA Today.

    « Joyeusement délectable… Une vraie réussite. »

    Fresh Fiction

    « Les amateurs de littérature paranormale pour filles ne rateront pas ce récit amusant de Gerry Bartlett. Glory est fantastique. »

    The Best Reviews

    « Un roman paranormal moderne sexy, intelligent et vivant. L’intrigue est prenante, les personnages sont excitants (sans parler des épisodes de sexe), et l’écriture est ciselée. Glory Saint-Clair est une vampire pulpeuse et torride ! Elle est culottée, sexy et plus ou moins célibataire. Une bouffée d’air frais. »

    Romance Reader at Heart

    Ce livre est dédié à Donna Maloy, une grande écrivaine et une grande amie.

    1

    D u sang.

    L’odeur appétissante m’enivra comme une bouffée de Coco au comptoir des parfums.

    Tu rêves, Blondie. Arrête de penser avec tes crocs, et attrape ces sacs de décorations de Noël.

    Valdez fredonna Mon beau sapin en sautant de ma vieille Suburban.

    — Valdez, je ne plaisante pas. Du sang, dis-je en reniflant de nouveau l’air. Sens. Du B positif. En grande quantité.

    Valdez leva le nez en remuant la queue contre ma jambe.

    Tu as raison. Monte dans la voiture et enferme-toi. Je vais voir ce qu’il en est.

    Il devint tout à coup très sérieux, et son grondement me mit les nerfs à vif.

    Malgré ses airs de chien, Valdez était mon garde du corps, un métamorphe qui possédait un petit quelque chose que je n’avais jamais identifié. Croyez-moi, on se connaît depuis assez longtemps pour qu’il sache que je n’allais pas rester assise dans ma voiture à vérifier ma manucure. J’attrapai Valdez par le collier.

    — Attends une seconde, Terminator, lui dis-je. Tu as reçu une flèche dans la hanche par ici. Tu te rappelles ? Sois prudent.

    Il s’écarta brusquement de moi, me renversant presque du même coup. Quand il est en mode protecteur, Valdez est pratiquement impossible à arrêter.

    Plaie ouverte. Il n’en reste pas moins que c’est l’endroit idéal pour une embuscade.

    Il fit un signe de tête en direction des lumières de sécurité à l’arrière du bâtiment. Encore éteintes.

    La prochaine fois, gare-toi dans la rue.

    — Tais-toi, Valdez. Quelqu’un est en train de se vider de son sang.

    Je fis discrètement le tour de la voiture et me dirigeai vers la benne, à quelques mètres de là. Je connais l’odeur du sang ; celui-ci était frais et provenait d’une personne encore vivante, à proximité.

    Hé, les sales types ! On a appelé les flics. Si vous pensez pouvoir nous attaquer, vous vous fourrez le doigt dans l’œil ! cria Valdez.

    Il parle dans mon esprit, mais ceux qui se trouvent à sa portée peuvent aussi l’entendre.

    Ma patronne a un gros pistolet.

    Nous nous arrêtâmes, aux aguets. Pas de bruit de pas. C’était un bon signe, parce que je n’avais évidemment pas de gros pistolet. Je suis une vampire, pour tout dire. J’ai des capacités. C’est alors que j’entendis quelque chose. Un gargouillis. Quelqu’un qui rendait son dernier souffle. Je me précipitai de l’autre côté de la benne à ordures.

    Une femme était étendue sur le dos, la gorge ouverte.

    — C’est un vampire qui a fait ça.

    Tu en es certaine ? me demanda Valdez sans même lui jeter un coup d’œil.

    Il examinait les environs à la recherche de celui qui avait fait ça, au cas où il traînerait encore dans les parages.

    — Oui, certaine. J’ai vu ce type de blessures un nombre incalculable de fois.

    Et ça n’en était pas moins désagréable. Je récitai une brève prière pour le repos de son âme. Ça vous étonne qu’une vampire prie ? Vous vous en remettrez. Tous les vampires ne sont pas des démons venus des enfers. Mais celui qui avait fait ça avait une poêle à frire à son nom qui l’y attendait.

    — Vérifie son cou, Valdez.

    Je ne vérifie rien ; je suis en mode défense. Cet enfoiré pourrait revenir, tu sais.

    J’inspirai. Hormis l’odeur de sang précédemment mentionnée, il y avait à peine une trace de vampire dans l’air.

    — Peu importe son identité, celui qui a fait ça est parti depuis longtemps.

    Je secouai la tête. Quelle espèce de vampire incapable de se contrôler avait trouvé nécessaire de tuer de cette façon ? Avions-nous un nouveau dévoyé qui tuait les gens pour le plaisir, ici à Austin ? Son assaillant avait en tout cas une case en moins, pour laisser dégouliner du bon sang B positif partout sur le béton au lieu de la drainer jusqu’à la dernière goutte. Pourquoi ? J’y réfléchirais plus tard.

    Sauve-la, Blondie. Tu vois bien qu’elle respire encore, dit Valdez, qui s’était enfin concentré sur elle. Soigne-la comme tu l’as fait avec moi. Je vais fouiller les environs plus attentivement.

    Il avait raison. La femme n’était pas encore morte, mais elle l’était presque. Si seulement… La soigner. D’accord, je pouvais essayer. Je contournai une flaque de sang, enveloppai sa gorge de mes mains et « vis » la chair massacrée se reconstituer. Vous vous rappelez ce savoir-faire ? Les bords se ressoudèrent entre mes doigts jusqu’à ce que le sang ne coule plus de la blessure. Mais la guérison de cette femme allait nécessiter autre chose qu’un tour de main. Je respirai l’air frais de la nuit. Il y avait quelque chose de familier…

    Valdez revint en trottinant examiner la femme.

    Tu as raison, il n’y a plus personne. Celui qui a fait ça s’est fait la malle, dit-il en poussant les cheveux de la femme avec son museau. La gorge a l’air bien.

    — Elle a perdu trop de sang, Valdez. Appeler les secours ne ferait qu’amener la police à enquêter.

    La communauté paranormale d’Austin faisait profil bas. Les flics sont toujours le dernier recours. Je sortis quand même mon téléphone. C’était sa meilleure chance de survie.

    Attends. Cette scène est déjà suspecte, étant donné que la blessure est guérie et qu’il y a tout ce sang. Je pense que les secours ne pourront rien pour elle. Que vas-tu faire ? demanda-t-il avec un regard insistant.

    — Je suis désolée, mais on dirait que nous sommes arrivés trop tard.

    Je n’étais pas prête à admettre que j’avais déjà compris qu’il n’existait qu’une façon d’empêcher cette femme de mourir.

    Ne joue pas au plus fin avec moi. Tu sais ce que tu dois faire pour qu’elle ne soit pas définitivement morte. Transforme-la, Blondie. Fais d’elle une vampire.

    — Il n’en est pas question, dis-je en reculant, marchant presque sur le magnifique sac Hermès Birkin de la femme.

    Quelqu’un avait renversé son contenu et vidé un beau portefeuille Gucci avant de le jeter à quelques pas de là. Une décision stupide. À moins que cette femme ait transporté des sacs remplis de diamants ou d’argent liquide, le sac lui-même valait sans doute davantage que ce qu’il y avait dedans.

    Il en est totalement question. J’ai traîné suffisamment longtemps avec toi pour reconnaître que cette femme avait du goût et un intérêt pour le luxe. Comme ce sac à côté de tes pieds. Et tu vas la laisser mourir ?

    Je détournai le regard de la poitrine à peine en mouvement de la femme. C’était un sac incroyable, mais à côté de celui-ci se trouvait quelque chose d’encore plus intéressant.

    — Regarde ça, dis-je en ramassant un couteau couvert de sang.

    Je reniflai un coup et sus que cette femme s’était défendue. C’était incontestablement du sang de vampire sur la lame. Je regardai la femme avec un nouveau respect. En plus d’avoir bon goût, elle savait se servir d’une arme. Je n’avais vraiment pas envie qu’elle meure. J’attrapai un paquet de mouchoirs et m’essuyai les mains.

    Sérieusement, Glory. Tu vas faire quelque chose, ou tu as l’intention de rester là à la regarder rendre son dernier soupir ?

    Je ne transforme pas les mortels en vampires. Je ne l’ai jamais fait. J’avais passé quelques centaines d’années à regretter ma propre transformation, et je m’étais juré de ne jamais prendre cette décision pour qui que ce soit. Le simple fait d’y penser me donnait envie de partir en courant et d’oublier que j’avais vu…

    Je comprends. Transformer quelqu’un, ce n’est pas rien. Mais je te connais, Glory. Tu n’es pas assez froide pour t’en aller comme ça.

    Valdez fit le tour de la femme et renfila ses bottes en cuir marron Bottega Veneta par-dessus un jean moulant.

    Si tu ne peux pas le faire, appelle Flo. Elle le fera. Et bon sang, dépêche-toi.

    « Flo. Bonne idée », me dis-je.

    J’ouvris mon téléphone et appuyai sur la touche de composition rapide. Ma colocataire, Florence da Vinci, devait se trouver juste au-dessus, dans l’appartement que nous partagions. Elle pouvait descendre en vitesse, et… Je tombai sur sa boîte vocale.

    Essaie Blade.

    Jeremy Blade. Mon amant par intermittence, le beau gosse des Highlands qui m’avait transformée en vampire à l’époque fort lointaine où mon cerveau était embué par le désir. Il répondit après que j’eus appuyé sur la touche de composition rapide.

    — Jerry ! Oh, Seigneur, Jerry, j’ai besoin de ton aide.

    Je me sentais vraiment mal pour la femme. Elle n’était pas en mesure de gémir, mais j’entendais son cœur battre légèrement. Et le faible murmure de sa respiration était un râle mortel. Je lui tapotai l’épaule.

    — Tiens bon, chérie. Les secours arrivent.

    Je l’espérais, en tout cas.

    — Gloriana. Que se passe-t-il ? Es-tu blessée ?

    — Pas blessée ; en panique. Je viens de trouver une femme. Elle est en train de mourir, saignée par un vampire… Bref, peux-tu venir dans l’allée derrière mon magasin ? Et peux-tu arriver… il y a cinq minutes ?

    — Je suis en Louisiane, mon cœur. Je finalise la vente de mon casino, dit Jeremy en soupirant. Si tu veux la sauver, tu dois la transformer, Gloriana.

    — Tu sais bien que je ne…

    Je me crispai quand j’entendis la femme exhaler ce qui devait être son dernier souffle. Valdez se contenta de me regarder, semblant penser que je serais une sacrée mauviette si je ne m’en occupais pas. Et merde. Transformer quelqu’un en vampire… Comment me blâmer ? On parle d’un état permanent qui, vous pouvez me croire, entraîne tout un tas de complications. Je n’avais jamais voulu être responsable de tout ça pour quelqu’un d’autre. Et…

    — Gloriana, continue d’hésiter, et tu n’auras plus besoin de le faire.

    — D’accord, d’accord. Bon sang, Jerry, dis-moi ce que je dois faire.

    — Bonne fille. D’abord, draine-la entièrement. Aux limites de la mort.

    — Elle y est déjà.

    Je remontai ma jupe fourreau avant de marcher précautionneusement dans l’immense flaque de sang qui s’était formée sous le corps de la femme et de m’accroupir à ses côtés. Oui, oui, je sais. Mais c’était une jupe Chanel d’époque, et si vous avez déjà essayé d’enlever une tache de sang sur de la laine, vous voyez ce que je veux dire.

    — Assure-t’en, Glory. Peux-tu utiliser son cou ?

    — Je ne crois pas. Je l’ai guérie, mais c’est trop tôt pour que j’y touche. Tu devrais voir le couteau de fou à côté de son corps. Cette femme s’est certainement débattue.

    — Celui qui a fait ça peut revenir à tout moment. Oublie la femme. Fiche le camp de là.

    Bon, il y a une minute, j’aurais sauté sur une telle excuse, mais il y avait ce vieux ton suggérant que j’étais une femme sans défense dans la voix de Jerry… Et je ne suis pas sans défense.

    — Il n’y a personne. Valdez monte la garde. J’ai commencé, alors maintenant, je vais finir. Je vais essayer son poignet.

    Tenant toujours le téléphone dans une main, je m’épargnai la rengaine de Jerry sur mon manque de jugement. Je m’emparai du poignet de la femme. Il était froid, mou, sans vie. Peut-être était-il trop tard.

    Maintenant, je me sentais vraiment mal. Si Flo ou Jerry avaient trouvé le corps, cette femme serait déjà en haut, en route pour son initiation vampirique. Je fis courir ma langue sur mes crocs. Ils étaient prêts à l’action depuis le premier effluve de sang frais. Je mordis sa chair, à la recherche d’une veine. Elle eut à peine un soubresaut, puis elle redevint immobile. Sa peau était froide, et je m’écartai.

    — Elle est totalement vidée, Jerry. Et maintenant ?

    — Oblige-la à boire ton sang. Coupe-toi le poignet, et porte-le à ses lèvres. Tu aurais dû apprendre ça depuis longtemps, Gloriana.

    — Je ne crois pas. J’aimerais ne pas être en train de l’apprendre.

    Je ramassai le couteau et m’entaillai le poignet sans même grimacer, merci beaucoup. J’approchai la coupure des lèvres bleues de la femme — bleues sous le rouge à lèvres Lady Danger de chez MAC. Elle avait vraiment bon goût. Je pris une seconde pour pleurer son manteau en daim au col de lynx couvert de sang. Ce manteau m’aurait rapporté gros dans mon commerce, Le Grand Magasin Vamp Rétro, qui n’était qu’à quelques pas, au rez-de-chaussée de l’immeuble abritant mon appartement.

    Vous vous demandez peut-être comment je peux être aussi… détachée, à quatre pattes dans une mare de sang avec une femme mourante accrochée à mon poignet. Hé, je suis sur cette planète depuis plus de 400 ans. Je pourrais vous en raconter, des histoires… Bref. Au moins, je faisais mon possible pour la sauver. Et si elle ne survivait pas ? Alors je n’aurais pas mis au monde un nouveau vampire, ce qui n’était pas une mauvaise chose en réalité.

    — Jerry, elle ne boit pas.

    Elle ne respirait pas non plus. Détachée ? À qui voulais-je faire croire ça ? Je ne pouvais tout simplement pas laisser un autre humain mourir. Oui, un autre humain. J’ai beau être une immortelle qui se nourrit de liquide, je n’accepterai jamais le fait que je ne suis pas humaine, bon sang.

    Malheureusement, j’avais tenu à ne jamais transformer qui que ce soit. Du coup, je n’y connaissais rien. Seigneur, ce que je peux être nulle, parfois ! J’aurais au moins dû apprendre les bases. En cas d’urgence. Comme celle qui se produisait à ce moment-là.

    — Que puis-je faire d’autre ?

    Je refoulai mes larmes et me dis que je craquerais plus tard. Le cou de la femme semblait bien. Mais vu tout le sang perdu, elle frappait à la porte du paradis, et le Tout-Puissant était sur le point de l’accueillir à bras ouverts. Bon sang, je devais la sauver.

    — Force-la, Glory. Ouvre ses lèvres, et fais couler ton sang dans sa gorge. Une fois qu’elle en aura avalé ne serait-ce qu’un petit peu, elle commencera à revivre.

    La voix apaisante de Jerry me calma un peu. Ah, évidemment qu’il était paisible. Il n’était pas ici, dans le sang jusqu’aux hanches, avec la sinistre faucheuse qui regardait par-dessus son épaule.

    Mais je savais, d’expérience, que le sang de vampire est puissant. Je posai le téléphone au sec sur le béton, et je me mis au travail.

    — Vas-y, ma chérie. C’est du délicieux sang de vampire à haut indice d’octane. Bois une gorgée, et tu entendras ton moteur ronronner.

    Je jetai un coup d’œil à Valdez. Il avait fouillé dans le contenu du sac et avait le regard fixé sur un permis de conduire de New York.

    — Quel est son nom, Valdez ? Elle répondra peut-être si j’utilise son nom.

    Il renâcla et me regarda, ses yeux noirs brillants dans sa fourrure.

    Tu ne vas pas le croire, Glory. Elle s’appelle Lucky¹.


    1. N.d.T.: « Chanceuse », en anglais.

    2

    A rrête tes bêtises, dis-je à Valdez. Je suis sérieuse.

    Avait-elle déjà avalé ? Je caressai sa gorge, anxieuse de sentir descendre une goutte.

    Moi aussi. Vois par toi-même.

    Il poussa le permis du museau vers moi, et j’y jetai un œil.

    « Lucky Carver. Hmm. » Je lui donnais 35 ans au maximum, mais son permis indiquait qu’elle n’était pas loin de la cinquantaine.

    — Vas-y, Lucky. Fais honneur à ton prénom. Bois, et tu seras comme neuve. Non, mieux.

    Hé, c’était vrai. Enfin, de bien des façons. J’ouvris son manteau. Un pull rouge en cachemire de haute qualité. Sa tenue complète valait davantage que toute une année de Crocbon, mon substitut au sang de choix, ces derniers temps. La femme avait visiblement un sens particulier des priorités.

    Je crois qu’elle ne va pas s’en sortir, dit Valdez en poussant un tube de mascara sur le béton.

    — J’ai commencé, alors je dois finir.

    Je jetai un coup d’œil à mon téléphone, certaine que Jerry pouvait m’entendre. Il s’attendait sans doute à ce que je me dégonfle. Il savait à quel point j’étais contre tout ce processus de transformation depuis les derniers… oh, depuis quatre siècles. Enfin, je l’avais bluffé récemment en développant quelques-uns de mes pouvoirs de vampire. Si je parvenais à aller au bout de ceci, il serait au septième ciel. Et emmener Jerry au septième ciel (hé, vous savez ce que je veux dire) est l’une des choses qui me motivent dans la vie…

    — Lucky, si tu ne bois pas, tu vas rater les soldes chez Nordstrom. Des bottes à moitié prix.

    Ha, ha ! Je sentis sa gorge bouger sous mes doigts. J’avais visiblement trouvé le moyen de lui donner le goût de vivre. Elle poussa un soupir, puis elle prit une autre gorgée avant de s’agripper tout à coup des deux mains à mon poignet, suçant mon sang comme s’il s’agissait de chocolat Godiva liquide.

    — Ouah, laisse-moi assez de sang pour que je puisse monter chez moi, d’accord ?

    Je dégageai mon poignet de sa prise et vis que ses joues étaient roses. Ses battements cardiaques avaient repris, tout comme sa respiration. Elle battit des paupières, et je plongeai dans ses yeux noisette pailletés d’or aux longs cils rehaussés d’un trait noir permanent.

    Je vis le moment où la femme prit conscience du fait qu’elle était étendue sur du béton froid, dans une mare de son propre sang, avec un chien et une jolie blonde aux yeux bleus d’une vingtaine d’années (moi, bien sûr) qui la dévisageaient tous les deux. Je lui adressai un grand sourire, plutôt excitée de l’avoir ramenée à la vie. L’instant suivant, Lucky menaçait ma gorge d’un couteau.

    — Hé, je viens de te sauver les fesses, dis-je en me servant de ma rapidité de vampire pour me mettre hors de sa portée. Que dirais-tu d’un peu de reconnaissance, Lucky ?

    — J’ai vu tes crocs. Écoute, espèce de sale suceuse de sang, tu devrais finir ce que tu as commencé, parce que tu vas finir empalée en plein soleil pour ça.

    Elle essaya de s’asseoir puis retomba en arrière.

    — Ce n’est pas moi qui t’ai ouvert la gorge. Tu m’as entendue ? Je t’ai sauvée.

    Lucky ferma les yeux et agrippa son couteau. Je vis pratiquement tourner les rouages dans son esprit avant qu’elle ouvre soudainement les yeux.

    — Comment connais-tu mon prénom ?

    Je poussai son permis de conduire du pied.

    — Je sais lire. Tu sais, tu es vraiment pas mal, pour une femme de ton âge.

    Lucky hoqueta, et des larmes lui vinrent aux yeux.

    — Tu as vu mon âge ? dit-elle en récupérant son permis, qu’elle enfouit dans son soutien-gorge. Dis-le à qui que ce soit — n’importe qui —, et tu te retrouves à midi dans une fourmilière avec un masque au miel, vampire.

    Laisse-la ici, Glory. Laisse-la découvrir ce qui arrivera quand le soleil va se lever, gronda Valdez, pressé contre ma jambe. Tu devrais baiser les pieds de Glory. Quand on t’a trouvée, tu étais en route pour l’au-delà.

    La bouche de Lucky s’ouvrit toute grande.

    — Qu’est-ce que c’est que ce cirque paranormal ? Une vampire avec un chien qui parle pour acolyte ?

    Elle parvint enfin à s’asseoir.

    — Qui a fait ça ? demanda-t-elle, son regard se promenant sur la mare de sang, puis sur son manteau fichu. Tu as dit que tu n’avais pas…

    — Non, je ne l’ai pas fait. Mais c’est bien l’œuvre d’un vampire.

    Mon poignet étant déjà en train de guérir, j’attrapai son sac et en caressai le cuir fauve souple.

    — Je dirais que c’était un type qui n’y connaît rien. Aucune femme vampire digne de ce nom ne laisserait ce trésor à la merci d’éclaboussures de sang.

    — Tu as raison à ce sujet, dit Lucky en jetant un coup d’œil alentour. Où est Brittany ?

    — Qui ?

    Je regardai la femme glisser le couteau dans sa botte.

    Oui, elle avait vraiment un couteau dans sa botte. Et l’autre couteau se trouvait toujours sur le béton à côté d’elle.

    Je le touchai du pied.

    — Celui-ci aussi est à toi ?

    — Oui. Mais on ne peut pas dire qu’il m’ait été bien utile, dit-elle en l’attrapant avec une grimace avant de l’essuyer sur son manteau. J’aimerais savoir où peut bien se trouver Brittany.

    « Brittany. D’accoooord. » Le prénom évoquait l’image d’une vedette pop avec des bras comme des brindilles et des lèvres absorbant quatre litres de rouge à lèvres par semaine.

    — Nous t’avons trouvée seule, en train de te vider de ton sang. Peut-être que ta copine Brittany est allée quelque part pour vérifier son… rouge à lèvres. À moins qu’elle soit une vampire et qu’elle ait décidé de se faire sa meilleure amie.

    — Ce n’est pas mon amie, mais ma garde du corps. Et elle n’est pas une vampire ; c’est une métamorphe, dit Lucky en se mordant la lèvre. J’avais confiance en elle. Je ne pensais pas… Oh, zut.

    Elle se frotta le front, et une larme coula le long de sa joue.

    Je vais encore jeter un œil dans les parages. Au cas où…

    Valdez descendit l’allée.

    — Tu dis qu’un vampire a essayé de me liquider ? Je suppose que j’aurais dû mettre un pieu dans mon autre botte.

    Je frissonnai et posai une main sur mon cœur. Tel était l’effet du mot « pieu » sur moi.

    — Tu ne sembles pas surprise par l’existence de vampires et de chiens avec des dons spéciaux, dis-je en regardant Valdez, en train de faire le tour d’une voiture garée. Et tu as une métamorphe comme garde du corps. Qui es-tu ?

    Je reniflai, mais je ne sentis rien d’autre que ce délicieux sang en train de geler sur le béton.

    — Je suis humaine, souviens-t’en, dit-elle en sortant de nouveau son couteau. Ma famille fait des affaires avec les vampires, les métamorphes et les autres paranormaux depuis des années.

    Elle plissa les yeux.

    — Donne-moi mon sac.

    — Ça te tuerait de dire « s’il te plaît » ? dis-je en suspendant le sac au-dessus de la flaque de sang.

    Jamais je n’aurais osé profaner une telle œuvre d’art, mais la menace fonctionna plutôt bien.

    — Je suis… désolée, dit-elle en jetant un coup d’œil à son manteau fichu tout en faisant courir sa main le long de sa gorge, visiblement surprise de ne pas la retirer pleine de sang. Je crois que je suis toujours à côté de mes pompes. Je n’ai aucun souvenir de l’attaque. Un instant, Brit et moi parlions d’un appel que je venais de recevoir. Et puis…

    Elle soupira et sortit un paquet de mouchoirs du gâchis. Elle se mit à essuyer ses mains tachées de sang.

    — Tu m’as soignée ? dit-elle en me regardant comme si j’en étais totalement incapable. Ou on t’a aidée ?

    Elle observait désormais Valdez, qui était revenu en trottinant se poster à côté de nous.

    — C’est moi qui l’ai fait. Ce n’est que l’un de mes nombreux talents.

    Il était hors de question que je donne quelque crédit que ce soit à Superman. Même s’il m’avait sauvé la vie plus d’une fois. Il jouait le garde du corps à mes côtés en remboursement d’une dette quelconque qu’il avait à l’égard de Jerry et dont ni l’un ni l’autre ne voulaient parler.

    Ma transformation avait eu lieu trop longtemps aupa­ravant pour que je me rappelle ce que ressent un tout nouveau vampire, et la femme avait eu un sacré choc avec sa gorge ouverte et tout le reste. C’est donc avec des mains tremblantes qu’elle jeta les mouchoirs sales.

    — Mon manteau est fichu. J’ai été attaquée par un vampire, et tu connais mon âge, soupira-t-elle en se massant le front. Je me sens plutôt mal, et j’ai probablement une sale tête.

    Je la pris en pitié et lançai son sac sur ses genoux.

    — Hé, tu es en vie.

    « En quelque sorte. »

    Euh, Glory ? Blade est toujours au téléphone.

    Valdez ne quitta pas Lucky des yeux lorsqu’elle reprit son couteau, qu’elle essuya soigneusement avant de le refermer d’un coup sec.

    — Jerry ! dis-je en attrapant le téléphone. Tu as entendu ? J’ai réussi ! Je lui ai sauvé la vie.

    — Bon sang, Glory. Pourquoi t’a-t-il fallu autant de temps ?

    — Eh bien, excuse-moi, mais j’étais occupée — avec le sang et les explications.

    Je regardai Lucky fourrager dans son sac. Était-elle à la recherche d’une nouvelle arme ? Valdez grogna un avertissement et montra les dents. Je lui caressai l’oreille.

    — Est-elle réveillée ? Comment va-t-elle ? demanda Blade.

    — Plutôt pas mal, tout bien considéré. Valdez et moi avons fini. Nous étions sur le point de laisser mademoiselle Gratitude ici et de monter.

    — Tu as fini ? ricana Jerry. Mais, mon cœur, vous avez à peine commencé. Emmène ta nouvelle vampire avec toi là-haut. Tu sais comment ça fonctionne.

    — En fait, étant donné qu’il s’agit d’un nouveau rôle pour moi, je ne sais pas.

    J’eus le désagréable sentiment de ne pas avoir envie d’entendre ce qui allait suivre.

    — C’est toi qui l’as transformée en vampire ; à toi de lui montrer les ficelles.

    Lucky tendit la main vers son portefeuille et en sortit ses cartes de crédit. Lorsqu’elles furent toutes alignées, elle marmonna au sujet d’une carte Gold qui avait disparu avant de me regarder comme si je l’avais dérobée.

    — Les ficelles ? dis-je, énervée. La seule ficelle que j’ai envie de montrer à cette garce ingrate, c’est un nœud coulant pour son cou rachitique.

    Je ramassai un tube de Russian Red de chez Mac et le fourrai dans la poche de mon manteau.

    — Elle est sous ta responsabilité, ma chérie. Désolée, mais il t’incombe de t’occuper d’elle.

    — Voilà pourquoi je n’ai jamais transformé quelqu’un jusqu’ici.

    Jerry l’avait fait pour moi. Mais nous étions des amants hors pair en ce temps-là. Il nous fallait rester ensemble, ne serait-ce que pour le sexe.

    — Ce ne sera pas pour toujours, Gloriana ; simplement jusqu’à ce qu’elle soit capable de faire face à sa nouvelle situation.

    Hmm. Dans ce cas, pourquoi Jerry continuait-il à me surveiller, à me protéger ? Était-ce de l’amour ? C’est ce qu’il disait, mais l’éternité se profilait. Et rester liée au même homme depuis le XVIe siècle…

    — Glory, tu ne vas quand même pas la laisser là, n’est-ce pas ?

    — D’accord, d’accord. Je sais ce que j’ai à faire.

    « Plus ou moins. »

    — Appelle-moi quand tu seras en ville, Jerry.

    Je raccrochai et mis ma main sur le collier de Valdez lorsqu’il grogna une nouvelle fois. Lucky se mit péniblement debout et se maudit lorsqu’elle glissa sur son propre sang et tacha ses bottes. Je réprimai l’envie de lui tendre la main, certaine qu’elle allait la repousser.

    Elle se mit à ramasser ses trésors éparpillés. Un ancien miroir de poche s’en était sorti sans dommage. Un BlackBerry et suffisamment de produits cosmétiques pour ouvrir un marché aux puces furent lancés dans son sac. Elle fixa son téléphone cellulaire un instant, visiblement toujours secouée malgré son air fanfaron.

    — Y a-t-il quelqu’un que tu souhaiterais appeler ? lui demandai-je. Comme un mari ? De la famille ? La police ?

    Étant donné que j’allais visiblement être coincée avec cette femme, il valait mieux que je me montre sympa. Ses doigts étaient nus, mais le vampire qui lui avait ouvert la gorge pouvait fort bien l’avoir soulagée de quelques babioles en souvenir, comme une alliance.

    — Manque-t-il autre chose que ta carte de crédit ?

    Elle porta la main à ses lobes d’oreilles.

    — Bon sang, c’étaient mes diamants deux carats préférés.

    Elle jeta un coup d’œil à mes faux David Yurman et renifla avant d’ajouter :

    — Pas de mari ces 10 dernières années. Je ne vais certainement pas appeler ma famille. Ni la police. Je récupérerai mes affaires à ma façon.

    Elle chancela sur ses bottes à talons hauts.

    — Je me sens… bizarre. Que m’as-tu fait, exactement ?

    Ses yeux roulèrent dans ses orbites, et je l’attrapai avant qu’elle heurte le sol. Elle s’était évanouie.

    Je lui retirai son manteau et le lançai à côté de la porte pour le récupérer plus tard. Je la jetai alors sur mon épaule et passai son sac sur mon autre épaule, suivi du mien, qui avait l’air minable. Je composai le code de sécurité sur le pavé à côté de la porte arrière de mon immeuble.

    — Valdez ? Pousse le manteau à l’intérieur et prends les sacs avec les décorations de Noël entre tes dents, puis montons. Cette femme est petite, mais son sac pèse une tonne.

    Petite. Taille 36 par rapport à ma taille 40. D’accord, 42. Je sentais ses jambes musclées en la portant. Elle était en forme. Ce devait être sympa de rester bloquée avec une telle silhouette. Pas comme celle que j’avais le jour J, avec mon faible pour le rôti de bœuf et la tarte au citron.

    Valdez tira le manteau de l’autre côté de la porte puis attrapa les sacs en plastique et trottina à l’intérieur pendant que je lui tenais la porte ouverte. Il se dirigea vers l’escalier, comme il le faisait toujours, pour s’assurer qu’il n’y avait aucun danger. J’ai quelques ennemis, et il semble que la liste s’allonge de jour en jour, même si je suis quelqu’un de vraiment sympa. J’ai également beaucoup d’amis. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles j’ai décidé de rester à Austin et de faire un succès de mon magasin de vêtements rétro. La communauté paranormale est fantastique, dans sa grande majorité.

    Je jetai un coup d’œil au visage pâle de Lucky par-dessus mon épaule. Peut-être quelqu’un qui lui en voulait l’avait suivie depuis New York. Que faisait-elle au Texas, de toute façon — et dans l’allée derrière mon magasin, qui ne figurait pas vraiment sur la liste des circuits touristiques ?

    J’entendis un aboiement de Valdez, et je montai. J’avais beaucoup de questions, et jusqu’à ce que Lucky se réveille et change de comportement, je n’obtiendrais aucune réponse. Dotée d’une force de vampire, j’aurais pu parcourir des kilomètres tout en portant Lucky sans peine. Mais, bon sang, sa botte pleine de sang cognait contre mon manteau trapèze en laine à motif pied-de-poule jaune et blanc. J’espérais qu’un nettoyage à sec puisse éliminer le sang. J’avais été stupide. J’aurais dû me débarrasser du manteau, le laisser dans la voiture et la prendre.

    Maudissant mon manque d’anticipation, je jonglai avec mon chargement pour déverrouiller la serrure. J’ouvris la porte de l’appartement d’un coup sec et jetai Lucky — oui, avec douceur — sur le canapé pendant que Valdez traînait à l’intérieur les sacs de lumières de Noël. On allait oublier les chants de Noël pour ce soir. Je me dirigeai vers la cuisine et pris une bouteille de Crocbon A positif. L’odeur du sang de Lucky et ma petite gorgée m’avaient donné une soif terrible. Debout au-dessus d’elle, je vidai la bouteille d’un trait. « Ouah. » Je me penchai et reniflai. « Oh, Seigneur. » Lucky avait une odeur très proche de la mienne. Vraiment étrange. J’enlevai mon manteau en gémissant à la vue d’une tache qui s’étalait sur la manche et regardai l’horloge.

    Il ne restait que quelques minutes avant l’aube. Il n’était pas étonnant que mes pensées se dispersent et que je sois à peine capable de garder les yeux ouverts. Je retirai les bottes de Lucky, dont je vérifiai la pointure (elles étaient trop petites pour moi, mais parfaites pour ma colocataire), puis me précipitai en bas pour récupérer son manteau. Je le fourrai dans un sac à ordures que je posai à côté de la porte. Je connaissais une bonne adresse de nettoyage à sec. Il était hors de question que je ne tente pas quelque chose pour une marque de créateur.

    Lucky allait, quoi qu’il arrive, dormir comme un sonneur jusqu’au coucher du soleil, mais j’essayai quand même de l’installer confortablement et lui lançai même une couverture dessus. Puis je me dirigeai vers mon propre lit. Valdez attendit de l’autre côté de ma porte fermée pendant que je me déshabillais et enfilais une chemise de nuit. Quand je le laissai entrer, il s’installa au pied de mon lit pour veiller sur moi durant les heures vulnérables de lumière du jour.

    Je fermai les yeux en pensant à Lucky. Elle allait avoir une sacrée surprise à son réveil. Et j’allais devoir lui donner les détails sanglants de sa nouvelle vie… ou mort, ou ce qu’on veut. Puis je bondis, me rendis à ses côtés, fouillai son sac jusqu’à ce que je trouve son couteau et sortis l’autre d’un ingénieux fourreau cousu sur le côté de sa botte droite. Je cachai les deux couteaux sur une étagère, derrière un livre intitulé Comment s’habiller pour sembler peser cinq kilos de moins, puis retournai au lit.

    Lucky s’était incontestablement montrée à la hauteur de son nom, ce soir. Si je n’étais pas passée par là… Mais allait-elle se montrer reconnaissante, maintenant qu’elle faisait partie des morts-vivants ?

    Moi, je ne me sentais pas si chanceuse. Ma colocataire n’était pas rentrée avant l’aube. Ce n’était pas inhabituel, mais elle ne m’avait pas laissé de message sur le répondeur. Nous avions convenu de nous tenir au courant, après que chacune d’entre nous eut vécu quelques mésaventures. Croyez-le ou non, il existe des gens qui n’apprécient pas notre sens de la mode et nos personnalités pétillantes. Alors, nous veillons l’une sur l’autre.

    J’espérais que Florence allait bien. J’espérais que j’allais bien. J’étais maintenant responsable d’une nouvelle vampire. Zut.

    3

    D es cris — non, des hurlements — me réveillèrent alors que j’étais en plein sommeil. Je poussai Valdez du pied.

    — On dirait que notre invitée vient de se réveiller.

    Et qu’elle flippe, ajouta Valdez, qui bâilla et bondit du lit. Tu veux que j’aille m’en occuper ?

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