Les caprices de la destinée

Capucine déambulait sur la place du village où de nombreux étals étaient installés. Des troubadours tentaient de gagner quelques piécettes en donnant une démonstration de leurs talents. Un montreur d’ours forçait le pauvre animal à exécuter des cabrioles sous les rires des enfants. Capucine avait pitié de la bête qui obéissait, le regard triste. Elle espérait qu’un jour il briserait ses chaînes et fuirait vers une vie meilleure. Ce pitoyable spectacle ne l’attirait guère, elle se détourna et se concentra sur ses futures victimes. Tandis que les gens observaient la scène, elle profitait de leur inattention pour dérober leurs bourses.

C’était une fille flamboyante. Sa tignasse d’un noir de jais encadrait un joli visage éclairé par des yeux pers. Avec son allure dépenaillée, échevelée, sa beauté passait inaperçue. Tout comme ses boucles constamment emmêlées cachaient une chevelure magnifique. Dans l’existence qu’elle menait, elle avait rapidement compris que le charme était un handicap et pouvait lui amener bien des ennuis. Aussi ne faisait-elle aucun effort pour soigner son apparence face aux loups qui traînaient dans les rues à la recherche de proies faciles.

Elle était là, scrutant les badauds, afin de dénicher une cible qui lui permettrait de s’offrir un bon repas, ce qu’elle n’avait pas goûté depuis trop longtemps.

Ce n’était pas l’existence qu’elle avait rêvée, mais c’était la seule qu’elle connaissait. Orpheline très jeune, elle avait grandi dans la rue, comme une mauvaise herbe, et avait appris très tôt à éviter les bagarres entre miséreux. Elle s’était déniché un coin isolé, loin des hordes dangereuses qui cherchaient querelle, dans le seul but d’instaurer leur suprématie sur les sans-abri afin que ces derniers travaillent pour eux.

Ceux qui tombaient entre leurs griffes étaient contraints de leur céder le peu qu’ils gagnaient en mendiant. Les jolies filles étaient forcées à vendre leur corps, même très jeunes. Capucine avait réussi à se protéger de ces rapaces depuis qu’elle s’était enfuie de l’orphelinat, une véritable prison où elle