Les caprices de la destinée

L’attente était insupportable. Avec une certaine perversité, l’homme semblait trouver plaisir à les voir terrifiées. Enfin, d’un geste méprisant, il désigna quelques malheureuses que ses hommes emmenèrent sans ménagement.

Et lorsqu’ils furent partis, celles qui restaient dans le cabanon respirèrent enfin, comme si elles avaient retenu leur souffle durant l’inspection.

Rosalie et Capucine reprirent leur place sur leur paillasse et s’allongèrent à nouveau.

– Que vont-ils faire à ces femmes ? questionna Capucine – Je n’en sais rien. Pour l’instant, je me concentre sur une seule question : que va-t-il advenir de nous ? C’est la seule chose qui m’importe. Et je ne veux pas me soucier du sort des autres.

Capucine ne fit aucun commentaire. Elle était dans le même état d’esprit que son amie. L’avenir lui semblait terriblement sombre, sans éclaircie à l’horizon.

Leur première nuit dans ce nouveau pays se déroula finalement sans accroc. On leur avait porté de quoi se restaurer et à boire. Les filles n’avaient pu tirer un seul mot des servantes. Obéissaient-elles à des consignes ou étaient-elles terrifiées au point de ne pas parler aux détenues ?

Reposée, Capucine avait repris quelque force et son moral s’en ressentait. Elle retrouvait un peu de sa combativité, même si l’angoisse du futur demeurait. Rosalie aussi semblait dans de meilleures dispositions que la veille. Elle s’était réveillée avec la certitude qu’elle ne laisserait pas l’adversité dicter son destin. Elle ne voulait pas ressembler aux autres femmes qui subissaient, gisant sur leur paillasse, déjà brisées par la traversée et vaincues à l’avance par la fatalité.

Si le repos avait donné aux jeunes filles cet élan matinal, la possibilité de se laver de la crasse du voyage acheva d’embellir leur humeur.

– J’ai l’impression de revivre, s’exclama Rosalie.

Elle se tourna vers Capucine, remarqua ses cheveux plus hirsutes que d’habitude.

– C’est pas possible