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La prophétie des nains
La prophétie des nains
La prophétie des nains
Livre électronique217 pages2 heures

La prophétie des nains

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À propos de ce livre électronique

Le village ardennais était paisible et loin de tout, jusqu’à ce qu’une inconnue soit retrouvée noyée dans la fontaine. Une mort mystérieuse qui sera la première d’une série d’autres toutes aussi étranges. L’affaire va mettre à l’épreuve l’inspecteur Joris, en proie au doute, et la juge Werner, fraîchement débarquée dans la région. Au cœur de l’histoire, une auberge où tout est suspect, même la ribambelle de nains de jardin qui la décore. S’amuseraient-ils à obscurcir l’enquête ?
Une auberge ardennaise où tout est suspect...


À PROPOS DE L'AUTEURE


Line Alexandre a déjà publié dans la collection Plumes du Coq Jeanne derrière la porte et L’Enclos des fusillés, un premier polar liégeois où l’on rencontrait l’inspecteur Joris et la juge Werner. 
LangueFrançais
ÉditeurWeyrich
Date de sortie30 sept. 2022
ISBN9782874897405
La prophétie des nains

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    Aperçu du livre

    La prophétie des nains - Line Alexandre

    La_prophétie_des_nains_cov_1600.jpg

    Descriptif

    La collection de romans policiers Noir Corbeau bénéficie du regard averti de François Périlleux, Commissaire Divisionnaire (e. r.), ancien chef de la Crime à la Police Judiciaire Fédérale de  Liège.

    Chapitre 1

    Assise sur la margelle d’un bac de la fontaine, elle entend l’eau ruisseler derrière elle à gros bouillons, les pluies ont été rudes et les sources sont gonflées. De l’autre côté de la rue se dresse la masse de schiste sombre, presque hostile, du café du village aux fenêtres trop rares, aucune de son côté, il lui tourne le dos, il l’exclut, il la boude, il lui dit qu’elle n’est pas d’ici. L’air du soir la fait frissonner, elle remonte le col de son anorak, elle songe à se lever puis se ravise, elle ne partira pas. Elle serre son téléphone. Il lui faut une réponse à son message. Sinon…

    Une ombre arrive à sa rencontre.

    — On ne devait pas se voir ici. Jamais !

    — C’est pourtant le bon endroit, répond-elle.

    — Non, non, tu m’avais promis. Va-t’en, on parlera plus tard.

    — On a trop parlé, il faut agir maintenant, mon bel amour.

    — Tais-toi.

    — Mais tu es mon bel amour.

    La main de l’ombre la gifle. Elle titube, elle se dresse.

    — Tu vas me le payer. Je vais tout lui dire.

    L’autre lui saute dessus. Elle bascule en arrière, sa tête heurte le bord de pierre, tout devient flou, elle a le temps de sentir une main qui lui saisit la nuque, la retourne et la plonge dans l’eau, la main est ferme, déterminée, elle ne sait à quoi s’agripper, griffe les parois, elle ouvre la bouche pour prendre l’air, l’eau le remplace, ses poumons explosent en une douleur hurlante mais les bulles sont silencieuses.

    Chapitre 2

    Il faudrait surveiller de plus près l’état du gruyère. Les trous s’élargissent. Et si les trous s’élargissent trop, ils se rejoindront et il ne restera bientôt plus que l’idée de gruyère. Est-ce que le gruyère a des trous ? se demande-t-elle, ou plutôt l’emmenthal ? Qu’importe, la pensée du fromage met Julia en appétit.

    Comté fruité, note-t-elle sur son carnet pour s’en nourrir déjà par cœur. Demain, elle en fera acheter. Il est essentiel de continuer à avoir des projets !

    À la page « Consignes pour la journée », elle relit celle de l’heure présente :

    « 19 h Cadenasser la barrière d’entrée. »

    Elle sort sous un crachin peu sympathique, le ciel vomit encore et toujours sa gueule de bois, on n’y voit déjà plus et l’automne s’annonce à peine.

    Mais avant de s’enfermer pour la nuit, elle a envie d’aller écouter chanter la fontaine qui déverse à travers son tube de cuivre les eaux de la source et les crache dans un bac de pierre bleue format cercueil. Oui, songe Julia, on pourrait s’y allonger et dormir. Et ce bac se déverse dans celui du dessous et ainsi de suite, une cascade de quatre bacs. Jusqu’au dernier qui se vide dans la rigole. Le flux disparaît dans une bouche d’égout quand un fermier ne vient pas prélever l’eau pour en remplir un conteneur destiné à abreuver ses bêtes ou arroser ses terres. Mais l’attention de Julia est attirée par le dernier bac qui bouillonne et déborde. Il lui semble que la pluie n’a pas été si terrible aujourd’hui, mais elle n’en est pas certaine. Peut-être que quelque chose en bouche l’orifice ? Elle s’approche de la masse sombre dont une moitié est plongée dans l’eau. C’est le corps d’une femme dont la tête scrute le fond de l’eau noire tandis que les jambes pendent au-dehors. Elle est immobile. Julia ne veut pas que cette femme soit morte, elle la touche, elle tente de la réveiller, elle la secoue un peu et la masse bascule, s’effondre à ses pieds. Julia ne crie pas, l’angoisse la fige, une angoisse qui vient autant de sa terreur devant le cadavre que de la certitude qu’elle ne reconnaîtra pas ce visage. Et que le fait qu’elle ne le reconnaisse pas ne signifie nullement qu’elle ne l’a jamais connu. Il peut se nicher dans n’importe quel trou du gruyère ou venir d’ailleurs.

    Un homme passe, ralentit. Elle montre le corps inerte : « Allez chercher de l’aide, s’il vous plaît. » Elle ne sait plus que faire, quelqu’un doit s’en charger. L’homme rebrousse chemin et se met à courir. Julia pense qu’il a compris. Puis elle s’avise d’une autre urgence, noter l’événement à la date du jour. À la maigre lueur du réverbère, elle écrit dans son carnet :

    « Découverte du corps d’une jeune femme morte près de la fontaine. Inconnue ? »

    Désormais, ce moment a bien existé.

    Elle s’assied à côté de la femme dans l’herbe humide, n’osant ni la déplacer ni l’abandonner pour se mettre au sec. Elle frissonne. Elle se dit qu’elle la veille comme une mère. Non, ce n’est pas sa fille, mais il faut vérifier. Cette pensée la pousse de nouveau vers son carnet qui s’inaugure par la lettre A, comme Anna. Voilà, c’est le prénom de sa fille. Et une petite photo d’identité collée à côté du prénom la rassure immédiatement.

    Elle entend une sirène, ou elle l’imagine. En fermant les yeux, elle sent des lumières bleues les lui brûler de l’intérieur, des gyrophares. Elle lève le bras pour se protéger, vaguement coupable et menacée, parce qu’il va falloir répondre à des questions et qu’elle sait si peu de choses qu’on la prendra pour une menteuse.

    Chapitre 3

    Évariste peut rester des heures sous la douche, figé sous le jet brûlant, les yeux clos. À penser. Au passé, au présent, au futur. Là, il se voit arriver au restaurant, il portera sa veste sombre, son nouveau Levi’s, une chemise blanche. Pas de cravate. Sa tenue l’attend, préparée sur la chaise à côté.

    Il arrivera avant Cécile, il s’assiéra à la table qu’elle a réservée.

    Il se savonne à renforts généreux de mousse.

    Elle poussera la porte, elle sera élégante comme toujours. Il aime la façon dont elle tire ses cheveux en une épaisse tresse. Elle est jolie, intelligente, indépendante, elle a le sens de l’humour, d’humeur égale, enthousiaste, dynamique. Vraiment, elle est parfaite et cela l’agace, rien à lui reprocher.

    Il n’est pas certain d’être amoureux d’elle mais elle semble amoureuse de lui, elle veut qu’ils se voient plus souvent. La gorge d’Évariste se serre à la pensée qu’elle pourrait lui proposer qu’ils vivent ensemble, sinon pourquoi l’a-t-elle invité au restaurant ? C’est ainsi que ferait un homme s’il désirait demander à une femme de partager sa vie. Mais ce n’est pas lui qui invite et ce ne sera pas lui qui demandera.

    Doucement, doucement… tempère-t-il.

    L’eau le rassure en lui picotant le crâne, taquine.

    Le téléphone sonne, il sursaute. Il coupe le jet et arrache son peignoir de bain à la patère. Il happe son portable.

    — Oui ?… C’est moi, bien sûr… Hmm ? Bien sûr, Madame la juge… ça s’est passé où ? OK… Étonnant, dans ce bled… Je devrais être là dans une petite heure… Merci.

    Il s’habille sans réfléchir puis s’avise que le programme a changé, la tenue n’est peut-être pas adéquate. Tant pis !

    Mais il prend soin de téléphoner à Cécile. Il est désolé, il doit annuler. Elle comprend, dit-elle, même si elle est déçue. Il s’excuse, il est contrit. Il sort en sifflotant.

    Chapitre 4

    Le trajet lui paraît long. Évariste a écouté Ascenseur pour l’échafaud jusqu’au bout. En roulant dans le noir, le crachin et une lune presque pleine créaient les conditions idéales. Plus une femme assassinée qui attendait dans la nuit.

    Il n’y a plus d’échafaud pour les tueurs et c’est tant mieux, la coutume était barbare, mais quelqu’un séjournera pendant quelques années en prison s’il fait bien son travail. Il respire une large bouffée d’oxygène, c’est sa première enquête criminelle en tant qu’inspecteur principal. C’est lui qui décidera, orientera l’enquête, il ne sait pas encore de qui il sera flanqué. S’il le pouvait, il préférerait travailler seul. Même s’il y aura bien sûr cette juge qui le chapeautera et qu’il ne connaît pas. Nouvelle mutation, paraît-il. Espérons qu’elle n’aime pas trop sortir de son bureau, songe-t-il tandis qu’il enchaîne sur Melody Gardot. C’est sa chanteuse de jazz préférée. Il est toujours envoûté par cette voix rauque si douce, du pur velours, qui puise sa sensualité dans la douleur d’un corps rompu.

    Il aime sortir le soir pour échapper à la nuit. Seul, il n’arrive pas à se coucher, il craint les rêves, et pire, les insomnies. Voilà pourquoi il a besoin de Cécile. Ou d’une autre. Mais le matin, il veut être seul, la journée lui appartient et il ne la partage avec personne. Sauf en vacances, et les dernières remontent à deux ans. Il était parti se promener en montagne avec un ami. Un hôtel en Autriche. Des soupers copieux avec d’autres marcheurs, ils avaient échangé les numéros de téléphone et personne ne s’en était servi. Les amis de vacances, c’est comme le vin local, délicieux sur place, de la piquette au retour et il déteste le désenchantement. Peut-être est-ce la raison pour laquelle il ne veut pas vivre avec une femme, car toujours vient le désenchantement. Et lui ne demande qu’un peu de compagnie pour affronter la nuit. Pas davantage.

    La lumière des phares éclaire les premières maisons. Il est arrivé. Il respire lentement, il a l’habitude que sa peau café au lait et ses cheveux bouclés, l’héritage de sa mère antillaise, et ce prénom en prime, Évariste, surprennent. Il anticipe que dans ce village isolé, l’inspecteur métis qui va donner des ordres aux gens du coin ne sera pas accueilli à bras ouverts.

    Il tente d’endiguer cette angoisse qu’il sent monter en lui.

    À l’adolescence, quand il apprenait au matin par une réflexion maladroite que les autres s’étaient réunis la veille après l’avoir quitté en déclarant rentrer chez eux, il était blessé. Évariste pouvait incriminer sa couleur de peau mais pas seulement, ces gars ne se moquaient pas de lui, ils se contentaient de l’éviter. Qu’est-ce qui clochait chez lui ? Peut-être faites-vous le minimum syndical amical, avait dit sa psy.

    Il en gardait des rancœurs qui lui donnaient des migraines. Il avait envie de tous les envoyer promener. Pourtant, il avait décidé de ne pas renoncer.

    Il avait changé depuis, même si, quand il devait affronter une nouvelle équipe… Non, pas affronter, rencontrer ! murmure-t-il.

    Chapitre 5

    Un attroupement l’arrête. Ses phares allumés éclairent la scène. Les bacs de la fontaine en cascade, les policiers qui barrent la route avec le combi, quelques curieux, bien sûr, et le café éclairé, sans fenêtre de ce côté. Il aurait fallu que quelqu’un sorte au bon moment pour être témoin de ce qui se passait, et quel était ce bon moment ? Cela, seul le légiste le lui dirait.

    Il sort de la voiture et immédiatement le vent le glace. Il attrape son manteau sur le siège arrière et s’approche en le boutonnant. Dommage qu’il ait oublié gants et écharpe.

    Les gens s’écartent à son arrivée.

    — Inspecteur principal Joris.

    — Bienvenue inspecteur. Inspecteur Charlier.

    Un gars en ciré et bottes fourrées lui tend la main. Il n’a pas froncé les sourcils en le voyant, c’est bon signe. On lui désigne un corps sur lequel se penche déjà un légiste.

    — Venez voir, dit le médecin sans se relever.

    Joris s’avance et ses pieds s’enfoncent soudain dans l’eau boueuse qui inonde le bas-côté de la route, pourquoi ont-ils laissé mariner le corps dans cette gigantesque flaque ? Ses chaussures ressortent avec un bruit de succion. Il glisse et doit mettre un genou dans la boue pour ne pas tomber.

    — Ne venez pas me saloper ma scène de crime, dit le bonhomme en combinaison blanche. Restez à distance, sapristi ! On dépêche, il fait déjà nuit.

    Un jeans neuf, bon sang ! Il devine quelques sourires derrière lui. Les autres sont équipés de bottes ou de grosses chaussures, ils savaient où ils mettaient les pieds. Lui arrive comme un novice, il sent ses joues s’échauffer. Maintenant qu’il a les chaussures immergées et trempées, il n’a plus rien à perdre, il peut prendre le temps de regarder.

    — Jeune femme entre trente-cinq et quarante ans, de constitution sportive, tenue de marche, une randonneuse sans doute. Une plaie à l’arrière du crâne. Je pourrai vous dire plus tard si elle est morte de cela ou noyée.

    Le légiste se relève et fait un signe, on peut l’emmener.

    — On peut imaginer une mauvaise chute, une glissade ?

    — Je ne crois pas. Ce n’était pas le temps idéal pour jouer dans l’eau. Ni se désaltérer. Eau non potable en prime, dit-il en désignant le panneau. J’ajouterai que comme la blessure est à l’arrière du crâne, elle aurait dû chuter vers le sol, pas plonger dans le bac, donc on l’a aidée. La vieille qui l’a découverte dit que la fille était bien immergée. Dommage qu’elle l’ait touchée et sortie. En tout cas, la victime est trempée jusqu’à la taille et ses cheveux dégoulinent, il n’y a pas de doute, elle était là-dedans et elle bouchait l’écoulement. D’où la gadoue dans laquelle nous pataugeons.

    — Depuis combien de temps ?

    — Difficile à dire. L’eau est glacée et la température du corps peut être trompeuse. Je situerais le décès entre dix-sept et dix-neuf heures.

    — On lui a maintenu la tête sous l’eau ?

    Le légiste hausse les épaules.

    — Je n’aime pas jouer les devins, je vous en dirai plus demain après l’autopsie, mais sous ses ongles, on peut voir quelques résidus d’algues, ce qui m’amène à penser qu’elle a dû griffer les parois.

    L’inspecteur sort son portable et fait vite quelques photos du corps, de la fontaine.

    — Venez, on va parler là, dit Charlier en désignant le café derrière eux. La carte des bières de L’Auberge de Charron est fameuse et il y fera moins humide. Vous pourrez même enlever vos chaussures, ou plutôt vous devrez, parce que le patron n’aime pas qu’on salisse chez lui. Vous allez voir.

    Il sourit tandis qu’on emmène la fille et Joris a le

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