William Boyd TRIO
Mai 1968. Le vent libertaire venu de France atteint Brighton, sur la côte anglaise, où l’on tourne un film irracontable, au titre impossible. Elfrida, écrivaine et épouse du réalisateur, tente d’oublier par la boisson les frasques de son mari et une décennie en panne d’inspiration. Elle qui détesta qu’on la dépeigne en héritière de Virginia Woolf brûle soudain d’écrire sur la dernière journée de l’auteure, suicidée par noyade dans une rivière voisine. Le producteur Talbot affecte flegme et courtoisie en toutes circonstances, quand bien même son ulcère le martyrise au gré des mille et un incidents qu’il doit résoudre et d’un questionnement lancinant sur la meilleure façon d’accepter enfin son identité sexuelle. De telles interrogations épargnent la jeune vedette américaine du film: Anny assume son amour des hommes, au point de peiner à mettre en ordre sa vie sentimentale. Amante d’un philosophe révolutionnaire parisien, elle entretient une liaison avec son partenaire à l’écran et reconnaît dans une foule d’admirateurs son ex-mari, anarchiste en cavale venu demander son aide pour échapper à la CIA. William Boyd verse volontiers dans l’ironie pour décrire un milieu artistique aussi superficiel dans ses caprices et babillages que profond dans ses insécurités, son âpreté au gain et ses diverses addictions. À les voir se débattre dans des difficultés réelles ou fantasmées, il se dégage pourtant des efforts des protagonistes de Trio une mélancolie certaine : aucun des trois n’a vraiment choisi d’appartenir à cette soi-disant élite, et leur salut, s’il existe, passera par la fuite.
LE LIVRE
TRIO (ID.)
WILLIAM BOYD
TRADUIT DE L’ANGLAIS (ROYAUME-UNI) PAR ISABELLE PERRIN, 432 P., 22 €. COPYRIGHT SEUIL.EN LIBRAIRIES LE 6
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