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Le DERACINE
Le DERACINE
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Livre électronique163 pages2 heures

Le DERACINE

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À propos de ce livre électronique

Est-ce qu'une seule décision peut faire basculer toute une vie?

À l'automne 1970, les paysans de la vallée de L'Anse-au-Griffon sont expulsés de leurs terres. Alors âgé de dix-sept ans, Damien décide de quitter sa famille pour tenter sa chance à Montréal, persuadé qu’une vie de rêve l’attend là-bas. Or, ce n’est pas le cas, car il s’y sent complètement déraciné. Après quinze ans de cette existence, sa campagne natale lui manque cruellement et chaque jour le rend un peu plus nostalgique.

À la suite de son mariage avec Valérie, une infirmière entièrement dévouée à son travail, la situation ne s’améliore guère. Peu de temps s’écoule avant que les deux ne se retrouvent aux prises avec des préoccupations personnelles qui étouffent graduellement leur amour.

Puis, après un séjour en solitaire à la montagne, Damien parvient à convaincre sa femme de prendre les rênes de la ferme de son oncle Antoine, à Cap-des-Rosiers. Ce retour à la terre sera-t-il un gage de bonheur ? Damien retrouvera-t-il la joie de vivre qui lui fait si souvent défaut ?  
LangueFrançais
Date de sortie11 nov. 2021
ISBN9782925178170
Le DERACINE
Auteur

Gilles Laverrière

Un auteur inné! Gilles Laverrière est né à Malartic, en Abitibi. Après avoir publié un essai à saveur théologique, il signe Le déraciné, un premier roman fort singulier qui marque la naissance d'un auteur regorgeant de talents.

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    Le DERACINE - Gilles Laverrière

    cover.jpg

    Table des matières

    PREMIÈRE PARTIE
    DEUXIÈME PARTIE
    TROISIÈME PARTIE

    Le déraciné

    Gilles Laverrière

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    Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

    Titre: Le déraciné / Gilles Laverrière.

    Noms: Laverrière, Gilles, 1957- auteur.

    Identifiants: Canadiana (livre imprimé) 20210059966 | Canadiana (livre numérique)

    20210059974 | ISBN 9782925178156 (couverture souple) | ISBN 9782925178163 (PDF) |

    ISBN 9782925178170 (EPUB)

    Classification: LCC PS8623.A835323 D47 2021 | CDD C843/.6—dc23

    Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada (FLC) ainsi que celle de la SODEC pour nos activités d’édition.

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    Conception graphique de la couverture: Jim Lego

    Direction rédaction: Marie-Louise Legault

    ©  Gilles Laverrière, 2021 

    Dépôt légal  – 2021

    Bibliothèque et Archives nationales du Québec

    Bibliothèque et Archives Canada

    Tous droits de traduction et d’adaptation réservés. Toute reproduction d’un extrait de ce livre, par quelque procédé que ce soit, est strictement interdite sans l’autorisation écrite de l’éditeur.

    Imprimé et relié au Canada

    1re impression, octobre 2021

    C’est dans l’ignorance de notre raison d’être qu’est la racine

    de notre tristesse et de nos dégoûts.

    Anatole France

    À la mémoire de Lorraine Bélanger

    PREMIÈRE PARTIE

    1

    Debout avant l’aube, Damien sortit de la maison sans faire de bruit et marcha jusqu’au ruisseau qui traversait la vallée de L’Anse-au-Griffon. Des rumeurs au sujet d’une éventuelle expropriation l’empêchaient de dormir paisiblement. Finalement, la mauvaise nouvelle avait été confirmée. Le gouvernement fédéral avait décrété que son patelin deviendrait une zone touristique où l’on aménagerait une partie du parc national de Forillon. Damien n’en revenait pas. Jamais il n’aurait cru qu’une décision aussi lourde de conséquences viendrait bouleverser son existence dans un coin perdu de la Gaspésie.

    Assis sous un pommier, au bord du ruisseau, il s’indignait de cette injustice en maudissant l’aveuglement de certains politiciens qui abusaient de leur pouvoir. Il saisit une pomme et la lança rageusement sur l’autre rive.

    —Que nos dirigeants aillent au diable! ne put-il s’empêcher de grommeler.

    Un voile de brume s’effilochait au-dessus du cours d’eau dont le murmure apaisa un peu Damien. À la lueur du clair de lune, il pouvait percevoir une branche à la dérive. Du coup, il se dit qu’il était lui aussi emporté par des événements qui le prenaient de court, tout en le laissant désemparé.

    Depuis quelque temps, il avait pris en grippe les paysans qui pliaient l’échine face au diktat du gouvernement. Plusieurs entendaient se liguer contre ce dernier pour recevoir leur indemnité d’expropriation, mais avaient renoncé à se battre pour demeurer sur leurs terres. Benjamin, le père de Damien, les accusait de vendre leur âme au diable pour une bouchée de pain. Un soir, alors que la famille était attablée, le paternel avait prononcé ces paroles décisives:

    —Je vous jure que je ne troquerai pas mon bien contre des billets de banque! Ça me répugne trop. Je préfère tout brûler et repartir de zéro.

    Pénétré par le froid, Damien cherchait à comprendre pourquoi son père était si déterminé à quitter son pays pour s’établir avec sa famille chez l’un de ses cousins qui possédait un ranch en Louisiane. Une seule explication lui vint à l’esprit. Il ne pouvait supporter l’affront qu’on lui faisait. La malchance s’abattait sur des gens enracinés dans leur terroir depuis des décennies.

    Âgé de dix-sept ans, l’adolescent, réfléchissait à son avenir en fixant le ruisseau qui se frayait lentement un chemin vers la mer. Il était sûr de deux choses. Il ne voulait pas aller vivre aux États-Unis ni chez son oncle Antoine dont les deux fils avaient déjà déserté la région.

    Il avait longuement réfléchi à l’idée de faire sa vie à Montréal. Encore une fois, il tenta de se convaincre de la justesse de cette solution. Il en était à peser le pour et le contre lorsque le chant du coq retentit. Aussitôt, il se releva d’un bond et se dirigea d’un pas rapide vers les bâtiments.

    Au-dessus de la montagne, une lueur blanchissait l’horizon et baignait peu à peu la vallée. Le jour que Damien redoutait tant était en train de se lever, le jour du grand bouleversement qui anéantirait d’un seul coup sa tranquillité rassurante et qui le jetterait, pour ainsi dire, à la face du monde. Au fur et à mesure qu’il s’approchait de la maison, les battements de son cœur s’intensifiaient. Si bien qu’il passa à deux doigts de défaillir en apercevant son père qui l’attendait sur le perron.

    —D’où viens-tu? lui demanda ce dernier.

    —Je suis allé au bord de la rivière.

    —Magne-toi. Le temps est venu de plier bagage.

    Damien gravit les trois marches du perron et annonça qu’il avait déjà fait sa valise. Il entra dans la maison où sa mère et ses deux sœurs s’affairaient à entasser le strict nécessaire dans une malle. Quand elle fut pleine, l’adolescent et son père la transportèrent près de la voiture, autour de laquelle la famille se rassembla spontanément. Benjamin tapota l’épaule de son fils en lui disant:

    —Fais sortir les animaux de l’étable.

    Damien fit quelques pas, puis, prenant conscience de la gravité du geste que son père allait poser, il se retourna et bredouilla:

    —Mettre le feu aux bâtiments... et à la maison… ça n’a aucun bon sens, papa.

    —Les bulldozers vont bientôt tout démolir. On ne fait que devancer l’inévitable.

    Damien baissa la tête et marcha jusqu’à l’étable où, à la lueur du petit matin, les vaches broutaient du foin. À l’aide d’un bâton, il fit sortir le bétail qui se précipita vers le pré, comme si les bêtes craignaient un danger imminent. Les beuglements des vaches, les grognements des cochons et les piaillements de la volaille le remuaient. L’adolescent vit son père mettre le feu à la maison, à l’étable et à la grange, où les flammes se propagèrent dans le foin à la vitesse de l’éclair. La mort dans l’âme, il regardait son passé partir en fumée. L’expropriation sonnait le glas d’une époque. Damien aimait la routine paisible de cette ferme sur laquelle il avait vaillamment travaillé aux côtés de son père. À présent, il s’efforçait de voir les choses sous un nouvel angle. L’expulsion lui permettrait d’échapper à son destin et de fuir la misère qui, tôt ou tard, aurait fini par l’engloutir.

    Près de lui, ses deux sœurs pleuraient à chaudes larmes, tandis que sa mère, dont le visage était d’une pâleur cadavérique, était si foudroyée qu’elle ne soufflait mot. Les feuilles qui virevoltaient dans la bise de ce petit matin d’automne 1970 rendaient la scène encore plus lugubre. Quand les bâtisses furent à moitié brûlées, Benjamin cracha par terre et laissa éclater sa fureur.

    —Un parc national... quelle idiotie! La bêtise humaine est sans borne! Je hais ceux qui nous dirigent! Je les vomis!

    Ces vociférations tirèrent sa femme Gisèle de sa torpeur. Elle s’approcha de lui, prit sa main et murmura:

    —Viens, partons vers des cieux plus cléments.

    Benjamin tourna les talons et, aidé par son fils, saisit la malle, puis la hissa sur le porte-bagages. Après des années de misère entremêlée de joie, c’était le seul bien familial qu’il lui restait. S’il avait écouté son cœur, il l’aurait volontiers jeté au feu pour que tout soit consumé et que nul souvenir tangible ne subsiste de son coin de pays qu’il avait désormais en abomination.

    La famille monta dans la voiture. Dans un parfait silence, ils roulèrent longtemps sur la route sinueuse longeant le littoral. Damien commençait à peine à se remettre de ses émotions quand son estomac se noua. Il craignait de commettre une erreur en allant tenter sa chance en ville. De temps en temps, il observait sa mère, qui semblait songeuse. Juste avant d’arriver à Gaspé, elle se tourna vers lui et lança d’une voix ferme:

    —N’hésite pas, mon grand, va à Montréal si ça te chante. Je suis sûre que tu parviendras à te débrouiller seul.

    À ces mots, Damien se sentit soulagé d’un poids énorme, comme si sa mère venait de couper le cordon ombilical. À la gare, il embrassa les siens avec la certitude de leur faire ses adieux. Au moment où son père lui donna l’accolade, il réprima son envie de pleurer.

    —Bon vent, mon fils! souffla Benjamin. Tâche de te faire une place au soleil, et surtout, sois fier de tes origines.

    Le sens de ces derniers mots échappa à Damien, qui s’efforça de se donner une contenance. Il comprit soudainement que cette rupture avec les siens constituait une décision aussi importante que celle de quitter son patelin. Il monta dans le train, déposa sa valise par terre et s’assit sur une banquette. Coupé de ses racines, il se lançait seul à la conquête de cette grande ville qui le fascinait tant.

    2

    Quinze années s’étaient écoulées et Damien avait toujours la nostalgie de la campagne. Incapable de s’acclimater à Montréal, il avait l’impression de tourner en rond, d’être seul parmi le flot de piétons qui déambulaient sur les trottoirs. Entraîné par le tourbillon de la métropole, il avait rapidement relégué sa famille aux oubliettes en mettant un terme aux lettres qu’il leur écrivait. Et pourtant, le souvenir des siens demeurait intact en lui.

    L’été, quand la chaleur était étouffante, il allait se promener au parc La Fontaine. La plupart du temps, il s’essayait sur un banc et, contemplant le ciel ou le lac, s’abandonnait à ses rêveries.

    Il vivait dans une garçonnière qui ne contenait que l’essentiel et qu’il se plaisait à appeler sa cage à poules. Du haut de son deuxième étage, il jouissait d’une vue plongeante sur le café situé au rez-de-chaussée de l’immeuble d’en face. Durant les grisailles de l’hiver, il restait des heures entières accoudé à la table pour observer, par la fenêtre, les passants et les voitures.

    Pour gagner sa vie, il avait exécuté mille et un petits boulots devant lui permettre de boucler son budget. Il s’était finalement résigné à travailler dans une fabrique spécialisée dans la production de pièces détachées pour les avions. Sa tâche se résumait à appuyer sur une manette et à percer trois trous dans une plaque d’acier. C’est ce qu’il faisait à longueur de journée. Un travail qui lui semblait tellement dérisoire que, par moments, il avait l’impression d’être devenu un robot rivé à une machine-outil.

    Certains jours, il regrettait amèrement de s’être exilé à Montréal, alors qu’il aurait pu vivre chez son oncle Antoine dont la ferme avoisinait la vallée de L’Anse-au-Griffon. Lorsqu’il se rendit compte de sa bêtise, il était trop tard pour rebrousser chemin. Refusant de se comporter comme un enfant, il avait assumé avec un remords incessant les conséquences de son choix.

    Au fil des années, il avait cumulé plusieurs aventures sentimentales. Chaque nouvelle femme lui semblait la bonne. Toujours, il parvenait à lui trouver les qualités dont il rêvait. Lorsque le doute viscéral qui empoisonnait son existence venait le hanter, il se voyait contraint à mettre un terme à la liaison. L’idée de se marier le plongeait dans l’anxiété, car il craignait de se mettre la corde au cou. Même si sa liberté ne rimait plus à rien, il en conservait

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