L' INVENTION DE LA TRIBU
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À propos de ce livre électronique
L’autrice Catherine Lune Grayson nous parle d’une voix intériorisée et vraie de cet amas de vies, de beautés et de douleurs qu’elle a su rendre avec un rare talent. Bien plus que ces histoires croisées qui font rire et pleurer, L’invention de la tribu est un roman exigeant et puissant, qui fait défiler sous nos yeux l’amour, la guerre, la mort, la vie…
Catherine-Lune Grayson
La première fois qu’elle pose les pieds en Afrique pour y faire une série de reportages, Catherine-Lune Grayson ne sait pas encore qu’elle y élira bientôt domicile et ce, pour de nombreuses années. Elle se tourne vers le travail humanitaire, qui la conduira d’une zone de crise à une autre. De pays en pays, elle découvre la poésie du continent et de ses habitants. Catherine-Lune Grayson a notamment travaillé pour les Nations Unies, le Conseil danois pour les réfugiés et la radio de Radio-Canada. Elle est l’auteure de Nul ne revient du pays qui n’existe pas (Michel Brûlé) et de L'invention de la tribu (Mémoire d'encrier). Catherine-Lune Grayson est née en 1977 et a grandi en Estrie.
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Avis sur L' INVENTION DE LA TRIBU
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Aperçu du livre
L' INVENTION DE LA TRIBU - Catherine-Lune Grayson
Catherine-Lune Grayson
L'INVENTION DE LA TRIBU
Roman
Amomis.comMise en page : Virginie Turcotte
Maquette de couverture : Étienne Bienvenu
Dépôt légal : 1e trimestre 2012
© Éditions Mémoire d'encrier
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Grayson, Catherine-Lune, 1977-
L’invention de la tribu
(Roman)
ISBN 978-2-923713-77-9 (Papier)
ISBN 978-2-89712-131-0 (PDF)
ISBN 978-2-923713-86-1 (ePub)
I. Titre.
PS8613.R389I58 2012 C843’.6 C2012-940001-7
PS9613.R389I58 2012
Nous reconnaissons, pour nos activités d'édition, l'aide financière du Gouvernement du Canada par l'entremise du Conseil des Arts du canada et du Fonds du livre du Canada.
Mémoire d'encrier
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Version ePub réalisée par:
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Amomis.comÀ Hélène
Prologue
Je vous jure que c’est vrai, que tout est vrai, que rien de tout ça n’a eu lieu.
Disons que ça se déroule dans des pays imaginaires. S’il faut mettre des noms sur ces pays-là, la tribu vit sur un petit rang perdu du Québec, le pays de Lamine, c’est le Sénégal, et le désert est tout au nord de la Somalie, bordé par le bleu du golfe d’Aden. Pierre est né en Slovaquie, même s’il ne s’en souvient pas. Tout ça a bien peu d’importance, car ça pourrait être partout, ça pourrait être nulle part.
Et au risque de me répéter – on passe sa vie à se répéter : Les histoires vraies sont des histoires inventées / Les histoires inventées sont des histoires vraies.
La mort est en fait le seul vrai problème.
Vladimir Jankélévitch
Ça commence par un cri.
Ça commence toujours par un cri.
Il y a toujours un avant et un après. Avant la naissance. Après la naissance. Avant la mort de la mère. Avant l’Afrique. Avant que la tribu ne soit une espèce en voie de disparition. Avant que toutes les villes ne te rappellent les unes aux autres, avant cette impression de déjà-vu, cet étrange enchaînement entre les lieux, des déserts aux champs de blé, des champs au village, du village à la ville, des dunes aux plaines, des sentiers aux rues, des camps de réfugiés aux terrains de camping, aux rangées de maisons ordonnées. Après l’Afrique. Après la mort d’une mère. Après la mort d’un mari. Après la fin de la tribu.
Ça commence toujours par un cri. Ça se termine parfois par un cri. Et à la fin, le silence l’emporte.
Tant que tu ne fais pas partie de l’histoire, tu es épargné. Le paysage n’est qu’un paysage. Ses pics et ses creux, ses arbres et ses roches ne te racontent pas d’histoires. Ils ne sont pas encore marqués, annotés, fêlés, fissurés. Ils sont sans histoire. Dans la préhistoire, tu es épargné.
Dans la préhistoire, il y avait la tribu. Ils allaient vivre heureux et avoir beaucoup d’enfants. C’était avant qu’ils ne soient tous devenus un peu fous. Avant que le creux, là-bas, ne soit celui des fondations incendiées de la maison blanche. Avant que le vélo rouge ne soit un tas de ferraille. Avant que le bruit des vagues ne soit une marche funèbre.
Le livre de Marie
Qui nous a bien retournés que de la sorte nous soyons, quoi que nous fassions, dans l’attitude du départ ? Tel celui qui, s’en allant, fait halte sur le dernier coteau d’où sa vallée entière s’offre une fois encore, se retourne et s’attarde, tels nous vivons en prenant congé sans cesse.
Rainer Maria Rilke, Huitième Élégie
Le premier jour de la fin du monde
Je vais mourir demain.
Elle va mourir demain. Son pouls est faible. Son visage incolore.
Je vais fermer les yeux et ne les ouvrirai plus. Jamais plus.
Elle va fermer les yeux et je ne verrai plus ce regard qui rassure, ce regard qui me dit que je lis si bien, que j’ai fière allure sur mon vélo, qu’un jour je serai grande, que je suis la plus belle.
Le monde est vieux. Usé. Brisé. Elle le sait même les yeux fermés. Le ciel de février est blanc, incolore.
Comment on sait qu’on aime, maman ? Ta gorge se serrera. Ton cœur tressaillira, cessera de battre un instant, puis il rebondira, battra un peu plus vite, de façon un peu désordonnée. Tu seras distraite. Tu sauras. Tu sauras, ma belle. Ne t’inquiète pas, ma belle.
Comment on sait qu’on est mort maman ? On ne sait pas, ma belle. On ne sait pas. On ne sait plus rien quand on est mort. On n’est plus là pour savoir, ma belle. Ne t’inquiète pas, ma belle.
Ne pleure pas, ma fille. Les larmes, ça ne sert à rien et ça te fait perdre de l’eau. Il ne faut pas pleurer, ma fille, surtout en été quand il fait chaud. Promets-moi que tu ne pleureras pas.
Elle tient le visage de sa fille entre ses mains. Ce geste de mère.
Tu dois apprendre, apprendre tout ce que tu peux. Tu dois comprendre, comprendre tout ce que tu peux. Apprends et comprends, ma belle, et rends-toi utile. Peut-être que c’est tout ce que tu auras, mais ce sera déjà beaucoup.
L’enfant dégage les cheveux du visage de la mère. Lisse les mèches du bout des doigts. Elle se penche sur son visage.
Tout à l’heure, elle fermera les paupières de sa mère de sa petite main et restera lovée contre le corps encore chaud. Elle est si belle. Ses traits sont si purs. Elle embrassera ses lèvres gercées, sans y penser. Le goût du sang. Après, elle sera seule avec le goût du fer. Elle descendra les marches sur la pointe des pieds, tout doucement, sans faire de bruit, comme pour retarder le moment où elle devra partager la mort avec les autres, comme pour repousser la mort encore un moment. Elle passera la porte de la cuisine baignée de soleil. « Maman est morte. » Il y aura tout ce bruit et ce désordre autour d’elle, mais elle ne l’entendra pas, ou si peu. Elle a neuf ans. Elle sait déjà que le bonheur a une fin. Neuf ans de bonheur, c’est déjà pas si mal. Elle fera tout très tôt, à commencer par la mort de sa mère. Elle ne sait pas encore que c’est la fin de l’enfance. Elle ne pleure pas.
Plus tard, elle se souviendra de la façon qu’avait sa mère de lui caresser distraitement les cheveux en lisant, de la robe de vichy rose qu’elle portait l’été, de la douceur de son ton quand elle l’appelait « ma belle », d’une dispute pour une robe à frous-frous, de sa peur irrationnelle de l’eau et des chiens, du bonheur avec lequel elle se remémorait sa rencontre avec son père, de son amour des plantes et des livres.
Le goût de l’enfance
Tableau I : vert
Soir. Il fait encore clair parce que c’est la fin de l’été. La lumière est dorée. Ça sent le gazon fraîchement coupé. Les enfants sont installés loin du sol, sur les branches d’un arbre immense qui joue avec le vent. Tout à l’heure, une mère va sortir et dira : « Les enfants, venez, c’est l’heure de manger. »
Le bonheur, quoi.
C’est quoi, le bonheur, au fait ? C’est quand le ciel vire au rose, c’est quand on se réveille un matin de printemps et qu’il y a des feuilles dans les arbres, c’est quand ça sent le café au réveil, c’est quand on a quatorze ans et qu’on descend des grandes côtes en planche à roulettes, le vent dans les cheveux, quand on est le premier à laisser ses empreintes dans la neige fraîche, quand les feuilles des arbres virent au rouge. Ou rien de tout ça.
Ils avaient eu des enfants un peu par hasard. Ils étaient occupés à s’aimer, à s’imaginer faire mieux que leurs parents. Ils s’étaient installés loin de la ville et avaient rêvé d’une autre vie. Ils avaient renoncé à la religion et à l’électricité. Ils cultivaient de vastes jardins, derrière leurs petites maisons. Au début, ils n’étaient que quelques adultes. Avec le temps, des enfants étaient nés et d’autres adultes s’étaient joints à eux. Ils avaient été de plus en plus nombreux. Ils construisaient des maisons, défrichaient de nouveaux champs. Il y avait des dizaines d’adultes et des ribambelles d’enfants dans les fêtes.
La vie coulait, doucement. L’un des parents avait décidé d’enseigner aux enfants à la maison, car à l’école du village, il fallait faire la prière. Les petits grandissaient ensemble, petite tribu gazouillante. Ils chassaient les grenouilles à travers les quenouilles dans l’eau glacée du marécage derrière la grange. Ils passaient des heures perchés dans les grands pins qui bordaient le rang, balancés par le vent, à s’inventer un univers où les lits étaient faits de fougères, les hommes avaient des ailes et les forêts étaient peuplées d’insectes visqueux, de monstres et de dragons. Ils sentaient la résine de pin et avaient des nœuds dans les cheveux. Ils allaient vivre heureux et avoir beaucoup d’enfants. Ils partiraient tour à tour découvrir le monde. Puis ils reviendraient raconter aux autres ce qu’ils avaient vu. Évidemment, ça ne se passerait pas vraiment comme ça, parce qu’on oublie souvent ses promesses d’enfant. Ils s’en iraient à tour de rôle, certes, mais ne reviendraient pas. Certains pousseraient l’exploration de plus en plus loin, convaincus qu’ils trouveraient ailleurs les forêts, les montagnes, les villes et les rivières qui peuplaient leurs rêves les plus fous. À la fin, peut-être se diraient-ils que ces forêts, ces montagnes, ces villes, ces rivières et ces hommes
