Le retour de Samba

Comme chaque année, Stanislas s’était bien préparé à l’hiver. Il avait observé les arbres qui perdaient leurs dernières feuilles d’un seul coup, déshabillés par le vent acide de novembre, et il s’était dit : « On y est enfin ! »

Pour un peu, il aurait applaudi, battu des mains comme un gosse. Comme certains animaux, il pratiquait l’hibernation, vivait au ralenti. C’était une vie douce et paisible dans laquelle le travail tenait une place infime.

C’était au moment où les premiers bourgeons apparaissaient que Stanislas se jetait à corps perdu dans l’écriture, alors que ça aurait dû être le contraire. Tout ce que les autres avaient espéré pendant les longs mois d’hiver, il le fuyait. Et, rivé à son bureau, les yeux sur l’écran de son ordinateur, il ne voyait ni le ciel bleu ni les arbres en fleurs, il n’entendait rien, pas même le chant des oiseaux qui s’égosillaient à quelques mètres de sa fenêtre.

Il s’était donc habitué à l’hiver, et voilà que l’hiver s’en était allé et que le calendrier en annonçait officiellement la fin. Voilà qu’hier, en marchant dans le bois, il avait découvert, presque effrayé, une touffe de violettes. Et il était resté figé, les pieds dans les herbes mouillées, à regarder les fleurettes d’un mauve très pâle, qui semblaient s’excuser de se trouver sur son passage. Il avait rebroussé chemin, était parti presque en courant, et n’avait repris son calme qu’une fois chez lui, la porte refermée.

Il s’était rassuré. Dieu merci, le printemps n’allait pas vous sauter dessus d’un coup ! Il y aurait encore du froid, de la pluie et, qui sait, peut-être de la neige. La dernière, celle qu’on appelait dans la région « la neige du coucou », puisqu’elle coïncidait généralement avec l’arrivée de l’oiseau migrateur.

Mais après, ce serait le printemps, le vrai, la saison qui fait craquer la terre, délivre les ruisseaux et donne naissance aux bourgeons.

Stanislas se tourna vers la fenêtre. Les vitres étaient couvertes de buée. Il avait allumé du feu dans la