Avec Regardez-nous danser, Leïla Slimani poursuit la vaste fresque familiale commencée en 2020, dans le cadre de sa trilogie : Le Pays des autres. Le Maroc a retrouvé son indépendance le 2 mars 1956. Dix ans plus tard, la colonisation apparaît comme un « malentendu », qu’on tente d’oublier dans un semblant d’égalité franco-marocaine. Hassan II clame son soutien aux agriculteurs, sans déposséder les Français. Après avoir fait fructifier ses terres, la famille Belhaj s’est taillé une place dans la société bourgeoise, qui peine à faire sortir le mot « bicot » de son vocabulaire. Mathilde cherche à contourner les contraintes de son mari, Amine, que seule la réussite de sa fille Aïcha peut assouplir. Enfermée dans sa solitude, cette dernière étudie la médecine en Alsace, sans se soucier des garçons et de Mai-68. La greffe botanique, entreprise par Amine dans le volume précédent, n’a pas permis de fusionner le citron et l’orange, et Selim ne reprendra probablement pas la ferme de son père. Les drames de la guerre sont révolus, emportant avec eux le passé militaire d’Amine dans l’armée coloniale. Les hippies ont investi le paradis marocain, en quête d’une liberté individuelle impossible, malgré les combats menés par ce pays pour retrouver sa souveraineté. La douceur de vivre réclame des ruses intimes, des compromis, nous dit Leïla Slimani. Pour se sentir à sa place même quand on reste étranger aux autres.
LE LIVRE
REGARDEZ-NOUS DANSER.LE PAYS DES AUTRES 2
LEÏLA SLIMANI 370 P., 21 €. COPYRIGHT GALLIMARD.EN LIBRAIRIES LE 3 FÉVRIER.
Mathilde était à la fenêtre et observait le jardin. Son jardin opulent et désordonné, presque vulgaire. Sa vengeance contre l’austérité à laquelle son mari, en tout, la contraignait. Le jour était à peine levé et le soleil,