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L'alphabétisation: État des lieux et pistes d'intervention
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Livre électronique358 pages3 heures

L'alphabétisation: État des lieux et pistes d'intervention

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À propos de ce livre électronique

Tout formateur en alphabétisation est conscient du défi que représente la recherche de matériel didactique adapté aux réalités des personnes adultes analphabètes. Souvent contraints de créer leur propre matériel ou d’adapter à leur contexte du matériel déjà existant, les formateurs savent qu’en raison de la complexité de la situation, une adaptation ne saurait suffire, à moins qu’elle prenne en compte tous les facteurs biologiques, sociaux et culturels que sous-tend un contexte d’alphabétisation.

Cet ouvrage jette un pavé dans la mare en contribuant à combler ce manque de matériel didactique. Il vise à répondre à certains besoins sur le plan du matériel certes, mais surtout sur le plan des connaissances issues de la recherche. En ce sens, il propose plus de 35 pistes d’interventions didactiques qui prennent appui sur la recherche en andragogie, en neurosciences, en psycholinguistique et en didactique des langues secondes ou étrangères pour justement comprendre les différents facteurs que sous-tend un contexte d’alphabétisation. Les formateurs en alphabétisation ainsi que les étudiants en éducation et les professionnels de la didactique pourront désormais faire le pont entre la recherche et le milieu de pratique en alphabétisation afin d’allier leur compréhension d’éléments contextuels à une pratique enseignante adaptée à la situation et porteuse de succès.

Sonia El Euch est professeure titulaire au Département des sciences de l’éducation de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Ses domaines d’ensei­gnement et de recherche sont la didactique des langues secondes ainsi que les facteurs sociaux, psychologiques et cognitifs dans l’apprentissage et dans le développement du bilinguisme.

LINDA DE SERRES, Ph. D., est professeure titulaire au Département de lettres et communication sociale de l’Université du Québec à Trois-Rivières. Ses domaines d’enseignement et de recherche sont la didactique des langues secondes ainsi que la neuroéducation et la pédagogie dans l’enseignement-apprentissage du français comme langue première ou langue additionnelle.
LangueFrançais
Date de sortie10 févr. 2021
ISBN9782760554481
L'alphabétisation: État des lieux et pistes d'intervention
Auteur

Sonia El Euch

Sonia El Euch est professeure titulaire au Département des sciences de l’éducation de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Ses domaines d’ensei­gnement et de recherche sont la didactique des langues secondes ainsi que les facteurs sociaux, psychologiques et cognitifs dans l’apprentissage et dans le développement du bilinguisme.

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    Aperçu du livre

    L'alphabétisation - Sonia El Euch

    Introduction

    Une mise au point terminologique

    CIBLES DE LECTURE

    Exposer les profils possibles d’immigrants au Québec.

    Définir des vocables inhérents à la francisation et à l’alphabétisation.

    Énoncer les droits et les attentes sur le plan linguistique en regard des immigrants adultes au Québec.

    QUESTIONS CLÉS

    Quels types d’immigrants reçoit le Québec ?

    Que signifie une pleine intégration à la société québécoise ?

    En quoi se différencie le multiculturalisme de l’interculturalisme ?

    Quels immigrants ont droit à une formation linguistique en français au Québec ?

    1. Les types d’immigrants au Québec

    Le Québec connaît depuis plusieurs années une vague d’immigration. Il accueille quatre profils de migrants selon les raisons qui les ont motivés à quitter leurs pays (Rédaction, 2018). Pour des raisons économiques, des gens d’affaires et des travailleurs qualifiés quittent leur pays pour assurer leur prospérité. Alors que les gens d’affaires, par exemple les entrepreneurs ou les investisseurs, choisissent le Québec comme pays d’adoption, les travailleurs qualifiés s’y installent généralement sur une base saisonnière ou ponctuelle. Outre l’immigration économique, l’immigration familiale, aussi appelée la réunification familiale, permet quant à elle de réunir les membres d’une même famille. De plus, le principe de solidarité internationale fait en sorte que le Québec accueille des réfugiés en situation de détresse (Ministère de l’Immigration, de la diversité et de l’inclusion [MIDI], 2019), favorisant ainsi l’immigration humanitaire.

    Les différents types d’immigration, et par conséquent les différents profils d’immigrants, sous-tendent différents besoins langagiers et donnent le droit, selon le cas, à des services linguistiques. Par exemple, seules les clientèles dites familiale et humanitaire ont droit aux cours de francisation. La clientèle dite économique, composée de travailleurs qualifiés, peut se prévaloir de services de francisation en ligne (FEL) (MIDI, 2017b). Ainsi, contrairement aux gens d’affaires, qui doivent maîtriser soit le français, soit l’anglais (Bissonnette, 2018), le critère de maîtrise linguistique du français ou de l’anglais ne s’applique pas aux travailleurs qualifiés. À défaut d’avoir un niveau de scolarité appréciable, les nouveaux arrivants au Québec peuvent tirer avantage de cours de francisation.

    Or, pour s’intégrer pleinement à la société québécoise, chaque nouvel arrivant adulte non francophone devra posséder de solides compétences de base en de multiples domaines dont la lecture, l’écriture, la numératie, la technologie, l’environnement, la citoyenneté et la culture. Ce bagage d’acquis, avec la langue française comme fondement, s’avère crucial pour occuper un emploi satisfaisant, pour prendre soin de sa santé, pour être un citoyen responsable et autonome, pour accéder au monde culturel et l’apprécier. Somme toute, chacun ambitionnant de jouir d’une qualité de vie appréciable au Québec, voire en sol canadien, ne pourra faire fi de la langue écrite comme outil d’intégration optimal.

    Le saviez-vous ?

    « [O]n confond souvent les termes de demandeur d’asile et de réfugié : un demandeur d’asile est une personne qui dit être un(e) réfugié(e), mais dont la demande est encore en cours d’examen » (Ferretti, 2016, p. 52). Bien que cette demande relève de la juridiction fédérale, un demandeur d’asile peut, de fait, vivre au Québec durant l’examen de sa demande, laps de temps au cours duquel le Gouvernement du Québec lui procure des services comme un logement, une aide financière, des soins de santé, des cours de français, la possibilité que ses enfants étudient, et plus encore.

    Le saviez-vous ?

    L’immigration économique est l’unique catégorie d’immigrants sur laquelle le Québec a l’entier contrôle. Les immigrations familiale et humanitaire relèvent du gouvernement fédéral.

    Puisque d’ici 2036, au Canada, une personne sur deux sera issue de l’immigration (Morency, Caron-Malenfant et MacIsaac, 2017), comment soutenir avec discernement les adultes non francophones venant s’enraciner au Québec ? Comment les habiliter à tous égards pour qu’ils soient entièrement partie prenante de « leur » monde de demain, de fait, du nôtre ? Ce sont là des intentions nobles qui demandent en amont énormément d’investissements de tous ordres et de la part de tous. Et cela devient encore plus exigeant de part et d’autre quand il s’agit de nouveaux arrivants adultes ayant des besoins en alphabétisation ou en francisation. Pour mieux comprendre les enjeux dans un contexte d’intervention éducative et mieux saisir les éventuels effets des interventions éducatives, il faut préalablement faire une mise au point terminologique : différencier l’alphabétisation de la francisation avant de saisir les caractéristiques de ces nouveaux arrivants dits allophones, et connaître les types de classe qu’ils auront à fréquenter pour apprendre le français. Peu importe le contexte d’apprentissage, il ne faut pas perdre de vue que la langue véhicule la culture, et que celle-ci est souvent tributaire d’enjeux politiques. Les prochaines lignes visent, brièvement, à mettre en lumière ces différents éléments qui constituent les fondements des interventions éducatives dans des situations d’alphabétisation ou de francisation.

    Le saviez-vous ?

    Au Québec, l’analphabétisme touche plus d’un million d’adultes de 16 à 65 ans, soit environ un adulte sur cinq. Contrairement aux idées reçues, la majorité de ces adultes ne sont pas des personnes immigrantes (Institut de la Statistique du Québec, 2015) ; ces dernières ont plutôt de très bonnes compétences en lecture et en écriture dans leur langue maternelle. Certaines peuvent toutefois avoir des difficultés en français et auront alors besoin autant de francisation que d’alphabétisation.

    2. La distinction entre alphabétisation, alphabétisme et francisation

    L’alphabétisation consiste en l’offre d’activités éducatives où la formation n’est pas limitée au domaine linguistique. Elle inclut des éléments d’intégration sociale et culturelle. L’alphabétisation s’adresse à des personnes adultes ne sachant pas ou peu lire et écrire dans une seule et unique langue, quelle qu’elle soit. L’alphabétisation permettrait donc à ces apprenants adultes d’accéder à la connaissance et à l’information, d’exercer leurs droits sociaux et politiques et de communiquer dans un contexte inter- ou multiculturel. Ainsi, l’alphabétisation n’est pas limitée aux nouveaux arrivants ; elle s’applique aussi aux analphabètes québécois.

    L’alphabétisation est, par ailleurs, différente de l’alphabétisme, qui consiste à « apprendre à lire et à écrire (textes et chiffres), et aussi [à] utiliser la lecture, l’écriture et le calcul pour apprendre d’autres choses, et enfin approfondir et utiliser ces compétences efficacement dans la vie quotidienne » (Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture [UNESCO], 2006, p. 67).

    Quant à la francisation, elle s’adresse à des personnes qui savent lire et écrire dans au moins une autre langue que le français. Elles possèdent donc un bagage conceptuel qui peut favoriser leur apprentissage du français ainsi que l’apprentissage des disciplines scolaires en français. La francisation s’adresse aussi à de jeunes enfants qui ne savent ni lire ni écrire, mais qui communiquent néanmoins dans une autre langue que le français. La francisation de ces jeunes apprenants et celle des apprenants ayant déjà des habiletés de lecture et d’écriture consiste en la mise en œuvre de mesures éducatives afin qu’à l’« intérieur d’un groupe, d’un lieu, d’une institution, le français soit la langue qui prédomine dans les communications interlinguistiques¹ » (Office québécois de la langue française, 2007).

    Le saviez-vous ?

    Plus du tiers des 50 000 nouveaux arrivants au Québec n’ont aucune connaissance de la langue française. De cette fraction, moins de 31 % s’inscrivent à des cours de français. Plus de 90 % de ceux qui terminent le cours seraient incapables de fonctionner au quotidien en français (Gervais, 2017 ; Leclerc, 2017).

    3. Le français langue étrangère et le français langue seconde

    Le saviez-vous ?

    Au Québec, des mesures de plus en plus contraignantes ont été mises en place pour protéger et promouvoir la langue française. En 1969, la Loi 63 (Loi pour promouvoir la langue française au Québec) a insisté sur l’importance de l’école de langue française. Ensuite, la Loi sur la langue officielle (Loi 22) a limité l’accès à l’école de langue anglaise et a fait du français la langue de travail et la langue de l’administration et des services. En 1977, la Charte de la langue française du Québec (ou la « loi 101 ») a imposé l’école de langue française comme espace commun de scolarisation à la plupart des nouveaux arrivants, faisant ainsi du français la langue de l’éducation tout autant que celle du travail, des services et des affaires (El Euch et Martineau, 2017).

    Le français ne jouit pas du statut de langue maternelle pour ces nouveaux arrivants, avec les valeurs identitaires, culturelles et sociales que ce statut implique. En effet, le français est pour plusieurs une langue étrangère (FLE) en raison de distances matérielle, culturelle et linguistique (Cuq et Gruca, 2002 ; Dabène, 1994). Alors que pour un Chinois, le français est plus distant de lui que ne l’est le coréen, pour un Arabe de l’Afrique du Nord, le perse s’avère plus distant que ne l’est le français. Il s’agit ici d’une distance géographique (distance matérielle), qui joue un rôle dans la représentation d’étrangeté qu’on se fait de la langue. Alors que pour un Chinois, le français est une langue étrangère, pour un Arabe de l’Afrique du Nord, c’est plutôt le perse qui est une langue étrangère, même si culturellement l’arabe et le français sont plus distants l’un de l’autre que l’arabe et le perse ne le sont. La distance géographique ne détermine donc pas la distance culturelle. La perception d’une faible distance culturelle demeure toutefois un facteur important dans le processus d’appropriation de la langue, et particulièrement de connaissances idiomatiques (Cuq et Gruca, 2002), alors que la perception d’une grande distance culturelle conduit à l’expression de préjugés (Mahfud, Badea, Guimond, Anier et Ernst-Vintila, 2016). Quant à la distance linguistique, elle a permis d’identifier des familles de langues (langues romanes, indoeuropéennes, slaves, afro-asiatiques, etc.). La perception d’une faible distance linguistique entre des langues favoriserait l’apprentissage, même si elle peut causer des transferts négatifs ou des interférences. Par exemple, l’espagnol et le français font partie de la famille des langues romanes. Alors que le terme universidad faciliterait l’acquisition du terme « université », le terme constipado causerait un malaise s’il fait appel au faux-ami français dans « Si vous êtes constipé, ne m’embrassez pas », au lieu de l’équivalent correct « Si vous êtes enrhumé, ne m’embrassez pas ».

    Les distances matérielle, culturelle et linguistique sont aussi présentes dans des situations d’apprentissage du français langue seconde. La différence est que dans une situation de langue étrangère, le processus d’appropriation de la langue est plus ou moins volontaire, alors qu’il est plutôt dicté par des raisons sociales ou statutaires dans une situation de langue seconde. Dans ce dernier type de situation, l’importance de la perception des distances est minimisée par l’importance des statuts sociopolitique et éducatif accordés à la langue. Au Canada anglais, tout comme en Afrique du Nord, le français est la langue seconde ; pourtant, dans un cas, le français est proche de la langue majoritaire (l’anglais) et dans l’autre cas, le français est distant de la langue majoritaire (l’arabe).

    4. Les allophones et les immigrants de première et de deuxième générations : dans des classes d’accueil ou dans des classes ordinaires ?

    Au Québec, les nouveaux arrivants qui ne connaissent ni le français, langue seconde ou étrangère, ni l’anglais sont appelés allophones. Leur nombre est en constante augmentation dans la grande région de Montréal, ce qui entraîne une augmentation du nombre d’élèves issus de l’immigration inscrits dans les écoles québécoises (Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport [MELS], 2014). Ces élèves peuvent être des immigrants de première génération, s’ils sont nés à l’extérieur du Canada, ou de deuxième génération, s’ils sont nés au Canada et qu’au moins un de leurs parents est né à l’extérieur du Canada.

    Le saviez-vous ?

    Les allophones sont concentrés, dans une proportion de 88 %, dans la grande région de Montréal (Centre de la Francophonie des Amériques, 2017). Et pourquoi ne se trouvent-ils pas ailleurs au Québec ? En raison notamment de la langue française omniprésente et exigée des employeurs, de l’homogénéité des villes (sans « ghettos culturels » ou quartier culturellement marqué), et ce, malgré des atouts certains comme le marché de l’emploi (forte demande), le climat paisible de vie et la sécurité (Bourque, 2019).

    Selon leurs connaissances linguistiques, les jeunes immigrants de première ou de deuxième génération fréquentent des classes d’accueil ou apprennent en situation d’immersion dans des classes ordinaires. La classe d’accueil regroupe les jeunes élèves selon leur âge et leur compétence langagière. Ils y reçoivent, de manière intensive, des services d’accueil et de soutien à l’apprentissage du français, partagent leur expérience commune d’intégration linguistique, scolaire et sociale, et bénéficient d’une adaptation du matériel pédagogique pour la majorité des cours. Ils suivent leurs cours tout en étant intégrés de manière partielle et graduelle à la classe ordinaire dans une ou plusieurs matières (MELS, 2014). Quant à l’intégration directe à la classe ordinaire, bien que les élèves y reçoivent des services d’accueil et de soutien à l’apprentissage selon leurs besoins, elle permet aux élèves de vivre une intégration scolaire soutenue, de communiquer fréquemment avec des locuteurs francophones et d’acquérir rapidement un sentiment d’appartenance à la société d’accueil (MELS, 2014). La recherche a montré qu’il n’y a pas de modèle de classe gagnant. Le modèle de classe d’accueil et le modèle d’intégration directe en classe ordinaire ont fait leurs preuves au fil des ans, quoiqu’aucun n’est considéré comme le modèle de classe idéal. Les deux modèles fonctionnent bien, tant que le séjour dans la classe d’accueil n’est pas trop long et que l’intégration dans la classe ordinaire est accompagnée d’un soutien suffisant (McAndrew, 2001).

    Le modèle de classe d’accueil et le modèle d’intégration directe en classe ordinaire fonctionnent bien, tant que le séjour dans la classe d’accueil n’est pas trop long et que l’intégration dans la classe ordinaire est accompagnée d’un soutien suffisant

    5. La distinction entre multiculturalisme et interculturalisme

    Pour ces jeunes allophones et leurs parents, se trouver en présence d’une autre langue signifie aussi se trouver en présence d’une autre culture. Langue et culture sont indissociables. On ne peut envisager l’enseignement du français sans y intégrer des éléments culturels. De la même manière, on ne peut dissocier les locuteurs d’une autre langue que le français de leur culture d’origine. Comme la culture accompagne de facto la langue, des politiques linguistiques et culturelles sont souvent mises en place dans une perspective de paix sociale ou une perspective protectionniste. Le multiculturalisme canadien et l’interculturalisme québécois illustrent ces perspectives (Juteau, McAndrew et Pietrantonio, 1998 ; Lefebvre et St-Laurent, 2018 ; McAndrew, 1995 ; Rocher et White, 2014). Dans un souci de paix sociale, le multiculturalisme canadien considère les différents groupes culturels, linguistiques et religieux, égaux en droits. La Charte canadienne des droits et libertés² rend compte de cette perspective multiculturelle basée sur les droits fondamentaux des individus. Quant à l’interculturalisme québécois, il est basé sur des politiques visant à intégrer les communautés culturelles au groupe francophone majoritaire, tout en encourageant ces communautés à préserver leurs caractéristiques culturelles. La Charte de la langue française, plus connue sous le nom de « loi 101 » (Charte de la langue française [RLRQ], c. C-11), le projet de Charte des valeurs québécoises (Drainville, 2013), et plus récemment le test des valeurs québécoises (Messier, 2018) rendent compte de cette perspective interculturelle basée sur le principe d’assurer la pérennité de la langue française et de la culture inhérente. Alors que le multiculturalisme peut être représenté par une mosaïque, la métaphore privilégiée pour représenter l’interculturalisme est l’« arbre auquel viennent se greffer des souches diverses. Une culture de convergence, constituée d’un noyau dur basé sur les traditions québécoises [et] appelée à s’enrichir d’apports de cultures minoritaires » (McAndrew, 1995, p. 46).

    L’interculturalisme soulève des enjeux identitaires et force le nouvel arrivant à adopter consciemment ou inconsciemment une attitude positive ou négative envers la société d’accueil et envers l’apprentissage du français. En effet, il n’est pas possible d’ignorer la posture d’apprentissage que peut avoir un allophone, selon qu’il sente sa langue et sa culture, et par ricochet sa propre personne, appréciées, tolérées ou rejetées.

    Cette mise au point terminologique pose les jalons pour mieux comprendre l’état des lieux en matière d’alphabétisation et de francisation au Québec et pour baliser des pistes d’intervention éducatives. Cet ouvrage, consacré à l’alphabétisation, expose en premier lieu les caractéristiques de l’adulte allophone peu ou pas alphabétisé ainsi que les approches et les méthodes d’alphabétisation. Il fait ensuite le point sur la situation au Québec avant d’aborder le contrat didactique et le rapport andragogique dans une situation d’alphabétisation, et de présenter les défis reliés à l’acquisition de certaines compétences de nature langagière. Des pistes d’intervention se retrouvent autant dans les parties dédiées à la formation à l’acquisition des compétences langagières en français que dans les parties un peu plus théoriques, et ce, dans le but d’illustrer les propos et de fournir aux intervenants en alphabétisation un point de départ ou des étincelles inspirantes pour élaborer ou adapter des activités appropriées à l’intention de leurs apprenants.

    ÉLÉMENTS CLÉS À RETENIR

    > Le Québec prône l’interculturalisme, à savoir autant une intégration des nouvelles communautés culturelles qu’une présentation de la langue majoritaire et de ses valeurs inhérentes.

    > Des immigrants de première ou de deuxième générations pourraient, selon leur cas et leurs besoins, se prévaloir de droits semblables en matière de formation linguistique en français.

    > Une majorité d’immigrants adultes ne peuvent vraisemblablement pas se dire fonctionnels à s’exprimer en français dans leur routine quotidienne au terme de leur formation linguistique initiale.

    , consulté le 13 octobre 2020.

    2 Loi constitutionnelle : , consulté le 13 octobre 2020.

    L’allophone adulte analphabète

    CIBLES DE LECTURE

    Exposer les types possibles d’analphabètes.

    Décrire les caractéristiques de l’apprenant allophone analphabète.

    Décrire les attitudes et les motivations des allophones adultes analphabètes.

    Énoncer les stratégies de communication que l’allophone adulte analphabète est appelé à développer.

    Proposer des stratégies d’apprentissage à mettre en place en alphabétisation des adultes.

    QUESTIONS CLÉS

    À qui correspond le vocable analphabète ?

    Quels sont les enjeux auxquels les analphabètes sont confrontés ?

    Quels pourraient être les fondements des pistes d’intervention à mettre en place pour accompagner l’allophone analphabète dans son quotidien dans son pays d’accueil ?

    Pour s’investir pleinement dans la société moderne actuelle, chaque adulte doit satisfaire à un niveau minimal d’alphabétisation, l’équivalent d’un 5e secondaire ou 12 ans de scolarité – primaire et secondaire confondus. Cela consiste à savoir écrire bien sûr, et aussi à savoir compter et lire, ce qui sous-tend d’être à même de raisonner et de maîtriser la langue, donc d’en détenir le code. Ce code peut revêtir diverses formes dont un code linguistique pour écrire et lire, informatique pour interagir avec l’électronique, numérique pour calculer, et symbolique pour

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