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Petits hommes: Roman de l'enfance
Petits hommes: Roman de l'enfance
Petits hommes: Roman de l'enfance
Livre électronique152 pages2 heures

Petits hommes: Roman de l'enfance

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À propos de ce livre électronique

À dix ans, André est un garçon à peu près comme les autres.

Il vit avec sa mère, professeur de littérature, et aime jouer aux cow-boys avec son meilleur ami Jean. Mais André a un don : le piano. Un jour, pour la première fois, son père, un homme d’un certain âge, vient le chercher à la sortie de l’école. Cet évènement, banal pour tant d’autres enfants, bouleverse sa vie.

Un roman qui exprime la relation père-fils à travers les yeux d'un enfant.

EXTRAIT

André posa son blouson et son cartable à côté du buffet, Jean posa Macar, son cartable et son blouson. Dans le salon, deux étagères se faisaient face. Elles filaient jusqu’au plafond et le long du mur. Il y avait une échelle en bois pour attraper les livres tout en haut. Jean reprit Macar, et André monta sur l’échelle et saisit un gros, vieux livre. Il redescendit.
— Tu vois ? dit-il.
— Ouvre.
André posa le livre sur la table et l’ouvrit à la première page. Jean se baissa pour le sentir. Macar le sentit aussi.
— Ça pue.
— Oui, ça sent le vieux.
— 1781, quand même.
— C’est mon père qui me l’a donné.
Jean se pencha sur le livre. Il fronça les sourcils et tenta de déchiffrer l’écriture gothique sur le papier jauni.

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Chronique sensible d’une enfance plus tout à fait insouciante, ce premier roman révèle la fibre délicate de Konrad Laghos. - Delphine Peras, L’Express

Un roman touchant sur l’apprentissage de la vie, les premiers grands chagrins, la relation au père. L’univers des enfants entre cruauté de certains entre eux, courage et solidarité est parfaitement décrit. C’est un joli premier roman que l’on quitte à regret ! - Librairie La Parenthèse

Tout est ambivalence et délicatesse dans ce roman. - Daniel Fattore

À PROPOS DE L'AUTEUR

Né à Paris en 1989, Konrad Laghos, a suivi sa scolarité à Blois et fait ses études à Canterbury puis à Bruges. Il réside depuis quelques années à Zurich, où il a été journaliste.
LangueFrançais
ÉditeurIntervalles
Date de sortie11 oct. 2018
ISBN9782369561651
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    Aperçu du livre

    Petits hommes - Konrad Laghos

    toujours.

    1

    La pluie s’était arrêtée. Les ardoises de la gare luisaient comme un miroir. Ça sentait bon l’automne et la pluie sur les feuilles mortes, et l’air piquait un peu. Il avait fait chaud jusque-là. Les uns parlaient d’été indien et en avaient profité pour faire griller des saucisses au jardin en rentrant du travail. Les autres parlaient de réchauffement climatique. Les uns se réjouissaient de bientôt faire pousser des oranges au nord de la Loire, les autres prédisaient l’apocalypse avant la fin du siècle à venir. Les uns et les autres s’écharpaient, mais il était généralement de bon ton de dire que l’Homme était coupable.

    Dans la gare, il y avait des hommes et des femmes, des enfants aussi. Ils s’enlaçaient et s’embrassaient, certains pleuraient, certains riaient, d’autres riaient et pleuraient en même temps. Parmi eux, devant le kiosque à journaux, une femme regardait les titres. René Lacoste venait de mourir.

    Au-dessus des portes en verre entre les quais et le hall, le grand panneau indicateur fit flap ! flap ! flap ! flap ! Giulia Dumont se posta au milieu du hall et attendit en mâchant un chewing-gum. Elle avait les cheveux roux et courts avec des boucles et les yeux de la couleur des feuilles quand elles bourgeonnent au printemps. Des gens la regardèrent par-dessus l’épaule d’autres gens.

    La mélodie de la SNCF sortit des haut-parleurs et un train entra en gare. Marguerite et André apparurent entre les portes en verre. Ils rejoignirent Giulia.

    — Salut, mes chéris, vous avez fait bon voyage ? dit-elle en faisant chanter les mots.

    Elle posa deux bises sur les joues de Marguerite et deux sur celles d’André.

    — Impeccable, dit Marguerite, le train est parti en retard mais il l’a rattrapé.

    — Il est allé vraiment vite ! dit André.

    Tous les trois, ils sortirent de la gare. Le ciel était bleu maintenant. Un nuage blanc flottait au-dessus du soleil.

    — Le bahut est là-bas, dit Giulia. Elle pointait du doigt vers un break Citroën avec des bandes rouges et bleues et Police écrit dessus.

    Giulia s’installa derrière le volant, Marguerite à côté et André à l’arrière. Au-dessus de la boîte à gants était posée une édition du tome premier du Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir.

    Sur la banquette arrière, André regarda les arbres défiler sur le bord de la route. Avec la vitesse, ils formaient une guirlande rouge et jaune, et puis la voiture tourna là où il n’y avait plus d’arbres. En face, le soleil éclairait la façade des Loges et on voyait bien les bas-reliefs des Douze travaux d’Hercule. Giulia s’arrêta au feu, au pied du château. Elle se tourna vers Marguerite.

    — Et alors, William, comment il va ?

    — Oh, il va, il va, hein André ?

    — Oui.

    — Il nous a emmenés au Train Bleu hier soir, continua Marguerite, je savais pas où me mettre.

    — Comment ça ?

    — Ben tu sais, le Train Bleu, gare de Lyon. Ce genre de resto, c’est pas trop pour moi. Trop BCBG.

    — Oui, dit Giulia, je te comprends. Moi non plus, ça me dit rien. De toute façon, avec la misère que paye la boîte, c’est pas demain la veille que j’irai ripailler là-bas.

    Elle démarra. La voiture longea le square face au château et André observa le gigantesque conifère au milieu. Sa mère lui avait dit le nom de cet arbre mais il l’avait oublié. Ce qui était certain, c’est qu’il était vieux parce que sa cime dépassait les cheminées du toit du château. André se demanda qui l’avait planté, cet arbre. Il n’eut pas le temps de s’épancher sur la question parce que Giulia le regardait dans le rétroviseur avec ses pattes au coin des yeux.

    — Qu’est-ce que tu as pris, mon grand ?

    — Un magret de canard avec des patates douces et de l’ananas confit.

    — Mmmh ! Mais c’est que tu vas me donner faim si tu continues !

    — C’est vrai que c’était bon, dit Marguerite.

    Marguerite sortit de son sac à main un foulard qu’elle enroula autour de son cou.

    — Tu veux que je mette le chauffage ? dit Giulia.

    — Surtout sur les pieds, tu sais bien.

    Giulia tourna la molette du chauffage à côté de la radio dont s’échappaient des crépitements, des bribes et plein de noms codés qu’André ne comprenait pas mais qu’il trouvait captivants. Bien sûr, ça donnait mieux en anglais mais c’était chouette quand même.

    — C’est vrai qu’il a pas fait chaud, ce week-end, dit Giulia. Hier, les collègues ont ramassé le premier picard de la saison juste là, là, derrière.

    Giulia montrait du doigt la bibliothèque Abbé-Grégoire où André allait lire des BD le samedi.

    — Un picard ? dit André.

    Giulia regarda dans le rétroviseur.

    — Eh bé oui, tu sais, mon grand, plus tard, il faudra pas que tu dormes dehors quand il fait zéro.

    André comprit et décida qu’il n’irait pas lire de BD le samedi suivant.

    Finalement, Giulia gara la voiture à un endroit où les voitures normales n’ont pas le droit de se garer. Elle sortit, Marguerite sortit, André sortit. Ils étaient devant une résidence fermée par une barrière rouge et blanche. Les immeubles en arc de cercle étaient blancs, coupés au milieu par une large bande noire. Il y avait un petit parc avec des marronniers. À l’automne, Marguerite chargeait André de ramasser les marrons. Il se piquait souvent avec les bogues mais les marrons dans des bols, ça faisait joli dans le salon. Avec les marronniers, il y avait des bouleaux et d’autres arbres aussi dont André avait oublié le nom.

    Ils passèrent la barrière et s’avancèrent vers le premier immeuble. Une mésange zinzinulait quelque part. Il aimait bien ce mot, André. Zinzinuler. Il le tenait de son grand-père, le père de sa mère, et il trouvait que ça faisait savant.

    Dans le petit hall de l’immeuble, Marguerite ouvrit la boîte aux lettres. Un grand miroir mural permettait de se coiffer une deuxième fois avant de partir pour de bon le matin. Giulia se regarda dedans.

    — J’ai mauvaise mine, dit-elle.

    Elle se tourna vers Marguerite qui tenait une lettre dont la petite figurine en haut faisait penser à la statue de la Liberté.

    — Tu trouves pas que j’ai mauvaise mine ?

    — Au contraire, je te trouve rayonnante, dit Marguerite.

    — Mais t’as vu ces valises ?

    Marguerite considéra Giulia un moment. André les considéra toutes les deux, puis il prit les clefs des mains de sa mère pour ouvrir la porte en verre qui menait à l’escalier et à l’ascenseur.

    L’appartement se trouvait au premier étage, qu’il partageait avec deux autres appartements. L’un d’eux était occupé par une petite vieille qu’on ne voyait jamais mais qui mettait des mots en bas quand elle voulait se plaindre de quelque chose.

    André tourna la clef dans la serrure et un miaulement sourd traversa la porte. Derrière, un gros chat gris avec des yeux d’or était assis sur ses pattes arrière. Quand André entra, le chat se leva, la queue dressée en l’air, pour aller se frotter contre ses jambes. Ensuite, il partit zigzaguer entre les mollets de Marguerite et de Giulia.

    Marguerite referma la porte. Giulia ôta son blouson et le posa sur la chaise Zafimaniry rapportée de Madagascar par le grand-père aux mésanges quand il n’était pas encore grand-père. Marguerite et Giulia se glissèrent dans la cuisine et André prit le chat dans ses bras. Le chat ronronnait comme une locomotive. « Alors mon gros Macar, la vie est dure, hein ? » André souleva Macar vers lui et enfouit son visage contre son ventre. Les ronronnements vibrèrent dans toute sa tête et il se sentit chez lui.

    Puis, relevant la tête, il vit une petite lumière rouge clignoter sur le téléphone du buffet. Il posa Macar sur le buffet et appuya sur un bouton.

    « C’est moi. Je voulais savoir si vous étiez bien rentrés et si Macar allait bien. Je suis très heureux d’avoir vu André, même si c’était court. Je vous embrasse. À bientôt. »

    André sourit. C’était une voix d’homme grave et douce, si profonde qu’on la sentait vibrer dans le ventre, avec un léger accent indéfinissable. André reprit Macar qui ronronnait toujours et se précipita dans le salon.

    — Maman ! Maman ! Il y a un message de p…

    Il s’arrêta au milieu de sa phrase et du salon. Sur le canapé recouvert d’un damas, Marguerite étreignait Giulia, et Giulia avait des larmes et beaucoup de rides sur le visage.

    — André, dit Marguerite, va dans ta chambre, s’il te plaît. André posa Macar sur la moquette. Il sortit du salon, repassa dans l’entrée prendre son sac et disparut dans sa chambre en passant devant le mur en face de la salle de bains. Ce mur, André l’avait jugé trop fade quand il était petit. Depuis, il y avait toujours eu de grandes figurines noires aux bras comme des bâtons. Il y avait eu des rouges aussi, mais l’encre de Chine laisse des souvenirs plus définitifs.

    La chambre d’André était adjacente à celle de sa mère. C’était commode parce que parfois, André rêvait d’un loup qui venait lui manger la main et le loup n’osait pas se montrer dans la chambre de Marguerite. C’était une petite chambre recouverte de moquette bleu foncé. Par-dessus la moquette, il y avait un tapis de petites voitures et de Playmobil, de slips et de chaussettes, lesquels appartenaient initialement aux tiroirs de l’armoire à glace et à trois portes qui touchait le plafond. Sur les murs étaient collés toutes sortes de cartes et de posters, de France mais surtout du Far West. Et il y avait une affiche en meilleur état que toutes les autres. Elle était accrochée au-dessus de la tête du lit sans oreiller. Elle était blanche, rouge et noire. Le noir venait du piano à queue qui était dessiné dessus. Sur l’affiche, on pouvait lire : Du 11 au 13 janvier 1997, 11e concours départemental de piano. Ouvert à tous les pianistes, débutants ou confirmés.

    André enjamba la banque et le bureau du shérif, posa son sac sur le lit et s’assit à côté. Il en ressortit un assez gros carton qui contenait une diligence et un coffre rempli d’or. Dans le sac se trouvait aussi un petit livre en anglais sur la couverture duquel on voyait un cow-boy avec des chaps sur les jambes. Puis, André sortit une partition toute rouge. Dessus, en gros, était écrit J.-S. Bach, Kleine Präludien und Fughetten. André laissa la diligence et le cow-boy en chaps, et il ouvrit une page.

    Assis en tailleur sur son lit, André pianotait sur ses genoux quand Marguerite frappa à la porte et passa le nez dans l’embrasure.

    — Mon p’tit cœur, Giulia nous invite à aller dîner chez elle puisqu’on n’a plus rien dans le frigo.

    André leva la tête.

    — Oh oui ! oui ! oui ! oui !

    — On y va, mais à condition que

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