L' APPRENTISSAGE A TRAVERS DES SITUATIONS-PROBLEMES MATHEMATIQUES: Bases théoriques et réalisation pratique
Par Laurent Theis et Nicole Gagnon
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À propos de ce livre électronique
Après avoir exposé les fondements théoriques à la base de leur approche les auteurs présentent les neuf situations-problèmes expérimentées touchant à des notions telles que les nombres décimaux, les fractions, les pourcentages, la statistique et la géométrie. Pour chacune des situations-problèmes, les éléments nécessaires à sa réalisation sont fournis, les enjeux conceptuels sous-jacents sont décrits et les stratégies auxquelles les élèves ont eu recours sont analysées. Les différents aspects de la gestion didactique de l’activité sont également abordés. Rédigés sous forme de dialogues entre le chercheur et l’enseignante, ces chapitres traitent de sujets comme l’aide à fournir aux élèves aux prises avec un blocage, la fonction des retours collectifs pour l’apprentissage ou encore la prise en compte des élèves en difficulté dans la classe. Si les auteurs ne prétendent pas fournir une recette miracle, la gestion d’une classe étant trop complexe pour pouvoir être résumée en quelques principes qui fonctionnent en tout temps, leur ouvrage contient toutefois des pistes de réflexion fort utiles et éclairantes.
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L' APPRENTISSAGE A TRAVERS DES SITUATIONS-PROBLEMES MATHEMATIQUES - Laurent Theis
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Introduction
LES SITUATIONS-PROBLÈMES AU CENTRE DE NOTRE APPROCHE
Quel lien pouvons-nous établir entre la recherche en didactique des mathématiques et le savoir expérientiel développé par des enseignants d’expérience ? C’est la question centrale à laquelle nous tenterons de répondre dans cet ouvrage.
D’un côté, la didactique, telle qu’elle est décrite dans la recherche, propose des outils qui permettent d’analyser ce qui se passe lors de l’apprentissage ou lors de l’enseignement des mathématiques. En revanche, cette didactique ne donne que peu d’informations sur les actions à entreprendre pour faire avancer l’apprentissage des élèves. Dans un certain sens, la didactique est très analytique, mais très peu prescriptive. Cependant, cela ne veut pas dire que la didactique n’est pas utile pour l’enseignant. Afin que celui-ci puisse intervenir de manière adéquate, il doit comprendre comment l’élève apprend les mathématiques et avoir à sa disposition des outils qui lui permettent d’analyser ce qui se passe en classe. Le rôle de la didactique est donc essentiel, même si elle ne donne pas nécessairement de « recettes » sur la façon de procéder en classe. Selon nous, la didactique fournit à l’enseignant les outils d’analyse sur lesquels il peut se baser pour guider sa pratique.
D’un autre côté, cette didactique n’apporte pas nécessairement de réponses quant à la gestion didactique de l’activité mathématique de l’élève en classe. Ce savoir-faire, développé par les enseignants à travers leur expérience au fil des ans, reste ainsi souvent à un niveau implicite et est peu accessible aux autres enseignants. Or, nous sommes convaincu que cette expertise développée par les enseignants peut aider d’autres enseignants à développer leurs pratiques.
Dans cet ouvrage, nous faisons le pari de tenter de concilier ces deux points de vue, celui de la recherche et celui de la pratique, autour de la thématique de la résolution de situations-problèmes en mathématiques. Cette thématique nous semble centrale pour l’apprentissage des mathématiques, puisque résoudre des situations-problèmes est au cœur de l’activité faire des mathématiques. Le présent ouvrage est le fruit d’une longue collaboration entre un chercheur en didactique des mathématiques dont les travaux s’intéressent aux situations-problèmes mathématiques et une enseignante du primaire, qui a, depuis de nombreuses années, développé un grand intérêt et une expertise dans la conception et la gestion de situations-problèmes en mathématiques.
Cette collaboration s’est concrétisée au sein de l’école primaire alternative et publique L’Écollectif de Sherbrooke. Le projet éducatif de l’Écollectif est particulier en ce sens que les enseignants y mettent en pratique depuis de nombreuses années une approche centrée sur les projets et axée sur le développement de l’autonomie des élèves du primaire. Au fil des années, et bien avant l’introduction des programmes par compétences au Québec, les enseignants des différents cycles, et particulièrement Nicole Gagnon, y ont développé un enseignement des mathématiques centré sur des situations-problèmes mathématiques, complexes et signifiantes. C’est cette longue expérience dans la mise en place d’une telle approche qui fait de cette école un milieu particulièrement intéressant pour tenter de décrire l’expertise enseignante qui s’y est développée. En même temps, le caractère alternatif de cette école ne devrait pas être compris comme un obstacle pour une utilisation plus large des situations-problèmes que nous y avons expérimentées. D’une part, les caractéristiques des élèves qui fréquentent cette école sont similaires à celles d’autres écoles, que ce soit au regard du nombre d’élèves considérés en difficulté ou du milieu socioéconomique des parents. D’autre part, la présence de classes regroupant des élèves de deux années différentes, généralisée dans cette école, est de plus en plus observée dans d’autres écoles primaires. Finalement, même si l’expérimentation de nos activités s’est déroulée dans un contexte d’une approche centrée sur les projets, elle pourrait tout aussi bien s’insérer dans d’autres types de projets pédagogiques. Nous pensons donc que les activités de mathématiques que nous décrirons dans ce livre pourraient être utilisées telles quelles ou avec un certain nombre de modifications, dans n’importe quelle autre école primaire.
Les chapitres de ce livre sont articulés autour de trois thématiques bien différentes. D’abord, l’introduction vise à situer le concept de situation-problème tel que nous l’entendons et à décrire les principes qui sont à la base de notre collaboration. Ensuite, nous décrirons les situations-problèmes sur lesquelles nous avons travaillé en classe avec les élèves de 3e cycle du primaire (5e et 6e année). Chacune des situations-problèmes propose une description du déroulement, une analyse des concepts qui sont abordés à travers la situation-problème et des obstacles que les élèves doivent surmonter ainsi qu’une analyse des stratégies auxquelles ont eu recours les élèves lors de l’expérimentation. Finalement, une série de sections, intercalée entre les descriptions des situations-problèmes, vise à croiser les regards théorique et pratique posés sur différentes thématiques en lien avec la gestion didactique des activités en classe. Ces sections sont présentées sous forme de dialogue. Ainsi, les particularités des discours pratiques et théoriques restent intactes et deux points de vue différents éclairent une même question.
Il importe enfin de noter qu’à travers cet ouvrage nous ne tentons pas de montrer comment il faut enseigner les mathématiques au primaire. Même si les situations que nous soumettons peuvent être reprises par d’autres enseignants dans leur classe, notre propos est plutôt analytique et ne vise pas à prescrire certaines pratiques en particulier. Nous espérons cependant pouvoir faire avancer la réflexion du lecteur sur ses propres pratiques à travers la présentation de points de vue différents, mais complémentaires.
1 QUELQUES ÉLÉMENTS DE CONTEXTE
Avec le renouveau pédagogique qui a cours au Québec en enseignement primaire depuis 2000, la résolution de problèmes ou de situations-problèmes est devenue un pivot de l’enseignement des mathématiques. Ainsi, les programmes de formation du primaire (MEQ, 2001) mettent le développement de la compétence « résoudre une situation-problème mathématique » au centre de l’enseignement des mathématiques.
Pour le MEQ (2001), une « situation-problème [en mathématiques] se caractérise par le fait qu’il y a un but à atteindre, une tâche à réaliser ou une solution à trouver » (p. 126). Par ailleurs, cette solution « ne saurait être atteinte d’emblée, car il ne s’agit pas d’un exercice d’application. Sa quête suppose, au contraire, raisonnement, recherche et mise en place de stratégies mobilisant des connaissances » (ibid., p. 126). La résolution de problèmes assume alors un double rôle à l’intérieur du programme de formation : moyen pédagogique, d’un côté, et compétence à développer de l’autre. « Le traitement de situations-problèmes est omniprésent dans les activités mathématiques. En tant que processus, la résolution de situations-problèmes constitue un objet d’apprentissage en soi. En tant que modalité pédagogique, elle soutient la grande majorité des démarches d’apprentissage en mathématique » (ibid., p. 124).
Dans la littérature scientifique, il n’y a pas de définition univoque de ce qu’est un « problème » ou une « situation-problème ». Ainsi, pour Nesher, Hershkovitz et Novotna (2003), la résolution de problèmes est un terme générique plutôt vague qui englobe plusieurs approches théoriques différentes. Il en va de même pour Francisco et Maher (2005), qui relèvent que la résolution de problèmes a été associée à diverses significations, qui reflètent des points de vue différents sur les mathématiques et l’apprentissage des mathématiques.
Pour notre part, nous nous appuyons sur la définition d’Astolfi (1993), utilisée largement dans la communauté didactique. Cette définition, que nous allons expliciter dans les prochains paragraphes en donnant un exemple de situation-problème, présente un certain nombre de ressemblances, mais également des différences importantes, avec les définitions actuellement utilisées dans les documents ministériels québécois.
1.1. En exemple pour illustrer ce que nous entendons par situation-problème
Afin d’illustrer certaines caractéristiques des situations-problèmes que nous proposons dans cet ouvrage, nous aurons recours à la consigne de la situation de la fonte des glaciers, présentée de manière plus détaillée à la page 109 et destinée, comme les autres situations-problèmes décrites dans cet ouvrage, à des élèves du troisième cycle du primaire.
EXEMPLE DE CONSIGNE DE DÉPART
Voici une image satellite de la calotte glaciaire au-dessus de l’Arctique. La ligne bleue représente l’étendue de la calotte glaciaire en 2003. La surface blanche constitue la prévision de climatologues de l’étendue de la calotte glaciaire en 2020. Quelle est l’étendue de la calotte glaciaire prévue en 2020 par rapport à aujourd’hui (2003) ?
Quelles sont les caractéristiques d’une situation-problème comme celle-ci et comment sont actualisés les critères d’Astolfi (1993) dans cette tâche ?
1.2. Un rôle central dans l’enseignement et l’apprentissage des mathématiques
Tout d’abord, au niveau de la fonction de la situation-problème, elle joue pour Astolfi (1993) un rôle central dans l’enseignement mathématique.
Dans les cas des situations-problèmes […], le problème devient le moyen même de l’apprentissage, puisque c’est autour de lui que va se nouer le dispositif didactique. Le problème est ici la source, le lieu et le critère de l’élaboration du savoir. C’est lui qui va permettre l’engagement de l’élève dans une résolution et qui va catalyser la genèse des instruments intellectuels, dont la construction se révélera nécessaire, chemin faisant (ibid., p. 313).
Outre la place occupée par les situations-problèmes en enseignement, la fonction décrite ici a d’autres implications importantes, puisque la situation-problème y est considérée comme une source, un lieu et un critère d’élaboration d’un savoir. Pour Antoine (1999), le critère de la construction des savoirs est d’ailleurs un des éléments clés qui distinguent la situation-problème du problème d’application. « [La situation-problème est] un problème dont l’objectif est à l’opposé de celui du problème d’application, puisqu’il ne s’agit plus d’exercer et de renforcer les connaissances existantes, mais bien de découvrir le savoir à partir du problème, de lui donner du sens » (ibid., p. 102).
1.3. Franchissement d’un obstacle conceptuel
Dans ce sens, un autre élément important concerne la nature de l’obstacle à franchir dans une situation-problème. Si les documents ministériels québécois ne donnent pas nécessairement d’indication quant à la nature de cet obstacle, Astolfi (1993) précise la place centrale qu’occupe l’obstacle et sa nature. « Une situation-problème est organisée autour du franchissement d’un obstacle par la classe, obstacle préalablement identifié » (p. 319). L’obstacle à franchir dans la situation-problème ne relève, par conséquent, pas du hasard, mais de la situation qui a été construite expressément pour permettre son franchissement par l’élève. L’obstacle est également clairement identifié par Astolfi (1993) comme étant de nature conceptuelle. « La situation-problème se justifie par le fait que des obstacles à la connaissance se présentent pour les élèves, qui les empêchent de saisir immédiatement ce qu’on se propose de leur faire acquérir » (p. 318). Pour qu’il y ait situation-problème au sens d’Astolfi (1993), il devient donc nécessaire que l’obstacle à franchir soit de nature conceptuelle. Dans ce sens, chacune des situations-problèmes que nous allons décrire dans cet ouvrage est centrée autour d’un concept mathématique particulier. La situation-problème n’est alors pas une fin en soi, mais un prétexte qui permet de travailler sur des concepts mathématiques bien identifiés.
Nous pouvons donc retrouver dans la construction du savoir une différence importante avec la définition du MEQ (2001), qui, comme nous l’avons vu un peu plus tôt, met l’accent sur le « raisonnement, [la] recherche et [la] mise en place de stratégies mobilisant des connaissances » (p. 126 ; nous soulignons). Cette différence nous apparaît fondamentale : dans les définitions utilisées en didactique, c’est le savoir même qui est construit à travers la résolution d’une situation-problème tandis que dans les documents ministériels, ce savoir n’y est pas construit, mais seulement réinvesti et mobilisé. Lors de notre travail en classe, c’est la première fonction du problème, centrée autour de la construction d’un savoir, qui est au cœur de nos actions.
Dans le cas de la situation de la calotte glaciaire, le savoir à construire se situe essentiellement à deux niveaux. Comme il faut calculer l’aire de deux figures irrégulières, les élèves doivent trouver un moyen de calculer cette surface, alors qu’aucun algorithme qu’ils connaissent ne permet de le faire directement. Par ailleurs, ils doivent trouver une façon d’exprimer la différence qu’ils obtiennent entre les deux surfaces sous forme d’un rapport, d’une fraction ou d’un pourcentage. Voilà les savoirs qu’il s’agit de construire dans cette situation, et qui constituent en même temps des obstacles à franchir.
1.4. Des situations-problèmes situées en début de séquence d’apprentissage
La posture voulant que les situations-problèmes servent à construire des savoirs a des implications importantes sur la place qu’occupent les situations-problèmes dans une séquence d’enseignement. Si nous considérons que le savoir se construit à l’intérieur d’une situation-problème, il devient important que la situation-problème se situe au début d’une séquence d’apprentissage d’un concept (Antoine, 1999). En effet, dans une approche, où l’on présenterait d’abord les contenus à apprendre, qui seraient ensuite réinvestis dans le cadre d’une situation-problème, la fonction du problème changerait considérablement, puisque ce ne serait plus le lieu où se construit le savoir.
Pour la situation des glaciers, cela signifie qu’elle est travaillée par les élèves sans que nous ayons présenté auparavant les différents contenus mathématiques qu’il faut élaborer dans la situation. Nous ne travaillons pas préalablement, dans d’autres tâches, sur des manières qui permettraient de calculer des aires de figures irrégulières, et il n’y a pas de travail fait au préalable sur les rapports ou les pourcentages. Comme le mentionne Astolfi (1993), les élèves ne disposent pas, au départ, de tous les moyens et de toutes les connaissances nécessaires pour résoudre la situation-problème. C’est à travers la situation-problème des glaciers que se construisent ces connaissances. Cela ne veut cependant pas dire que, dans la classe, il n’y a aucune tâche d’application qui est proposée aux élèves. La différence touche le moment où sont présentées ces situations : elles n’apparaissent qu’une fois que les élèves ont eu l’occasion de démarrer la construction des connaissances visées dans des situations-problèmes¹.
1.5. Des situations-problèmes contextualisées
La contextualisation est un autre critère d’une situation-problème pour Astolfi (1993, p. 319). « L’étude s’organise autour d’une situation à caractère concret, qui permette effectivement à l’élève de formuler hypothèses et conjectures. » Dans la situation des glaciers, ce contexte provient d’un article de journal qui nous a permis de développer la situation-problème. Pour d’autres activités réalisées en classe, nous tentons d’insérer les situations-problèmes dans un contexte relié soit à la vie de la classe, au quotidien ou aux intérêts des élèves. Dans tous les cas, nous tentons d’avoir des contextes les plus authentiques possibles, notamment pour minimiser les risques qu’apparaissent certains effets reliés au contexte et que nous allons décrire plus en détail à la page 166.
1.6. Des situations-problèmes accessibles au départ
Une autre caractéristique de notre situation est que, d’une part, il est assez facile au départ d’envisager quelle forme prendra la réponse finale. Lorsque nous proposons la situation de la fonte de la calotte glaciaire à des élèves du primaire, ils se rendent généralement compte assez rapidement qu’il est nécessaire de trouver une réponse sous forme de fraction ou de pourcentage et d’envisager les premières stratégies qui permettront l’exploration du problème. En même temps, les concepts qu’elle contient sont suffisamment complexes pour qu’ils posent un véritable défi pour les élèves. La manière de transformer les résultats obtenus en une fraction ou un pourcentage constituent alors des défis considérables. Dans ce cadre, Astolfi (1993) souligne l’importance que la situation-problème ne soit pas perçue comme étant hors d’atteinte par les élèves et qu’en même temps elle offre une résistance suffisante pour permettre l’élaboration de nouvelles idées.
1.7. Résolution des situations-problèmes au sein de travaux d’équipe
Lors de la résolution de ces situations-problèmes en classe, les élèves fonctionnent de manière générale en équipe, afin qu’ils puissent avancer à travers les argumentations et les confrontations de points de vue. Astolfi (1993) parle, dans ce contexte, d’un « mode du débat scientifique à l’intérieur de la classe, stimulant les conflits sociocognitifs potentiels » (p. 319). Dans ce sens, le débat et les échanges sont également les modes d’intervention privilégiés lors des différents moments de travail collectif. Lors du retour sur le processus de résolution à la toute fin du travail sur la situation-problème, ce sont plutôt les concepts travaillés dans la situation ainsi que les stratégies utilisées pour résoudre la situation-problème qui sont abordés. Dans le cas de la situation-problème sur la fonte des glaciers, ce sont les concepts centraux travaillés dans l’activité, à savoir le calcul de l’aire d’une surface irrégulière et les pourcentages, qui ont été évoqués lors de ces retours en grand groupe. Ces aspects de la gestion des situations-problèmes en classe seront traités plus en détail à la page 34.
1.8. Apport de la structure de la situation-problème pour la validation
Un dernier critère d’Astolfi (1993), plus difficile à mettre en place celui-là, concerne le soutien qu’offre la structure du problème pour la validation des différentes stratégies. Selon Astolfi (1993, p. 319), « la validation de la solution et sa sanction n’est pas apportée de façon externe par l’enseignant, mais résulte du mode de structuration de la situation elle-même ». De quelle manière peut alors concrètement se faire cette validation ? Tout d’abord, dans la situation-problème sur la fonte des glaciers, la comparaison des résultats obtenus par les différentes équipes à la suite du travail de compilation des aires peut être une façon de valider les réponses. Bien sûr, cette validation est plutôt pragmatique, puisqu’il est toujours possible que toutes les équipes se soient trompées dans leur travail. Par ailleurs, la confrontation des résultats obtenus à la tâche initiale peut également contribuer à leur validation. Comme nous le verrons dans la description de cette situation-problème, à partir de la page 109, certains élèves se servent des périmètres des deux figures pour conclure sur l’aire. Cependant, comme les deux périmètres ont des longueurs presque égales, c’est la structure même de la situation qui permet la validation : les deux périmètres étant presque identiques, les résultats obtenus par cette stratégie indiqueraient que la calotte glaciaire n’a presque pas diminué. Or, en confrontant ces résultats à l’image initiale, nous voyons bien que ce résultat ne peut pas être correct.
La structuration de l’activité afin de donner cette rétroaction n’est cependant pas facile et n’est pas contenue dans toutes les situations. Dans les tâches statistiques par exemple, il s’agit souvent de déterminer quel outil, parmi plusieurs disponibles, est le plus adapté pour répondre à la question posée. Toutefois, il n’y a pas de réponse définitive et unique à cette interrogation, et c’est par le débat et l’argumentation qu’est alors tranchée la validation du choix d’un outil.
2 MÉTHODOLOGIE EMPLOYÉE
Avant de procéder à la description des différentes situations-problèmes proposées aux élèves, il convient de décrire succinctement la méthodologie que nous avons utilisée pour l’élaboration et l’expérimentation des situations-problèmes, pour l’analyse des stratégies des élèves et pour le travail sur les chapitres reliés à la gestion didactique des situations-problèmes en classe.
Au départ, il convient de signaler qu’il n’existe pas de « recette infaillible » pour l’élaboration d’une situation-problème riche et adaptée aux besoins des élèves. En revanche, nous espérons, en dégageant les principes sous-jacents à notre démarche, rendre explicites les leviers sur lesquels nous avons tenté d’agir afin de maximiser le potentiel de nos situations-problèmes.
2.1. Des points de départ différents pour l’élaboration des situations-problèmes
Les points de départ à partir desquels les situations présentées dans cet ouvrage ont été élaborées diffèrent largement. D’un côté, bon nombre de situations avaient déjà été utilisées dans la classe de Nicole Gagnon avant notre collaboration intensive et ont seulement fait l’objet de quelques ajustements. D’autres situations ont été développées spécialement pour ce projet. D’un autre côté, nous avons constaté que nous avons utilisé plusieurs points de départ différents dans l’élaboration des situations-problèmes. Pour certaines d’entre elles, nous sommes partis d’un concept puis nous avons essayé de construire une situation-problème autour de ce dernier. C’est le cas de la situation-problème 5 sur les fractions. Pour d’autres, c’est un contexte ou une thématique sur laquelle les enfants travaillaient en classe qui a été le point de départ de la situation. Notre travail consistait alors à identifier, à l’intérieur de ce contexte, une situation potentiellement riche en apprentissages mathématiques. Ce fut d’ailleurs le cas pour la situation-problème sur le calcul des taxes. Finalement, pour certaines activités, comme celle sur la fonte des glaciers, c’est un article dans un quotidien qui a constitué le point de départ pour le développement de la situation-problème.
2.2. Une mise en forme de la situation-problème qui favorise le travail sur le concept identifié
Après avoir repéré un concept à travailler avec les élèves et un contexte dans lequel nous pouvions le traiter, nos discussions tournaient essentiellement autour d’une analyse des concepts à explorer dans la situation. De façon générale, les questions abordées étaient les suivantes : Quelles mathématiques sont présentes dans cette situation ? Quels sont les difficultés et les obstacles que