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La vie ne dure jamais un soir
La vie ne dure jamais un soir
La vie ne dure jamais un soir
Livre électronique364 pages6 heures

La vie ne dure jamais un soir

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À propos de ce livre électronique

"C'était l'heure où le soleil se couche, l'asphalte était encore brûlant. Dans la rue Castaldo, pas très loin de la gare, trois jeunes filles au visage ingrat discutaient et ricanaient en se tenant par la main..."
Cristina rêve de sa première rencontre avec son mari qui a eu lieu quinze ans auparavant. Ce qui devait être un mariage heureux s'est vite révélé n'être qu'une immense duperie truffée de mensonges et Cristina, grâce à un habile stratagème, mettra à jour les agissements de son mari. L'amour entre Roberto et Elena est l'autre face de la même médaille : leur différence d'âge et la passion qui alimente leurs rapports servent de toile de fond à leur union qui flirte avec la déraison.
Dans les méandres d'un scénario constellé de grandes histoires d'amour, de trahisons et de passions fugitives, va naître une intrigue policière internationale très complexe, avec son lot de coups de théâtre, qui obligera les protagonistes à s'inventer une nouvelle vie et à chercher un refuge temporaire de l'autre côté de l'océan.
Cristina et Elena réussiront-elles à réaliser leurs rêves et à trouver le véritable bonheur ?   

LangueFrançais
ÉditeurBadPress
Date de sortie16 juil. 2016
ISBN9781507132333
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    Aperçu du livre

    La vie ne dure jamais un soir - Maria Calabria

    Maria Calabria

    La vie ne dure jamais un soir

    Publié en Italie par

    Lettere Animate Editore

    ––––––––

    Traduit en Français par Eric Trigance

    A ma mère,

    dont l’importance à mes yeux

    éclipse tout le reste.

    Chapitre 1

    C'était l'heure où le soleil se couche, l'asphalte était encore brûlant. Dans la rue Castaldo, pas très loin de la gare, trois jeunes filles au visage ingrat discutaient et ricanaient en se tenant par la main. L'air chaud de la journée déclinante avait laissé en elles une étrange nervosité, un désir inassouvi d'aventure. Un jeune homme traversa la rue. Les trois amies le regardèrent avec curiosité : elles auraient bien aimé l'arrêter, se faire courtiser, mais c'était déjà trop tard.

    ... Driiing...

    Elle ouvrit les yeux tout doucement. Avec des gestes automatiques, elle allongea un bras pour arrêter la sonnerie. Elle se tourna sur le flanc gauche, regarda son mari qui émit un gémissement qui ressemblait à quelque chose situé entre un bâillement et un bonjour.

    – J'ai rêvé de notre première rencontre, chuchota-t-elle en s'asseyant sur le rebord du lit.

    Marco balbutia quelque chose puis se tourna pour se rendormir.

    Cristina secoua la tête et soupira.

    Il était six heures : c'était un des rares matins où elle n'avait pas anticipé la sonnerie du réveil. Avec des gestes mécaniques, elle se prépara un café et ouvrit les stores :

    Un autre jour pour la marmotte, pensa-t-elle en s'écartant des vitres.

    Elle vit par terre le livre de poésie que lui avait offert son mari pour Noël :

    – Nocturnes, murmura-t-elle en lisant le titre et elle ressentit en un éclair le bonheur de cet instant quand, après avoir déchiré le papier-cadeau, elle avait regardé son mari d'un air stupéfait, ne réussissant qu'à dire :

    – Mais comment as-tu fait, il n'est pas encore imprimé !

    Il lui avait fait un clin d'œil et avait dit avec un air de fausse modestie :

    – Ben, tu sais, j'ai écrit quelques mails à un ami cher qui accessoirement est aussi l'amie de la poétesse et...

    Elle lui avait sauté au cou, l'obligeant à reculer jusqu'au divan.

    D'une main tremblante elle feuilleta quelques pages, et relut quelques vers : La vie fouille dans nos sillons les plus profonds Puis l'amour vous plante des arbres magnifiques, sans y trouver le moindre réconfort.

    Déçue devant ces mots que, dans un autre temps, elle avait adorés lire, elle remit le livre sur le placard le plus haut, là où d'habitude elle disposait les objets qu'elle ne voulait pas que les enfants attrapent. Elle alluma son ordinateur et se dirigea vers la salle de bain. Dans le couloir, sur un des murs, elle remarqua une tâche plus sombre :

    – Pourvu que ce ne soit pas une fuite d'eau ! espéra-t-elle, puis elle rassembla ses idées et dressa la liste des choses à faire : appeler le plombier, repasser un coup de peinture blanche.

    Le réveil était un des rares moments qu'elle avait à sa disposition rien que pour elle avant que le tourbillon habituel de la journée ne l'entraîne : les enfants avaient encore une heure à dormir avant le branle-bas de combat. Pour elle, un bon café bien chaud devant la grande baie vitrée de la cuisine qu'elle aimait tant, les nouvelles à lire et sa liste habituelle de choses à faire sans aucune pause pour souffler. Désormais elle avait besoin de plonger à bras le corps dans ces occupations pour éviter de penser. Se remémorer chaque chose la détruisait à petit feu et ça, elle ne pouvait pas se le permettre, au moins pour les enfants.

    Elle se pesa comme tous les matins avant de s'habiller. Elle repensa à son rêve et se dit :

    – J'ai même perdu la paix dans mon sommeil.

    Elle termina de s'habiller et put enfin se consacrer à sa routine journalière.

    – Allez Giulio, tu déjeunes et puis on file vite à l'école. Pendant ce temps je m'occupe de ton petit frère, d'accord ? Ce soir nous allons chez mamie et papy, vous allez rester quelques jours avec eux.

    – Toi, tu ne restes pas avec nous ? demanda son fils, perplexe.

    – Non, j'ai trouvé un travail, je commence lundi, je viendrai vous retrouver à la fin de la semaine, c'est un arrangement temporaire jusqu'à ce que je puisse m'organiser, dès que ce sera possible je viendrai vous récupérer.

    Sur le long meuble rouge du séjour, elle récupéra les vêtements pliés avec soin la veille au soir et prêts à être portés pour le plus petit, à côté de la pile pour l'aîné. Sur le siège, son sac et sa veste. Elle suivit scrupuleusement l'ordre dans lequel elle les avait posés.

    Pendant qu'elle terminait d'habiller Giulio, elle sentit derrière elle Marco entrer dans la pièce.

    – Bonjour, lui dit-elle sans se retourner, le café est chaud et les brioches sont dans le four, je viens juste d'éteindre... J'y vais.

    Giulio la regarda confus et surpris, mais elle ne parut pas s'en apercevoir.

    Elle monta dans sa voiture, ferma les yeux un court instant dans le but d'apaiser l'imperceptible tremblement qui l'avait envahie, parcourut d'un regard mélancolique les fenêtres de sa maison, mit le moteur en marche et partit.

    – Bonjour madame Marotti, cela faisait un moment que je ne vous avais pas vue, comment allez-vous ? demanda la maitresse.

    Cristina désigna le petit Francesco :

    – Je vais bien,  je suis très occupée.

    Après avoir pris congé avec le berceau coincé comme un sac sur son avant-bras, elle franchit la porte de l'école. Elle avait hâte d'être seule ou tout au moins avec le petit Francesco qui, à huit mois, ignorait ce que sa maman allait faire ensuite. Elle sentit soudain une main venir se poser chaleureusement sur son épaule droite.

    – Coucou ma chérie ! Comment vas-tu ? Quelle belle plante, toujours en train de courir, en forme et pleine d'énergie ! Je suis vraiment heureuse de te voir, nous pensions toutes à toi, on ne t'a pas vue depuis...

    Cristina sourit à la femme qui se tenait devant elle et ne lui laissa pas le temps de terminer sa phrase :

    – Adèle, quel plaisir de te revoir, ça fait des siècles, en effet. Le fait est que cette année Giulio prend le car scolaire et donc, à moins que tu ne viennes du côté de chez moi, ce sera difficile dorénavant de nous rencontrer à Cormons. Ce matin, c'est un cas exceptionnel, je devais sortir pour faire les courses et donc je l'ai accompagné. Faisons comme ça, écoute, je t'appelle la semaine prochaine et nous prendrons un café ensemble, ok ?

    Adèle acquiesça en l'enlaçant. Les deux femmes se saluèrent avec la promesse de s'appeler bientôt et Cristina s'éloigna avec l'intention de n'en rien faire. Elle remonta en voiture, ferma la porte et laissa se déverser les pensées qu'elle avait retenues jusqu'à présent.

    – Espèce de salaud, enfoiré, comment as-tu pu me faire ça ? Je te hais, je te hais !

    Elle conduisit un moment puis tourna à gauche pour s'arrêter sur un parking devant un bar. Elle se ressaisit et, réendossant son masque de normalité sur son visage, elle se dirigea vers le fond de la salle, le plus loin possible des personnes présentes.

    Elle installa Francesco qui maintenant dormait, commanda un café macchiato, sortit deux enveloppes blanches de son sac et les disposa avec soin sur la table et, quand son café lui fut servi, elle commença le rituel qui durait maintenant depuis quasiment un mois. Elle commença à lire :

    De loin, même si cela doit me faire souffrir, je regarderai quel visage a la femme qui, pendant dix ans, t'a fait rêver et qui, après tant d'années, après tout ce que nous avons enduré ces derniers temps, est capable en l’espace de quelques mails, de mettre de nouveau en péril notre mariage.

    Pour toi, penser à cette nana que tu t'es tapée dans mon dos relève de ton insouciance de jeunesse ! Quelle vision différente avons-nous de l'insouciance : la mienne, que tu dois juger stupide, est toujours liée au souvenir des moments passés ensemble, à nos fiançailles, au fait de dormir contre toi lorsqu'il faisait froid ; à boire un café le matin, assise sur l'accoudoir du divan pendant que tu sommeillais encore à moitié allongé et discuter de l'avenir de nos fils...

    Jusqu'à aujourd'hui, tu as toujours été mon seul et unique amour, et puis tu deviendras cette douleur qui, de temps en temps reviendra, comme tout ce qui est source d'enseignement. Cette douleur, elle reviendra pour me rappeler de ne plus t'aimer parce que tu ne le mérites plus ; elle me rappellera de ne pas éprouver de nostalgie à table en regardant cette place vide à côté de moi parce que lorsque je croyais qu'elle était occupée, en fait elle était déjà vide.

    Je voudrais te faire souffrir du même mal, mais je sais que ce ne sera pas possible de ma part. Je souhaite longue vie à tes amours, qu'ils puissent te rendre la monnaie de ta pièce avec cet argent que je ne possède pas.

    Cristina.

    Cristina soupira et but la dernière goutte de café salée par ses larmes, puis elle sortit une feuille de la seconde enveloppe mais ne parvint pas à relire les mails : cela lui faisait trop mal. Elle referma les enveloppes et les remit dans son sac.

    Quand elle avait avoué à son mari que ces mails, c'est elle qui les lui avait écrits pour le mettre à l'épreuve, il n'avait manifesté aucune réaction tandis qu'elle pleurait de façon hystérique avant de finir par en bégayer et en rester sans force.

    – C'est entièrement de ta faute, tu as décidé de te faire du mal, si tu n'avais pas écrit ça en te faisant passer pour une autre, tu ne serais pas là, maintenant, en train de te tourmenter et de me tourmenter également, moi je n'aurais jamais repensé à elle, je l'avais supprimée de ma mémoire !

    – Mais tu... tu as répondu d'un compte secret, d'une adresse mail que tu avais pris la peine de lui communiquer après vos dernières escapades pour pouvoir lui écrire dans mon dos, moi, la pauvre crétine ! Et elle, de toute façon, elle aurait bien fini par te chercher et tu te serais précipité dès qu'elle se serait offerte sur un plateau d'argent !

    Marco, qui avait une drôle de lueur dans le regard, peut-être de la rage pour avoir été découvert, peut-être de la déception car rien de ce qu'il avait fantasmé les derniers jours ne se réaliserait vu que la Sara qui lui avait écrit n'était personne d'autre que sa femme, Marco donc avait continué :

    – Si ! Si ! Si ! J'ignore si j'aurais vraiment conclu ! J'ai répondu sur le coup, sans réfléchir, par jeu !

    – Par jeu, non mais je rêve là ! Si tu veux je te relis mot par mot, regarde, j'ai tout imprimé en ordre chronologique, trois jours, seulement trois jours ! Et je n'ai même pas eu besoin d'insister la seconde fois pour te convaincre ! Tu ne changeras jamais, je te hais...

    Elle avait pris le petit Francesco dans ses bras.

    – Je ne peux pas imaginer ce que tu as fait d'autre au cours de toutes les années où tu as vécu loin de moi, si par le plus grand des hasards il n'y a pas d'autres... saloperies. Qu'y-a-t-il encore que j'ignore ? Combien de frasques ? Une ? Deux ? Trois peut-être parce que tu te sentais seul ? Je les aurais comprises, pardonnées, mais tu as complètement ignoré le fait que tu t'étais engagé vis à vis de moi et tu as sauté sur tout ce bougeait, et dans ma ville en plus ! Tu pouvais faire tranquillement tout ce que tu voulais là où tu vivais : pourquoi m'humilier ainsi ? Me tromper avec des femmes que je connaissais, avec lesquelles tu plaisantais même lorsque j'étais là... Comment as-tu pu ? Combien de squelettes caches-tu encore dans ton placard ?

    Marco avait continué à ne pas répondre.

    – Et toi... Tu ne dis rien ? Arrogant et narquois, tu n'as pas le plus petit remord pour m'avoir fait ce que tu m'as fait, tu n’es qu’un sale connard...

    Cristina s'était dirigée dans la chambre à coucher et avait commencé à sortir ses habits des placards. Seulement alors Marco s'était décidé à parler :

    – Que veux-tu que je te dise ? J'ai commis des erreurs, d'accord, mais cela ne signifie pas que je ne t'aime pas, je t'ai toujours aimé et... de toute façon, ce n'est pas facile et si tu crois que je me mets tout seul dans les emmerdements, tu te trompes, les choses que tu ne sais pas, tu ne les sauras jamais...

    À ces mots, Cristina se sentit envahie par la colère, impuissante, et consciente qu'elle ne saurait jamais la vérité :

    – Je ne veux pas passer toute mon existence avec un homme dont j'ignore toutes les salopes qu'il a baisées et tous les mensonges débités sur mon compte ! J'aurai des doutes chaque fois que tu écouteras une chanson et que tu souriras, plongé dans tes pensées... Pourquoi m'as tu fait ça ? Pourquoi ? Tu as raison, je suis une crétine, une pauvre sotte ! Moi ! Tout est de ma faute ! Je le mérite, je suis une pauvre conne !

    – Toi... toi...  répétait-elle comme en proie à la folie, toi qui après m'avoir raccompagnée et embrassée avant de me quitter, téléphonais à une autre pour aller passer la nuit dans son lit avec encore mon odeur sur les lèvres...

    Elle délirait. En un instant, elle avait ouvert le tiroir aux couverts.

    – Je vais te tuer, sale bâtard... avait-elle grogné, brandissant un couteau à bout de bras. Mais ensuite, au lieu de diriger la lame vers son mari, elle avait tenté de la retourner contre elle.

    – Arrête ça, tu es folle !!

    Marco s'était précipité sur elle dès qu'il avait compris ce qu'elle allait faire et avait balancé le couteau dans l'évier.

    – Je suis une femme sans caractère... Je suis une incapable, une ratée, je n'ai jamais rien compris, rien... se lamentait-elle, possédée par la haine et l'impuissance.

    – Cristina, je t'en prie, tu es en train de me faire mourir. Pense à tes enfants, ne fais pas ça...

    Il la serrait dans ses bras et elle se laissait aller contre lui, épuisée.

    Elle était rentrée dans sa coquille comme après un moment d’égarement. Ils s'étaient calmés tous les deux et n'avaient plus parlé de ça durant toute la journée. Elle s'était tellement contractée en se mettant dans cet état que son cou et ses épaules étaient restés bloqués.

    Cette nuit-là, elle était restée dans la cuisine, ne pouvant dormir à cause de la douleur dans son cou et à cause d'une douleur bien plus profonde qu'elle sentait palpiter à l'intérieur d'elle.

    – Ce n'est pas possible, je ne peux pas rester comme ça, j'ai deux enfants, je vais me rendre malade, j'en suis certaine, et moi, je ne veux pas laisser mes enfants, je ne veux pas...

    Le jour suivant, elle avait écrit cette lettre d'adieu qu'elle avait gardée jusqu'à maintenant. De retour du bar, après ce rituel qu'elle répétait pour la énième fois, elle prit une décision : elle allait poser cette enveloppe sur l'étagère du placard de la cuisine dans lequel Marco stockait ses boîtes de thé dont il se préparait chaque jour une tasse à dix-sept heures précises.

    – Il la trouvera... comme ça, ce sera à lui de renouer la conversation et... moi je m'en vais, je veux qu'il souffre.

    Chapitre deux

    – Qu'est-ce qui ne va pas aujourd'hui ? demanda Rita en remarquant l'air perdue de son amie, d'habitude exubérante et bruyante.

    – Rien, répondit sèchement Elena, en descendant du tabouret et en se dirigeant vers la vitrine pour arranger quelques chemises.

    – Quand on te regarde, ce doit être un rien derrière lequel se cachent beaucoup de choses, insista son amie.

    – C'est sans doute à cause du temps, essaya de se justifier Elena distraitement.

    – Ma chérie, tu es vraiment bizarre, tu es la seule femme que je connaisse à qui une belle journée flanque le bourdon !

    Elena se retourna et, après quelques secondes d'hésitation, ne put s'empêcher de se mettre à rire devant cette observation très juste de son amie.

    – Tu as raison, dit-elle, puis, retournant s'assoir un peu moins crispée, elle ajouta : j'ai vraiment choisi la pire des pires fausses excuses.

    – Il s'agit encore de ton amoureux transi, n'est-ce pas ? Qu'y-a-t'il, le prince charmant se fait encore attendre aujourd'hui ? Cet homme est pire qu'un opérateur de Vodafone, dit Rita en posant ses coudes sur le comptoir.

    – Mais non, ce n'est pas de ça qu'il s'agit. Au contraire, ces derniers temps il a été constant, il n'a pas fui et il a un étrange côté poétique qui ne lui ressemble pas.

    Elena se releva de nouveau avant de continuer, un rictus sur le visage laissant transparaître son embarras :

    – C'est justement ça qui ne va pas, il est foutrement satisfait.

    – Non, laisse-moi comprendre, tu es contrariée parce que lui joue son rôle et est satisfait  de votre relation ? demanda Rita, perplexe.

    – Oui. Comment peut-on se contenter d'une situation de ce genre ?

    – Ma chérie, il y a des hommes qui se contentent de beaucoup moins que ça !

    – Mais lui, il m'aime, je le sens.

    – Elena, dit Rita en la fixant cette fois-ci droit dans les yeux, si lui est satisfait, il y a deux possibilités : la première, tu n'es pas sur la même longueur d'onde que lui, la seconde, la situation qui pourrait se produire, c'est à dire rendre publique votre relation, pourrait vous nuire à tous les deux et il cherche à te protéger.

    Après avoir haussé les épaules, Rita continua :

    – Honnêtement, après bon nombre de relations clandestines, j'ai arrêté de croire tous ceux qui te disent qu'ils te laissent parce qu'ils t'aiment !

    Elena se sentit blessée dans son orgueil et s'emporta bien plus qu'elle n'aurait voulu :

    – Non, ce n'est pas le cas de Roberto. D'ailleurs qu'en sais-tu ? Moi, je l'aime, pour toi c'est sans doute un concept difficile à comprendre.

    – Allez, ne te fâche pas, tu sais comme je suis, non ?

    Rita tenta d'enlacer son amie mais Elena esquiva sa tentative de réconciliation.

    – J'ai la langue plus pendue que mon sens de la diplomatie, reprit-elle.

    – Ok, dit-elle d'une voix moqueuse, si tu veux bouder, vas-y, te gêne pas. Moi je vais me consoler avec un Cappuccino et une cigarette.

    – Je veux aussi du cacao sur la Chantilly, finit par céder Elena en esquissant un sourire.

    – Qu'est-ce que je dois faire avec lui ? Je lui ai toujours dit que je ne lui mettrai pas la pression et franchement je le pensais. Je croyais que ça n'aurait pas duré longtemps et au contraire...

    – Et au contraire le charme de l'homme mûr prévaut toujours, je te l'avais dit, souligna Rita.

    – Tu sais comment c'est, venant de toi, j'avoue que je n'ai jamais pris cet avertissement au sérieux. D'habitude c'est toi qui déconnes !

    – Justement, l'interrompit Rita, tu aurais dû faire confiance à une ceinture noire des embrouilles !

    Elles se mirent à rire toutes les deux. Finalement, elles fermèrent le magasin à 21 heures.

    – Je n'ai pas envie de rentrer à la maison ce soir, dit Elena pendant qu'elles se dirigeaient vers la sortie.

    Rita rouvrit la porte du magasin :

    – Dans ce cas, allons nous préparer, viens, j'ai tout ce qu'il faut dans mon sac. Nous allons aux Terrasses ?

    – Va pour les Terrasses, approuva Elena.

    Une fois attablée aux Terrasses, Elena repensa à Roberto une seule fois mais elle ne fut pas mélancolique : elle leva son verre et dans les vapeurs de l'alcool de quelqu'un qui a bu un peu plus qu'il ne faut, trinqua à sa santé en disant :

    – Rita, je lève mon verre à mon homme, car ce sera celui-là.

    Rita approuva avec un signe de la tête :

    – Trinquons à l'homme que je trouverai moi aussi très bientôt ! Je ne peux pas être aussi nulle !

    Elles rirent toutes les deux et quittèrent le bar à quatre heures du matin.

    – Qui conduit maintenant ? demanda Elena lorsqu'elles furent devant la voiture.

    Après un moment d'hésitation, elles éclatèrent toutes les deux d’un rire hystérique :

    – Toi, toi, tu es plus sobre que moi, dit Rita d'un ton décidé, moi je garde la tête à la fenêtre comme ça j’irai mieux lorsque nous arriverons à ma voiture.

    Elles montèrent toutes les deux dans la voiture et prirent une route secondaire.

    – C'est mieux de passer par là, comme ça nous éviterons de souffler dans le ballon et d'avoir un retrait de permis.

    – Mais moi je veux bien souffler dans le ballon, dit Rita d'une voix un peu pâteuse, surtout si c'est celui d'un beau carabinier !

    Elles continuèrent à rigoler.

    – C'est pas un sac que tu as, c'est une commode à trois tiroirs ! observa Elena tandis que Rita sortait en un cd de son sac à main. Peu de temps après, la musique retentit :

    When you were here before couldn't look you in the eye... chanta doucement Rita.

    – Radiohead, les meilleurs... commenta Elena.

    – Tu vois, expliqua Rita, l'homme de ma vie peut surgir à tout moment et je dois avoir tout ce qu'il faut : le maquillage pour me refaire une beauté, des sous-vêtements de rechange et... de la bonne musique au cas où la soirée prendrait un tour romantique.

    Elle sortit un préservatif d'une petite poche de son sac :

    – Ah et surtout ça !

    Elles rirent de bon cœur et reprirent le refrain à gorge déployée.

    – Qu'est-ce que c’est que ça ? murmura soudain Elena, on dirait une voiture en panne, continua-t-elle. Elle ralentit en distinguant une silhouette.

    – Ne t'arrête pas, suggéra Rita.

    – Mais c'est une nana, et elle est seule ! Ne sois pas froussarde !

    Elena se gara, laissant les phares allumés. Peu de temps après, une femme à l'aspect soigné s'approcha de la fenêtre :

    – Bonsoir. Je suis en panne et je n'arrive pas à contacter mon mari, son téléphone est éteint, je suppose qu'il est en train de dormir, vous posez me déposer à la station-service la plus proche ?

    – Bien sûr, montez ! dit Rita.

    La jeune femme soupira de soulagement :

    – Ok, j'arrive. Je prends mon sac, je ferme la voiture et je vous rejoins, merci... dit-elle en s'éloignant.

    – Que diable fait-elle toute seule à cinq heures du matin avec un mari qui dort à la maison ? demanda Rita.

    – Chut, elle arrive. Où habitez-vous ? Si c'est sur la route, je vais plutôt vous déposer chez vous. Je m'appelle Elena, elle c'est Rita.

    La nouvelle passagère sourit depuis le siège de derrière :

    – Moi je m'appelle Cristina et à l'odeur que je sens dans cette voiture j'en déduis que soit vous perdez de l'essence ou alors vous aussi vous avez arrosé vos pensées avec une bonne dose d'alcool comme je l'ai fait moi ! dit-elle d'un ton ironique.

    Sur le coup, personne ne parla puis toutes les trois éclatèrent de rire en même temps.

    – Bien, maintenant que nous nous sommes présentées comme il convient, je voudrais vous remercier pour votre gentillesse et votre sympathie en vous offrant une brioche et un cappuccino, ça vous va ? Maintenant qu'il fait pratiquement jour, autant terminer la soirée comme il se doit !

    Elena se rendit compte qu'elle avait une grande faim après cette nuit blanche et après un rapide coup d'œil à Rita, elle accepta :

    – De toute façon, je n'arriverai pas à dormir l'estomac vide, alors allons-y !

    Elle démarra et prit la direction du bar ouvert le plus proche, l’esprit bien réveillé par la présence de cette nouvelle amie. 

    Chapitre trois

    En ce dimanche matin, la maison de Cristina était silencieuse. Il ne lui fut pas difficile de se lever tard et de trainer une bonne partie de la journée en pyjama : elle n'avait aucun enfant à s'occuper. Elle mit le café en route, prit le téléphone et se dirigea vers la fenêtre :

    – Maman... Bonjour...

    Une respiration à l'autre bout du fil lui laissa deviner un peu d'hésitation.

    – Bonjour Trésor, comment vas-tu ? J'entends enfin ta voix...

    Cristina se laissa tomber sur une chaise de la cuisine.

    – Oui, je sais, j'ai pensé à t'appeler toute la journée mais, tu sais, mon nouveau travail, et puis j'ai repeint le mur du couloir en blanc...

    Cristina hésita un moment avant de continuer tandis que sa mère, à l'autre bout du fil, attendait en espérant la suite...

    – Giulio ? Il est là ? Il fait le malin ?

    Déçue par ce changement de conversation, sa mère répondit :

    – Il est au jardin avec ton père, il joue avec son vélo tout neuf. Il te réclame... Cristina, tes enfants ont besoin de toi et toi, tu as besoin d'eux, tu pourrais toi aussi être ici, avec eux, ensemble vous pourriez aller de l'avant et surmonter cette crise...

    Cristina l'interrompit brutalement :

    – Maman, arrête, je te l'ai déjà dit : je ne pourrai pas m'occuper d'eux pendant quelques semaines,  je ne peux pas demander un congé, je viens à peine de commencer et je ne veux pas faire mauvaise impression. Dès que j'ai deux jours, je viendrai... Je dois te laisser, bonne journée.

    Elle raccrocha de mauvaise humeur ; elle reprit son calme et alla éteindre sous le café. Elle ouvrit le placard où était rangé le sucre et vit que l'enveloppe posée sur l'étagère où Marco stockait ses tisanes était toujours là et ne paraissait pas avoir été ouverte. Elle la saisit, la retourna entre ses doigts et regarda les mots écrits sur le verso : Pour Marco, puis la reposa, déçue, au même endroit.

    – Il n'a même pas pris la peine d'ouvrir cette enveloppe qui porte son nom, pensa-t-elle, amère.

    La table était encore mise depuis la veille et le repas qu'elle lui avait préparé était intact dans le plat.

    – Il sera sorti lui aussi pour faire comme moi...

    Après une dizaine de minutes, elle s'aperçut qu'il y avait quelqu'un allongé sur le canapé en cuir :

    – C'est toi ? Tu m'as fait une de ces peurs !

    Marco lui sourit :

    – Excuse-moi...

    Cristina alla s'assoir à côté de lui sur le canapé.

    – J'ai eu froid toute la nuit, j'ai mal dormi, je devais avoir un peu de fièvre.

    Marco se leva et se dirigea vers la fenêtre tout en disant :

    – Peut-être est-ce parce que tu ne m'enlaces plus en dormant comme tu le faisais avant...

    Elle répondit tristement :

    – Marco... chaque matin je me réveille et je me demande où je me suis trompée, sans réussir à tirer les leçons de ce parcours que nous avons fait ensemble et que je croyais avoir fait pour ma part de la meilleure des façons possibles. Je t'ai promis de ne plus

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