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Danse de sang
Danse de sang
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Livre électronique221 pages3 heures

Danse de sang

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À propos de ce livre électronique

Un décès accidentel.
Une présence par-delà la mort.
Une cérémonie dangereuse qui tourne mal.

En cherchant des réponses, Véronique va libérer Le Dévoreur, un démon aussi ancien que le monde lui-même. Elle seule pourra mettre fin à la vague de meurtres qui s’abat sur la ville. Lorsqu’une des plus féroces abominations du panthéon vaudou s’invite dans votre quotidien, les morts s’accumulent au gré des accords d’une danse de sang… Et si, par amour, vous ouvriez les portes de l’Enfer ?
LangueFrançais
Date de sortie28 mars 2024
ISBN9782491750671
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    Aperçu du livre

    Danse de sang - Frédéric Livyns

    Frédéric Livyns

    DANSE DE SANG

    Une image contenant Police, Graphique, logo, typographie Description générée automatiquement

    Couverture : Bertrand Binois

    ISBN EBOOK : 978-2-491750-67-1

    Dépôt légal mars 2024

    © Editions Faute de frappe

    Tous droits réservés.

    1.

    Bertrand sortit de chez le photographe avec son cadre sous le bras. Un grand sourire illuminait son visage. Il imaginait déjà la tête que ferait Véronique, son épouse, lorsqu’elle verrait ce cadeau à son retour. Être marié à une reporter internationale n’était pas toujours évident, car cela impliquait de vivre parfois des semaines entières sans sa compagne. Il essayait cependant de voir le bon côté des choses. Lui n’avait jamais aimé voyager. D’une part, l’avion lui faisait terriblement peur et, d’autre part, il était du genre casanier. L’idée de quitter son petit chez-lui plusieurs jours d’affilée lui était insupportable. Véronique était, quant à elle, une véritable globetrotter. Son magazine l’envoyait aux quatre coins de la planète couvrir des reportages.

    Bertrand qualifiait d’ailleurs souvent son aimée d’oiseau migrateur. Le métier de sa femme lui permettait d’assouvir sa passion tout en ne plaçant pas son époux face à ses phobies. Tout s’arrangeait donc pour le mieux.

    Bertrand avait un job à son image : sans surprises. Il était employé dans une grande agence bancaire. Sa position, assez élevée sur l’organigramme, lui permettait de jouir d’un excellent salaire, donc de satisfaire la plupart de leurs désirs. De plus, les primes que rapportaient les voyages de son épouse fournissaient un apport financier confortable.

    Il assura sa prise sur le cadre qui glissait au gré de ses pas et se dirigea vers sa voiture, stationnée de l’autre côté de la rue. Il était pressé de voir Véronique revenir au foyer, car le temps commençait à lui sembler long.

    Depuis qu’elle était partie en Afrique pour les besoins de son magazine, il était difficile de la joindre. L’endroit où elle se trouvait était plutôt reculé, mais pas à l’écart de la civilisation, lui avait-elle certifié. Il recevait en moyenne un télégramme par semaine. Un message simple et court l’informant que tout se passait bien, dans l’unique but de le rassurer.

    Absorbé par ses pensées, il ne vit pas le feu pour piétons passer au rouge et s’engagea sur la chaussée.

    Lorsqu’il releva la tête, le véhicule arrivait sur lui à toute vitesse.

    2.

    Cela faisait maintenant cinq semaines que Véronique se trouvait au fond de l’Afrique de l’Ouest pour le compte du magazine Life Anywhere. Le sujet de son reportage portait sur l’évangélisation du peuple Dogon. Pour ce faire, elle accompagnait dans le moindre de ses déplacements le père Gonzague, un missionnaire chrétien consacrant sa vie à leur conversion. Bien évidemment, elle avait pris ses renseignements avant de se rendre sur place. Elle avait de la sorte appris que les Dogons étaient majoritairement musulmans, bien qu’il existât une minorité chrétienne, mais qu’ils avaient conservé leur culte animiste originel en parallèle.

    Elle s’était également aperçue que le tourisme tenait une place importante dans cette région d’Afrique. Cela l’avait immédiatement rassurée, car elle n’atterrirait pas dans un endroit coupé de toute civilisation.

    Les quelques appréhensions qui avaient survécu à la préparation du voyage s’étaient très vite envolées dès son arrivée. Le père Gonzague était venu personnellement la chercher à l’aéroport. Cela pouvait paraître ridicule, mais cette attention, lui permettant de prendre contact en douceur avec cette civilisation inconnue, l’avait touchée. Le père était à l’opposé de l’archétype du missionnaire chétif que Véronique s’était imaginé.

    C’était un homme abordant la cinquantaine, et bâti comme un bœuf. Tout au long de la route, il n’avait cessé de lui décrire de façon élogieuse ses ouailles. Il lui confirma que les Dogons étaient tous adeptes du culte de l’animisme, base même du vaudou. Même si certains se tournaient vers le christianisme, ils n’en continuaient pas moins de vénérer Amma, ce dieu plus ancien, et le mélangeaient même avec les principes de la religion catholique. Véronique n’en fut pas plus étonnée que cela. Elle avait déjà pu observer un métissage religieux similaire au cours d’un précédent reportage à Haïti.

    Elle fut agréablement surprise par l’accueil qui lui fut réservé par les autochtones. Elle avait craint que celui-ci soit plutôt froid, voire hostile, mais il n’en fut rien. Elle put constater que ce peuple, que le monde occidental méconnaissait profondément, démentait les préjugés le reléguant au rang de société moins évoluée. Sentence proférée sur les bases de l’ignorance.

    Les premiers jours que Véronique passa en leur compagnie furent inoubliables. Le père Gonzague l’initia aux croyances des Dogons, car il disait toujours que l’évangélisation doit se faire par le respect. L’idée même que le terme « évangéliser » éveillait en l’esprit de Véronique fut sérieusement écornée par les méthodes patientes et pleines de déférence dont l’homme faisait preuve. Il n’essayait pas de remplacer une religion par une autre, mais de les mettre en corrélation. De la sorte, le choix pouvait se faire en âme et conscience. On était bien loin des pratiques guerrières d’autrefois où la seule alternative autorisée se faisait avec une arme pointée sur la poitrine.

    Véronique découvrit une autre manière de vivre, essentiellement basée sur la nature et l’harmonie avec tout ce qui nous entoure. Elle était séduite par cette société qui, bien qu’à base de clans, était égalitaire au sein de ceux-ci. Une exception était cependant à souligner. Elle s’appelait les hossobés. Ce terme, qui signifiait banni, désignait les personnes ayant trahi la confiance ou le respect de la tribu pour une raison ou une autre.

    Elle découvrit également l’importance que revêtaient certains métiers tels que la vannerie ou le tissage, et réserva un large encart à ces aspects culturels dans son article.

    Durant la quatrième semaine de son séjour, elle eut l’honneur de pouvoir assister à la fête de l’Agguet, une cérémonie religieuse destinée à rendre hommage aux anciens de la tribu.

    Sa vie bascula au cours de la cinquième semaine. Elle reçut un télégramme de son rédacteur en chef stipulant qu’elle devait rentrer en France. Son séjour, initialement prévu pour deux mois, s’en vit largement écourté. Elle n’était pas heureuse de cette nouvelle, imposée par des aspects budgétaires supposait-elle, ce type de reportage étant en effet assez onéreux. Ce n’est qu’à la fin du message, lui enjoignant de prendre contact au plus vite avec lui, qu’elle comprit que le caractère urgent n’avait rien à voir avec des dispositions d’ordre financier.

    Elle se fit conduire par le père Gonzague au village voisin, seul endroit à des kilomètres à la ronde disposant d’un téléphone. Après plusieurs tentatives pour établir la communication, elle entendit la voix de Serge, son supérieur. L’accent français lui parut bizarre après tant de temps. Mais Véronique n’eut pas le loisir de s’attarder sur cela. L’homme tournait autour du pot, l’air embarrassé. À ce moment, elle sut que quelque chose d’important, dépassant le cadre professionnel, s’était produit. Serge était d’ordinaire quelqu’un de direct, voire brusque. L’écouter chercher ses mots de la sorte, le sentir essayer de faire preuve d’un tact dont il n’était pas coutumier, avait été suffisant pour l’inquiéter. Alors, n’étant pas rompu à d’autres pratiques que la franchise, il lui annonça de but en blanc la terrible nouvelle : son mari était décédé. La phrase résonna longtemps, vide de sens, incroyable dans son esprit. Bertrand ? Mort ? C’était impossible ! Elle avait dû mal entendre ! Elle resta quelques secondes immobile, le cornet chancelant dans sa main tremblante. Le caractère livide qu’avait revêtu son visage alerta immédiatement le père Gonzague. Il se précipita vers elle et eut juste le temps de la rattraper lorsque ses jambes se dérobèrent. Il la soutint, fit signe à un garçon observant la scène de lui apporter une chaise, et l’y installa. Il prit la communication. L’air concentré, il sortit un calepin du petit sac qu’il portait en bandoulière et commença à écrire. Véronique luttait pour conserver son équilibre et rester en position assise.

    Elle entendit, sans le comprendre l’échange verbal entre le père Gonzague et Serge. On lui donnait les directives pour le rapatriement de la journaliste. Une place lui avait été réservée sur le prochain vol, celui qui partait le lendemain matin. Serge viendrait lui-même la chercher à l’aéroport. Le prêtre lâcha, d’une voix douce qu’il voulait rassurante, ce flot d’informations.

    Véronique se contenta de hocher la tête en signe d’assentiment, incapable de prononcer un mot.

    Ce n’est que sur le chemin du retour qu’elle trouva la force de demander ce qui s’était passé. Le père Gonzague, à qui l’on n’avait expliqué les événements que de manière succincte, répéta ce qu’on lui avait dit.

    Deux policiers s’étaient présentés au siège du magazine. Ils la cherchaient. Étant donné qu’elle ne se trouvait pas à son domicile, ils s’étaient immédiatement rendus sur son lieu de travail. Après avoir constaté son absence, ils avaient demandé à Serge de faire le nécessaire pour l’informer. L’accident s’était produit le matin même. Comme chaque jour, Bertrand se rendait à son bureau. Distrait, il n’avait pas vu que le feu pour piétons était rouge et avait été percuté de plein fouet par un automobiliste surpris, qui n’avait pas eu le temps de freiner. Comme si cela était à même d’atténuer la détresse de Véronique, les policiers avaient assuré à Serge que Bertrand n’avait pas souffert, qu’il était mort sur le coup. Vous parlez d’une consolation !

    Véronique rentra au village dans un état second. Elle ne réalisait pas. Cela était-il vraiment arrivé ? Une mort aussi stupide ? Alors qu’elle se trouvait aussi loin de chez elle ? De son mari ?

    Ensuite, la réalité la rattrapa. Il fallait qu’elle prépare ses bagages, qu’elle soit présente pour régler toutes les démarches inhérentes aux funérailles !

    Juste avant son départ, le chef du village lui remit un masque kaolin traditionnel représentant un étranger. Cet objet rituel symbolisait le passage, et le deuil. Elle aidait les âmes des défunts à trouver le repos, à s’en aller vers l’au-delà. Le père Gonzague lui certifia que ce présent montrait à quel point elle était estimée par les membres de la tribu. Ils souhaitaient lui offrir ce cadeau afin d’apporter la paix à l’âme de son époux.

    Le lendemain, Véronique quitta le village sous les chants d’adieu des Dogons. Le prêtre la conduisit à l’aéroport et l’accompagna jusqu’à l’embarquement.

    3.

    Les jours qui suivirent furent horribles et Véronique les traversa comme dans un cauchemar. Elle agissait par automatisme et n’aurait rien pu assumer sans l’aide précieuse de Myriam, sa meilleure amie.

    À sa demande, ce fut elle que Serge contacta dès son retour en France. Ce fut aussi elle qui l’accompagna afin d’identifier son époux. Une épreuve terrible ! Elle se souviendrait jusqu’à la fin de ses jours de son passage à la morgue. Le pan de mur recouvert de tiroirs dans lesquels reposaient des cadavres. Il régnait dans cette pièce une atmosphère étrange. En dehors de son froid aseptisé, la salle dégageait une impression de transition… d’attente. Elle frissonnait encore à cette pensée. Dieu merci, Bertrand avait l’air de dormir ! Quand on lui avait annoncé qu’elle devait procéder à l’identification de son défunt mari, elle s’était préparée au pire. Elle s’attendait à le voir défiguré, mutilé. Mais rien de tout cela. La croyance populaire avait fait place à la froideur clinique de la réalité. Beaucoup moins spectaculaire et plus cynique. Bertrand gisait sur son lit de métal, le visage serein.

    Myriam se chargea ensuite de la quasi-totalité des démarches administratives, allant même jusqu’à veiller au bon déroulement des obsèques.

    Le jour des funérailles, l’église était remplie. Tous ses amis étaient présents. Elle recueillit les condoléances de tous et toutes, ainsi que les promesses de soutien. Mais, comme c’est souvent le cas dans ce genre de situation, elle finit par se retrouver toute seule au bout de peu de jours. Était-ce par pudeur ou gêne que les gens n’osaient plus prendre contact avec elle ? Elle ne leur en voulut pas. Après tout, elle avait également été confrontée à cela et savait à quel point il pouvait sembler délicat de s’enquérir de l’état de quelqu’un qui vient de perdre un proche.

    Seule Myriam prenait chaque jour de ses nouvelles et lui répétait sans cesse de ne pas hésiter à faire appel à elle si elle avait besoin de quoi que ce soit.

    4.

    Deux semaines s’étaient écoulées depuis l’inhumation de Bertrand. Véronique retrouvait un semblant de sommeil grâce aux puissants somnifères que son médecin de famille lui avait prescrits, sommeil nullement réparateur. Ses nuits étaient peuplées soit de cauchemars, soit de souvenirs de sa vie d’avant. Du temps où Bertrand et elle étaient heureux. Quand il n’était pas mort et où elle se sentait encore vivante. Certains jours, elle était tellement assommée par les cachets qu’elle passait des heures à errer sans but dans la maison. Elle pouvait passer des pans entiers de journée à regarder les photos et, curieusement, elle se sentait aussi proche de son mari que s’il était toujours là. Elle avait parfois peur de devenir folle. Combien de fois n’aurait-elle pas juré sentir son odeur ou sa présence dans les pièces où elle pénétrait ? Comme s’ils se croisaient dans un même décor sur deux plans existentiels différents, se devinant sans pouvoir se toucher. Son médecin avait tenté de la rassurer en lui certifiant qu’il s’agissait de l’un des effets de ses médicaments. Elle en lut ensuite la posologie et constata que le praticien avait raison. Ce fut pour elle un immense soulagement. Quelle autre explication aurait-il pu y avoir ? Bertrand était parti vers un monde meilleur et, aussi révoltante et douloureuse que soit sa mort, elle n’avait d’autre choix que de l’accepter.

    Mais cette vérité vola en éclats trois jours plus tard. Elle prenait sa douche matinale lorsque tout changea. La nuit avait été correcte. En tout cas, la meilleure depuis la tragédie. Un sommeil paisible et, surtout, pas de cauchemars. Elle laissait l’eau chaude couler sur sa peau, vidant son esprit au gré des gouttelettes, s’efforçant de ne penser à rien. Elle sursauta lorsqu’elle eut soudain l’impression de ne plus être seule dans la salle de bain. Une certitude plutôt qu’une sensation. Comme si quelqu’un se tenait à ses côtés et respirait bruyamment. Elle coupa l’eau et tendit l’oreille. Plus rien. Elle se dit alors qu’il s’agissait d’un bruit dans la tuyauterie. Elle ouvrit le rideau de douche et tendit la main pour attraper sa serviette. Il n’y avait personne.

    « Évidemment qu’il n’y a personne ! » se morigéna-t-elle. Elle devait faire attention à ne pas laisser son imagination galoper. Elle se sentait stupide. Elle rinça la cabine, chassant la mousse à grands jets d’eau axés sur le dévidoir, comme elle s’amusait à le faire étant gamine. Le bruit de respiration se produisit à nouveau pour s’interrompre dès qu’elle coupa l’eau. Preuve était faite que le problème venait de la plomberie qui, il est vrai, n’était plus de première jeunesse.

    Elle se dirigea vers le lavabo et s’arrêta, tétanisée.

    Sur le miroir empli de buée étaient tracés, du bout du doigt, ces mots : Je t’aime.

    Elle saisit ses vêtements et dévala les escaliers jusqu’au salon. Les chiens, confortablement

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