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Les Dyslexies-dysorthographies
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Livre électronique417 pages4 heures

Les Dyslexies-dysorthographies

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À propos de ce livre électronique

Les dyslexies-dysorthographies sont un trouble d’apprentissage de la lecture et de l’orthographe qui peut entraîner de faibles compétences en langage écrit. Or maîtriser la langue écrite est indispensable dans la société d’aujourd’hui. Il s’agit d’une pierre angulaire essentielle à la démocratie et à l’économie des pays du monde. Heureusement, les récentes découvertes scientifiques ont permis de mieux comprendre et de cerner ce trouble développemental ainsi que de reconnaître plusieurs facteurs cognitifs associés à son origine.

Cet ouvrage – qui couvre la période de l’enfance à l’âge adulte – propose une synthèse des recherches scientifiques actuelles sur l’apprentissage de la lecture et de l’orthographe ainsi que sur les dyslexies-dysorthographies. Il aborde également les conséquences scolaires et psycho­affectives de ces troubles. Unique en son genre, ce livre présente des sujets peu abordés dans les écrits, mais essentiels à une bonne compréhension de ces troubles et de leurs conséquences. Trois différents sous-types de dyslexies-dysorthographies sont traités plus particulièrement dans des chapitres distincts : la dyslexie-dysorthographie phonologique, les dyslexies-dysorthographies par trouble de l’empan visuoattentionnel et la dyslexie-dysorthographie mnésique. Un chapitre est par ailleurs entièrement consacré aux actions à entreprendre pour développer le sentiment d’autoefficacité des élèves ayant des troubles d’apprentissage et pour favoriser la persévérance scolaire.

Les étudiants universitaires en formation dans les domaines de l’orthophonie et des sciences de l’éducation ainsi que les orthophonistes, les orthopédagogues et les ensei­gnants pourront parfaire leurs connaissances sur l’apprentissage du langage écrit et des dyslexies-dysorthographies grâce à la lecture de cet ouvrage.
LangueFrançais
Date de sortie9 mars 2017
ISBN9782760544383
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    Aperçu du livre

    Les Dyslexies-dysorthographies - Brigitte Sanké

    dyslexies-dysorthographies.

    L’ABC de l’apprentissage de l’écrit pour mieux en prévenir les difficultés

    Pascal Lefebvre

    CIBLES

    •Connaître l’importance des faibles niveaux de littératie par rapport à celle des dyslexies-dysorthographies.

    •Comprendre l’importance de s’informer des percées scientifiques récentes en lecture et en écriture pour la prévention des difficultés.

    •Identifier et définir les principales habiletés en lecture et en écriture.

    •Connaître les grandes lignes du développement des principales habiletés en lecture et en écriture.

    •Connaître les pratiques éducatives éprouvées pour favoriser l’apprentissage des habiletés en lecture et en écriture.

    •Amorcer une réflexion critique sur les pratiques éducatives actuelles en littératie.

    QUESTIONS CLÉS

    •Quelles sont les conséquences à long terme des difficultés en lecture et en écriture?

    •Pourquoi la prévalence des difficultés de lecture et d’écriture est-elle si élevée?

    •Quels sont les principaux mécanismes en jeu lors de la lecture et l’écriture?

    •Quelles attentes sont réalistes concernant les performances des enfants lors de leur apprentissage de l’écriture?

    •Comment prévenir les difficultés de lecture et d’écriture, et ce, dès le début de la scolarisation?

    1. L’importance de la prévention

    Dans le domaine de l’apprentissage de la lecture et de l’écriture, la prévention est incontournable. En fait, les mesures pour prévenir de façon précoce l’apparition des difficultés de lecture et d’écriture permettent d’éviter des situations encore plus graves.

    ENCADRÉ 1.1

    Kevin est issu d’un quartier défavorisé. Lors de son entrée au préscolaire, il est le plus jeune de sa classe et est perçu par son enseignante comme un garçon agité et immature. Celle-ci remarque qu’il ne s’intéresse pas aux activités liées à la littératie, comme les lectures d’histoire en groupe ou les ateliers d’exploration de l’écriture. Mettant ces observations sur le compte du jeune âge de Kevin, l’enseignante réduit ses attentes envers lui lors des activités d’apprentissage du nom des lettres, de la conscience phonologique et de calligraphie afin qu’il conserve le plaisir de venir à l’école.

    Dès le début de sa 1re (CP) année du primaire, apprendre à lire et à écrire constitue un défi de taille pour Kevin. Son nouvel enseignant suit un manuel scolaire qui encourage la lecture globale des mots dès l’entrée en 1re année afin de permettre aux élèves de lire rapidement des phrases et des textes. Cependant, il doit accorder beaucoup de temps de récupération pour soutenir Kevin qui éprouve de la difficulté à mémoriser tous ces mots. Malheureusement, ces mesures d’aide se révèlent insuffisantes. Après le congé des Fêtes de Noël, l’enseignant discute de ses inquiétudes avec l’orthopédagogue (enseignante-spécialisée) de l’école. Occupée par les besoins des élèves plus âgés, cette dernière prodigue quelques conseils à l’enseignant. Ce dernier fait de son mieux, mais le nombre d’élèves dans sa classe ne lui permet pas de les mettre en application aussi souvent qu’il le souhaite.

    Kevin entre tout de même en 2e (CE1) année du primaire, étant donné la politique de l’école qui n’encourage pas le redoublement. L’écart entre lui et ses pairs s’étant creusé pendant l’été, sa nouvelle enseignante va rencontrer la direction d’école afin d’obtenir des services d’orthopédagogie le plus rapidement possible. Vers le mois de novembre, Kevin rencontre finalement l’orthopédagogue qui constate l’ampleur des retards en français. Les difficultés qu’elle note lui laissent suspecter la présence de troubles d’apprentissage chez Kevin. Une référence est immédiatement faite pour une évaluation en orthophonie et en psychologie afin de confirmer son hypothèse. Entre temps, Kevin commence vraiment à se décourager et à douter de ses compétences. Il commence alors à être plus turbulent en classe et les devoirs deviennent pour lui une corvée insurmontable pendant laquelle sa mère se met souvent en colère contre lui. Vers la fin de la 2e année, ses performances en lecture et surtout en écriture demeurent très faibles. Les évaluations en orthophonie et en psychologie confirment la présence de retards importants d’apprentissage, ce qui mène à l’établissement d’un plan d’intervention. Un redoublement est recommandé et Kevin doit refaire sa 2e année.

    Avec une aide plus soutenue en orthopédagogie, Kevin réussit finalement à passer en 3e (CE2) et en 4e (CM1) année, mais ses performances scolaires demeurent nettement sous la moyenne. Il éprouve de plus en plus de difficulté à comprendre ce qu’il lit, ce qui mine complètement son intérêt pour la lecture. Ses productions de textes restent minimales et ne répondent pas aux exigences du programme scolaire. Son intérêt pour l’école est en chute libre et son comportement en classe dérange de plus en plus. Il reçoit donc l’aide d’un psychoéducateur afin de mieux gérer ses comportements à l’école.

    Kevin termine sa 6e année du primaire avec une réputation de voyou. À l’école secondaire, les choses ne s’arrangent pas pour lui. Il fréquente une classe à effectif réduit pour des élèves en troubles d’apprentissage. Son taux d’absentéisme aux cours est très élevé et il est même suspendu pour intimidation. Très rapidement, il décroche et quitte le foyer familial. Sans qualification, il est incapable de se trouver un emploi. Il se tourne vers la vente de stupéfiants pour une organisation criminelle active dans son quartier afin de s’assurer d’un revenu. Ayant été reconnu coupable d’actes criminels, Kevin purge aujourd’hui une peine derrière les barreaux. Est-ce que Kevin est dyslexique-dysorthographique? Non.

    Cette histoire peut sembler alarmiste, mais elle reflète une réalité trop souvent oubliée. Les données de la recherche démontrent qu’environ le tiers des adultes faisant partie de la population carcérale ont des difficultés d’apprentissage (Mottram, 2007; Mottram et Lancaster, 2006). Rack (2005) et Herrington (2005) rapportent même qu’environ la moitié des prisonniers possèdent des niveaux de littératie inférieurs à ce qu’on attend des enfants du primaire. Fait important à noter, seule une partie d’entre eux sont dyslexiques-dysorthographiques.

    Selon le Programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes (Statistique Canada, 2013), les données canadiennes en matière de littératie ne sont guère reluisantes: 48,5% des individus de 16 à 65 ans démontrent de faibles habiletés en littératie qui les empêchent d’être pleinement compétents pour la plupart des emplois à combler dans notre économie moderne. Les données sur les francophones sont encore plus inquiétantes. Le Québec figure parmi les provinces et territoires qui contiennent les plus grandes proportions d’adultes ayant de faibles habiletés en littératie (53,3%) comparativement à la moyenne nationale. Il est aussi important de souligner que les francophones, non seulement ceux qui vivent en situation minoritaire au Nouveau-Brunswick, en Ontario et au Manitoba, mais aussi ceux qui vivent en situation majoritaire au Québec, possèdent des habiletés de littératie plus faibles que les anglophones de leur province respective. Le même phénomène est observé chez les élèves québécois; les résultats obtenus par le Programme international de recherche en lecture scolaire de 2011 (Conseil des ministres de l’Éducation, 2012) révèlent que les performances des élèves de 10 ans sont inférieures à la moyenne nationale. Plus alarmant encore, cette tendance persiste depuis plusieurs années, et ce, malgré le fait que les élèves en difficulté n’ont jamais eu autant accès aux divers services d’aide à l’école.

    Le Québec figure parmi les provinces et territoires qui contiennent les plus grandes proportions d’adultes ayant de faibles habiletés en littératie (53,3%) comparativement à la moyenne nationale.

    La prévalence des troubles spécifiques de l’apprentissage qui touchent la lecture et l’écriture, comme les dyslexies-dysorthographies développementales, ne peut expliquer à elle seule les faibles niveaux de littératie observés actuellement.

    Comment se fait-il qu’autant d’enfants et d’adultes au Canada éprouvent de la difficulté à lire et à écrire? La prévalence des troubles spécifiques de l’apprentissage qui touchent la lecture et l’écriture, comme les dyslexies-dysorthographies développementales, ne peut expliquer à elle seule les faibles niveaux de littératie observés actuellement. Clay (1987) ainsi que Vellutino et ses collègues (1996) soutiennent que la très grande majorité des difficultés de lecture et d’écriture des élèves sont plutôt liées à des lacunes expérientielles et éducatives. Il ne fait plus aucun doute que la prévention des difficultés de lecture et d’écriture demeure la clé pour dénouer cette impasse, et que le rehaussement des pratiques éducatives au préscolaire et au primaire est un passage obligé et prioritaire pour que cette prévention soit efficace. Cependant, la prévention ne se limite souvent qu’au discours. En effet, depuis de nombreuses années, on en fait la promotion, on affirme que c’est important, mais, malheureusement, peu de mesures concrètes sont réellement mises de l’avant.

    La très grande majorité des difficultés de lecture et d’écriture des élèves sont liées à des lacunes expérientielles et éducatives.

    L’un des facteurs qui contribuent à cette inertie est la lenteur que mettent les découvertes scientifiques récentes dans le domaine de l’éducation à se transformer en actions concrètes dans les milieux éducatifs. Ceci est particulièrement vrai dans les milieux francophones, la vaste majorité des écrits scientifiques étant publiée dans la langue de Shakespeare. L’enseignement du français écrit s’inscrit dans une longue tradition transmise depuis des générations entre les enseignants. Des pratiques se sont donc perpétuées dans les écoles, parfois sans que personne ne les remette en question. Les découvertes scientifiques réalisées depuis déjà quelques décennies sont venues jeter un éclairage important sur le développement des apprentis lecteurs et scripteurs ainsi que sur les activités éducatives qui permettent de prévenir efficacement les difficultés. Une bonne compréhension des différentes habiletés impliquées dans l’apprentissage de la lecture et de l’écriture est essentielle aux intervenants du monde de l’éducation pour soutenir leurs pratiques réflexives en matière de prévention. Les études récentes sur la formation initiale des enseignants et des éducateurs en petite enfance révèlent des lacunes importantes à ce sujet (Cunningham, Zibulsky et Callahan, 2009; Moats, 2009). Ces lacunes ne sont pas à prendre à la légère, d’autant que le niveau d’expertise des enseignants concernant le développement et le fonctionnement typiques de la lecture et de l’écriture influence le degré de réussite de leurs élèves dans ce domaine, surtout au début du primaire (Carlisle, Kelcey, Rowan et Phelps, 2011). De plus, l’influence de leurs pratiques éducatives va bien au-delà du succès scolaire; en contribuant au succès précoce de l’apprentissage de la lecture et de l’écriture chez les enfants, elles influencent positivement la santé, la participation citoyenne ainsi que l’employabilité future des jeunes (ABC Life Literacy Canada, 2014). Les éducatrices et les éducateurs en petite enfance ainsi que les enseignantes et enseignants du préscolaire et du primaire sont donc des acteurs clés pouvant faire une différence dans la vie des jeunes. L’objectif de ce chapitre est de rendre accessibles ces nouvelles connaissances aux milieux éducatifs francophones afin d’en influencer les pratiques. Les sections qui suivent visent à définir les principales habiletés qu’utilisent les apprentis lecteurs et scripteurs, et à signaler les grandes lignes de leur développement et de leur fonctionnement.

    Les découvertes scientifiques réalisées depuis déjà quelques décennies sont venues jeter un éclairage important sur le développement des apprentis lecteurs et scripteurs ainsi que sur les activités éducatives qui permettent de prévenir efficacement les difficultés. Une bonne compréhension des différentes habiletés impliquées dans l’apprentissage de la lecture et de l’écriture est essentielle aux intervenants du monde de l’éducation pour soutenir leurs pratiques réflexives en matière de prévention.

    Les éducatrices et les éducateurs en petite enfance ainsi que les enseignantes et enseignants du préscolaire et du primaire sont donc des acteurs clés pouvant faire une différence dans la vie des jeunes.

    2. Les habiletés principales de la lecture et de l’écriture

    Deux théories ont grandement influencé la façon de concevoir la lecture et l’écriture; il s’agit de la vision simplifiée de la lecture proposée par Gough et Tunmer (1986) ainsi que la vision simplifiée de l’écriture proposée par Berninger (2000), Berninger et al. (2002) et Berninger et Graham (1998). Selon ces deux théories, la lecture et l’écriture sont composées d’habiletés de base sur lesquelles reposent en partie des habiletés de haut niveau. Les habiletés de base permettent d’accéder au code de l’écrit, tandis que les habiletés de haut niveau permettent d’accéder au sens de l’écrit. Les habiletés de traitement visuel et d’identification de mots forment les habiletés de base en lecture, tandis que les habiletés de base en écriture comportent la calligraphie et l’orthographe. Les habiletés de compréhension en lecture et de production de textes en écriture constituent les habiletés de haut niveau. Inspirée des visions simplifiées de la lecture et de l’écriture, la figure 1.1 illustre les habiletés principales de la lecture et de l’écriture.

    Les habiletés de base permettent d’accéder au code de l’écrit, tandis que les habiletés de haut niveau permettent d’accéder au sens de l’écrit.

    Les habiletés de base exercent beaucoup d’influence sur les habiletés de haut niveau, car le cerveau humain dispose de ressources limitées, c’est-à-dire qu’il ne peut traiter plusieurs d’information simultanément, surtout si ce traitement nécessite beaucoup de ressources cognitives. Par exemple, en lecture, si on identifie les mots en les décodant grâce à la correspondance entre les lettres et les sons, on ne peut pas lire rapidement, ce qui limite grandement notre compréhension du texte. La même chose en écriture, lorsqu’on est concentré sur la manière de tracer les lettres des mots, il est plus difficile de les orthographier correctement et il ne reste que peu de ressources cognitives pour composer un texte riche. En fait, les ressources cognitives du cerveau humain dépendent à la fois des capacités de mémoire de travail et d’attention ainsi que des fonctions exécutives qui assurent la gestion de ces dernières. Le cerveau des apprentis lecteurs et scripteurs se retrouve donc souvent devant un grand dilemme: comment attribuer les ressources cognitives de façon efficace? En réalité, le but ultime de la lecture et de l’écriture, c’est d’être capable de comprendre et de produire des textes de façon optimale. Or, ces habiletés de haut niveau sont très gourmandes en matière de ressources cognitives. Donc, si les habiletés de base comme l’identification de mot ou la calligraphie nécessitent une bonne part des ressources cognitives, il n’en reste jamais assez pour satisfaire les habiletés de haut niveau de compréhension et de production de textes. Pour se sortir de cette impasse, le cerveau humain a recours à ce qu’on appelle l’«automatisation». Plus précisément, lors de l’apprentissage de la lecture et de l’écriture, l’exposition répétée et la pratique permettent d’automatiser les habiletés de base. Lorsqu’une habileté de base est automatisée, elle requiert beaucoup moins de ressources cognitives. Conséquemment, ces dernières sont libérées, ce qui permet leur attribution à des habiletés de plus haut niveau.

    FIGURE 1.1.

    Habiletés principales de la lecture et de l’écriture

    Lors de l’apprentissage de la lecture et de l’écriture, l’exposition répétée et la pratique permettent d’automatiser les habiletés de base. Lorsqu’une habileté de base est automatisée, elle requiert beaucoup moins de ressources cognitives, ce qui permet leur attribution à des habiletés de plus haut niveau.

    Il est important de souligner que les habiletés principales de la lecture et de l’écriture sont composées elles aussi d’habiletés sous-jacentes. Dans les sous-sections qui suivent, les habiletés principales de la lecture (le traitement visuel, l’identification des mots et la compréhension de textes) et de l’écriture (la calligraphie, l’orthographe et la production de textes) ainsi que leurs sous-habiletés sont décrites. De plus, pour chacune des habiletés principales, une courte histoire démontre l’importance d’une bonne connaissance de l’habileté en question, le développement de cette habileté est brièvement exposé et des conseils préventifs concernant cette habileté sont offerts.

    3.Le traitement visuel

    Le traitement visuel, entre autres, permet à l’individu de traiter les lettres, les espaces et la punctuation de l’écrit pendant la lecture (St-Pierre, Dalpé, Lefebvre et Giroux, 2010). Ce traitement se fait grâce à des mouvements oculaires accompagnés de déplacements attentionnels, c’est-à-dire que les yeux bougent de façon coordonnée avec l’attention du lecteur (Casalis, Leloup et Parriaud, 2013). Ce traitement ne se fait pas en glissant les yeux sur les lettres, mais bien en fixant un groupe de lettres brièvement, puis en sautant sur le groupe de lettres suivant. Le traitement visuel s’effectue donc par saccades oculaires au cours desquelles le lecteur oriente rapidement son attention visuelle, puis la focalise brièvement sur à peu près tous les mots à lire, car l’attention visuelle peut traiter plusieurs lettres à la fois, et ce, de façon détaillée. Il ne faut donc pas confondre le traitement visuel avec l’acuité visuelle, qui permet de percevoir avec précision l’information visuelle et non de la traiter. Une bonne acuité est donc préalable au traitement visuel.

    Le traitement visuel permet à l’individu de traiter les lettres, les espaces et la punctuation de l’écrit pendant la lecture grâce à des mouvements oculaires accompagnés de déplacements attentionnels, c’est-à-dire que les yeux bougent de façon coordonnée avec l’attention du lecteur.

    Selon McBride-Chang et al. (2011), les expériences précoces des enfants avec l’écrit influenceraient le développement du traitement visuel en lecture. Tolchinsky, Levin, Aram et McBride-Chang (2012) ont tiré les grandes lignes de ce développement. Très jeunes, les enfants utilisent ce traitement visuel pour apprendre à distinguer l’écrit, des dessins et des chiffres. Cette distinction s’exprime entre autres dès leurs premières tentatives d’écriture dont les traits visuels s’apparentent à ceux de l’écriture à laquelle ils sont exposés. Les habiletés de traitement visuel sont aussi nécessaires au développement de l’habileté à identifier correctement les lettres, l’un des plus puissants facteurs prédictifs du succès en lecture dans plusieurs langues, dont le français (Cormier, 2006; Écalle, Biot-Chevrier et Magnan, 2008; Foulin, 2007; Hillairet de Boisferon, Colé et Gentaz, 2010). Au fur et à mesure que les enfants développent leurs habiletés de lecture, leurs habiletés de traitement visuel leur permettent de traiter simultanément un plus grand nombre de lettres (Häikiö, Bertram, Hyönä et Niemi, 2009; Rayner, 1986). De plus, les études portant sur le mouvement des yeux ont démontré que les saccades visuelles augmentaient en amplitude et que le nombre de retour en arrière diminuait (McConkie et al., 1991). Rayner (2014) stipule que ces changements dans les mouvements oculaires ne sont pas la cause, mais plutôt la conséquence de la lenteur de traitement des jeunes lecteurs. En d’autres mots, le mouvement des yeux est le reflet du fonctionnement des ressources cognitives pendant la lecture.

    ENCADRÉ 1.2

    Monsieur Éric est inquiet, car l’un de ses élèves de 2e année, Adam, a de la difficulté à acquérir de la fluidité en lecture. Il note que ce dernier fait de nombreux retours en arrière lorsqu’il lit, et ce, tant en lecture à voix haute qu’en lecture silencieuse. Il suspecte des problèmes visuels. Pourtant, l’acuité visuelle d’Adam a été évaluée et l’optométriste a conclu que sa vision était parfaite. Alors, pour l’aider à gagner de la vitesse, Monsieur Éric a conseillé à Adam de faire glisser ses yeux sur le texte sans retourner en arrière et de ne pas s’arrêter afin de lire plus rapidement. À la suite de ce conseil, les performances d’Adam en lecture se sont détériorées; il n’identifie presque plus de mots correctement et ne comprend plus ce qu’il lit.

    Les données sur le développement du traitement visuel insistent sur la pertinence d’exposer les enfants dès le jeune âge à l’écrit et aux lettres afin qu’ils reconnaissent rapidement ce qui relève de l’écrit de ce qui s’en écarte. Lors de la lecture à l’enfant, il est conseillé de lui démontrer l’endroit où on lit et de suivre les mots avec son doigt au fur et à mesure de la lecture. L’enfant apprend alors à distinguer progressivement le texte des illustrations dans un livre. On peut même expliquer ces conventions verbalement en précisant que c’est le texte et non les illustrations qu’on lit et que cette lecture débute sur la page de gauche, dans le coin supérieur gauche, pour ensuite lire de gauche à droite chacune des lignes, de la première en haut jusqu’à la dernière en bas. De plus, lorsqu’on lui parle des lettres de son prénom, qu’on lui montre les lettres dans les livres et sur les panneaux ou lorsqu’on manipule avec lui des lettres magnétiques, l’enfant commence à distinguer les lettres des autres symboles écrits.

    En d’autres mots, le mouvement des yeux est le reflet du fonctionnement des ressources cognitives pendant la lecture.

    L’entraînement à la reconnaissance des lettres en majuscule et en minuscule à partir de leur prénom, dès le préscolaire, est aussi un bon exercice qui met à profit le traitement visuel en lecture. Il a été démontré que les enfants sont meilleurs pour nommer les lettres de leur nom (surtout la première lettre) et que certaines lettres comme O, A et B sont les plus faciles à nommer; d’autres comme Q, U et V sont les plus difficiles, qu’elles soient majuscules ou minuscules (Justice, Pence, Bowles et Wiggins, 2006; Phillips, Piasta, Anthony, Lonigan et Francis, 2012). Toutes ces connaissances acquises avant la 1re année du primaire démontrent que l’enfant développe la conscience de l’écrit et la connaissance alphabétique, des précurseurs importants du succès en lecture et en écriture (National Early Literacy Panel, 2008). Ces précurseurs font systématiquement appel aux habiletés de traitement visuel (Woodrome et Johnson, 2009; Zhou, McBride-Chang et Wong, 2014).

    La conscience de l’écrit et la connaissance alphabétique, des précurseurs importants du succès en lecture et en écriture.

    Lorsque les élèves amorcent leur apprentissage formel de la lecture en 1re et 2e année du primaire, il est important de considérer leurs comportements visuels comme un indice de leur capacité à identifier les mots. Donc, si un enfant fait des retours en arrière pendant qu’il lit un mot, il se pourrait que ce comportement traduise des difficultés, non pas de traitement visuel, mais bien d’identification de mots. Finalement, lorsque l’enfant commence à reconnaître plusieurs mots spontanément, il peut traiter la séquence des mots plus rapidement, comme un lecteur expert. En fait, l’automaticité du traitement en saccades visuelles devient un indice de la capacité de l’enfant à identifier efficacement les mots qu’il lit (Rayner, 2014).

    En bref

    •Le traitement visuel permet à l’individu de traiter l’écrit pendant la lecture grâce à des saccades oculaires qui permettent de déplacer l’attention visuelle du lecteur.

    •Si on les expose très jeunes à l’écrit et que les adultes leur en expliquent les conventions, les enfants apprennent rapidement à identifier où est le texte pour ensuite distinguer les différentes lettres de l’alphabet dès le préscolaire.

    •La reconnaissance des formes des lettres et la connaissance de leur nom constituent des précurseurs majeurs du succès en lecture et en écriture.

    •À partir du début du primaire, l’efficacité du traitement visuel devient un indice de l’automaticité à identifier les mots en lecture.

    ENCADRÉ 1.3

    Si Monsieur Éric avait eu une connaissance plus approfondie du traitement visuel, il n’aurait pas donné ce conseil à Adam. Il aurait plutôt vérifié les habiletés d’identification de mots de ce dernier avant de conclure à des difficultés de nature visuelle.

    L’identification de mots, parfois appelée la reconnaissance de mots, permet au lecteur de reconnaître individuellement les mots afin d’accéder à leur sens.

    4.L’identification de mots

    L’identification de mots, parfois appelée la reconnaissance de mots (Fayol et Gombert, 1999), permet au lecteur de reconnaître individuellement les mots afin d’accéder à leur sens (St-Pierre et al., 2010). Les lecteurs experts identifient les mots de façon tellement automatique qu’ils ne peuvent s’empêcher de lire un mot lorsqu’ils le regardent. En effet, essayez de regarder un mot sans le lire est une tâche impossible pour les adultes normolecteurs. Cependant, les jeunes enfants, en début de primaire, sont en mesure, eux, de le faire. Contrairement aux adultes, ils doivent souvent faire des efforts pour lire le mot en le décodant. Ce phénomène illustre que l’identification de mots peut s’effectuer selon deux processus principaux: la voie phonologique, plus laborieuse, qui permet de décoder les mots, et la voie orthographique, plus automatique, qui permet de reconnaître rapidement un mot (Coltheart, Rastle, Perry, Langdon et Ziegler, 2001). La voie phonologique est couramment nommée la voie de décodage ou voie d’assemblage. Elle consiste essentiellement à traiter chacune des

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