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L'éducation psychomotrice, 2e édition: Source d'autonomie et de dynamisme
L'éducation psychomotrice, 2e édition: Source d'autonomie et de dynamisme
L'éducation psychomotrice, 2e édition: Source d'autonomie et de dynamisme
Livre électronique602 pages5 heures

L'éducation psychomotrice, 2e édition: Source d'autonomie et de dynamisme

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À propos de ce livre électronique

L’éducation psychomotrice : source d’autonomie et de dynamisme se veut une référence pour mieux comprendre le processus du développement de l’enfant, un outil pour orienter les choix, les actions et les réflexions des éducateurs professionnels ou en formation. Le contenu est fondé sur les connaissances et les recherches issues des sciences de l’éducation, de la psychologie et des neurosciences.

Cette deuxième édition apporte un éclairage actualisé sur l’éducation psychomotrice des enfants de la naissance à 12 ans, considérée dans le sens de l’intervention favorable au bien-être et au développement global de l’enfant à travers son activité corporelle. Les connaissances théoriques et pratiques sont contextualisées dans le cadre des programmes d’éducation en cours au Québec. De plus, elles sont enrichies et illustrées avec les réflexions et les idées des éducateurs qui vivent et créent le quotidien avec les enfants. Outre la mise à jour de l’ensemble des chapitres, ce livre intègre de nouvelles notions, notamment en ce qui concerne la régulation des émotions et l’intervention en éducation psychomotrice. Des exercices inédits permettent également d’approfondir la réflexion.

L’originalité de l’approche éducative décrite dans ce manuel tient au fait que l’intervention est abordée par niveau de développement et qu’elle intègre toutes les dimensions de l’évolution de l’enfant. L’accent est mis sur la progression de l’activité corporelle, son influence sur les comportements et son rôle comme moyen de développement et source d’épanouissement.

Francine Lauzon, enseignante retraitée des techniques d’éducation à l’enfance du Cégep Marie-Victorin, détient une maîtrise en éducation de l’Université du Québec à Montréal. Ses travaux ont porté sur l’intégration des apprentissages, la pratique réflexive comme outil de développement professionnel et le perfectionnement psychopédagogique des enseignants au collégial. Elle s'intéresse actuellement aux recherches et aux pratiques liées à la régulation des émotions et aux activités de ressourcement.
LangueFrançais
Date de sortie28 août 2020
ISBN9782760549487
L'éducation psychomotrice, 2e édition: Source d'autonomie et de dynamisme
Auteur

Francine Lauzon

Francine Lauzon, enseignante retraitée des techniques d’éducation à l’enfance du Cégep Marie-Victorin, détient une maîtrise en éducation de l’Université du Québec à Montréal. Ses travaux ont porté sur l’intégration des apprentissages, la pratique réflexive comme outil de développement professionnel et le perfectionnement psychopédagogique des enseignants au collégial. Elle s'intéresse actuellement aux recherches et aux pratiques liées à la régulation des émotions et aux activités de ressourcement.

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    Aperçu du livre

    L'éducation psychomotrice, 2e édition - Francine Lauzon

    Introduction

    L’éducation des enfants soulève de nombreuses questions dans notre société et suscite la création d’une variété de théories et de pratiques tant chez les parents, les intervenants que les chercheurs. Chacun souhaite que les enfants vivent dans des contextes stimulants et conçus dans le but de favoriser leur développement et leur plein épanouissement. L’importance de la richesse des expériences sensorielles, perceptives et motrices est reconnue dans l’intervention que l’on veut éducative. Bouger pour se développer, bouger pour rester en santé, bouger et manipuler des objets pour apprendre, bouger et respirer pour se détendre et réguler ses émotions.

    Les enfants peuvent avoir accès à du matériel de jeu très sophistiqué, à une variété d’appareils technologiques leur permettant d’explorer des univers réels ou virtuels. Ils peuvent s’initier à différentes activités ludiques, de détente, d’expression ou sportives. En somme, les enfants sont souvent plongés dans des contextes qui sollicitent leurs sens, éveillent leur attention et les invitent à être actifs.

    Mais…

    Le quotidien très organisé et souvent découpé par des horaires de plus en plus surchargés laisse peu de place à la spontanéité, au rythme individuel, aux mouvements naturels ainsi qu’à l’exploration et à l’expression libres. Le tourbillon dans lequel sont souvent bousculés les adultes et les enfants ne favorise pas toujours les moments de contact et de communication spontanés. Des moments pour les relations affectives significatives chaleureuses, précieuses et essentielles au développement sain, équilibré et harmonieux. Des temps d’arrêt pour se reposer, ressentir et établir ses besoins et ses ressources.

    Bien sûr!

    Les parents et les éducateurs ont le désir de favoriser le plein épanouissement et le développement harmonieux de l’enfant. Ils sont conscients qu’à cause du large éventail de stimulations offertes, fondées sur de nombreuses théories et pratiques de l’intervention éducative, il est possible de perdre de vue l’enfant lui-même dans sa globalité, qu’on ne tienne pas compte de ses besoins exprimés et réels, toujours à la recherche de la meilleure et de la dernière trouvaille.

    Comment s’y retrouver?

    Cette nouvelle édition du livre apporte un éclairage actualisé sur l’éducation psychomotrice des enfants de la naissance à 12 ans, considérée dans le sens de l’intervention favorable au bien-être et au développement global de l’enfant à travers son activité corporelle. Le titre, en soi, est porteur du message véhiculé tout au long des chapitres. Un enfant actif qui explore un environnement riche et adapté à son niveau de développement, en toute quiétude, entouré d’enfants et accompagné d’adultes bienveillants a plus de chances d’actualiser son plein potentiel et de devenir une personne autonome et dynamique.

    Les données des recherches les plus récentes le démontrent: dès leur naissance, les enfants ont besoin d’être actifs, en interaction avec un environnement humain et physique sécurisant et stimulant pour être en santé et se développer harmonieusement. Aussi, l’expertise développée au cours des dernières décennies par divers intervenants qui œuvrent auprès des enfants contribue à une meilleure compréhension de leurs besoins fondamentaux. Plusieurs approches et programmes d’intervention ont fait leurs preuves tant auprès des enfants, des familles que des services de garde ou de loisirs. Nous nous en inspirons tout au long de l’ouvrage.

    La prétention ici n’est surtout pas d’en ajouter. L’éducation psychomotrice: source d’autonomie et de dynamisme se veut une référence pour mieux comprendre le processus du développement de l’enfant. Il s’agit d’un outil pour orienter les choix, les actions et les réflexions quotidiens des éducateurs professionnels ou en formation. Le contenu est fondé sur les connaissances et les recherches issues des sciences de l’éducation, de la psychologie et des neurosciences. Les applications sont contextualisées dans le cadre des programmes d’éducation en cours au Québec. De plus, elles sont enrichies et illustrées avec les réflexions et les idées pratiques puisées dans l’expérience des éducateurs qui vivent et créent le quotidien avec les enfants. En fait, l’ouvrage se veut un cadre de référence original et innovant issu de la gestation du couple théorie et pratique.

    Pour cette nouvelle édition, nous sommes allées à la rencontre d’éducatrices dans leur milieu pour découvrir comment elles intègrent l’éducation psychomotrice dans les moments de vie passés avec les enfants. Quels sont les moyens qu’elles ont développés pour favoriser leur développement à travers l’activité corporelle (en installation, en milieu familial ou dans le cadre d’un service de garde en milieu scolaire)? Comment intègrent-elles le programme éducatif (Ministère de la Famille et des Aînés, 2007) à leur quotidien? Les échanges ont permis de recueillir des idées pratiques d’interventions, d’organisation de milieux et d’activités libres ou structurées, à l’intérieur comme en plein air. Les données recueillies ont permis de concrétiser, contextualiser et illustrer les connaissances actuelles sur l’éducation psychomotrice.

    L’originalité de l’approche éducative décrite dans ce manuel tient à ce que l’intervention est abordée par niveau de développement et qu’elle intègre toutes les dimensions¹ du développement de l’enfant. On a mis l’accent sur l’évolution de l’activité corporelle, son influence sur les comportements de l’enfant et son rôle comme moyen de développement et comme source de bien-être et d’épanouissement, y compris pour l’équilibre et la régulation des émotions. Ce sont là des sujets qui reviennent tout au long de l’ouvrage pour expliquer l’intervention la mieux adaptée à chaque groupe d’âge.

    Pour des raisons pratiques, le contenu de l’ouvrage se divise en trois grandes parties distinctes, mais complémentaires. Dans la première partie, comprenant les deux premiers chapitres, on présente les fondements théoriques de l’éducation psychomotrice. Dans la deuxième partie, regroupant les chapitres 3 à 9, on traite de chacune des composantes de la psychomotricité. La troisième partie, qui comprend les chapitres 10 à 14, sert à décrire une approche éducative en s’appuyant sur le développement global des enfants de la naissance à 12 ans. Le chapitre 10 apporte des précisions sur l’intervention en éducation psychomotrice et fournit aux intervenants les informations dont ils ont besoin pour concevoir des moments de vie² riches et stimulants. Les chapitres 11 à 14 serviront de guide pratique pour la préparation de moments de vie tels que les routines, les transitions et les activités ludiques, sportives, d’expression ou de détente libres ou structurées à l’intérieur comme en plein air.

    L’ensemble du volume est conçu dans la perspective d’un manuel de formation. À cette fin, des questions et des exercices pour favoriser l’observation, l’action et la réflexion sur la théorie comme sur la pratique sont introduits à la fin des chapitres de manière à favoriser l’intégration et le transfert des apprentissages chez les étudiants et alimenter des échanges chez les éducateurs.

    En somme, nous espérons que les éducateurs professionnels ou en formation trouveront dans cet ouvrage l’essentiel des connaissances dont ils auront besoin pour créer un milieu de vie stimulant et intervenir en accordant la place qui revient à l’activité corporelle pour favoriser le bien-être et le développement de l’enfant, de même que la qualité de vie en groupe. La méthodologie retenue pour l’approche pédagogique et pour les pistes d’intervention laisse toute la place nécessaire pour que leur sensibilité et leur créativité s’expriment. Ce sont eux finalement, qui, avec l’enfant, peuvent développer l’approche éducative la plus signifiante et adaptée à leur contexte de vie.

    1Les dimensions physique et motrice, affective, cognitive, langagière et sociale et morale telles qu’elles sont décrites dans Accueillir la petite enfance: le programme éducatif des services de garde du Québec (Ministère de la Famille et des Aînés, 2007).

    2L’expression «moment de vie» est employée pour toutes les périodes d’activités vécues avec les enfants, y compris les activités de la vie courante comme le sommeil, les repas, l’habillage, les transitions, les arrivées et les départs.

    PARTIE I /

    LES FONDEMENTS THÉORIQUES DE L’ÉDUCATION PSYCHOMOTRICE

    Cette première partie pose les fondements théoriques de l’éducation psychomotrice. Dans le premier chapitre, nous présentons notre définition de l’éducation psychomotrice, à savoir l’activité corporelle comme moyen de développement global de l’enfant, source d’équilibre et de renouvellement d’énergie, mais aussi de régulation des émotions. Dans le deuxième chapitre, nous décrivons de façon simple les fondements neurophysiologiques du processus d’acquisition des habiletés motrices et psychomotrices, ainsi que le rôle du système nerveux autonome dans l’équilibre, le renouvellement d’énergie et la régulation des émotions.

    CHAPITRE 1 /

    Vers une définition de l’éducation psychomotrice

    L’éducation psychomotrice touche l’intervention favorable au bien-être et au développement global de l’enfant à travers son activité corporelle.

    Le concept d’éducation psychomotrice repose sur une vision globale de l’être humain, vision selon laquelle, au cours de ses premières années de vie, l’enfant agit, se développe, apprend, s’exprime et communique à travers ses activités sensorielles, perceptives et motrices.

    L’éducation psychomotrice prend sa source dans les théories et les pratiques portant sur le développement de l’enfant, la psychologie et la motricité. Elle se définit en fonction de son histoire et évolue constamment avec l’apport des recherches issues des sciences de l’éducation, de la psychologie et des neurosciences. Pour en arriver à faire ressortir clairement le sens que nous lui donnons dans cet ouvrage, nous traiterons d’abord de l’éducation en général, de la psychomotricité et de l’unité de la personne, puis de l’importance et du rôle des activités corporelles dans l’activité humaine. Ensuite, nous expliquerons notre définition de l’éducation psychomotrice en précisant son but et en décrivant les éléments qui en font partie.

    1 /L’éducation

    Avant de définir l’éducation psychomotrice, précisons le sens que nous donnons à l’acte d’éduquer. Éduquer l’enfant, pour nous, c’est favoriser son développement et son plein épanouissement, en tenant compte de ses caractéristiques propres et en le considérant dans le contexte de sa collectivité.

    Plus précisément, nous distinguons trois pôles principaux dans le processus d’éducation: l’enfant, l’adulte et l’environnement immédiat. Ces trois pôles sont en interaction dans un vaste contexte – environnement physique et humain – constitué de la famille de l’enfant, des personnes significatives qui l’entourent, de sa communauté environnante et des valeurs qui y sont véhiculées, de même que des événements vécus par l’enfant (l’approche écologique de Bronfenbrenner) (Ministère de la Famille et des Aînés, 2007).

    Qu’est-ce alors qu’éduquer?

    Éduquer suppose plus que le fait de montrer ou d’enseigner. Éduquer, c’est croire que l’enfant se construit et se développe grâce à ses interactions avec son environnement physique et humain.

    Dans le cadre de services éducatifs, éduquer suppose que l’éducateur:

    •développe une relation affective significative stable et sécurisante avec l’enfant;

    •fasse en sorte que l’enfant puisse être actif et explorer un environnement stimulant – les lieux et les activités – qui lui offre des défis adaptés à son niveau de développement;

    •entretienne des interactions de collaboration avec les parents.

    Ce sont là trois critères fondamentaux pour définir le rôle d’un éducateur. Au départ, cela exige une formation et, dans la pratique, des ajustements constants de leur part, afin de tenir compte du niveau de développement et des particularités de chacun des enfants, de même que de l’environnement humain et physique dans lequel celui-ci évolue.

    En résumé, retenons que dans cet ouvrage, nous nous appuyons sur les principaux fondements éducatifs énoncés dans le programme éducatif des services de garde du Québec (Ministère de la Famille et des Aînés, 2007). Deux grandes théories et cinq principes de base doivent guider l’intervention. Les deux grandes théories sont les suivantes:

    •l’approche écologique: l’enfant se construit et se développe grâce à ses interactions avec son environnement physique et humain;

    •la théorie de l’attachement: la qualité de la relation qui s’établit entre le poupon, puis l’enfant et les premiers adultes qui en prennent soin constitue la pierre angulaire de son développement. Des relations stables et sécurisantes favorisent la confiance de l’enfant et sa motivation à explorer le monde qui l’entoure.

    Les cinq principes de base qui doivent guider l’intervention au quotidien sont les suivants:

    •le développement de l’enfant est un processus global et intégré;

    •chaque enfant est unique;

    •l’enfant est le premier agent de son développement;

    •l’enfant apprend par le jeu;

    •la collaboration entre le personnel éducateur ou les responsables du service de garde et les parents est essentielle au développement harmonieux de l’enfant.

    Pour guider l’intervention en s’appuyant sur la théorie de l’attachement, retenons également que l’enfant se développe et s’épanouit au contact de personnes significatives bienveillantes avec qui il établit une relation de confiance sécurisante et stable.

    En lien avec ces fondements éducatifs du programme des services de garde du Québec, en complémentarité avec le contexte scolaire, nous nous appuyons également sur le Programme de formation de l’école québécoise (Ministère de l’Éducation, 2006), qui reconnaît notamment qu’agir et apprendre sont indissociables pour l’enfant: la connaissance et le développement de compétences sont chez lui le résultat d’interactions avec les autres et avec son environnement.

    Ces fondements seront intégrés et traduits sous forme de pistes d’action dans la troisième partie, lorsqu’il sera question de l’intervention éducative adaptée aux différents groupes d’âge.

    Le manteau et les bottes de Manise, un exemple de lien d’attachement affectif sécurisant

    Un début d’année, Manise s’est retrouvée avec un groupe de 8 enfants de 3 à 4 ans très actifs. Avec son expérience, Manise savait qu’il fallait qu’elle développe d’abord une bonne relation avec chacun des enfants. Une relation chaleureuse modulée en fonction de la personnalité de chacun, mais il fallait aussi faire respecter un minimum de règles pour assurer le bon déroulement des journées. Être ferme! Pas question de créer de programme d’activités au début! En concertation avec les parents, ses principes de base étaient: la relation d’abord et le respect à travers les jeux et les activités de routines… Pas facile ce début! Une fin de journée, elle a même entendu un enfant dire à sa mère: «Elle est méchante Manise!» Puis, quelques semaines plus tard, elle s’est rendu compte qu’en arrivant le matin, plusieurs des enfants vérifiaient si le manteau et les bottes de Manise étaient dans l’entrée. S’ils ne les voyaient pas, lors de sa journée de congé par exemple, certains demandaient: «Où est Manise?» et ne voulaient pas rester au service de garde… Les enfants avaient développé un lien d’attachement affectif de confiance et sécurisant. C’était parti! Ces enfants, maintenant d’âge scolaire, viennent lui rendre visite à l’occasion.

    2 /La psychomotricité et l’unité de la personne

    Examinons d’abord la composition du mot «psychomotricité». On y reconnaît facilement les éléments «psycho» et «motricité». Le premier élément, psycho, vient du grec et désigne notamment les manières de penser et les sentiments de la personne, en d’autres termes ses aspects cognitif et affectif. Quant au deuxième, motricité, il désigne le corps en mouvement ou au repos et concerne donc toute l’activité corporelle. Le mot «psychomotricité» a ainsi été formé pour marquer l’interaction de l’esprit – qui désigne l’affectif et le cognitif – et du corps, qui englobe l’activité sensorielle, physique et l’activité motrice. Psychomotricité, écrit sans trait d’union, soulignait à l’origine une vision nouvelle de l’être humain. On reliait alors en un tout le psycho et le moteur pour insister sur le lien étroit observé entre le corps et l’esprit.

    C’est ainsi que l’être humain doit être considéré dans sa globalité: il se définit avec son corps, son intelligence, ses émotions et ses sentiments en interaction les uns avec les autres et régis par son cerveau et son système nerveux. Il forme un tout désigné par l’expression «être unifié».

    Ce concept d’être unifié provient des milieux de rééducation et de recherche sur le développement de l’enfant. En effet, la notion de psychomotricité est issue des travaux de cliniciens travaillant auprès d’enfants et de personnes aux prises avec des difficultés physiques ou psychologiques. Vers la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle, les différents chercheurs, psychologues, neurologues et psychiatres se sont rendu compte de l’importance et du rôle des expériences corporelles dans le développement et les comportements d’un individu, de même que de l’incidence de l’évolution de la personnalité sur les comportements moteurs. Ils ont ainsi préconisé une nouvelle conception de la personne intégrant les aspects cognitif, affectif et moteur. Mentionnons, entre autres, Ajuriaguerra (1973), Guindon (1982), Le Boulch (1981), Piaget (1970) et Vayer (1980), qui ont soit fourni des théories sur le développement et le fonctionnement humain, soit contribué par leur pratique à marquer l’évolution de l’éducation et de la rééducation psychomotrice. D’autres plus contemporains se sont ajoutés. Au Québec, on pense à Jean-Charles Juhel (1997), à René Paoletti (1999), à Robert Rigal (2009) et à l’équipe de recherche Qualité éducative des services de garde et petite enfance de l’UQAM-Sciences de l’éducation ainsi qu’à Sonia Lupien¹, qui, par leurs nombreuses recherches et publications, ont su rendre accessibles d’une part les données de la recherche, mais ont aussi apporté de nombreuses pistes d’action éducatives.

    L’apport des neurosciences et des recherches en éducation appuie et renforce cette conception de la personne comme un être unifié. Les connaissances sur le fonctionnement du cerveau et du système nerveux aident à mieux comprendre le processus de développement et les comportements de l’enfant. De plus, elles induisent des pistes d’action éducatives. En bref, les neurosciences permettent:

    •de mieux reconnaître et nommer les différentes dimensions du développement de l’enfant: physique et motrice, cognitive, affective, langagière, sociale et morale;

    •de localiser dans le cerveau le siège du contrôle de ces dimensions du développement;

    •de mieux comprendre leur développement et leurs interrelations;

    •de mieux expliquer l’unicité de chaque enfant en regard de son développement et de ses comportements;

    •de développer des moyens pour favoriser davantage le bien-être des enfants et la régulation des émotions.

    3 /L’importance et le rôle des activités corporelles dans l’activité humaine

    Les premiers signes de la vie se manifestent à travers les cris et les mouvements du nourrisson. L’activité sensorielle, physique et motrice forme la base du développement humain et assure le contact de l’individu avec son entourage. En effet, dès la naissance, l’enfant démontre sa vitalité par son attitude corporelle, de même qu’il manifeste son degré de réceptivité par ses réactions aux stimuli. Par exemple, un bébé pleure et devient tout crispé lorsqu’il a faim, tandis qu’il bouge tout son corps de contentement lorsqu’on approche le sein ou le biberon de sa bouche. Les jeunes enfants explorent leur environnement avec tous leurs sens et leurs mouvements; ainsi, les différentes dimensions physique et motrice, cognitive, affective, langagière, sociale et morale se développent en interaction avec l’environnement physique et humain. À leur façon, les adolescents et les adultes poursuivent l’actualisation de leur potentiel et leur épanouissement, de même que la recherche ou le maintien de leur bien-être à travers diverses activités corporelles.

    L’activité corporelle, peut-on dire, c’est la vie; lui accorder sa place, c’est favoriser le développement global et l’épanouissement tout au long de la vie. Elle constitue une source d’énergie indispensable à la santé, de même qu’un moyen d’exprimer l’être dans toute sa profondeur.

    Les approches éducatives ou thérapeutiques accordent une grande place à l’activité corporelle et se ramifient et se multiplient sans cesse. Le concept de l’être unifié et l’importance de l’activité corporelle se manifestent à travers diverses approches ou méthodes dont le but est de favoriser le développement, la mise en forme, le bien-être et la santé. La qualité de l’alimentation, l’exercice physique (marche, jogging, sports, danse, etc.) et l’intégration de moments de ressourcement et de détente (exercices de respiration, yoga, méditation, massages, etc.) sont devenus des pratiques courantes chez bon nombre de personnes de tout âge.

    Quelle place l’activité corporelle doit-elle occuper dans l’ensemble des activités de l’enfant? Quels types d’activités seront favorables au développement global et harmonieux? Quelle approche de l’activité corporelle doit-on privilégier? Quel type d’intervention sera le plus approprié?

    Nous croyons que les réponses à de telles questions exigent de prendre en compte l’âge, les caractéristiques, les champs d’intérêt et le niveau de développement de l’enfant, de même que l’environnement humain et physique dans lequel il évolue.

    Tout au long du présent ouvrage, nous décrirons l’évolution de l’activité corporelle chez l’enfant et en préciserons la place. Retenons pour l’instant les trois postulats suivants, qui sont interreliés comme fondements de notre approche:

    1le corps se développe lorsque l’enfant bouge, explore et ajuste ses mouvements aux conditions de l’environnement;

    2l’intelligence et le langage se développent à travers l’activité sensorielle, perceptive et motrice de l’enfant grâce à la communication avec d’autres et au contact des objets, de l’espace et de l’univers sonore;

    3le développement affectif et social s’effectue au contact de personnes significatives avec qui l’enfant établit un lien de confiance stable et sécurisant à travers son activité corporelle, ses expériences sensorielles, perceptives et motrices.

    Soulignons également l’importance de l’activité corporelle pour assurer le bien-être physique et psychique: bouger, respirer et se détendre constituent des moyens de libérer les tensions, d’équilibrer les énergies ou de réguler les émotions.

    4 /L’éducation psychomotrice

    L’éducation psychomotrice touche l’intervention favorable au bien-être et au développement global harmonieux de l’enfant à travers son activité corporelle, de manière à assurer son autonomie et son dynamisme.

    On doit d’abord comprendre que le développement de la confiance en soi, de l’autonomie, du langage, de l’estime de soi, de l’esprit d’initiative, de la créativité et de la capacité de participation active au sein d’une collectivité passe d’abord par le bien-être et le développement global harmonieux.

    L’autonomie et le dynamisme, comme nous l’entendons, supposent chez l’enfant une maîtrise de son corps suffisante pour agir et apprendre dans son environnement et pour communiquer efficacement et harmonieusement avec son entourage. Ces qualités s’acquièrent d’abord par l’utilisation des sens, le développement de la perception et de la motricité, de même que par la capacité d’équilibrer ou de renouveler ses énergies et de réguler ses émotions.

    L’autonomie et le dynamisme entraînent une grande disponibilité du corps et de l’esprit, source de liberté et d’ouverture sur le monde. C’est ce qui permet à l’enfant de tirer profit des stimuli de son entourage. Il apprend ainsi à se connaître, à s’ouvrir aux autres et à l’environnement, à exercer des choix et à agir de façon autonome, créative et responsable. Retenons finalement qu’elle s’acquiert progressivement, grâce à la maturation du système nerveux combinée à l’expérience de l’enfant accompagné d’adultes bienveillants, avec qui il interagit.

    Comprise en ce sens, l’éducation psychomotrice comporte essentiellement deux volets d’intervention:

    1le développement psychomoteur à travers ses différentes composantes;

    2l’équilibre et le renouvellement d’énergie, et la régulation des émotions.

    4.1 /Le développement psychomoteur et ses composantes

    Les composantes du développement psychomoteur englobent l’évolution interactive des fonctions mentales et motrices. Elles concernent l’évolution des actions corporelles – l’ensemble des façons de bouger, de se déplacer ou de prendre et de manipuler un objet –, de même que l’organisation des informations captées par les sens par rapport au corps propre, aux objets, à l’espace, au temps et au rythme.

    Motricité et activités mentales évoluent constamment en fonction l’une de l’autre. Par exemple, au fur et à mesure que l’enfant acquiert des habiletés motrices, la perception qu’il a de son corps s’enrichit; c’est cette connaissance du corps et de ses possibilités qui le pousse à agir davantage sur l’environnement, en sollicitant sa propre activité sensorielle et perceptive. Se déplacer, entendre, regarder, prendre, manipuler, adapter la position de sa main à la grosseur d’un objet, reconnaître, associer, discriminer, s’orienter d’un endroit à un autre et marcher en cadence figurent parmi les exemples d’activités sollicitant la motricité et la perception. On les désigne par l’expression «habiletés psychomotrices» (figures 1.1 et 1.2).

    Examinons maintenant l’ensemble des composantes du développement psychomoteur et, pour ce faire, représentons-nous une personne en action. D’une part, on reconnaîtra chez elle la motricité proprement dite, divisée en motricité globale et en motricité fine. S’il s’agit de mouvements qui sollicitent l’ensemble des parties du corps comme marcher, rouler, lancer, grimper, courir, sauter, etc., on parlera de motricité globale, tandis que pour désigner des activités de manipulation qui demande de la précision comme tenir un crayon, découper, pianoter, etc., on aura recours à l’expression «motricité fine». D’autre part, on notera qu’il y a aussi la perception, alimentée par l’activité sensorielle, qui stimule l’activité mentale. Quand la perception s’exerce sur le corps propre, on parle de schéma corporel et de latéralité; quand elle porte sur les objets, on l’appelle «organisation perceptive» et, enfin, lorsqu’il s’agit de l’espace, du temps et du rythme, il s’agit d’organisation spatiale, temporelle et de l’évolution du sens rythmique.

    On retient donc sept composantes du développement psychomoteur sur lesquelles peut porter l’intervention en éducation psychomotrice. Ces composantes ont chacune leur caractère propre, mais évoluent en interaction les unes par rapport aux autres:

    •la motricité globale;

    •la motricité fine;

    •le schéma corporel;

    FIGURE 1.1 / La période du repas fait appel à la motricité et à la perception

    •la latéralité;

    •l’organisation perceptive;

    •l’organisation de l’espace;

    •l’organisation du temps et l’évolution du sens rythmique.

    L’intervention en lien avec ces composantes à travers les activités quotidiennes constitue le sujet majeur de l’éducation psychomotrice auprès des jeunes enfants. L’évolution progressive de chacune d’elles entraîne l’acquisition d’habiletés qui couvrent et influencent l’ensemble des dimensions du développement de l’enfant: physique et motrice, affective, sociale et morale, cognitive et langagière.

    Notons que chez le jeune enfant, avant l’âge de 6 ou 7 ans – au cours des périodes sensorimotrice et préopératoire du développement de l’intelligence² –, on peut dire que toutes les dimensions du développement sont intimement liées à l’activité et à l’expérience corporelle – aux 7 composantes. En éducation psychomotrice, les fonctions cognitives abstraites dérivent de l’action motrice concrète (Rigal et al., 2009, p. 433). Grâce à la maturation³ et à la stimulation cognitive et langagière, l’enfant pourra progressivement avoir accès à différents concepts sans avoir obligatoirement recours directement à l’activité corporelle. Cela explique l’emploi des expressions «éducation motrice» et «éducation psychomotrice»⁴ au niveau scolaire.

    Laurianne arrive en courant et dit à son éducatrice: «J’ai trouvé ma mitaine derrière l’arbre».

    Annie l’éducatrice surprend Raphaël qui joue dans le vestiaire à aligner les bottes par ordre de grandeur.

    FIGURE 1.2 / La motricité et la perception interviennent dans le maintien de l’équilibre

    Retenons aussi que les sept composantes du développement psychomoteur constituent des points de repère utiles pour l’observation des jeunes enfants pour planifier ou ajuster ses interventions et structurer les lieux et les activités – activités de la vie courante –, les routines et les transitions, ou encore les activités ludiques, sportives, d’expression ou de détente à l’intérieur comme en plein air; somme toute, tout au long du processus d’intervention⁵.

    4.2 /L’équilibre et le renouvellement des énergies, et la régulation des émotions

    L’équilibre et le renouvellement des énergies⁶, de même que la régulation des émotions, représentent le volet de l’éducation psychomotrice qui s’intéresse au bien-être physique et mental.

    L’énergie procure la forme physique et mentale nécessaire à la santé, au bien-être, à la joie de vivre et assure une plus grande disponibilité des fonctions comme l’attention et la concentration. La régulation des émotions vise la conscience et le contrôle de l’intensité de ce qui est ressenti. Elle englobe dans un premier temps la capacité de reconnaître et d’accueillir une émotion, puis de comprendre comment on la ressent et, au besoin, de prendre les moyens adéquats pour l’influencer, afin de la vivre ou de l’exprimer sereinement. L’expression bien connue «un esprit sain dans un corps sain» illustre bien cette idée.

    Nous étudierons cette question en traitant du rôle et de l’importance des activités corporelles dans l’équilibre et le renouvellement des énergies (ÉRÉ) et la régulation des émotions (RÉ). Pour mieux en comprendre la portée, nous partirons de faits bien connus.

    Il nous arrive souvent d’entendre les gens de notre entourage dire qu’ils sont épuisés, qu’ils se sentent «vidés» et qu’ils n’ont plus d’énergie. Ils verbalisent ainsi leur manque d’entrain, leurs maux physiques et même leur tristesse ou leur découragement et chez certains, leurs colères ou leurs pertes de contrôle à l’occasion. Il en va de même pour les enfants: la plupart du temps, ils font agir leurs émotions au lieu de les verbaliser. Les pleurs, les colères, les maux de ventre, les cris, les coups portés aux autres sont souvent des signes qui expriment de la fatigue ou le mal-être, ainsi que l’incapacité à reconnaître et à exprimer leurs besoins ou leurs émotions sereinement, de façon socialement acceptable. Dans le feu de l’action, à travers les obligations et les engagements quotidiens, ces situations sont fréquentes et la routine devient alors plus lourde à porter. L’intolérance et l’incapacité de fournir des efforts détériorent la disponibilité, quand on est à court d’énergie. Les exigences et les imprévus du quotidien apparaissent alors comme des montagnes et, poussé à l’extrême, cet état conduit vers un profond découragement et une fatigue excessive; il en résulte souvent un état de stress⁷, un épuisement total ou un burnout. Très souvent, plusieurs personnes éprouvent en plus des maux physiques importants. Il est à noter que le stress des adultes influence celui des enfants.

    Parler de dynamisme et d’autonomie, dans le sens de la disponibilité du corps et de l’esprit, suppose donc que la personne puisse éviter d’aboutir à de telles situations et qu’elle soit capable de retrouver et d’équilibrer ses énergies et de réguler ses émotions pour atteindre un minimum de bien-être et de disponibilité pour affronter les situations de la vie courante.

    Nous croyons que l’équilibre et le renouvellement des énergies et la régulation des émotions sont des habiletés qui se développent à partir de la naissance, par l’ensemble du vécu corporel à travers des relations bienveillantes stables. Ainsi, accompagner l’enfant et lui apprendre à équilibrer et à renouveler ses énergies, ainsi qu’à réguler ses émotions fait largement partie de l’éducation psychomotrice, au même titre que les composantes du développement psychomoteur. Retenons que ces deux volets assurent le dynamisme et l’autonomie de l’enfant⁸.

    Nous décrirons, dans la troisième partie, des interventions favorables à l’équilibre, au renouvellement des énergies de même qu’à l’apprentissage de la régulation des émotions. Nous verrons également comment les intégrer dans l’ensemble du processus de l’intervention éducative.

    Résumé

    Le concept d’éducation psychomotrice comporte une vision globale de l’être humain, que nous avons définie par l’expression «unité de la personne». L’éducation psychomotrice accorde au corps une place prépondérante dans le développement de l’enfant.

    L’éducation psychomotrice, telle que définie, porte donc sur l’intervention favorable au développement de l’activité sensorielle, perceptive et motrice, et à son utilisation comme moyen de bien-être et de développement global de l’enfant. Elle vise l’acquisition d’habiletés motrices et psychomotrices. Elle suppose une intervention adaptée au niveau de développement, aux particularités de l’enfant et au contexte dans lequel il évolue.

    Ainsi, l’intervention en éducation psychomotrice s’articule autour de deux volets: le développement psychomoteur et ses sept composantes, ainsi que l’équilibre et le renouvellement des énergies, et la régulation des émotions (ÉRÉ-RÉ).

    Avant de traiter de l’éducation psychomotrice comme telle en fonction de chaque âge et afin d’apprendre à intervenir en ce sens, en comprenant bien la dynamique de tous

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