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L' Échange de connaissances en petite enfance: Comment mettre à profit les expertises des chercheurs et des praticiens
L' Échange de connaissances en petite enfance: Comment mettre à profit les expertises des chercheurs et des praticiens
L' Échange de connaissances en petite enfance: Comment mettre à profit les expertises des chercheurs et des praticiens
Livre électronique383 pages3 heures

L' Échange de connaissances en petite enfance: Comment mettre à profit les expertises des chercheurs et des praticiens

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Ce collectif vise à présenter des expériences d’échanges de connaissances menées au Québec par des chercheurs et des praticiens de la petite enfance et issus de divers contextes éducatifs, tels que des services de garde, des écoles, des milieux communautaires et des services sociaux.
LangueFrançais
Date de sortie17 oct. 2011
ISBN9782760530713
L' Échange de connaissances en petite enfance: Comment mettre à profit les expertises des chercheurs et des praticiens
Auteur

Nathalie Bigras

Nathalie Bigras, Ph.D. en psychologie, est professeure titulaire au département de didactique de l’Université du Québec à Montréal et directrice scientifique de l’Équipe de recherche Qualité des contextes éducatifs de la petite enfance. Elle est professeure externe aux Départements de psychologie de l’UQAM et l’Université de Sherbrooke, ses travaux portent sur la qualité des services de garde éducatifs (SGÉ), l’accès aux SGÉ des familles démunies, la mesure de la qualité et la formation initiale et continue, pour mieux répondre aux besoins des enfants et des familles.

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    Aperçu du livre

    L' Échange de connaissances en petite enfance - Nathalie Bigras

    Canada

    Introduction

    Pourquoi aborder l’échange de connaissances en petite enfance?

    Nathalie Bigras

    Université du Québec à Montréal

    Caroline Bouchard

    Université Laval

    Cet ouvrage collectif vise à présenter des expériences d’échanges de connaissances menées au Québec par des chercheurs et des praticiens de la petite enfance issus de divers contextes éducatifs, tels que des services de garde, des écoles, des milieux communautaires et des services sociaux. C’est le fruit d’un colloque ayant eu lieu en mai 2010 dans le cadre du congrès de l’ACFAS. Ce colloque, dont le thème était «Échange de connaissances en petite enfance: comment mettre à profit l’expertise des chercheurs et des praticiens», visait à rapprocher les chercheurs et les praticiens, et ultimement favoriser une meilleure utilisation des connaissances issues de la recherche dans la pratique.

    Dans ce but, ce collectif vise à souligner le rôle fondamental de l’échange de connaissances dans l’offre de services éducatifs de qualité pour les enfants à la période de la petite enfance. De plus, et bien que traditionnellement entreprises par des chercheurs, il souhaite témoigner du fait que plusieurs expériences d’échanges de connaissances que nous y rapportons ont été initiées par des praticiens. En effet, plusieurs chapitres découlent d’une collaboration praticiens-chercheurs réalisée à la demande des praticiens (voir les chapitres 4, 5, 6, 7 et 8). La mise en commun des résultats de ces expériences d’échanges de connaissances ayant été menées au Québec nous apparait d’une grande valeur sociale. Elle permettra d’analyser les composantes de ces expériences afin d’identifier les éléments à prendre en compte. L’ensemble du collectif sert ainsi à faire le point et à dégager des problématiques qui reflètent les préoccupations communes aux praticiens et aux chercheurs. Quelles sont les activités d’échanges de connaissances menées dans le domaine de la petite enfance au Québec? Quels sont les cadres de référence sur lesquels s’appuient ces différentes expériences? Quelles stratégies et problématiques des chercheurs rejoignent davantage les préoccupations des praticiens et inversement? Comment les praticiens peuvent-ils influencer le choix de thèmes de recherche pertinents pour la pratique? Ces questions, et bien d’autres encore, font l’objet de ce collectif.

    Cet ouvrage est organisé en cinq parties complémentaires: 1) les notions théoriques sur l’échange de connaissances, 2) les projets de grande envergure mobilisateurs et rassembleurs, 3) les projets liés à l’évaluation et à l’intervention en petite enfance, 4) les projets locaux visant la préparation à l’école et la réussite scolaire, 5) les projets visant l’accroissement des connaissances sur les pratiques éducatives et la qualité des services. La première partie aborde des notions théoriques portant sur l’échange de connaissances. Dans le premier chapitre, nous dressons d’abord un état des lieux de l’échange des connaissances, au Québec comme ailleurs dans le monde. Ce chapitre, rédigé par Lemire, Bigras et Eryasa, tisse la trame de fond de l’ouvrage et permet au lecteur de se familiariser avec ce domaine de recherche. Il est en quelque sorte une introduction au concept d’échange de connaissances et il explique les écarts considérables qui existent entre les résultats de la recherche et leur utilisation dans la pratique. Il propose certaines stratégies qui favorisent l’échange des connaissances dans les différents milieux. Enfin, il suggère des moyens à prendre pour faciliter ce rapprochement entre les chercheurs et les praticiens, en particulier par l’utilisation d’un partenariat égalitaire entre praticiens et chercheurs.

    Ce type de partenariat est d’ailleurs l’une des principales caractéristiques que présentent Théolis, Bigras, Desrochers, Brunson, Régis et Prévost, lorsqu’ils analysent, au chapitre 2, les éléments favorables à la collaboration recherche-pratique dans le cadre de la rédaction d’un livre portant sur les initiatives 1,2,3 Go! À l’aide d’un modèle théorique mis au point par D’Amour et ses collègues (2005), les auteurs proposent leur interprétation des résultats de quatre dimensions de la collaboration: 1) finalités poursuivies, 2) intériorisation, 3) formalisation et 4) gouvernance. Leurs constats vont dans le même sens que ce qui a été recensé par Lemire et ses collègues (voir le chapitre 1), à savoir que la confiance réciproque, mais aussi la connectivité entre les membres du groupe sont des facteurs déterminants de réussite d’un processus de partenariat entre praticiens et chercheurs.

    La seconde partie de l’ouvrage présente deux projets de grande envergure dont les visées de mobilisation et d’appropriation du pouvoir autour des tout-petits étaient prioritaires. Dans le chapitre 3, Isabelle Samson et Danielle Durand de la Direction de santé publique de l’Agence de la santé et des services sociaux de Montréal, ainsi que Louana Angeles, chargée de projet du chantier Parents pour le sommet montréalais sur la maturité scolaire, présentent l’expérience de l’initiative des sommets à la suite de la diffusion des résultats de l’enquête montréalaise sur la maturité scolaire. Elles mettent en lumière l’intérêt d’utiliser un processus de mobilisation en permettant aux intervenants œuvrant dans tous les secteurs de la petite enfance de s’approprier les résultats d’une enquête sur la maturité scolaire des enfants montréalais, pour ensuite réfléchir ensemble à des solutions adaptées aux diverses communautés. Cette mobilisation décentralisée a donné lieu à un grand rassemblement régional qui avait pour but de mieux soutenir le développement des enfants.

    Cet objectif de mobilisation autour des enfants était aussi poursuivi par le projet Odyssée, dont l’analyse théorique des effets (évaluation de programme) est présentée par François Chagnon, Louise Pouliot, Manon Théolis et Geneviève Issalys au chapitre 4. On y trouve les résultats de l’évaluation de l’implantation et des effets du projet Odyssée, mis en œuvre par l’Association québécoise des centres de la petite enfance du Québec (AQCPE). Ce projet a été implanté dans les centres de la petite enfance selon une approche fondée sur la collaboration entre la recherche et la pratique et ayant pour objectif l’amélioration continue des pratiques. L’évaluation de type participatif a adopté une approche centrée sur la théorie du programme et a utilisé des études de cas afin d’examiner en profondeur l’implantation et les effets du projet dans trois regroupements de centres de la petite enfance (RCPE) au Québec. Les auteurs rapportent des effets positifs et montrent les avantages de l’approche de coconstruction adoptée par les promoteurs du projet afin de susciter la mobilisation et la participation des membres du réseau. Ils soulignent cependant les défis et les tensions que comporte une telle approche, tant chez les partenaires de la pratique que chez ceux de la recherche. L’évaluation souligne l’importance de la mobilisation non seulement des éducatrices, mais aussi des gestionnaires, afin de produire les effets désirés dans une approche qualité.

    La troisième partie est consacrée à deux projets liés à l’évaluation et à l’intervention en petite enfance. Au chapitre 5, Jacques Moreau, Renée Latulippe, Michèle Poirier et Claire Vaillancourt présentent la Grille d’évaluation du développement (GED) comme moyen de partage de connaissances et d’intervention en petite enfance. Les auteurs retracent l’historique de la conception de l’outil, de même que le soutien offert aux utilisateurs afin d’en favoriser une utilisation adaptée et appropriée par les milieux de pratiques de la petite enfance en services de garde, en centre jeunesse et en protection de l’enfance en Europe. Encore une fois, cette expérience souligne l’intérêt pour les chercheurs de prendre en compte les besoins particuliers des utilisateurs. Ce constat est aussi repris au chapitre 6 par Geneviève Tardif, Francine Lavigne et Alexandra Douyon qui font état des défis auxquels une équipe composée de praticiens en centre jeunesse et d’une professeure-chercheuse de l’UQO a dû faire face, ainsi que des solutions que cette équipe a mises en place pour maximiser le transfert de connaissances sur la notion de la relation d’attachement. Cette expérience de collaboration et d’accompagnement clinique montre clairement que les exigences de la réalité du terrain passent par des conditions leur permettant de disposer de temps pour réfléchir à leurs pratiques, ce qui n’est pas fréquent dans un contexte de restrictions budgétaires.

    La quatrième partie aborde deux projets locaux, élaborés par les milieux de pratique, et visant la préparation à l’école et la réussite scolaire des enfants. Dans un premier temps, au chapitre 7, Gilles Cantin, Marie-Agnès Lebreton, Caroline Bouchard et Annie Charron font part de leurs réflexions sur une approche participative de l’évaluation du programme Accès à l’école (AE). Leur chapitre permet de cerner les avantages et les limites de l’approche participative utilisée pour l’évaluation du programme AE visant l’intégration des enfants en maternelle 4 ans. Plus particulièrement, les auteurs y abordent les effets de cette approche participative sur les participants. Leurs constats, qui sont de deux ordres, recoupent les propos des chapitres qui précèdent. En effet, le respect et la reconnaissance de l’autre demeurent des conditions particulièrement favorables puisqu’elles contribuent à maintenir la confiance mutuelle, tout en favorisant une véritable collaboration.

    Les auteurs du chapitre 8 (Annie Charron, Caroline Bouchard, Brigitte Gagnon, Christian Hinse, Ruth Audet et Isabelle Rodrigue) s’inscrivent aussi dans une démarche participative de type recherche-action. Ils font état d’une expérience menée dans une école primaire afin de soutenir les pratiques enseignantes destinées à améliorer les compétences des élèves en français langue d’enseignement, et ce, dès la maternelle. Leur expérience a démontré que ce type de recherche a sa place dans le milieu de l’éducation et que tous les acteurs ont intérêt à y travailler ensemble. En particulier, le développement d’un langage commun entre les praticiens et les chercheurs constitue l’une des retombées positives de ce projet. Plus encore, au terme de la première année la direction de l’école, en partenariat avec la conseillère pédagogique et la chercheuse principale, a mis en place des mesures de transfert de connaissances au sein de la commission scolaire. De leur côté, les chercheuses ont pu tirer des conclusions permettant de valider l’expérience auprès de leurs pairs.

    Dans la cinquième et dernière partie, nous abordons des projets visant une meilleure connaissance des pratiques éducatives et de la qualité des services. À ce sujet, le chapitre 9, rédigé par Johanne April de l’Université du Québec en Outaouais (UQO), nous renseigne sur la nature et le sens de la pratique des éducatrices en centre de la petite enfance (CPE) en lien avec la dimension psychomotrice (recherche-action). Cette recherche-action, réalisée en collaboration étroite avec un CPE, a permis d’identifier les besoins spécifiques des praticiennes dans le but ultime d’élaborer des outils de formation et d’offrir des repères à la fois théoriques et pratiques aux éducatrices.

    Enfin, Thérèse Besnard (Université de Sherbrooke), Aise Dyren (Cégep de Sherbrooke) et François Vaillancourt (CPE Carrosse-Citrouille) se demandent si nous avons besoin de plus d’hommes éducateurs dans les services de garde éducatifs. Ils rapportent en outre que, si de nombreux organismes demandent un nombre accru d’éducateurs masculins, à l’opposé certains craignent que leur présence entraîne une augmentation des cas de pédophilie entre autres. Leur méthode de travail consiste ainsi à confronter les points de vue des gestionnaires et des éducateurs de CPE avec les conclusions des travaux scientifiques. Les auteurs mettent l’accent sur l’importance de la collaboration entre les milieux des SGÉ et de la mise à l’épreuve des perceptions, si l’on souhaite dissiper les préjugés les concernant.

    Nathalie Bigras et Caroline Bouchard concluent cet ouvrage en abordant l’analyse de l’expérience du collectif. Quels sont les obstacles et les éléments facilitateurs qui sont apparus au cours de la mise en œuvre de cet ouvrage? Quels sont les enjeux liés à ce type de collaboration recherche-pratique? Voilà les questions auxquelles elles tentent de répondre afin de synthétiser l’ensemble de la démarche entreprise sur l’échange de connaissances en petite enfance. Elles terminent en indiquant certaines pistes de réflexion pour l’avenir.

    PARTIE 1

    NOTIONS THÉORIQUES SUR L’ÉCHANGE DE CONNAISSANCES

    CHAPITRE 1

    L’échange de connaissances en petite enfance: état des lieux

    Julie Lemire

    Université du Québec à Montréal

    Nathalie Bigras

    Université du Québec à Montréal

    Joell Eryasa

    Université du Québec à Montréal

    RÉSUMÉ

    Ce chapitre présente un survol du concept d’échange de connaissances. Un écart considérable existerait entre les connaissances acquises par la recherche et celles utilisées dans la pratique. Parmi les stratégies favorisant l’échange de connaissances dans les différents milieux, il serait capital de miser sur la qualité des relations qui se développent entre les différentes personnes significatives. Il apparaîtrait aussi primordial de faire participer les gens de façon interactive à toutes les étapes du processus. Un modèle de partenariat égalitaire serait à privilégier. Les communications gagneraient à être taillées sur mesure pour l’auditoire ciblé et transmises par un leader crédible spécialisé dans le domaine. Dans l’ensemble, il vaudrait mieux prendre le temps d’analyser le contexte dans lequel on veut réaliser un échange de connaissances réussi.

    Les travaux récents font ressortir un écart considérable entre les connaissances acquises par la recherche et celles utilisées dans la pratique. Cet écart est constaté de part et d’autre, et ce, dans plusieurs domaines (Beutler, Williams, Wakefield et Entwistle, 1995; Myers-Walls, 2000; Shonkoff, 2000; Small, 2005; Wandersman et al., 2008), notamment en médecine, en sciences de la santé, en psychologie et en éducation. Malgré la pertinence de certains résultats de recherche, il semblerait que ceux-ci passent souvent inaperçus dans l’abondante documentation disponible sur un même thème. De plus, ces résultats seraient diffusés dans des revues scientifiques ou spécialisées qui ne seraient pas toujours faciles d’accès. La valeur sociale des nouvelles données de recherche de même que la possibilité qu’elles soient utilisées dans la pratique s’en trouvent donc diminuées (Williams et al., 2008).

    Ce chapitre présente un survol du concept d’échange de connaissances. Dans un premier temps, nous tentons d’expliquer le décalage entre les milieux de la recherche, de la pratique et de l’élaboration de politiques sociales. Nous décrivons ensuite les facteurs qui font obstacle ou qui, à l’inverse, facilitent l’échange de connaissances, de même que plusieurs stratégies considérées comme efficaces pour le favoriser. Pour terminer, le chapitre aborde un volet particulier de l’échange de connaissances en examinant quels types de formations permettent aux professionnels d’intégrer efficacement, dans leurs pratiques quotidiennes, de nouveaux acquis. Nous présentons, notamment, les résultats d’une étude sur la formation d’éducatrices en service de garde éducatif.

    1. DU TRANSFERT À L’ÉCHANGE DE CONNAISSANCES: UN CONCEPT EN ÉVOLUTION

    Le concept d’échange de connaissances, relativement récent, s’inspire de celui de transfert de connaissances. Ce dernier avait pour objectif de départ de mieux comprendre l’écart existant entre la recherche et la pratique ainsi que de déterminer les freins et les facilitateurs de l’utilisation des connaissances scientifiques par les milieux de pratique. Il visait aussi à documenter les stratégies efficaces de transfert des nouveaux savoirs du milieu de la recherche vers celui de la pratique, et ce, dans le but ultime de réduire les disparités entre ces deux univers. Le concept de transfert de connaissances a évolué au fil du temps. Dans les années 1990, il se définissait surtout comme un processus unidirectionnel par lequel les producteurs de données de recherche (les chercheurs) apportaient des connaissances aux praticiens (Lavis, Robertson, Woodside, McLeod et Abelson, 2003). Ce caractère traditionnel et unidirectionnel du transfert de connaissances a alors été critiqué comme faisant de celui-ci une stratégie peu efficace pour l’adoption et l’implantation des connaissances obtenues grâce aux résultats de recherche dans les milieux de la pratique (Landry, Amara et Lamari, 2001). L’appellation a de ce fait été appelée à évoluer. Il apparaît dorénavant évident que l’utilisation des constats empiriques obtenus en recherche requiert non pas une communication à sens unique, mais bien de véritables interactions entre les chercheurs et les autres acteurs d’un champ d’application visé, notamment les praticiens et les décideurs (Lavis et al., 2003).

    À ce sujet, une récente étude menée par Graham et al. (2006) a dénombré près d’une trentaine d’appellations pour définir le concept recouvrant le processus global de transfert de connaissances. Parmi les plus utilisées, on trouve, dans la littérature anglophone, knowledge translation, knowledge transfer, knowledge exchange, research utilization, implementation, dissemination et diffusion. Dans la littérature francophone, en plus de transfert de connaissances, les termes fréquemment utilisés sont valorisation de la recherche, application des connaissances et échange de connaissances (Élissalde et Renaud, 2010). Il y aurait actuellement absence de consensus, autant dans la littérature anglophone que francophone, concernant une dénomination unique d’un thème qui, pourtant, suscite un intérêt commun, considérable et grandissant.

    En l’absence d’unanimité, l’appellation échange de connaissances sera utilisée dans le présent chapitre, dans le sens où celle-ci représente une interaction entre l’utilisateur des connaissances et le chercheur, qui se traduit par un apprentissage mutuel (Instituts de recherche en santé du Canada, 2010) ou, autrement dit, un effort coopératif des chercheurs et des décideurs visant à résoudre des problèmes grâce à des activités de transfert et d’échange. Un bon échange de connaissances implique des interactions entre chercheurs et utilisateurs de connaissances et amène chaque partie à développer ses connaissances dans le cadre de la planification, de la production, de la diffusion et de l’application de la recherche (nouvelle ou existante) à la prise de décisions (Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé, 2010).

    L’objectif premier de l’échange de connaissances est de permettre à la pratique et aux concepteurs de politiques sociales de tirer profit des constats empiriques de la recherche, ainsi que de permettre aux chercheurs de soulever, sur le terrain, des questions de recherche adaptées à la pratique et aux politiques sociales (Williams et al., 2008). Malgré les retombées positives d’un tel processus, il semble que les échanges de connaissances ne soient pas fréquents. À ce sujet, la recherche a identifié un certain nombre de raisons qui expliqueraient ce phénomène. La prochaine section en présente un aperçu.

    2. LES RAISONS QUI EXPLIQUENT L’ÉCART ENTRE LA RECHERCHE ET LA PRATIQUE

    Selon certains auteurs (Shonkoff, 2000; Small, 2005), les fonctions et tâches relatives respectivement aux domaines de la recherche, de la pratique et de la conception de politiques sociales seraient très différentes et exigeraient des habiletés et des connaissances distinctes. Ces disparités contribueraient à l’apparition de structures et de cultures professionnelles distinctes, qui présenteraient un langage différent et des valeurs parfois contradictoires. C’est ce que Caplan (1979) a nommé le phénomène des two communities theory, en comparant l’univers de la recherche à celui de la conception des politiques sociales. Selon cette théorie, les chercheurs seraient plus intéressés à la science par passion et par soif des connaissances qu’elle peut apporter à leur domaine de recherche. Pour leur part, les décideurs s’intéresseraient plutôt aux aspects pratiques et aux conséquences immédiates d’une action pour établir les politiques sociales. Conséquemment, ces deux disciplines se baseraient sur des sources différentes de connaissances pour vérifier leurs hypothèses et pour prendre des décisions. Dans le même ordre d’idées, Myers-Walls (2000) souligne que les chercheurs et les praticiens se retrouvent parfois dans des situations conflictuelles puisqu’ils se distinguent par rapport à leur organisation dans le temps, par leurs valeurs, par leur style de travail, par leurs objectifs et par leurs façons de communiquer.

    De plus, étonnamment, il semblerait que les nouvelles connaissances provenant de la recherche soient peu connues des personnes qui, pourtant, pourraient en bénéficier le plus (Small, 1996). Cela s’expliquerait entre autres par la difficulté d’avoir accès à ces données, puisque peu de praticiens considéreraient les revues scientifiques comme des sources de connaissances adaptées (Kanfer, 1990). Beutler, Williams et Wakefield (1993) montrent que les praticiens se tourneraient plutôt vers des livres de vulgarisation, des ateliers de formation professionnelle et des revues orientées vers la pratique plutôt que vers des revues scientifiques. De leur côté, il semblerait que les chercheurs aient une mauvaise compréhension des dynamiques liées à la prise de décision quant aux politiques sociales, de sorte qu’ils présenteraient et diffuseraient leurs

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