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Les clauses abusives et illicites dans les contrats usuels: (Droit belge)
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Les clauses abusives et illicites dans les contrats usuels: (Droit belge)
Livre électronique430 pages5 heures

Les clauses abusives et illicites dans les contrats usuels: (Droit belge)

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À propos de ce livre électronique

Le principe fondamental de la liberté contractuelle devrait permettre aux parties de négocier individuellement chaque clause d’un contrat sur un pied d’égalité.

Force est cependant de constater que les contrats dans lesquels la partie économiquement forte impose ses conditions à l’autre sont légion.
Dans cet ouvrage, les auteurs se penchent sur les clauses illicites et abusives que peuvent contenir ces contrats d’adhésion et sur les moyens dont dispose la partie réputée économiquement faible pour s’en protéger.

Ces spécialistes de la matière examinent les régimes spécifiques applicables à ces clauses lorsqu’elles sont insérées dans des contrats de travail, de bail, de téléphonie mobile, de fourniture d’énergie, d’assurance ou encore dans des contrats conclus avec les titulaires de profession libérale.
LangueFrançais
ÉditeurAnthemis
Date de sortie9 avr. 2015
ISBN9782874557835
Les clauses abusives et illicites dans les contrats usuels: (Droit belge)

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    Les clauses abusives et illicites dans les contrats usuels - Collectif

    ACQUEMIN

    Les clauses abusives dans les contrats de téléphonie et de fourniture d’énergie conclus avec des consommateurs

    Cécile D

    ELFORGE

    Avocate au barreau de Liège

    Assistante à l’Université de Liège

    Introduction

    1. Aujourd’hui, tous les ménages concluent un ou plusieurs contrats de téléphonie et de fourniture d’énergie. La plupart de ces contrats concernent des personnes physiques ayant la qualité de consommateur¹. Longtemps objets de monopoles, les secteurs de la téléphonie et de l’énergie ont été libéralisés. Cette libéralisation a eu pour conséquence un morcellement de compétences entre les autorités régulatrices². L’apparition de nouveaux acteurs sur ces marchés a entraîné la prolifération d’offres aux tarifs et conditions complexes ne facilitant pas toujours, loin s’en faut, leur compréhension par le consommateur et le choix de celui-ci. La multitude de contrats conclus dans ces domaines conduit, en outre, à un contentieux que l’on peut sans peine qualifier de contentieux de masse. Dans ce contexte, l’étude du régime des clauses abusives dans les contrats de téléphonie et de fourniture d’énergie conclus avec des consommateurs prend toute son importance.

    Section 1

    La législation applicable

    2. Les secteurs de la téléphonie et de la fourniture d’énergie sont régis par divers corps de règles émanant de différents niveaux de pouvoir dont l’examen exhaustif dépasse largement le cadre de la présente contribution. Notre proposse limitera à l’étude du régime des clauses abusives dans les contrats entre entreprises et consommateurs, spécialement dans les contrats de téléphonie et de fourniture d’énergie³, tel que ce régime résulte de la loi du 6 avril 2010 relative aux pratiques du marché et à la protection du consommateur (ci-après L.P.M.C.)⁴. Nous signalerons toutefois, ponctuellement et toujours sans prétendre à l’exhaustivité, certaines dispositions de législations spécifiques pouvant interférer avec ce régime.

    3. Avant d’entrer dans le vif du sujet, il n’est pas inutile de signaler que les secteurs de la téléphonie et de l’énergie se sont dotés⁵ de codes de conduite ayant pour objectif d’améliorer la protection du consommateur et qui contiennent une série d’engagements en ce sens. Ainsi, en matière d’énergie, un code de conduite est annexé à l’accord « Le consommateur dans le marché libéralisé de l’énergie et du gaz »⁶ dont le non-respect pourrait, à certaines conditions, être qualifié de pratique commerciale déloyale ou de clause abusive au sens de la L.P.M.C.⁷. Le secteur de la téléphonie connaît également de tels codes de conduite⁸.

    Section 2

    La loi du 6 avril 2010 relative aux pratiques du marché et à la protection du consommateur : champ d’application et définitions

    4. La loi du 6 avril 2010 relative aux pratiques du marché et à la protection du consommateur est entrée en vigueur le 12 mai 2010 et a abrogé la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et sur l’information et la protection du consommateur (ci-après L.P.C.C.)⁹.

    Le régime relatif aux clauses abusives contenu dans la L.P.C.C., issu de la transposition de la directive 93/13/CEE¹⁰ est, en grande partie, repris aux articles 73 à 78 de la L.P.M.C.

    Préalablement à l’examen détaillé de ce régime, il convient de circonscrire le champ d’application tant ratione personae que ratione materiae de la L.P.M.C., en partant de la définition de la clause abusive.

    5. L’article 2, 28° de la L.P.M.C. définit la clause abusive comme « toute clause ou toute condition dans un contrat entre une entreprise et un consommateur qui, à elle seule ou combinée avec une ou plusieurs autres clauses ou conditions, crée un déséquilibre manifeste entre les droits et les obligations des parties au détriment du consommateur ». Il en résulte que pour contrôler le caractère potentiellement abusif d’une clause, celle-ci doit nécessairement figurer dans un contrat conclu entre une entreprise et un consommateur, d’où l’intérêt d’appréhender également ces notions qui délimitent le champ d’application ratione personae de la L.P.M.C.¹¹.

    6. Le consommateur est « toute personne physique qui acquiert ou utilise à des fins excluant tout caractère professionnel des produits mis sur le marché »¹², les « produits » étant « les biens et les services, les biens immeubles, les droits et les obligations »¹³, ce qui recouvre, sans nul doute possible, la fourniture d’énergie et la téléphonie.

    7. Quant à l’entreprise¹⁴, elle désigne « toute personne physique ou personne morale poursuivant de manière durable un but économique, y compris ses associations »¹⁵.

    Sous l’empire de la L.P.C.C., les organismes publics et les personnes morales de droit public qui exerçaient une activité à caractère commercial, financier ou industriel et qui offraient en vente ou vendaient des produits ou des services étaient expressément qualifiés de « vendeurs »¹⁶ et donc soumis à la loi. La Cour constitutionnelle¹⁷ et la Cour de cassation¹⁸ ont confirmé qu’il en était ainsi « en ce compris dans le cadre de l’accomplissement de leurs prestations de service public sous réserve de dispositions légales contraires ou d’un conflit entre ces dispositions et les lois du service public »¹⁹. Cette jurisprudence revêtait une importance significative au regard de la protection du consommateur dans les domaines de la fourniture d’énergie et de la téléphonie en raison du monopole dont les pouvoirs publics ont longtemps bénéficié et du fait que certaines prestations fournies dans ces secteurs constituent des prestations de service public.

    La définition de l’entreprise figurant à l’article 2, 28° de la L.P.M.C. s’écarte pourtant de cette jurisprudence. Le législateur a souhaité qu’une appréciation concrète des prestations fournies par l’organisme public ou la personne morale de droit public soit effectuée afin de déterminer s’ils doivent être considérés comme une entreprise au sens de la loi²⁰. Une même entité pourra donc être soumise à la L.P.M.C. lorsqu’elle effectuera certaines prestations mais pas lorsqu’elle en fournira d’autres. Cette modification législative est regrettable. D’une part, elle est source d’une potentielle insécurité juridique puisqu’elle impose un examen de l’activité exercée par l’organisme public ou la personne morale de droit public et que cet examen pourra, dans certains cas, s’avérer malaisé. D’autre part, elle aboutit à limiter la protection des consommateurs lorsque leurs relations avec ces entités relèvent de l’exercice de leurs missions de service public.

    L’impact pratique de cette modification devrait toutefois être relativement limité dans les secteurs qui retiennent notre attention en ce qui concerne le régime des clauses abusives. Premièrement, les fournisseurs d’énergie et de services de téléphonie peuvent généralement être considérés, dans leurs rapports avec les consommateurs, comme des entreprises au sens de la L.P.M.C. dans la mesure où ces rapports représentent, en grande majorité, la poursuite d’un but économique durable. Deuxièmement, même dans le cadre de l’exercice d’une mission de service public, la modification de la définition de la notion d’entreprise dans la L.P.M.C. ne pourrait aboutir à ce que la L.P.M.C. entre en contradiction avec la directive 93/13/CEE qu’elle transpose et qui ne fait aucune distinction en fonction de l’activité publique ou privée du professionnel²¹. En matière de clauses abusives, les consommateurs devraient en principe pouvoir, nonobstant le changement législatif intervenu, bénéficier de la protection du régime des clauses abusives de la L.P.M.C. même si l’entité considérée est un organisme public agissant dans le cadre de ses missions de service public²².

    Section 3

    Le régime des clauses abusives dans la L.P.M.C.

    8. Le régime des clauses abusives comporte deux niveaux s’apparentant à deux types de règles. Le premier niveau se situe à l’article 73 de la L.P.M.C. qui est une norme générale contenant les critères d’appréciation du caractère abusif d’une clause. Le second niveau réside à l’article 74 qui abrite une liste noire de trente-trois clauses réputées abusives en toutes circonstances. Afin de contrôler l’éventuel caractère abusif d’une clause, on se reportera d’abord à la liste noire. Dans l’hypothèse où ce premier contrôle s’avérerait négatif, c’està-dire si la clause examinée ne correspond à aucune des clauses de la liste noire, on la confrontera alors à la norme générale de l’article 73.

    9. Soulignons d’emblée que l’examen du caractère abusif d’une clause n’a lieu d’être que si elle est entrée dans le champ contractuel et lie le consommateur. En droit commun des obligations, et a fortiori en droit de la consommation, le consommateur n’est pas tenu par la clause dont le contenu n’a pas été porté à sa connaissance ou dont il n’a pu raisonnablement prendre connaissance et qu’il n’a donc pu accepter avant la conclusion du contrat. L’article 4 de la L.P.M.C. renforce, à cet égard, l’obligation d’information de l’entreprise et requiert qu’« au plus tard au moment de la conclusion du contrat, [celle-ci apporte] de bonne foi au consommateur les informations correctes et utiles relatives aux caractéristiques principales du produit et aux conditions de vente, compte tenu du besoin d’information exprimé par le consommateur et compte tenu de l’usage déclaré par le consommateur ou raisonnablement prévisible »²³. De plus, les clauses écrites figurant dans un contrat conclu avec un consommateur « doivent être rédigées de manière claire et compréhensible »²⁴. Cette exigence de clarté et de compréhension est sanctionnée par l’interprétation la plus favorable au consommateur des clauses équivoques²⁵. Comme nous le verrons, elle est également prise en compte lors de l’appréciation du caractère abusif d’une clause²⁶.

    10. Dans les lignes qui suivent, nous envisagerons le régime des clauses abusives selon la manière dont le praticien doit l’appréhender. Nous commencerons donc par l’examen de la liste noire de l’article 74 avant de passer à la norme générale de l’article 73.

    § 1. La liste noire de l’article 74 de la L.P.M.C.

    11. L’article 74 de la L.P.M.C. contient une liste noire de trente-trois clauses ou conditions ou combinaisons de clauses et conditions réputées abusives en tout état de cause, aucun pouvoir d’appréciation n’étant laissé au juge. Cette liste ne présente pas d’ordre particulier. Dans un souci de clarté, nous avons choisi de répartir les trente-trois clauses qu’elle reprend en six catégories et d’en commenter la plupart. Nous illustrerons notre propos d’exemples concernant spécifiquement les contrats de fourniture d’énergie et de téléphonie mais aussi d’exemples plus généraux relatifs à tous types de contrats entre une entreprise et un consommateur.

    A. Clauses relatives à la formation du contrat

    Article 74, 1°: « prévoir un engagement irrévocable du consommateur, alors que l’exécution des prestations de l’entreprise est soumise à une condition dont la réalisation dépend de sa seule volonté ».

    Il ne pourrait, par exemple, pas être question pour une entreprise de prévoir que le consommateur est déjà engagé vis-à-vis d’elle alors qu’elle se réserverait le droit de fournir ou non sa prestation en fonction de l’appréciation arbitraire qu’elle ferait de certains éléments.

    Article 74, 26°: « constater de manière irréfragable l’adhésion du consommateur à des clauses dont il n’a pas eu, effectivement, l’occasion de prendre connaissance avant la conclusion du contrat ».

    Comme nous l’avons exposé²⁷, en droit commun, pour qu’une clause entre dans le champ contractuel, il est nécessaire que la partie à laquelle on l’oppose en ait pris connaissance ou ait pu en prendre raisonnablement connaissance. La charge de la preuve incombe à la partie qui se prévaut de la clause. Pour contourner cette difficulté, les contrats de consommation contiennent souvent des clauses d’adhésion en vertu desquelles le consommateur reconnaît avoir pris connaissance des conditions générales de l’entreprise ou en avoir reçu un exemplaire et les accepter.

    La Commission des clauses abusives n’a pas opéré de distinction en fonction du caractère réfragable ou non de l’adhésion résultant de clauses d’un contrat de téléphonie fixe. Selon elle, ces clauses qui énoncent que le consommateur « a accepté inconditionnellement les conditions générales alors qu’il n’a pas pu raisonnablement prendre connaissance de leur existence et de leur contenu sont contraires à l’article [74, 26°] »²⁸.

    Selon Reinhard Steennot, de telles clauses ne peuvent encourir de reproche sur la base de l’article 74, 26° puisque cet article interdit que l’adhésion du consommateur soit constatée de manière « irréfragable ». La protection dont jouit le consommateur en vertu du droit commun s’en voit dès lors amoindrie²⁹, même s’il demeure possible de vérifier la validité de telles clauses d’adhésion par rapport à la norme générale de l’article 73³⁰. Nous nous posons toutefois la question de savoir si de telles clauses d’adhésion, en ce qu’elles rendent, en pratique, impossible pour le consommateur d’apporter la preuve contraire³¹, ne pourraient tout de même pas relever de l’article 74, 26° malgré le fait qu’elles ne précisent pas expressément que la présomption d’adhésion est irréfragable.

    L’article 74, 26° peut être rapproché de l’obligation d’information générale qui pèse sur l’entreprise en vertu de l’article 4 de la loi et qui implique que le consommateur ait reçu toutes les données nécessaires avant la conclusion du contrat. Dès lors, dans un contrat de téléphonie conclu dans une téléboutique, la clause qui prévoirait que le consommateur a pris connaissance des conditions générales et les a acceptées sans réserve alors qu’il ne peut s’en procurer un exemplaire qu’en appelant un numéro spécial ou en consultant le site internet de l’entreprise contrevient à cette obligation d’information. Il ne peut être question d’imposer une démarche active au consommateur pour prendre connaissance de certains éléments du contrat tout en les lui réputant opposables par la conclusion même du contrat. La clause suivante, figurant dans les conditions générales applicables à un contrat de téléphonie fixe, viole donc l’article 4 de la L.P.M.C.: « La liste des prix, disponible sur le site internet de [l’opérateur] […] énonce l’ensemble des prix des prestations de [l’opérateur]. Des extraits actualisés peuvent être obtenus sur simple demande […]. Le contrat, les conditions générales, les prescriptions techniques […], la liste des prix, […], constituent l’ensemble du contrat conclu entre le Client et [l’opérateur]. Ces documents peuvent être obtenus dans tous les services de [l’opérateur] accessibles au public ou en téléphonant au service à la clientèle »³² ³³.

    C’est, semble-t-il, tant sur la base de l’article 74, 26° que de l’article 4 que le juge de paix de Grâce-Hollogne a sanctionné une clause d’adhésion figurant dans un contrat d’abonnement de téléphonie mobile. Selon le magistrat, « rien n’établit que [les conditions générales de l’opérateur] aient été portées à la connaissance du consommateur. […]. Aucune adhésion aux conditions générales […] ne peut être inférée de la signature que le consommateur défendeur a tracée sur la demande d’abonnement. La graphie intentionnellement illisible de la clause d’adhésion et des clauses protectrices du consommateur prive ces clauses d’effet »³⁴. Dans une autre décision, il a également stigmatisé, sur la base de l’article 74, 26°³⁵, la clause d’adhésion figurant dans un contrat de téléphonie en vertu de laquelle le consommateur déclarait avoir pris connaissance des conditions générales et les accepter. À son estime, cette clause avait « pour objectif […] de surprendre une reconnaissance qui ait pour effet non seulement d’assujettir le consommateur aux conditions générales, mais aussi de dispenser [l’entreprise] de la preuve effective de ses devoirs d’information […] »³⁶.

    Dans la même veine, le juge de paix d’Etterbeek a considéré, au sujet d’un contrat de téléphonie fixe, que « les conditions générales soumises à l’adhésion du contractant ne lui sont pas opposables si elles sont rédigées dans un caractère minuscule, spécialement lorsque ce procédé est réservé à la rédaction des clauses censées attester de la communication desdites conditions générales, et de leur acceptation »³⁷.

    Article 74, 27°: « permettre à l’entreprise de retenir des sommes versées par le consommateur lorsque celui-ci renonce à conclure ou à exécuter le contrat, sans prévoir le droit, pour le consommateur, de percevoir une indemnité d’un montant équivalent de la part de l’entreprise lorsque c’est cette dernière qui renonce ».

    Les clauses en vertu desquelles l’entreprise est autorisée à conserver par-devers elle l’acompte versé par le consommateur si ce dernier renonce à conclure ou à exécuter le contrat ne sont pas en tant que telles interdites par l’article 74, 27°. Elles ne sont dans le viseur de cette disposition que dans l’hypothèse où elles n’octroient pas, en contrepartie, une indemnité équivalente au consommateur en cas de dédit de l’entreprise³⁸.

    Article 74, 29°: « restreindre l’obligation de l’entreprise de respecter les engagements pris par ses mandataires, ou de soumettre ses engagements au respect d’une formalité particulière ».

    Si le consommateur signe un bon de commande que lui soumet un représentant de l’entreprise et que ce bon de commande comporte une clause disposant que l’entreprise ne peut être engagée avant d’avoir examiné et confirmé ellemême la commande, cette clause porte atteinte à l’article 74, 29° ³⁹.

    B. Clauses relatives à la durée du contrat

    1. Clauses de durée proprement dites

    Article 74, 18°: « engager le consommateur pour une durée indéterminée, sans spécification d’un délai raisonnable de résiliation ».

    Dans les contrats à durée indéterminée, un délai de résiliation doit être prévu et la durée de ce délai doit être raisonnable. Ce caractère raisonnable sera apprécié in concreto, en ayant notamment égard à la nature des produits⁴⁰.

    Article 74, 19°: « proroger le contrat à durée déterminée de livraison successive de biens pour une durée déraisonnable si le consommateur ne résilie pas à temps ».

    Article 74, 20°: « proroger automatiquement un contrat à durée déterminée en l’absence d’une notification contraire du consommateur, alors qu’une date excessivement éloignée de la fin du contrat a été fixée comme date limite pour exprimer cette volonté de non-prorogation de la part du consommateur ».

    Les points 19° et 20° de l’article 74 formaient initialement un seul et même texte dans la L.P.C.C.⁴¹ qui a été scindé dans la L.P.M.C.

    L’article 74, 19° ne vise que la prorogation des contrats portant sur des biens meubles corporels⁴², ce qui s’explique par le fait que l’article 82 de la L.P.M.C. règle la question de la reconduction tacite dans les contrats de services⁴³ à durée déterminée. L’article 82, § 1er, impose ainsi que la clause de reconduction tacite d’un contrat de service à durée déterminée conclu entre une entreprise et un consommateur « figure en caractères gras et dans un cadre distinct du texte, au recto de la première page ». La clause doit, en plus, reprendre « les conséquences de la reconduction tacite, et notamment la disposition du § 2, ainsi que la date ultime à laquelle le consommateur peut s’opposer à la reconduction tacite du contrat et les modalités selon lesquelles il notifie cette opposition ». Le second paragraphe de l’article 82 régit l’après-reconduction du contrat en dotant le consommateur d’un droit de le résilier « à tout moment, sans indemnité, au terme d’un délai de préavis déterminé dans le contrat, sans que ce délai puisse être supérieur à deux mois ».

    L’article 74, 20°, en revanche, ne fait aucune distinction entre les biens et les services. On peut donc en conclure qu’il joue pour tous les produits, qu’il s’agisse de biens ou de services. S’il peut être affirmé que la téléphonie relève des services, qualifier la fourniture d’énergie est plus difficile. La L.P.M.C. ne règle pas expressément la question mais on admet que le gaz et l’électricité peuvent être considérés comme des biens meubles corporels⁴⁴. En cela, les contrats de fourniture d’énergie sont donc soumis aux points 19° et 20° de l’article 74, alors que les contrats de téléphonie ne relèvent que de l’article 74, 20°, sous réserve de l’application de l’article 82.

    La durée des contrats de téléphonie et de fourniture d’énergie est également appréhendée par des législations spécifiques.

    En matière de téléphonie, l’article 108, § 1er/1, de la loi du 13 juin 2005 relative aux communications électroniques⁴⁵ prévoit que « le remplacement par le même opérateur d’un contrat à durée déterminée ou d’un contrat à durée indéterminée conclu avec un consommateur […] par un nouveau contrat conclu pour une durée déterminée est uniquement possible à [deux conditions] ». La première est que l’opérateur « ait préalablement averti le consommateur […] par écrit » qu’en « n’acceptant pas le remplacement, son contrat à durée déterminée en cours sera converti par application de l’article 82 de la [L.P.M.C.] à sa date d’échéance en un contrat à durée indéterminée, aux mêmes conditions et gratuitement résiliable à tout moment moyennant le respect du délai de préavis applicable de maximum deux mois » et qu’en « acceptant le remplacement, son contrat en cours sera remplacé par un nouveau contrat à durée déterminée, qui ne sera résiliable avant la date d’échéance que moyennant le paiement d’une indemnité de rupture, dont le montant [lui] sera également communiqué ». La seconde condition est que l’opérateur « ait reçu l’accord exprès et écrit du consommateur »⁴⁶.

    En outre, l’article 108, § 3 s’oppose à ce que le consommateur soit engagé pour une période initiale supérieure à vingt-quatre mois et impose aux opérateurs d’offrir la possibilité de conclure des contrats dont la durée initiale n’excède pas douze mois⁴⁷ ⁴⁸.

    Enfin, l’article 111/3, § 3 empêche l’opérateur de réclamer une indemnité de résiliation au consommateur qui résilie un contrat à durée indéterminée ou un contrat à durée déterminée six mois après son entrée en vigueur. Si le consommateur résilie le contrat à durée déterminée endéans cette période de six mois, l’indemnité de résiliation que l’opérateur est en droit de réclamer est plafonnée à hauteur du coût de l’abonnement courant jusqu’à la fin de cette période.

    En matière de fourniture d’électricité et de gaz, la loi du 29 avril 1999 relative à l’organisation du marché de l’électricité et la loi du 12 avril 1965 relative au transport de produits gazeux et autres par canalisations, telles qu’elles viennent d’être modifiées⁴⁹, confèrent au client résidentiel⁵⁰ un droit de résiliation du contrat, qu’il soit à durée déterminée ou indéterminée, sans indemnité, moyennant le respect d’un préavis d’un mois, et frappent de nullité toute clause contractuelle contraire.

    2. Faculté de résiliation unilatérale au profit de l’entreprise

    Article 74, 10°: « sans préjudice de l’article 1184 du Code civil, autoriser l’entreprise à mettre fin unilatéralement au contrat à durée déterminée, sans dédommagement pour le consommateur, hormis le cas de force majeure ».

    Article 74, 11°: « sans préjudice de l’article 1184 du Code civil, autoriser l’entreprise à mettre fin unilatéralement au contrat à durée indéterminée sans un délai de préavis raisonnable, hormis le cas de force majeure ».

    Les points 10° et 11° de l’article 74 étaient, auparavant, fondus dans une seule disposition: l’article 32, 9° de la L.P.C.C. Dans la L.P.M.C., deux points distincts permettent d’appréhender la résiliation unilatérale du contrat à l’initiative de l’entreprise selon qu’il s’agit d’un contrat à durée déterminée ou d’un contrat à durée indéterminée. Dans un contrat à durée déterminée, l’entreprise est tenue par le terme du contrat et ne peut anticiper ce terme sauf à indemniser le consommateur en conséquence. Dans un contrat à durée indéterminée, l’entreprise peut s’autoriser à mettre fin au contrat à condition qu’elle donne un préavis raisonnable au consommateur⁵¹. Il s’agit d’augmenter la protection que le consommateur tire du droit commun. En droit commun, la partie qui souhaite mettre fin à un contrat à durée indéterminée doit donner à son cocontractant un préavis raisonnable pour lui permettre de prendre ses dispositions. Le juge apprécie, le cas échéant, si le préavis donné respecte le principe d’exécution de bonne foi des conventions. L’article 74, 11° va plus loin car il oblige l’entreprise qui se dote d’un droit de résiliation unilatérale à prévoir un préavis raisonnable au profit du consommateur, le juge étant alors fondé à apprécier le caractère raisonnable de ce préavis sans avoir égard, ici, au principe d’exécution de bonne foi.

    Les points 10° et 11° de l’article 74 ne dérogent pas au droit commun en cas d’inexécution fautive du consommateur: comme ils ne portent pas préjudice à l’article 1184 du Code civil, l’entreprise peut solliciter en justice la résolution du contrat pour inexécution fautive. Il est admis que les points 10° et 11° ne font pas obstacle à l’insertion, dans le contrat, de clauses résolutoires expresses⁵². Enfin, les points 10° et 11° de l’article 74 réservent tous deux la force majeure.

    Dans une affaire soumise au juge de paix de Grâce-Hollogne, un opérateur de téléphonie fixe avait unilatéralement rompu le contrat le liant à une consommatrice après que celle-ci eut contesté une facture. L’opérateur se fondait en cela sur une clause du contrat lui permettant d’agir de la sorte « en cas de hausses anormales des frais de consommation du client ». Le juge de paix a déclaré cette clause abusive⁵³.

    Article 74, 28°: « permettre à l’entreprise de retenir les sommes versées par le consommateur lorsque c’est l’entreprise elle-même qui résilie le contrat ».

    L’article 74, 28° se situe dans le sillage de l’article 74, 10° et 11°: lorsque c’est l’entreprise qui, d’initiative, résilie le contrat, elle ne peut prévoir qu’elle conservera les montants déjà payés par le consommateur⁵⁴.

    C. Clauses réservant à l’entreprise un droit de modification unilatérale du contrat

    Article 74, 2°: « déterminer, dans les contrats à durée indéterminée, que le prix des produits est fixé au moment de la livraison ou permettre à l’entreprise d’augmenter unilatéralement le prix ou de modifier les conditions au détriment du consommateur sur la base d’éléments qui dépendent de sa seule volonté, sans que le consommateur ait le droit, dans tous ces cas, avant que le nouveau prix ou les nouvelles conditions s’appliquent, de mettre fin au contrat sans frais ou dommages-intérêts et sans lui laisser un délai raisonnable à cet effet.

    Sont toutefois autorisées et valides:

    les clauses d’indexation de prix pour autant qu’elles ne soient pas illicites et que le mode d’adaptation du prix soit explicitement décrit dans le contrat;

    les clauses selon lesquelles l’entreprise de services financiers se réserve le droit de modifier le taux d’intérêt dû par le consommateur ou dû à celui-ci, sans aucun préavis en cas de raison valable, pourvu que soit mise à la charge de l’entreprise l’obligation d’en informer le consommateur dans les meilleurs délais et que celui-ci soit libre de résilier immédiatement le contrat ».

    Article 74, 3°: « déterminer, dans les contrats à durée déterminée, que le prix des produits est fixé au moment de la livraison ou permettre à l’entreprise d’augmenter unilatéralement le prix ou de modifier les conditions au détriment du consommateur sur la base d’éléments qui dépendent de sa seule volonté, même si la possibilité de mettre fin au contrat est alors offerte au consommateur.

    Les exceptions prévues au 2°, alinéa 2, s’appliquent également en ce qui concerne le cas visé à l’alinéa 1er ».

    Au contraire de la L.P.C.C.⁵⁵, la L.P.M.C. distingue deux hypothèses en fonction de la durée du contrat.

    Dans un contrat à durée indéterminée et sous réserve de deux exceptions, l’entreprise peut se réserver la possibilité de modifier unilatéralement le prix à condition que le consommateur dispose du droit de mettre gratuitement un terme au contrat. Le consommateur doit, par ailleurs, être informé suffisamment à l’avance de la modification à intervenir pour pouvoir exercer son droit de résiliation endéans un délai raisonnable avant qu’elle entre en vigueur. Dans un contrat à durée déterminée – et toujours sous réserve des deux mêmes exceptions – il demeure en tout état de cause formellement interdit à l’entreprise de s’autoriser à modifier unilatéralement le prix des produits, indépendamment de tout droit de résiliation qui serait octroyé au consommateur en contrepartie.

    Les exceptions prévues pour les contrats à durée indéterminée s’appliquent, par renvoi, aux contrats à durée déterminée. Ainsi, dans les deux types de contrats, une clause d’indexation ne sera pas en elle-même abusive si elle est licite et si elle prévoit clairement le mode de calcul de l’indexation⁵⁶. Il en est de même, dans les contrats entre les entreprises de services financiers et les consommateurs, d’une clause de variation du taux d’intérêt pour autant que l’entreprise informe à temps le consommateur⁵⁷. Ces deux exceptions diffèrent néanmoins en ce que la mise en œuvre de la clause d’indexation n’ouvre pas de droit de résiliation au profit du consommateur alors que tel doit être le cas pour la clause faisant varier le taux d’intérêt.

    Ici encore, certaines dispositions de législations spécifiques aux secteurs que nous examinons retiennent l’attention.

    Pour la téléphonie, l’article 108, § 2, de la loi du 13 juin 2005 relative aux communications électroniques prévoit que « dès lors qu’ils sont avertis d’un projet de modification d’une clause du contrat conclu, les abonnés ont le droit de résilier leur contrat, sans pénalité », étant précisé qu’ils « doivent en être avertis individuellement et dûment, en temps utile, au plus tard un mois avant ces modifications, et sont informés, au même moment, de leur droit de résilier ce contrat sans pénalité au plus tard le dernier jour du mois qui suit l’entrée en vigueur des modifications, s’ils n’acceptent pas les nouvelles conditions ». Si la modification en cause est une augmentation tarifaire, l’abonné est autorisé à « résilier le contrat sans pénalité au plus tard le dernier jour du mois qui suit la réception de la première facture après l’entrée en vigueur des modifications ». L’application des dispositions relatives aux clauses abusives de la L.P.M.C. est, par ailleurs, expressément réservée, l’article 108, § 2 précisant qu’il s’applique sans préjudice de celles-ci⁵⁸.

    Dans le domaine de l’énergie, les lois du 29 avril 1999 relative à l’organisation du marché de l’électricité et du 12 avril 1965 relative au transport de produits gazeux et autres par canalisations ont été récemment modifiées afin que l’accord sectoriel « Le consommateur dans le marché libéralisé de l’électricité et du

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