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L'entreprise et la vente internationale de marchandises
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Livre électronique411 pages7 heures

L'entreprise et la vente internationale de marchandises

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À propos de ce livre électronique

Le droit français de la vente est-il un handicap ou un atout pour les entreprises françaises souhaitant se développer à l’international ?

L’ouvrage tente de répondre à cette question en s’interrogeant sur les forces et les faiblesses du droit français de la vente envisagé du point de vue des entreprises françaises exportatrices.

L'étude du CREDA est centrée sur l’exécution de la vente de marchandises, et met en lumière les multiples difficultés d’ordre juridique et judiciaire, dont celles relatives à la rupture du contrat. Les travaux, tout en faisant une large place au droit français, sont menés dans une perspective internationale.

Au-delà des règles inscrites dans le Code de commerce et le Code civil, ont été inclus dans le champ de l’analyse les dispositions de la Convention de Vienne, ainsi que les règlements « Rome I » et « Bruxelles I ».

Cette étude de nature essentiellement juridique comporte de nombreux volets pluridisciplinaires comme l’analyse économique du commerce extérieur français, celle de sentences arbitrales, ou encore l’examen du contentieux en matière de transport.
LangueFrançais
Date de sortie13 janv. 2016
ISBN9782804486044
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    L'entreprise et la vente internationale de marchandises - Éditions Larcier

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    Cette version numérique de l’ouvrage a été réalisée pour le Groupe Larcier.

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    © Groupe Larcier s.a., 2016

    Éditions Larcier

    Espace Jacqmotte

    Rue Haute, 139 – Loft 6 – 1000 Bruxelles

    Tous droits réservés pour tous pays.

    Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent ouvrage, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.

    ISBN : 978-2-8044-8604-4

    Sommaire

    Avant-propos

    Introduction

    Partie 1

    État des lieux de la pratique

    Chapitre 1

    Le commerce extérieur français : caractéristiques et mutations

    Jean-Luc

    Biacabe

    Chapitre 2

    Le regard de la pratique

    Claudine

    Alexandre-Caselli

    Annexes

    Partie 2

    Analyse juridique

    Chapitre 1

    Forces et faiblesses du droit interne français de la vente par rapport à la Convention de Vienne

    Claude

    Witz

    Chapitre 2

    Place des acteurs français et du droit français de la vente dans l’arbitrage CCI

    Emmanuel

    Jolivet

    et Stéphanie

    Torkomyan

    Annexes

    Chapitre 3

    Le droit français : un droit favorable à l’acheteur ou au vendeur ?

    Philippe 

    Delebecque

    et Arnaud

    Reygrobellet

    Chapitre 4

    Les forces et les faiblesses du droit français dans la relation entre la vente et le transport

    Philippe 

    Delebecque

    Conclusion

    Bibliographie

    Index

    Liste des auteurs

    Table des matières

    Avant-propos

    Lorsque le Centre de recherche sur le droit des affaires (CREDA) a lancé cette étude, la réforme du droit français des obligations apparaissait comme un horizon encore lointain. Nombreux étaient les observateurs convaincus de sa nécessité mais l’extrême difficulté de l’exercice, malgré la qualité des travaux préparatoires, son caractère périlleux aussi, laissaient à penser que cette petite révolution se ferait attendre quelques années encore. Pareillement, s’enlisait progressivement la curieuse idée de mettre en place un droit commun européen de la vente (Proposition de règlement du 11 octobre 2011, COM(2011) 635 final), justement critiquée tant par les organisations représentant les intérêts des consommateurs que par celles représentant les intérêts des milieux d’affaires et aujourd’hui abandonnée.

    Sans ignorer l’existence de ces projets, ce n’est pas dans leur sillage que les promoteurs de cette étude consacrée à la vente commerciale ont entendu s’inscrire. La réflexion entreprise a procédé d’une question simple, voire simpliste. Partant du constat que les entreprises françaises n’exportent pas suffisamment – le déficit commercial français, s’il s’est réduit en 2014 pour la troisième année consécutive, demeure à un niveau historiquement élevé (- 53,8 milliards d’euros fin décembre 2014) –, l’idée a consisté à s’interroger sur les forces et les faiblesses du droit français de la vente envisagé du point de vue des entreprises françaises exportatrices. Au fond, existe-t-il des spécificités du droit français qui viendraient au moins en partie expliquer cette situation ? Ou bien la dimension juridique est-elle parfaitement neutre à cet égard ? Ou bien encore, le droit français ne cèle-t-il pas des atouts dont les exportateurs auraient intérêt à tirer parti ?

    Simples à énoncer, ces questions étaient redoutablement complexes à traiter. À cela, plusieurs raisons.

    D’abord, sans nier l’importance de la structuration juridique des opérations d’exportation, il convenait de ne pas en survaloriser l’impact. La maîtrise des technologies, le positionnement prix/qualité, la parité euro/dollar, la politique de marketing sont des facteurs sans doute plus décisifs dans le développement et la réussite des exportations que le choix d’une règle ou d’un corps de règles. Ensuite, il s’est avéré bien délicat de savoir comment concrètement s’opère, dans une transaction commerciale, l’élection d’un droit plutôt qu’un autre. Au-delà du simple constat d’évidence que le cocontractant en position de force sera en mesure d’imposer son droit, et souvent aussi son juge, lorsque la solution de l’arbitrage n’est pas retenue, de multiples autres facteurs peuvent interférer dans la sélection du droit appelé à régir le contrat en voie d’élaboration : les usages du secteur économique, le recours à des conseils extérieurs plus à l’aise dans le maniement d’une législation que dans celui d’une autre, peut-être même l’habitude. Bref, les déterminants qui sont ici à l’œuvre ne procèdent pas toujours d’une volonté consciente et réfléchie. Or, plus que dans d’autres domaines, il s’est avéré difficile de procéder à des investigations statistiques de grande ampleur, permettant d’avoir un aperçu significativement pertinent sur les pratiques dominantes en la matière. On peut, du reste, le comprendre car on touche ici à l’alchimie contractuelle, qui a partie liée avec le secret des affaires.

    Indépendamment de ces difficultés pratiques, qui ont rendu délicate l’appréhension du phénomène, la recherche s’est heurtée à des obstacles plus théoriques. Pour que la réflexion ait un sens, elle ne pouvait embrasser l’intégralité des domaines ressortissant au « commerce extérieur » français selon la définition large qu’en donne la Comptabilité nationale. C’est pourquoi le propos a été resserré sur les seules ventes de biens meubles corporels, en excluant les services et tout l’univers incorporel pour lesquels les régimes spéciaux auraient été de nature à rendre moins net encore le décryptage de la situation. Pour les mêmes raisons, la dimension fiscale, y compris mais à regret douanière, n’a pas été intégrée à la réflexion.

    Autre difficulté, comment circonscrire le « droit français » de la vente commerciale ? Au-delà des règles inscrites dans le Code de commerce et le Code civil et de l’interprétation jurisprudentielle qui en est faite, il était évidemment impensable de ne pas inclure dans l’étude les dispositions de la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises, ne serait-ce que parce que celles-ci, certes supplétives, sont partie intégrante du droit substantiel français de la vente internationale. Pour la même raison, les règlements « Rome I », traitant de la loi applicable aux obligations contractuelles, et « Bruxelles I » concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale ont logiquement fait partie du débat.

    Voilà pour la délimitation du domaine de l’investigation.

    Quelle devait en être la méthode ? Si le droit comparé nourrit la plupart des études du CREDA, l’objet de la recherche excluait une approche comparative dans l’acception habituelle qu’en donne le monde académique. Pourtant, l’analyse comparative n’est pas absente de l’ouvrage. Simplement, elle s’est déportée vers d’autres domaines. En particulier, puisque le postulat de départ a consisté à évaluer le droit français du point de vue d’un exportateur localisé sur le territoire français, il était non seulement cohérent, mais indispensable de solliciter un économiste pour qu’il décrypte les principales caractéristiques du commerce extérieur français (circonscrit comme il a été dit plus haut) et en révèle les mutations en cours.

    Pareillement, il était naturel de chercher à mesurer la façon dont le droit français est bien, ou mal, reçu sans cantonner le regard sur le seul corpus jurisprudentiel émanant des juridictions étatiques. En ce domaine, plus qu’en tout autre, l’arbitrage occupe une place importante dans l’application du droit. Aussi doit-on se réjouir d’avoir pu, grâce à l’intervention de deux éminents spécialistes, avoir accès aux sentences arbitrales rendues sous l’égide la cour internationale d’arbitrage de la Chambre de commerce internationale.

    Pour le surplus, l’analyse présentée s’est attachée à puiser dans la jurisprudence publiée, tant par les juridictions françaises que communautaires, des éléments permettant d’évaluer les forces et les faiblesses du droit français.

    Quel est le résultat ? Sans anticiper sur le détail des analyses, on peut déjà révéler que le droit français n’apparaît nullement comme un droit dépassé. Au fil des années, il a su s’amender, s’ajuster au regard des besoins nouveaux qui sont apparus. La jurisprudence mais aussi la pratique des affaires, à travers les conditions générales, les contrats-types ont joué leur rôle. Sans doute, ici et là quelques ajustements seraient-ils profitables, spécialement pour mieux tenir compte de la qualité professionnelle des deux cocontractants dans l’hypothèse d’une vente commerciale internationale. Il nous paraît alors difficile de suivre Madame le Garde des Sceaux, lorsque, questionnée sur les forces du droit français aujourd’hui et afin de justifier la réforme entreprise du droit des obligations, elle affirme : « La situation de notre Code civil était très fragilisante pour les activités économiques en France » (C. Taubira, Enjeux Les Échos, juin 2015, n° 321, p. 89).

    Est-ce à dire qu’il ne fallait pas procéder à une telle réforme ? On ne saurait l’affirmer et tel n’était évidemment pas l’objet de la présente étude, d’autant que les modifications à venir épargnent les règles gouvernant le droit spécial de la vente, inscrites aux articles 1582 et suivants du Code civil. Sans doute, pouvait-on, à certains égards améliorer l’intelligibilité de la norme et son accessibilité en intégrant dans le Code des solutions solidement acquises en jurisprudence. Mais, ce dont les entreprises ont besoin, c’est d’une stabilité et d’une prévisibilité de la norme. En quelques occurrences, la réforme y pourvoit (notamment en énonçant qu’une promesse unilatérale est susceptible d’exécution forcée ou en reconnaissant clairement le droit pour le créancier à une exécution forcée en nature). Mais elle s’en éloigne par bien d’autres aspects (introduction de la notion de violence économique, admission de l’imprévision, extension du champ du déséquilibre significatif, etc.). En ouvrant ainsi de multiples portes, par lesquelles le juge sera autorisé à refaire ce qui a été voulu par les parties, la force obligatoire du contrat s’étiole et s’accroît ce faisant l’aléa inhérent à tout débat judiciaire. On peut craindre que cela soit de nature à dissuader les entreprises exportatrices françaises d’avoir recours au droit français et, par voie de conséquence, de s’en remettre au juge français ; et, plus encore, susciter un mouvement de raidissement de la part des partenaires étrangers lorsque la partie française suggère de gouverner leur relation en appliquant le droit français.

    Il n’est donc malheureusement pas certain que les modifications en cours soient de nature « à renforcer l’attractivité de notre droit pour les opérateurs internationaux » (C. Taubira, Enjeux Les Échos, juin 2015, n° 321, p. 89). On peut le regretter.

    Arnaud REYGROBELLET

    Introduction

    1. – Le CREDA a décidé très opportunément d’engager une étude sur le droit français de la vente internationale avec pour objectif d’identifier les forces et les faiblesses de notre droit. Au moment où l’on ne cessait de parler de la compétitivité des entreprises françaises, il s’agissait de se demander si le droit français était un frein aux exportations ou encore aux importations et compromettait, dans une certaine mesure, l’essor du commerce extérieur. Deux ans plus tard, l’étude peut être présentée. Elle n’est pas exhaustive, mais elle éclaire un certain nombre de questions que les professionnels, peut-être aussi les hommes politiques, sont en droit de se poser.

    2. – Il est indéniable que le droit français de la vente, du moins le droit français des ventes de marchandises au sens large du terme, n’est pas, de prime abord, très favorable au vendeur, contrairement au droit issu de la common law. Les obligations du vendeur sont devenues, en raison d’une jurisprudence très nourrie, lourdes, pesantes, voire handicapantes. L’observation se vérifie pour l’obligation de délivrance à laquelle s’accrochent aujourd’hui les obligations de renseignement, de conseil ou encore de mise en garde. Il arrive même que l’on fasse peser sur un fabricant une obligation de sécurité qui le conduit à indemniser son ou ses cocontractants des préjudices corporels dont ils peuvent être victimes. C’est un risque dont les entreprises doivent avoir conscience et qui n’est pas sans conséquence en termes d’assurance et donc de coût.

    De même en est-il – faut-il le rappeler ? – de l’obligation de garantie des vices cachés qui n’a cessé de s’étendre et d’être systématisée, même dans les relations entre professionnels. Il est devenu vraiment très difficile de s’y retrouver dans la jurisprudence contemporaine, car si la distinction entre l’obligation de conformité – qui relève de la délivrance – et l’obligation de garantie des vices est maintenue sur la base des textes du Code civil, sa mise en œuvre est délicate et particulièrement contentieuse. À cet égard, on ne peut que se féliciter de la simplification qu’apporte la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises qui fait désormais partie du corpus juridique français, du moins pour ce qui est des relations internationales¹.

    Que dire enfin des clauses limitatives de garantie qui ne trouvent que trop rarement grâce aux yeux des tribunaux, ces clauses n’étant admises que dans les relations entre professionnels de même spécialité, c’est-à-dire dans des situations très particulières et qu’il n’est sans doute pas possible de définir par avance ? Il est curieux que la liberté contractuelle ait été ainsi retranchée dans ses dernières extrémités. Le clivage droit de la consommation – droit professionnel, déjà contestable, n’est ici même pas respecté.

    3. – Il reste que lorsque le droit français s’applique dans les relations internationales commerciales, les solutions évoquées devraient changer, du moins connaître un certain assouplissement. On ne voit pas pourquoi, notamment, les clauses de garantie ne seraient pas acceptées lorsque le contrat a une dimension internationale et lorsque les parties ont la qualité de professionnel et sont à même de mesurer toutes les conséquences de leurs engagements. On pourrait parfaitement admettre que le droit français applicable dans les relations internationales soit plus flexible que ne peut l’être le droit français appelé à jouer dans les relations internes. C’est l’idée de règles matérielles propres à la vente internationale. À notre connaissance, cette idée est bien peu exploitée, si ce n’est à l’occasion de certains arbitrages.

    4. – En outre, comme nous l’avons dit, le droit français de la vente de marchandises, est, depuis l’entrée en vigueur de la Convention de Vienne de 1980 sur la vente internationale de marchandises, contenu dans cette convention. Cette convention est équilibrée sur tous les aspects de la vente : offre et acceptation ; obligations des parties ; sanctions susceptibles d’être mises en œuvre (i.e. remèdes à l’inexécution)… Or, les études et les enquêtes de terrain constatent que ce bel instrument juridique est encore relativement méconnu ; ses applications restent dans notre pays limitées, ce qui ne paraît pas être le cas dans d’autres États, notamment en Allemagne.

    On a parfois l’impression que certains opérateurs, peut-être mal conseillés ou peu documentés, se méfient de la Convention CNUDCI. Il y a sans doute encore de la pédagogie à entreprendre pour faire admettre que les textes internationaux ne se négocient plus aujourd’hui comme au début du XXe siècle et que l’heure est au multilatéralisme. De nouveaux États sont entrés dans le concert des Nations et si l’on ne veut pas qu’ils se tournent exclusivement vers la common law, il faut que les pays de droit civil, dont la France, fassent quelques pas vers eux et acceptent quelques compromis à l’exemple de ceux que la Convention de Vienne propose.

    5. – La vente internationale tire aussi ses sources des fameux Incoterms, c’est-à-dire des formules contractuelles offertes aux parties dans les opérations d’échanges internationaux. Une vente « CAF » (Coût, Assurances, Frêt) n’est pas une vente « FOB » (Free On Board), qui elle-même n’est pas une vente « rendu à l’arrivée ». La distinction entre les ventes au départ et les ventes à l’arrivée est naturellement essentielle. Il est permis de se demander quelle pourrait être la meilleure formule pour un exportateur – on disait jadis qu’il fallait vendre CAF et acheter FOB : est-ce encore exact ? –, ce qui suppose de bien connaître la relation sous-jacente concernant le transport. L’articulation entre la vente et le transport est au cœur du négoce international. Elle n’est pas toujours bien comprise.

    6. – De même en est-il des règles douanières qui restent très contraignantes, en tout cas dans les relations hors Union européenne. Le droit douanier est mal connu et ne doit pas apparaître comme un frein aux échanges, mais plutôt comme un moyen de mieux les réguler. Est-ce toujours le cas ? La question mérite d’être posée.

    7. – La fraude, enfin, ne doit pas être mésestimée. Elle est malheureusement présente dans toute une série de secteurs pour toute une série de raisons. Elle doit être détectée et justement sanctionnée. Le droit positif français le permet-il ? Est-il suffisamment efficace ? Là encore, un bilan s’impose.

    8. – Ce sont tous ces éléments que la présente étude essaye d’embrasser. Elle cherche, comme on le verra, à identifier les difficultés, les points de blocage, les lacunes, pour suggérer, le cas échéant, quelques solutions. Bien entendu une telle étude juridique sur les forces et les faiblesses du droit français de la vente internationale qui porte sur tous les aspects de la vente et intègre même les contrats complémentaires à la vente, dont le transport, l’affrètement ou encore l’assurance, ne pouvait présenter un intérêt que si elle était précédée d’observations concrètes issues de la pratique. De nombreuses questions ont été posées au moment d’engager l’étude. Rappelons les principales :

    – quelle est la part véritable de l’internationalité, dans la mesure où de nombreuses entreprises exportent via leurs filiales à l’étranger, filiales qui, elles-mêmes, contractent dans le droit local ?

    – les professionnels recourent-ils à des contrats-types ?

    – les conditions générales sont-elles développées ?

    – y-a-t-il des usages pour certaines professions ? (certainement dans certains secteurs, comme ceux des produits agricoles ou des matières premières, avec notamment, les formules Incograin, cependant moins usitées que les formules Gafta) ;

    – les professionnels sont-ils en mesure d’imposer la loi française dans leur contrat ?

    – préfèrent-ils finalement donner compétence à une loi étrangère ?

    – recourent-ils à la Convention de Vienne ?

    – ont-ils des litiges ? Si oui, l’arbitrage est-il la solution privilégiée ?

    – les préoccupations sont-elles les mêmes à l’exportation et à l’importation ?

    9. – Précisément, deux études statistique et économique conduites par Claudine Alexandre-Caselli et Jean-Luc Biacabe, même si elles ne répondent pas à toutes les questions posées – il aurait fallu plus, mais sans doute trop, de temps - permettront au lecteur de mesurer l’importance des ventes internationales et d’identifier les grands secteurs économiques concernés et de se convaincre aussi que l’aéronautique et le secteur de l’agro-alimentaire, pour prendre un exemple assez parlant, ne reposent pas sur les mêmes données sociologiques et économiques et ne sont sans doute pas confrontés aux mêmes contraintes.

    Ces premières études ont aussi le mérite de dévoiler certaines des conséquences de la mondialisation des échanges. Les flux commerciaux sont de plus en plus éclatés : le vendeur est désormais un assembleur de biens qui viennent de pays très divers. Il suffit d’évoquer Airbus pour se convaincre de cette réalité.

    Le lecteur pourra objecter que les problèmes sont aujourd’hui essentiellement d’ordre économique et que les questions juridiques sont finalement secondaires. Cela n’est qu’à moitié vrai, car le droit doit favoriser les échanges et a, en lui-même, de réelles potentialités économiques. Les juristes de common law l’ont, depuis longtemps, compris. Au demeurant, une conclusion même globalement neutre sur les insuffisances du droit français est déjà intéressante. Elle démontre, indirectement, que le droit français a encore et toujours vocation à s’exporter et peut-être davantage que certaines propositions de la Commission européenne qui précisément n’ont pas reçu l’aval des professionnels (voy. la proposition de règlement européen sur la vente finalement et à juste titre abandonnée²).

    10. – Après les indispensables investigations économiques et pratiques, l’étude proprement juridique des questions posées a été divisée en plusieurs chapitres.

    11. – Celui que l’on doit à Claude Witz sur les mérites de la Convention de Vienne par rapport au droit positif interne est très éclairant. On ne trouvera pas dans l’article de Claude Witz une simple plaidoirie en faveur de la nouvelle convention, mais une véritable réponse aux objections que certains opposent encore au texte. La Convention de Vienne fait aujourd’hui partie du droit français applicable aux relations internationales. Elle suscite naturellement de la jurisprudence, de la jurisprudence nationale, mais qui, comme le montre l’auteur, prend en considération les autres jurisprudences nationales avant de se fixer. D’où des solutions souples et propres à répondre aux exigences du commerce international.

    12. – Le chapitre sur la Convention de Vienne est complété par une étude sur la place des acteurs français et du droit français de la vente dans l’arbitrage CCI, conduite par Emmanuel Jolivet et Stéphanie Torkomyan. Très documenté, très utile pour les praticiens, l’analyse révèle on ne peut plus objectivement la situation dans les arbitrages CCI. Le plus souvent, les parties s’en tiennent à une loi a priori neutre comme peut l’être la loi suisse. Le droit français, issu du Code civil, n’est pas systématiquement écarté, mais est loin d’être dominant.

    Pour autant, la conclusion des auteurs est justement nuancée, car ce ne serait pas la qualité du droit qui serait en cause, mais plutôt le fait qu’il serait relativement méconnu. D’où la nécessité d’un travail de pédagogie que, précisément, la présente étude a commencé à entamer.

    13. – Le chapitre suivant tente de faire le point de la jurisprudence actuelle sur la vente internationale de marchandises ainsi que sur les avantages et les inconvénients que le droit français pourrait avoir pour les parties contractantes. L’acheteur est certainement protégé par la garantie des vices cachés, dont on sait l’importance, mais le vendeur n’est pas pour autant démuni si l’on veut ne pas oublier, notamment, l’extrême faveur du droit français pour les réserves de propriété ou encore pour les clauses de compétence. Le propos montre, en somme, que le droit français est encore équilibré et qu’il est un peu sommaire de le qualifier de droit des acheteurs.

    14. – Un dernier chapitre porte sur les relations entre la vente internationale et le transport / l’affrètement ainsi que sur les ventes maritimes (ventes CF, CAF, FOB, à l’arrivée). Les deux contrats, bien que juridiquement distincts, sont liés et en pratique souvent confondus. Lorsque l’on parle d’Incoterms – et personne ne nie leur rôle éminent dans la pratique – on ne sait pas toujours si l’on parle de vente ou de transport.

    Sur le plan juridique, les Incoterms relèvent du droit de la vente, mais puisqu’ils organisent des ventes internationales qui supposent un déplacement, les pratiques contractuelles qu’ils cernent ont, par la force des choses, une incidence sur le transport. Il a paru utile d’approfondir quelque peu ces aspects.

    Un article sur les questions douanières posées par les ventes internationales aurait dû achever la présente étude. Elle a été très sérieusement envisagée, mais pour des raisons purement contingentes, elle n’a pu être présentée dans les délais. On se permettra donc de renvoyer le lecteur à la chronique sur « le droit douanier, un droit aux frontières », parue dans la Revue de droit des transports³.

    Philippe DELEBECQUE

    1. Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI), Convention sur les contrats de vente internationale de marchandises (CVIM), Vienne, 1980.

    2. Proposition de règlement relatif à un droit commun européen de la vente, COM(2011) 635 final, 11 octobre 2011. La proposition fait partie de celles dont la Commission a demandé le retrait courant 2015 (voy. Proposition de résolution du Parlement européen en date du 12 janvier 2015 (PE547.460v01-00, B8-0037/2015) déposée à la suite d’une déclaration de la Commission sur le programme de travail de la Commission pour 2015 (2014/2829(RSP)). On signalera, ce qui est plutôt rare, que le Medef, la Fédération du E-commerce et de la vente à distance (Fevad) mais aussi des associations de consommateurs, telle l’UFC-Que Choisir, ont uni leurs voix pour demander ce retrait.

    3. Rev. dr. transp., 2014, n° 3, pp. 1 et s.

    Partie 1

    État des lieux de la pratique

    Chapitre 1

    Le commerce extérieur français : caractéristiques et mutations

    Jean-Luc Biacabe

    15. – Depuis quarante ans, la France enregistre régulièrement un déficit de son commerce extérieur¹. À plusieurs reprises dans son histoire économique contemporaine, cette situation l’a conduit à d’importants revirements de ses politiques économiques, en particulier en mars 1983, lors du tournant dit « de la rigueur ». Jusqu’à l’adoption de la monnaie unique, en 2002, la « contrainte extérieure » (l’obligation d’équilibrer la balance commerciale) a ainsi constitué la principale priorité des politiques économiques françaises, malgré (ou à cause) un contexte de niveaux élevés du chômage.

    16. – L’adoption de l’euro a fait croire que cette obligation d’équilibre avait disparu : grâce aux importants excédents commerciaux allemands, la zone euro était et reste, en effet, régulièrement en situation d’excédents importants sur le reste du monde (ce qui n’est pas sans expliquer les pressions à la hausse de l’euro contre dollar). Dans ce nouveau contexte, il apparaissait que les déficits de certains pays de la zone (dont la France) n’avaient pas plus d’importance que les « déficits extérieurs » constatés dans certaines régions françaises.

    La crise de la dette souveraine en Europe est venue brutalement rappeler que, même en zone monétaire unifiée, les États ne pouvaient se désintéresser de l’information statistique fournie par les balances commerciales. Pour des raisons d’équilibres comptables internes, il existe, en effet, une correspondance forte entre solde des comptes publics et solde extérieur. De fait, les pays européens ayant connu les déséquilibres de soldes publics les plus importants (Grèce, Espagne, Portugal etc.) étaient aussi ceux affichant les déséquilibres de solde commercial les plus importants (jusqu’à 10 % du PIB). L’effort d’assainissement des comptes publics, qui a ensuite été conduit, a ainsi débouché sur une réduction drastique du déficit des comptes extérieurs, voire l’apparition d’excédents commerciaux.

    17. – Dans le contexte de crise financière, voire de crise du projet européen, la problématique du commerce extérieur a donc retrouvé une nouvelle jeunesse et trente ans après le tournant de la rigueur, la France a de nouveau fait du retour à l’équilibre de sa balance commerciale (plus précisément, de la restauration de sa compétitivité), la priorité de sa politique économique.

    18. – L’objet de cette étude sera, d’une part, de dresser un tableau succinct de la situation du commerce extérieur français au cours de ces dernières décennies en décrivant les évolutions des importations et des exportations par types de produits, par zones géographiques et par tailles d’entreprises. À cette occasion, on rappellera rapidement les principaux déterminants, conjoncturels et structurels, des évolutions de notre commerce extérieur (I).

    Par ailleurs, dans un second temps, nous évoquerons les problématiques moins traditionnelles qui doivent désormais être intégrées dans l’analyse pour prendre en compte les changements importants intervenus ces dernières années dans les stratégies des entreprises. La fragmentation des chaînes de valeur, la redistribution mondiale des sites de production, la mise en concurrence accrue des territoires et des réglementations fiscales et sociales, ont des implications importantes qui obligent à changer le regard que l’on porte sur les statistiques de commerce extérieur (II).

    I. Les principales caractéristiques du commerce extérieur français

    A. Données globales sur le commerce extérieur et facteurs explicatifs

    19. – En 2013, le déficit de la balance commerciale française aura atteint 61,1 milliards € (soit 2,9 % du PIB), en amélioration par rapport aux années précédentes (74,1 et

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