Découvrez des millions d'e-books, de livres audio et bien plus encore avec un essai gratuit

Seulement $11.99/mois après la période d'essai. Annulez à tout moment.

L'intervention publique dans la spère économique: Fondements,principes et limites
L'intervention publique dans la spère économique: Fondements,principes et limites
L'intervention publique dans la spère économique: Fondements,principes et limites
Livre électronique401 pages4 heures

L'intervention publique dans la spère économique: Fondements,principes et limites

Évaluation : 0 sur 5 étoiles

()

Lire l'aperçu

À propos de ce livre électronique

Depuis sa création jusqu’à ce jour, la Belgique a connu diverses formes d’intervention publique dans la vie économique, par voie de régulation ou par des formes plus directes (subventions, création d’entreprises publiques, etc.). Parfois sans dessein clair et rationnel, elles constituent souvent des réactions ponctuelles justifiées par des crises aigües. Cet ouvrage offre – et c’est une première en Belgique – une grille d’analyse, dont la vérification quasi mécanique, point par point, doit permettre à ceux qui sont amenés à conseiller ou à décider d’apprécier si ledit cadre est effectivement respecté. Dans la première partie, les auteurs se sont penchés sur les fondements mêmes de l’intervention, à l’aune desquels ses différentes formes peuvent être comprises et son admissibilité, être examinée, au moins dans son principe.
La deuxième partie est consacrée aux limites des différents types d’intervention, parmi lesquelles les libertés consacrées par la Constitution mais également par le droit de l’Union européenne occupent une place importante.
L’objet de la troisième partie est de porter une attention particulière aux moyens d’action qui sont à disposition en cas de méconnaissance de ces limites. En cela, il s’adresse surtout à ceux qui organisent et/ou mettent en oeuvre les différentes formes d’interventionnisme dans la vie des affaires, ainsi qu’à ceux qui y sont confrontés, soit en tant que sujet de droit généralement concerné (en cas d’actes normatifs) soit en tant que destinataire ou tiers directement concerné (en cas d’actes individuels).
LangueFrançais
Date de sortie19 avr. 2013
ISBN9782804463052
L'intervention publique dans la spère économique: Fondements,principes et limites

Auteurs associés

Lié à L'intervention publique dans la spère économique

Livres électroniques liés

Droit administratif et pratique réglementaire pour vous

Voir plus

Articles associés

Catégories liées

Avis sur L'intervention publique dans la spère économique

Évaluation : 0 sur 5 étoiles
0 évaluation

0 notation0 avis

Qu'avez-vous pensé ?

Appuyer pour évaluer

L'avis doit comporter au moins 10 mots

    Aperçu du livre

    L'intervention publique dans la spère économique - Pierre Bandt

    9782804463052_Cover.jpg9782804463052_TitlePage.jpg

    Cette version numérique de l’ouvrage a été réalisée pour le Groupe De Boeck. Nous vous remercions de respecter la propriété littéraire et artistique. Le « photoco-pillage » menace l’avenir du livre.

    Pour toute information sur notre fonds et les nouveautés dans votre domaine de spécialisation, consultez notre site web : www.larcier.com

    © Groupe De Boeck s.a., 2013 Éditions Larcier Rue des Minimes, 39 • B-1000 Bruxelles

    Tous droits réservés pour tous pays. Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent ouvrage, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.

    ISBN 978-2-8044-6305-2

    Derniers titres parus dans la collection

    80 Le contrat de franchise. Les règles juridiques applicables au contrat de franchise en Belgique. Analyse et commentaire de quinze années de jurisprudence 1995-2010

    P. Demolin, V. Demolin, 2011

    81 Les groupes de sociétés et la protection des intérêts catégoriels. Aspects juridiques

    F. Magnus, 2011

    82 Le règlement collectif de dettes : du civil au social ? Chronique de jurisprudence 2007-2010

    F. Burniaux, 2011

    83 La réception du droit au logement par la jurisprudence. Quand les juges donnent corps au droit au logement. Chronique de jurisprudence

    N. Bernard, 2011

    84 Chronique de droit pénal

    2006-2010

    Y. Cartuyvels, Chr. Guillain, M. van de Kerchove, 2011

    85 Droit des personnes et des familles

    Chronique de jurisprudence 2005-2010

    G. Hiernaux, N. Gallus, N. Massager, D. Carré, S. Degrave, S. Pfeiff, 2012

    86 Le Code pénal social

    Analyse des lois des 2 et 6 juin 2010

    M. De Rue, 2012

    87 La vente immobilière en région flamande

    A. Mahieu, 2012

    88 La loi relative à la continuité des entreprises

    M. Grégoire, B. Inghels, 2012

    89 Le contrat d’entreprise

    Chronique de jurisprudence 2001-2011

    A. Delvaux, B de Cocqueau, R. Simon, B. Devos, J. Bockout, 2012

    90 La vente immobilière

    Chronique de jurisprudence 1990-2010

    B. Kohl, 2012

    91 Droit des étrangers

    Chronique de jurisprudence 2007-2010

    E. Derriks, K. Sbai, M. Van Regemorter, 2013

    92 La réglementation des sicafi

    T. Tilquin, V. Simonart, 2013

    9782804463052-coll.jpg

    Depuis 1881, le Journal des tribunaux suit, à un rythme depuis longtemps hebdomadaire, l’actualité du droit, de la jurisprudence et de la vie judiciaire au sens large. Sa vocation généraliste l’amène à aborder les matières les plus diverses, de façon approfondie. Mais un nombre forcément limité de pages est consacré aux articles de fond et aux « Vie du droit ».

    Or, ce droit évolue et ne cesse de croître en technicité et complexité, et donc aussi en volume, hélas. C’est ainsi qu’ont été créés en 1992 les Dossiers du J.T., qui sont consacrés à des monographies et à des chroniques de jurisprudence impossibles à publier dans les colonnes du Journal en raison de leur longueur. Elles ont été choisies par le comité de rédaction du J.T. comme un complément naturel et nécessaire des articles de doctrine que nous publions chaque semaine.

    Georges-Albert Dal, rédacteur en chef du « Journal des tribunaux »

    Sommaire

    Introduction

    Chapitre I. – Fondements de l’intervention publique dans l’économie

    Section 1. – Aperçu des circonstances fondant l’interventionnisme public dans le secteur économique (ou le fondement conjoncturel)

    Section 2. – L’intérêt général (économique) comme guide indispensable (ou le fondement politico-philosophique de l’interventionnisme public dans le secteur économique)

    Section 3. – Le(s) fondement(s) juridique(s) de l’interventionnisme public dans le secteur économique

    Section 4. – L’apport du droit européen (à la croisée des fondements)

    Section 5. – Concernant les formes d’interventionnisme (aperçu et tentative de classification)

    Chapitre II. – Limites s’imposant aux autorités publiques dans le cadre de leur intervention dans la sphère économique

    Section 1. – Aperçu des principes organisationnels et/ou structurels résultant de la Constitution et des lois spéciales

    Section 2. – Aperçu de certains droits, libertés et/ou principes fondamentaux dans la sphère économique

    Section 3. – Principes généraux du droit public et/ou administratif régissant l’action de l’administration

    Section 4. – Limites découlant du droit européen

    Section 5. – Limites découlant du droit international

    Chapitre III. – Moyens d’action

    Section 1. – Recours juridictionnels

    Section 2. – Plainte auprès d’autorités spécialisées

    Section 3. – Autres moyens d’action ?

    Chapitre IV. – Conclusion

    Introduction¹

    1. S’il est une question qui a déjà suscité et suscite encore de nombreux débats sans jamais aboutir à une conclusion ou solution définitive, c’est bien celle de la nécessité et, le cas échéant, de l’intensité de l’intervention publique au niveau économique. D’aucuns estiment ce type d’intervention nécessaire, voire essentiel afin d’assurer que le développement de l’activité économique contribue à l’essor d’une société plus juste et plus sociale, tandis que d’autres décrient l’intervention publique qui, selon eux, est susceptible de fausser le jeu de l’offre et de la demande au détriment du consommateur et plus généralement du bien commun.

    La Belgique, en tant que nation européenne, n’échappe pas à ce questionnement. Depuis sa création jusqu’à ce jour, elle a connu diverses formes d’interventions publiques dans la vie économique, souvent à la suite de graves crises. Ces interventions ont, en règle générale, visé à canaliser les conséquences néfastes d’un développement trop libre des activités économiques. Elles ont rarement obéi à un dessein clair et rationnel ; il s’agit plutôt de réactions ponctuelles à des événements particuliers qui ont été perçus par les décideurs politiques comme justifiant une intervention, soit par voie de régulation, soit par d’autres formes plus directes (subventions, création d’entreprises publiques, etc.). Si l’opportunité et l’efficacité de ces interventions ont souvent été doctement commentées, elles n’ont en revanche que rarement été analysées par les décideurs eux-mêmes, généralement parce qu’ils n’étaient plus en place pour examiner les conséquences de leurs décisions. À l’issue de ces analyses, ce sont, le plus souvent, de nouvelles interventions qui voient le jour afin de corriger ce qui est perçu comme des lacunes ou erreurs des interventions passées. Il arrive également que ces nouvelles interventions se greffent sur les interventions antérieures, au risque de compromettre l’efficacité de ces dernières.

    2. Le présent ouvrage n’a pas pour objet de se prononcer sur l’opportunité des interventions du secteur public au niveau économique. Il vise plutôt à offrir une grille d’analyse juridique des différentes formes d’intervention publique susceptibles d’être rencontrées.

    À l’évidence, c’est d’abord sur les fondements mêmes de cette intervention qu’il convient de se pencher ; c’est en effet à l’aune de ces fondements que les différentes formes d’intervention peuvent être comprises et que leur admissibilité peut déjà, au moins dans son principe, être examinée. La première partie du présent ouvrage leur est consacrée.

    Ces fondements permettent également de mieux cerner les limites des différents types d’intervention. Parmi elles, les libertés consacrées par la Constitution, mais également par le droit de l’Union européenne occupent une place importante. Ces limites sont examinées dans la deuxième partie.

    Enfin, une attention particulière sera portée aux moyens d’action qui sont à disposition en cas de méconnaissance de ces limites. Tel est l’objet de la troisième et dernière partie de l’ouvrage.

    3. De nombreux et excellents auteurs se sont déjà penchés sur ces différentes questions. L’objet du présent ouvrage n’est pas d’en refaire l’examen.

    L’angle d’analyse est différent. Il a déjà été précisé que l’objectif poursuivi est d’offrir une grille d’analyse juridique. Or, une telle grille ne peut à l’évidence reprendre l’intégralité des discussions et controverses doctrinales qui jalonnent un sujet aussi vaste que celui choisi.

    L’ouvrage s’adresse plus à la pratique et en particulier à ceux qui organisent et/ou mettent en œuvre les différentes formes d’interventionnisme dans la vie des affaires, ainsi qu’à ceux qui y sont confrontés, soit en tant que sujet de droit généralement concerné (en cas d’actes normatifs) soit en tant que destinataire ou tiers directement concerné (en cas d’actes individuels).

    Qu’il s’agisse d’une entité publique qui développe des activités de nature économique ou d’un acteur économique qui doit faire face à une réglementation de nature à restreindre sa liberté d’entreprendre, le présent ouvrage tend à leur présenter le cadre général des principes et limites qui guident l’intervention publique en matière économique.

    La présentation choisie dans ce cadre, qui se veut claire et synthétique, a plus précisément pour objet de constituer une grille d’analyse, dont la vérification quasi mécanique, point par point, doit permettre, à ceux qui sont amenés à conseiller comme ceux amenés à décider, d’apprécier si ledit cadre est effectivement respecté.

    4. Il est évident que le sujet est vaste, très vaste.

    L’objectif poursuivi ici ne se concilie d’ailleurs pas avec un traitement en profondeur de chaque sujet abordé.

    Se limitant le cas échéant à en situer le contexte de recherche, les auteurs ont dès lors choisi d’indiquer pour chaque sujet repris dans le présent ouvrage – parce que considéré comme central –, un certain nombre d’ouvrages et/ou d’articles de référence qui traitent du sujet avec la rigueur et la profondeur requises.

    À ceux à qui la méthode paraîtra trop superficielle, il est d’ores et déjà suggéré de se plonger dans ces nombreuses références et analyses. Le présent ouvrage s’adresse en effet surtout aux praticiens soucieux d’orienter leurs choix et décisions sur la base d’une grille d’analyse suffisamment large et précise à la fois. D’aucune manière, il ne prétend se substituer à l’analyse circonstanciée des faits et du droit qui s’impose dans chaque cas d’espèce.

    1 Les recherches globales menées en vue de la rédaction du présent ouvrage ont été clôturées au 31 décembre 2011. S’il contient des références à certaines contributions plus récentes, il s’agit du fruit de recherches plus ponctuelles menées en cours de finalisation. L’attention du lecteur est toutefois attirée sur le fait qu’il ne saurait en être déduit que l’ensemble des parutions de 2012 pertinentes quant aux points pour lesquels ces recherches ponctuelles ont été faites est renseigné dans le présent ouvrage.

    Chapitre I

    Fondements de l’intervention publique dans l’économie

    5. Fidèle au mot d’ordre donné en introduction, cette première partie tend uniquement à décrire, de manière générale, les origines, les fondements et les formes les plus communes – à tout le moins génériques – de ce type d’intervention, sans en analyser l’opportunité.

    Section 1

    Aperçu des circonstances fondant l’interventionnisme public dans le secteur économique (ou le fondement conjoncturel)

    6. En Belgique, comme probablement dans bon nombre d’autres États, la nature et la forme de l’interventionnisme des pouvoirs publics dans la vie économique sont avant tout tributaires de l’évolution du modèle d’organisation de l’économie et des circonstances particulières qui se sont présentées à un moment donné de notre histoire.

    Ainsi, les guerres, les crises financières et économiques ou encore les catastrophes naturelles ont assurément agi – et agissent encore – comme catalyseurs dans le développement d’interventions publiques toujours plus étendues et plus poussées.

    De même, l’évolution des conceptions philosophiques et/ou politiques a pu mener – et mène encore – au développement de systèmes de protection sociale (revenus de remplacement, logement, etc.), mais aussi de systèmes de régulation économique.

    Enfin, la dimension supranationale n’est pas sans incidence. L’interventionnisme public en Belgique comme ailleurs en Europe a été fortement influencé par l’avènement des communautés européennes, désormais l’Union européenne. La mise en place progressive d’un marché intérieur où les personnes, biens, services et capitaux peuvent circuler librement a, en effet, suscité une profonde remise en question des conceptions traditionnelles quant aux fondements et limites de l’intervention publique en matière économique.

    7. Les quelques développements qui suivent ont pour objet de donner un bref aperçu de ces évolutions.

    § 1. Du libéralisme économique au dirigisme économique ou du perpétuel balancement entre ces modèles au fil de l’évolution des circonstances et des idées

    8. Au lendemain de l’indépendance de la Belgique, le modèle dominant était clairement celui du libéralisme économique. La liberté et l’égalité, à la base de la doctrine libérale classique qui a par ailleurs largement inspiré les rédacteurs de la Constitution de 1831, ont été à la base du principe de la non-ingérence de l’État dans le domaine économique¹.

    Au fil des décennies qui ont suivi, l’intervention des pouvoirs publics dans la vie économique est allée crescendo, passant de la simple mesure de police à la reconnaissance de la faculté pour les pouvoirs publics de participer à la création et à la gestion d’entreprises privées, gérées selon les règles du droit commercial².

    9. Il est difficile de donner une explication uniforme à cette évolution. Il semble que ce soit un ensemble de circonstances particulières, combiné à une évolution des idées, qui ait poussé l’État à intervenir toujours plus fréquemment dans l’économie, en vue de réaliser des objectifs d’intérêt général – que l’on qualifiera peu à peu, dans ce contexte, d’intérêt général économique³.

    Dans ce cadre, une certaine trame peut être identifiée, sans qu’il puisse toutefois y être vu une explication universelle.

    10. Premièrement, il est certain que la nécessité d’une intervention des pouvoirs publics est ressentie avec une intensité accrue en période de crise et dans des secteurs dont l’activité est fortement cyclique et qui emploient une main-d’œuvre importante.

    Elle peut, dans ces cas, prendre de multiples formes, telles que des mesures pour sauvegarder l’emploi dans ces secteurs, des aides visant à restructurer les industries concernées ou encore l’activité économique dans la région qui est particulièrement affectée par la crise.

    À titre d’illustration, il ne fait aucun doute que la grande crise des années trente⁴ a conduit à une méfiance généralisée envers le capitalisme économique traditionnel, et a favorisé une transition vers une « économie organisée », plus généralement encore qualifiée de « dirigisme⁵ » économique. De même, la crise de la sidérurgie wallonne dans les années soixante-dix et quatre-vingt a, par son ampleur et son impact, favorisé l’essor d’un grand nombre d’outils nouveaux permettant aux autorités publiques de freiner le déclin de toute une région et d’en faciliter la reconversion.

    Dans de telles périodes de crise, il existe généralement un large consensus pour reconnaître à l’État le devoir d’intervenir, par voie d’autorité, afin de normaliser au plus vite les relations économiques, financières et sociales⁶.

    Les récentes crises bancaires et financières démontrent que ce contexte est susceptible de se reproduire à tout moment.

    11. Un autre élément qui peut être à la base de l’intervention des pouvoirs publics dans la sphère économique est lié à une forme de défaillance propre au modèle économique fondé sur le capital.

    Il n’est, en effet, pas rare que les acteurs économiques fassent preuve d’un manque d’intérêt prononcé pour des activités pas ou peu rentables, dans des domaines que les pouvoirs publics estiment pourtant essentiels⁷. Tel peut par exemple être le cas de l’offre de service postal ou de télécommunications dans des zones géographiques reculées ou peu peuplées. Un autre exemple est celui de l’offre de logement aux plus démunis. Certes, ce type d’offre est régulièrement fourni par les acteurs économiques, mais elle sera souvent trop chère et/ou de piètre qualité. Dans de telles hypothèses, l’intervention des pouvoirs publics vise à pallier les défaillances du secteur privé en imposant des obligations de service public aux acteurs privés (obligations dites de service universel) ou en organisant l’offre de ces services par la voie publique (p. ex. société publique de logement social) ou encore en soumettant l’offre privée à un contrôle strict.

    12. Ces multiples formes d’intervention publique en matière économique se situent dans le cadre plus large de ce qu’on appelle généralement l’ordre public économique.

    Au fil de leurs interventions, les pouvoirs publics ont en effet versé dans la mise en œuvre d’interventions qui ne servent plus uniquement à assurer l’ordre public général dans des circonstances particulières, mais plus généralement à mener une politique économique⁸.

    Cela ne devrait pas surprendre. Dès lors que la société s’ouvre à l’idée générale selon laquelle les pouvoirs publics ont pour mission de satisfaire certains besoins collectifs considérés comme essentiels pour la vie en société, il devient évident qu’ils ont pour mission d’intervenir dans tous les secteurs de l’économie qui présentent un intérêt pour la collectivité⁹.

    13. Enfin, au confluent de ces différents éléments, on remarquera que c’est également l’évolution tant des circonstances et des idées qui détermine, outre le besoin d’intervenir, les formes que peut revêtir cette intervention des pouvoirs publics.

    Par exemple, si, dans un temps pas si lointain, l’intervention publique a pu prendre la forme de prises de participations minoritaires¹⁰ dans le capital d’entreprises en difficulté, une telle forme d’intervention apparaît aujourd’hui beaucoup moins évidente. Si louable que soit l’objectif poursuivi, à savoir permettre un apport de moyens à des entreprises en difficulté¹¹, un grand nombre de règles encadrent désormais de telles interventions, au premier rang desquelles les règles européennes en matière d’aides d’État, qui visent à contrer les effets pervers de ces mesures.

    Compte tenu de la variété des formes que peut revêtir l’intervention des pouvoirs publics, qui n’a de limites que l’imagination des pouvoirs publics et de leurs conseillers, seuls quelques développements y seront consacrés (ultérieurement sous la première partie).

    § 2. Un élément important quant à la conception de l’organisation de l’économie : l’avènement des communautés européennes et la création d’un marché intérieur

    14. L’avènement des communautés européennes, désormais l’Union européenne, constitue assurément un élément important dans l’évolution des conceptions quant à l’intervention des pouvoirs publics en matière économique.

    15. La construction progressive de cette union, dont certains principes sont empreints de libéralisme économique¹², mais ne s’y limitent certainement pas, a en effet eu un impact important sur les conceptions des États membres quant à l’intensité et aux formes de l’interventionnisme public.

    16. En marge de la consécration des libertés fondamentales résultant du traité CE (désormais TFUE : traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ; ce traité reprend en grande partie les dispositions de l’ancien traité de Rome) et de l’avènement du droit européen de la concurrence, les mouvements d’harmonisation et, dans certains secteurs, de libéralisation qui ont été initiés au niveau européen ont largement contribué à une remise en cause de l’organisation de l’économie des États membres.

    Et pour cause ! Dans certains secteurs, c’est sous l’impulsion du droit européen qu’il a été décidé de mettre fin à des situations de monopole en vue de les ouvrir progressivement à la concurrence. La politique de libéralisation des industries dites de réseaux (transport ferroviaire, énergie, télécommunication, poste) et d’infrastructures essentielles (ports, aéroports, etc.) entamée au début des années quatre-vingt-dix en constitue sans aucun doute le plus grand chantier¹³.

    Dans d’autres secteurs, l’impact a été moins visible, mais tout aussi important. En effet, en vue d’harmoniser les conditions liées à l’accès et à l’exercice d’activités économiques dans l’Union européenne, les institutions européennes ont adopté des normes qui ont abouti à une remise en cause partielle de l’ordre public économique des États membres. Tel est par exemple le cas pour les directives relatives aux marchés publics de travaux et de services ou en matière d’assurances. Les États membres conservent certes une certaine liberté d’agir lors de la transposition de ces actes, mais cette liberté est généralement limitée.

    Section 2

    L’intérêt général (économique) comme guide indispensable (ou le fondement politico-philosophique de l’interventionnisme public dans le secteur économique)

    17. La notion d’intérêt général peut paraître a priori évidente, tant son invocation semble aujourd’hui commune. Il faut pourtant constater que peu d’auteurs se sont hasardés à la définir.

    Selon P. Goffaux il s’agit d’un « concept juridique utilisé pour désigner de manière générique l’objectif vers lequel doit nécessairement tendre toute l’activité de l’administration¹⁴ ».

    Cette définition présente l’avantage de souligner le caractère à contenu variable de la notion. Ce qui ressort de l’intérêt général est en effet susceptible d’évoluer selon l’objectif poursuivi à un moment donné et selon le secteur concerné.

    18. D’une manière générale, force est de constater que de nombreuses règles de droit, en particulier au niveau européen, renvoient à la notion d’intérêt général.

    Si, en tant que tel, il n’en va pas d’une règle de droit susceptible de fonder l’intervention des pouvoirs publics dans la vie économique, l’intérêt général économique constitue à la fois le but que doivent poursuivre les pouvoirs publics et, par la force des choses, une importante limite à leur intervention. De ce fait, il s’agit surtout d’un fondement politique à l’intervention des autorités publiques dans la sphère économique¹⁵.

    En tant que reflet des idées et conceptions, la notion d’intérêt général revêt par ailleurs une dimension philosophique. Son contenu évolue ainsi au gré de l’évolution sociétale et, partant, également en fonction des choix démocratiques.

    De même, l’intérêt général peut avoir un contenu variable au sein d’un même pays, ce en particulier selon les différentes composantes de ce pays. Cela semble notamment caractéristique d’un pays fondé sur une structure fédérale. A fortiori, cette notion pourra être perçue (très) différemment entre des pays aux traditions socio-économiques dissemblables.

    Il s’agit là d’ailleurs d’un des problèmes majeurs de la construction européenne, car il est particulièrement difficile de déterminer un niveau commun de régulation économique entre des pays ayant des conceptions parfois très différentes de l’intérêt général économique.

    19. De manière générale, il peut en tout cas être considéré que lorsqu’on parle d’intérêt général, c’est l’intérêt de la collectivité qui prime les intérêts particuliers.

    C’est afin de réaliser des objectifs d’intérêt général que le pouvoir législatif adopte des mesures à caractère général et que le pouvoir exécutif prend des mesures à caractère général ou à caractère individuel.

    Section 3

    Le(s) fondement(s) juridique(s) de l’interventionnisme public dans le secteur économique

    20. Les principes et limites que doivent respecter les interventions des pouvoirs publics dans la vie économique sont caractérisés par un grand nombre et une grande diversité. Nous les examinerons dans la seconde partie du présent ouvrage.

    En ce qui concerne le fondement de telles interventions, au sens des règles de droit fondant expressément le pouvoir/la compétence des pouvoirs publics, il est par contre étonnant de constater que, en Belgique, il n’existe pas de théorisation poussée en la matière. Il n’existe en effet pas, en tant que tel, de corps de règles de base permettant d’asseoir cette compétence. Au contraire, les règles de base en la matière sont relativement limitées, tandis que des dispositions particulières sont dispersées dans différents textes de loi, selon le secteur et/ou le niveau de pouvoir concernés.

    Sans doute un début d’explication à ce constat est-il à trouver dans l’idée généralement admise selon laquelle les pouvoirs publics peuvent faire appel à tous les instruments utiles destinés à satisfaire les besoins d’intérêt général. Une autre explication peut également être trouvée dans le fait que de nombreuses interventions ont eu lieu afin de faire face à des crises aiguës, ce qui n’a assurément pas permis de les asseoir dans un cadre théorique cohérent.

    21. Nous nous limiterons dans le présent ouvrage à relever sommairement les dispositions pertinentes au sommet de la hiérarchie des normes, à savoir la Constitution et les lois spéciales, sans préjudice des dispositions particulières qui régiraient par ailleurs spécifiquement certaines entités publiques.

    Quant à ce dernier point, il peut être constaté qu’au plus les pouvoirs publics sont spécialisés, au plus il est probable qu’il existe une réglementation organique propre, laquelle définit, le cas échéant, les instruments à disposition, comme la possibilité de créer une personne morale ou encore de prendre des participations dans d’autres personnes morales¹⁶.

    À ce stade, on retiendra déjà que le réflexe général à adopter face à toute intervention d’un organisme public particulier¹⁷ consiste à vérifier, en premier lieu, l’acte portant constitution de cette institution afin de vérifier son objet et les instruments qui, le cas échéant, sont expressément mis à sa disposition ou, au contraire, lui sont interdits.

    § 1. Les fondements constitutionnels de l’intervention publique en matière économique

    22. Traditionnellement, le terme Constitution couvre deux acceptions, selon que l’on vise le sens formel ou le sens matériel¹⁸. Au sens formel est visé un ensemble d’articles qui se situent au sommet de la hiérarchie des normes internes. Au sens matériel est visé un ensemble de principes fondamentaux, écrits ou non écrits, qui déterminent le fonctionnement et

    Vous aimez cet aperçu ?
    Page 1 sur 1