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Audimat - Revue n°7: Revue de critique musicale
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Audimat - Revue n°7: Revue de critique musicale
Livre électronique170 pages2 heures

Audimat - Revue n°7: Revue de critique musicale

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À propos de ce livre électronique

Découvrez le numéro 7 d'Audimat, une revue musicale qui transcende l'actualité pour apporter un regard de fond sur la musique !​​Dans ce numéro :​​• « Italie ’70 : musique légère, années de plomb », Diane Lisarelli
• « À l’ombre de Marcus Mixx », Boris Bergmann
• « Les voyages de Dashiell Hedayat et Michel Bulteau », Arnaud Maguet
• « Contre-musique pour enfants », Sylvian Quément
• «Vie et mort sur le dancefloor du Pulse », Tim Lawrence
• « Les « musiques expérimentales » : une polémique en devenir », Matthieu Saladin

Un discours critique exigeant sur la pop music, son histoire, son écoute et sa diffusion dans le monde.

EXTRAIT

Les anthologies et les documentaires consacrés au passé de nos musiques s’accumulent. Récemment, sur Arte, Bienvenue au club, 25 ans de musique électronique de Dimitri Pailhe s’intéressait à l’histoire de la house et de la techno en France et dans le monde, tandis que la série Soundbreaking, produite par George Martin — tant qu’à faire ! —, plongeait dans « la grande aventure de la musique enregistrée ». Le principal point commun aux deux projets, c’est de couvrir de très longues périodes historiques en très peu de temps et de générer immanquablement une profonde frustration pour qui s’intéresse à ce qui, dans ces musiques, ne se réduit pas au progrès technologique, à l’extension du marché, à ceux qui en sont devenus les héros et à leurs anecdotes.

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Un effort éditorial inédit : des textes sur la musique en long format qui abordent des sujets souvent pointus tout en évitant l’obscurantisme. - GQ
Une grande réussite grâce à des textes passionnants. - Global Techno
La revue est vraiment stimulante et se lit d’un bout à l’autre sans ennui. - L’éditeur singulier
Audimat se lit avec suffisamment d’intérêt et d’excitation pour qu’aucune ligne ne soit laissée de côté. - Noise
Audimat enterre définitivement les problématiques typiques de la génération des baby-boomers comme « Existe-t-il une critique rock ? » - Magic

À PROPOS DE LA REVUE

Audimat est une revue de critique musicale éditée par le festival Les Siestes Électroniques.
Notre projet : une écriture sur la musique libérée des contraintes d‘actualité et des formats de la presse périodique. Audimat veut rendre compte de la situation actuelle de la pop music, et l‘éclairer par son histoire. Il s’agit de recenser ce qui se passe, d‘aller s‘entretenir avec la musique et son évolution, de se plonger méthodiquement dans l‘expérience musicale, et dans ce qu‘elle implique sur le plan des médiations, de l’imaginaire, de la société, de la pensée, de l’affectivité.
LangueFrançais
Date de sortie19 févr. 2018
ISBN9782954786766
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    Aperçu du livre

    Audimat - Revue n°7 - Collectif

    Copyright

    Édito

    Les anthologies et les documentaires consacrés au passé de nos musiques s’accumulent. Récemment, sur Arte, Bienvenue au club, 25 ans de musique électronique de Dimitri Pailhe s’intéressait à l’histoire de la house et de la techno en France et dans le monde, tandis que la série Soundbreaking, produite par George Martin — tant qu’à faire ! —, plongeait dans « la grande aventure de la musique enregistrée ». Le principal point commun aux deux projets, c’est de couvrir de très longues périodes historiques en très peu de temps et de générer immanquablement une profonde frustration pour qui s’intéresse à ce qui, dans ces musiques, ne se réduit pas au progrès technologique, à l’extension du marché, à ceux qui en sont devenus les héros et à leurs anecdotes.

    En effet, dans ces récits, tout peut faire rupture — et les films ne se privent pas d’exagérations — mais rien ne pose problème : chaque situation technique, esthétique et politique apparaît comme le jalon d’une voie à sens unique menant vers un présent sans nuances, envisagé comme une fin provisoire de l’histoire, qu’il s’agit moins de comprendre que d’accepter puisqu’au fond, « ça bouge ! », ce qui pour nos réalisateurs enthousiastes mais finalement indifférents, semble toujours une bonne nouvelle culturelle — et au passage une excellente occasion de demander à un artiste plus ou moins légendaire de nous raconter encore une fois la même anecdote. Mais plus ce type de légendes figées s’écrit et plus l’histoire nous fait défaut.

    Qu’est-ce qui nous manque alors ? Que voudrions-nous voir à la place, que pourrions-nous proposer ? Sans aucun doute des choses comme de l’altérité, de la pluralité, du conflit, du souterrain, du contre-intuitif, voire de la quasi-fiction. Les articles de ce numéro 7 d’Audimat font chacun place à l’une de ces perspectives. Altérité : l’article de Diane Lisarelli sur la réappropriation de la pratique du concert — entrées en force, blocages, interruptions — par le Movimento italien des années 1970 fait mesurer tout l’écart qui nous sépare d’une époque où la musique pop était au cœur de la vie quotidienne et militante, celle d’une population laborieuse ou déserteuse. Pluralité : Tim Lawrence propose une intervention historique mais paradoxalement « à chaud » pour montrer comment les queers hispano-américains ont été gommés des comptes-rendus médiatiques de la fusillade qui a touché le club Pulse d’Orlando en 2016. Son article montre que le même type d’effacement touche l’ensemble de la mémoire des musiques récentes[¹] et invite à des récits qui saisissent dans le même mouvement les représentations tronquées, les collectifs et la singularité des vies. Conflit : aujourd’hui, le pluriel accueillant de « musiques expérimentales » neutralise ce qui après-guerre relevait de l’affrontement décisif entre deux esthétiques, celles de John Cage et Pierre Schaeffer, que nous relate Matthieu Saladin. Celui-ci montre notamment qu’une nouvelle technologie — ici l’enregistrement sur bande — n’exige pas seulement d’être rejetée ou adoptée : plusieurs utilisations en sont possibles, selon ce qu’on ose espérer de la musique. Souterrain, avec Marcus Mixx, personnage injustement oublié dans la légende dorée de la house chicagoane dont Boris Bergmann explore à la lampe frontale le destin d’ombre, comme autant de galeries humides et sans issue. Contre-intuitif : Sylvain Quément retrace l’histoire d’un label de disques pour enfants, Chevance, qui dans les années 1970 et 1980 a fait le pari que le « jeune public » était aussi apte que les adultes — voire davantage — à entendre des chansons non-standardisées, souvent réalisées par des musiciens venus d’avant-gardes informelles. Quasi-fictif, quand Arnaud Maguet parle de deux obscurs albums français post-68, signés chacun d’un écrivain, pour nous faire gravir les branches pas toujours solides mais constamment jouissives d’un arbre à fantasmes historico-esthétiques.

    L’histoire de la musique récente se construit aussi, comme toutes les autres, sur de la négativité. Le travail de l’écrivain et professeur britannique Mark Fisher, mort en janvier dernier, en manifestait. Il nous avait fait l’honneur d’écrire dans le numéro 2 d’Audimat un texte très marquant, consacré au spleen de l’argent chez Drake. Son blog k-punk, dans lequel il parlait autant de musique que de la société britannique post-New Labour a été l’une des inspirations de notre revue. Fisher a montré que la musique portait souvent, de façon évidente ou non, les affects et les contradictions de son époque. En souvenir de ses écrits, demandons-lui de quoi écrire nos propres légendes.


    [1] On nous a signalé à juste titre la relégation en note de bas de page des femmes musiciennes dans l’article de Michel Chion republié dans le numéro 6 de la revue et originellement paru en 1982.

    L’actualité éditoriale consacrée à l’autonomie italienne est riche, avec la publication des ouvrages de Nanni Balestrini, Alessandro Stella, ou plus récemment encore de la somme La Horde D’Or (Balestrini/Moroni). Diane Lisarelli, journaliste et auteure indépendante basée à Nice, qui a notamment signé Éternels retours, un texte consacré à Lucio Battisti pour la NRF, s’est intéressée à la place des concerts dans cette période politique agitée : le goût et le dégoût pour les groupes étrangers, le cynisme des festivals commerciaux et les ambivalences des événements alternatifs, l’affirmation de la pop comme art populaire en même temps que sa critique comme industrie et comme opium, les actions pour empêcher que soit donné un prix à la culture, l’expression musicale des tensions existentielles, la continuité de fait entre musique et luttes sociales… À rebours des évocations romantiques de la musica leggera et de la « contre-culture », elle nous propose un parcours des scansions et des matières d’une révolte. Abordés au ras des événements d’alors, ces thèmes correspondent d’abord à des manières d’agir sur le moment, parfois avec brutalité, obligeant chacun à choisir son camp.

    Il palco è come un ponte

    che non unisce niente

    ci passano i cantanti

    fischiati dalla gente

    qualcuno un po' più furbo

    fa battere le mani

    o tira fuori il coro

    dei napoletani

    La scène est comme un pont

    qui ne relie rien

    y passent les chanteurs

    hués par la foule

    quelqu’un d’un peu plus malin

    fait battre des mains

    ou sort le choeur

    des Napolitains

    Gianfranco Manfredi,

    Un tranquillo festival pop di paura

    5 juillet 1971. 22 h 30, 30 ° C. Au vélodrome Vigorelli de Milan, Jimmy Page, Robert Plant, John Paul Jones et John Bonham montent sur scène avec une heure et demi d’avance. L’atmosphère est tendue : les groupes et chanteurs qui ont précédé Led Zeppelin ont essuyé les huées et les canettes de bière. Pour cette étape milanaise du « Cantagiro », grand raout itinérant de la variété italienne, le groupe de rock britannique partage l’affiche avec les purs produits locaux que sont Gianni Morandi, Bobby Solo, Lucio Dalla ou Ricchi e Poveri. Étrange mélange des genres et des publics. Cible vivante pour projectiles divers, Morandi sort de scène bouleversé sans avoir pu terminer sa version italienne d’un morceau de Joan Baez.

    Moins courageux, les autres ont rapidement évalué le rapport coût/bénéfice et refusent de se produire face à une fosse survoltée. Richard Cole, tour manager nerveux de Led Zeppelin, décide alors d’envoyer le groupe pour en finir au plus vite (« avec ces Italiens de merde » déclarera-t-il plus tard, une fois la pression retombée).

    À l’annonce de l’arrivée imminente des Anglais, la partie du public venue pour le Cantagiro s’enfuit. À l’extérieur, un paquet de jeunes gens n’ont eux qu’une idée en tête : entrer en force sans payer le billet, dont le prix est jugé trop élevé. Leurs raisons sont financières mais aussi politiques. Aux portoghesi (terme désignant traditionnellement en Italie ceux qui entrent sans payer dans les théâtres) s’ajoutent des jeunes gens las d’engraisser les organisateurs de concerts et de participer à la marchandisation d’une culture dite « populaire ». Scandant allégrement « PS-SS » (dérivé de CRS-SS, PS se référant à Polizia di Stato) pour narguer les 2000 policiers anti-émeutes mobilisés, des centaines d’entre eux profitent de la sortie des familles apeurées pour s’engouffrer dans le vélodrome. Devant les entrées s’installe alors une foule confuse et mouvante. Face à elle, les forces de l’ordre répliquent de manière somme toute classique : aux coups de matraques arbitraires succèdent les premiers gaz lacrymogènes.

    Les essaims de jeunes gens qui continuent d’entrer sont accompagnés d’une odeur âcre. Et tandis que tous se massent dans la fosse, l’arrivée du groupe est accueillie par un hurlement sauvage. À celui-ci répond un puissant mur de son couvrant les sirènes et les cris qui s’accentuent à l’extérieur. Rien, pourtant, ne parvient à couvrir la rumeur de violents affrontements. Robert Plant essaie à plusieurs reprises de calmer le public, « Dazed & Confused » est interrompue trois fois. Les choses deviennent incontrôlables quand des lacrymogènes sont tirés directement dans le vélodrome. Les gradins désertés, la fosse composée d’une dizaine de milliers de spectateurs est alors secouée de mouvements de foule océaniques, chacun cherchant à s’éloigner le plus possible des fumées. « Soufflez avec moi pour faire disparaître le gaz » tente Plant halluciné, mais les lacrymogènes envahissent jusqu’à la scène et le groupe est contraint de fuir en abandonnant son matériel.

    Après dix minutes de suspension de concert, les vapeurs vaguement dissipées, John Bonham lance une version chaotique et écourtée de « Moby Dick ». Suit « Whole Lotta Love ». Mais la police envoie maintenant délibérément des grenades lacrymogènes sur le côté droit de la fosse. Dans un mouvement de panique, l’électricité est coupée. Plant, Page et consorts abandonnent alors la scène dans l’obscurité. Dehors, les spectateurs sortant se mêlent à ceux restés pour affronter les forces de l’ordre à défaut d’avoir pu entrer. La police ne s’embarrasse pas et tape dans le tas.

    Led Zeppelin, ce soir-là, n’aura joué que 27 minutes. Plant racontera plus tard s’être ensuite barricadé dans un vestiaire avec les autres, leurs têtes enveloppées dans des serviettes mouillées pour calmer l’irritation due aux gaz. Les affrontements, qui dureront toute la nuit, s’étendront aussi à d’autres zones de la ville. Bilan : 16 arrestations, 40 blessés et de nombreux dégâts matériels. Ainsi s’installent, au pays de la musica leggera, les années de plomb.

    TRAVAILLER OU FAIRE L’AMOUR

    Quelques mois plus tôt, Adriano Celentano, superstar nationale, sort victorieux du festival de San Remo avec une canzonetta légère au texte ultra-réactionnaire. Son titre : « Chi non lavora, non fa l’amore », soit, « Qui ne travaille pas ne fait pas l’amour ». Après le Mai rampant de 1968 et l’automne chaud de l’année qui suit, durant lequel manifestations et occupations de locaux se sont multipliées (rien que pour la FIAT, le bilan de 1969 s’élève à 20 millions d’heures de grève), Celentano, tout sourire, fredonne l’histoire d’un ouvrier en lutte dont la femme lui ordonne de se remettre à travailler s’il veut à nouveau pouvoir la toucher. Le disque s’écoule à 750 000 exemplaires au grand dam de la gauche. Depuis longtemps, pourtant, une part de la jeunesse a choisi de faire l’amour au lieu de travailler.

    À Milan, nombreux sont ceux qui depuis le milieu des années 1960 vivent en marge de la société marchande et des diktats capillaires. Ces autoproclamés capelloni, ces « chevelus », s’agrègent autour de la revue Mondo Beat, premier journal underground du pays, dont les articles témoignent de nombreux engagements : pacifisme, antimilitarisme, critique de la famille et des institutions, reconnaissance des droits civils (divorce, pilule, avortement, amour libre) et participation directe. Quiconque arrive Viale Monte Nero au local de Mondo Beat est le bienvenu. Très vite, une communauté se forme et s’installe sur un terrain loué Via Ripamonti. Rebaptisé par la presse et les bien-pensants « Barbonia City » (en référence aux barboni, les sans-abri), le campement devient l’objet de fantasmes et de sévères condamnations. « À Barbonia City, on est libre d’apprendre

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