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RIEN NE VA PLUS

POUVOIR

Comment affronte-t-il l’épreuve ? Est-il plus isolé que jamais ? Concède-t-il quelques erreurs ? Ce matin du 25 juillet, Jean-Charles Naouri n’a pas pris la parole dans les médias depuis dix-huit mois. Aucune interview, rien. Et dans deux jours, il signera un accord avec ses repreneurs et créanciers, ouvrant la voie au plan de cession de Casino, l’empire qu’il a bâti avec acharnement ce dernier quart de siècle. Lui, le PDG jadis adulé des marchés pour sa vista, cet obsessionnel du contrôle à la limite de la paranoïa, ce grand impatient capable de relancer ses collaborateurs d’un « ? » par SMS quand il n’a pas une réponse instantanée à sa question, cet homme-là, donc, s’apprête à tout perdre.

9h59. Connexion à Teams pour notre entretien en visioconférence. Réglage de la caméra vers un fond neutre. Et là, surprise, deux icônes grises apparaissent à l’écran. Un problème informatique, explique le directeur de la communication, Nicolas Boudot, témoin de l’échange. Impossible de décrire la posture de Jean-Charles Naouri en cet instant. Affiche-t-il cette gravité inquiète que l’on décelait lors de nos précédentes rencontres. Tapote-t-il nerveusement sur son bureau comme à chaque fois qu’il s’impatiente ? A-t-il dénoué son immuable cravate rouge ?

« C’est bon, vous m’entendez ? » Voix concise, posée : on l’attribuerait à un homme de 40 ans si on ignorait son âge (il est né en 1940). D’emblée, il affirme n’avoir qu’une préoccupation en tête : préserver l’intégrité de Casino et sauver ses 50 000 emplois en France dont 1 500 au siège de Saint-Étienne, le berceau historique du groupe. « Je m’y consacre 24 heures sur 24, jour et nuit, répète le patron fantôme à travers l’écran. Nous avons eu des discussions intenses avec les créanciers. Même s’il reste encore beaucoup de travail, on peut dire que la mission est en grande partie accomplie. »

Laisser ses affaires en ordre comme on dépose un testament chez le notaire, voilà son sujet. Tous les acteurs du dossier l’assurent, il n’a rien négocié pour lui-même. Pas de présidence d’honneur. Pas de poste de conseiller stratégique. Pas de parachute en or. Pour un homme qui a exercé un pouvoir absolu, cela aurait été de toute façon dérisoire. « Mon cas personnel n’a pas d’importance », insiste-t-il, philosophe. On se risque à évoquer l’après-Casino, sans trop y croire tant il est avare de confidences. À ses proches, il a confié son envie d’aller en Colombie-Britannique ou en Écosse, ses deux spots favoris pour pratiquer la pêche à la mouche. « Je ne sais pas ce que je ferai, élude le PDG. J’y réfléchirai plus tard. »

« Il faut un sacré cuir POUR RÉSISTER à tout ce qu’il a subi. On lui a presque craché à la figure. »
OLIVIER BARATELLI, AVOCAT DE JEAN-CHARLES NAOURI

Il y a quelques mois encore, Jean-Charles Naouri avait modifié les statuts de Rallye, la société par laquelle il contrôle Casino à 51 %, pour repousser l’âge limite de la présidence de 75 à 78 ans. Comme s’il pouvait encore s’inscrire dans le temps long. Mais tout est allé plus vite qu’il ne l’imaginait. Le 26 mai 2023, Casino annonçait avoir obtenu du tribunal de commerce de Paris l’ouverture d’une procédure de conciliation. Tout le monde avait compris. Cette fois-ci, le virtuose de la finance ne pourrait plus repousser le mur de dettes qui se profilait devant lui, ces 6,5 milliards d’euros accumulés au fil d’une expansion conquérante, en Europe, en Asie et en Amérique latine. Sur fond de hausse des taux d’intérêt, d’inflation et de bataille des prix, Casino avait vu sa trésorerie se dégrader brutalement, brûlant, selon les experts, 100

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