Diapason

DÍAPASON à 700 on chante plus fort

Il était une fois un disquaire qui trouvait les revues d’art trop parisiennes. Mélomane abonné à l’Orchestre des Concerts populaires dans sa bonne ville d’Angers, mais aussi gendre d’un rédacteur en chef au quotidien Ouest-France, il s’énerve (c’est son style). Avec quelques amis, il fonde en 1952 un « huit-pages » format Canard dédié à la musique, au théâtre, aux expos, aux arts du pays. Le disquaire se nomme Georges Cherière. Le journal, Diapason donne le ton dans l’ouest.

Dans la famille, on ne badine pas avec l’argent. C’est bien joli, le grand art, mais de quoi vivre? Deux pages sur huit font à elles seules tourner la boutique. Deux pages où croît à vue d’œil une nouveauté : le microsillon. Un grand pas pour le discophile qui devait auparavant se lever toutes les quatre minutes changer son 78t de face. Un luxe de moins en moins cher, de plus en plus populaire. Voilà comment on vivra : trente-trois tours minute. Le rideau se lève.

ACTE I

scènes 1 à 99

Adieu expo, théâtre, concert. En arrivant à Paris, Georges Cherière lâche tout pour le disque. L’onctueux Armand Panigel, seigneur des sillons en librairie, à la radio, à l’écran et jusqu’à l’Unesco y tient déjà une revue, nommée Disques justement, bible du mélomane en chambre depuis 1935. Mais le jeune Angevin n’a pas peur. Disques fleure encore bon le 78t préhistorique. Diapason sera la boussole du client moderne. Quelques saisons de lutte feutrée: en 1962, Disques mourra de sa belle mort.

Sept ans plus tôt dans une soupente de l’avenue Marceau. L’ex-disquaire et son acolyte nantais Jean Préteseille, Monsieur « musique vocale », plantent le décor et recrutent l’équipe. Au diable l’année Mozart! Tendons l’oreille au bel aujourd’hui – les Trois petites liturgies de Messiaen; la Symphonie n° 10 de Chostakovitch révélée par Dimitri Mitropoulos; Arthur Honegger qui vient de nous quitter. Et bien sûr la musique populaire, jazz, chanson, danse, pourquoi pas ambiances et fonds sonores.

Virtuoses et yé-yé

Pour l’équipe, la vedette du Figaro Bernard Gavoty, quelques voix de la station qui ne s’appelle pas encore France Musique (René Dumesnil, Carl de Nys, Serge Berthoumieux), un spécialiste par spécialité – symphonie et concerto, musique instrumentale, vocale, de chambre. Le 1er janvier 1956, voici « Diapason – La revue du disque microsillon. » Trente-deux pages en format de poche. A la une du numéro 1, le pianiste Robert Casadesus.

Numéro 2: quarante-huit pages, cinquante (anciens) francs. Cadeau! Mais ne le demandez pas au marchand de journaux. Le petit guide mensuel, spartiate et plus informatif qu’explicatif, n’est en vente que chez les disquaires – dont par chance le nombre ne cesse d’augmenter. Nulle manne sur ce marché-là : salaires et piges ne tiennent qu’à la publicité. Qui elle aussi se porte de mieux en mieux. Cette année 1956, Polydor ouvre une filiale française sous le contrôle de Deutsche Grammophon qui modifie totalement l’édition classique jusqu’alors dominée par la, avant Aznavour, Dalida, leurs aîné(e)s, leurs cadet(te)s. Virtuoses et yé-yé se succèdent à un rythme trop soutenu pour le petit bureau du VIII arrondissement. La rédaction déménage rue La Fontaine, dans le XVI .

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