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EMBÛCHES
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Livre électronique270 pages4 heures

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À propos de ce livre électronique

Trompée par son fiancé, sa licence d'anglais obtenue, Charlotte décide de partir une année au pair en Angleterre s'occuper de Joy, la fille d'un homme d'affaire. Rien n'est simple à son arrivée, la rancoeur, la jalousie, la haine, une fillette esseulée et un père absent l'attendent. Elle subira la vindicte, des agressions physiques mais soutenue par des alliés, elle passera du temps entre l'Angleterre, Toulouse et l'Espagne. Impliquée dans la vie de cette famille aux lourd passé, elle participera au règlement des conflits avant de pouvoir envisager un futur heureux.
LangueFrançais
ÉditeurArgonautae
Date de sortie27 nov. 2023
ISBN9789403700427
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    Aperçu du livre

    EMBÛCHES - Lyne DEBRUNIS

    1

    Charlotte a enfin obtenu sa licence d’anglais ! L’esprit et le cœur submergés par le chagrin, c’est avec des difficultés qu’elle a terminé son interminable année universitaire.

    Peu après Pâques, à peine après trois mois de fiançailles, en rentrant chez elle plus tôt que prévu à cause d’un étal grippal, elle a eu l’horrible surprise de surprendre Marc avec son amie Mathilde dans une situation sans ambiguïté ; ils étaient nus vautrés dans son lit. Son fiancé officiel depuis le dernier Noël, était venu habiter chez elle quelques jours avant, au début des vacances de Pâques, un avant-goût des joies du mariage, disait-il en plaisantant. Bien que sa famille n’y fût pas favorable, Marc prétendait que puisqu’ils devaient se marier, ils pouvaient vivre ensemble, comme tous les couples d’aujourd’hui.

    Anéantie par la déception et emportée par une colère froide, elle avait mis le couple à la porte et un peu mélodramatiquement balancé sa bague et les affaires de Marc par la fenêtre.

    « Qu’il se débrouille s’il a l’intention de les récupérer ! »

    Elle avait terminé son stage, sans grande motivation et remis son mémoire. Elle n’imaginait pas continuer un master à Toulouse et risquer d’apercevoir Marc ou Mathilde à la fac ou ailleurs.

    Afin de sauvegarder son équilibre elle devait absolument tourner la page. Son père, après avoir voué Marc aux gémonies, lui a suggéré de s’octroyer une année sabbatique et d’aller en Grande-Bretagne dans le but de parfaire son anglais, de mieux appréhender la culture Anglo-saxonne et de prendre le temps d’affiner un projet de fin d’études. Il disait qu’un master d’anglais, c’était bien mais dans que but ? Puisqu’elle n’était pas très attirée par l’enseignement pourquoi ne songerait-elle pas à s’orienter vers le commerce international ?

    Pendant qu’elle y réfléchissait, sa mère avait fait jouer ses relations pour lui dénicher un travail au pair, au sein d’une famille recommandée, le temps de construire un vrai projet.

    Enfin, après trois semaines d’attente, une amie d’amie lui avait communiqué l’adresse d’un de ses cousins par alliance, un industriel très occupé qui recherchait quelqu’un de sérieux susceptible de prendre en charge sa fillette âgée de cinq ans. Charlotte s’était empressée d’appeler le numéro noté sur la fiche. Là, un homme, peut-être un secrétaire, avait répondu et lui avait conseillé de se présenter au manoir dès que possible, après l’avoir prévenu de son jour d’arrivée, car Monsieur devrait s’organiser pour la rencontrer et valider son embauche.

    La jeune femme avait déjà rendu son appartement et bouclé ses bagages le cœur lourd. Elle avait abandonné derrière elle ses illusions mais, soutenue par sa famille et son amie d’enfance Lucie, elle se laissait envahir par le sentiment de partir à l’aventure et s’obligeait à tourner une page. C’était la première fois qu’elle voyagerait aussi loin seule mais elle avait confiance dans sa conduite et son père s’était chargé de faire réviser son véhicule, lequel se trouvait en excellent état.

    Les cent kilomètres du début du voyage furent douloureux. Elle gérait l’éloignement d’avec ceux qui l’aimaient et l’avaient toujours accompagnée et son angoisse de ne pas appréhender exactement ce qui l’attendait.

    Cependant, curieusement, elle s’apaisait à mesure que la distance avec la ville rose augmentait, pour en arriver à ne plus être préoccupée que par son projet, jusqu’à enfin apprécier la route, même si une larme furtive brouillait par moment ses yeux. Elle repoussa de toutes ses forces les pensées parasites et les regrets d’avoir refusé toute discussion avec Marc après la découverte de son manque de fiabilité. Il l’avait trompée, elle l’avait surpris en flagrant délit et toute confiance détruite, ne voulait plus entendre parler de ce fourbe, ce menteur infidèle ni de Mathilde, sa prétendue amie. Elle avait, d’ailleurs, appris qu’elle avait été recalée à son examen et devait redoubler son année de licence.

    Charlotte s’en était secrètement réjouie, même si elle l’avouait avec une certaine gêne :

    « Il y a tout de même une justice immanente ! » pensait-elle, avec une évidente satisfaction.

    Elle roula tranquillement, pendant deux jours jusqu’au port de Roscoff dans le Finistère, d’où elle embarqua sur un ferry en direction de l’Angleterre. Après une nuit passée sur une mer houleuse, elle débarqua tôt à Plymouth et réalisa avec appréhension qu’elle avait maintenant, l’obligation d’emprunter le « mauvais » côté de la route. Ce ne fut pas sans une belle dose d’angoisse qu’elle s’engagea prudemment dans la file qui quittait le port.

    Elle traversa l’agglomération à la vitesse d’un escargot asthmatique, toute concentrée sur sa conduite et la circulation puis s’arrêta sur un parking isolé à la sortie de la ville, dans le but de renseigner son GPS, d’envoyer un texto à ses parents et de se décontracter car elle avait les muscles noués d’appréhension à l’idée de conduire à gauche. Elle reprit la route quand elle s’aperçut que sortie de la ville, la circulation était plus rare puis au fil des kilomètres, elle sentit la confiance revenir.

    A présent, elle devra rouler vers le nord-ouest, presque tout droit, pendant environ 250 kilomètres, jusqu’à Watermouth près du parc national d’Exmoor, où se situe la propriété de Mister Celian Ab Ithel. Ce nom signifierait en gallois d’après internet, « seigneur généreux ». Si elle ne trouvait pas la propriété, il faudrait qu’elle rappelle son contact afin que quelqu’un vienne la chercher au village.

    « Je parviendrai à découvrir l’adresse, je ne suis pas empotée ! C’est la seule maison en surplomb de la mer, à huit cents mètres du bourg, d’après les explications de mon correspondant ! » pensait-elle.

    Elle prit son temps, s’arrêta en cours de route, profitant de la découverte de ce pays, s’habituant aux sonorités de la langue et n’arriva à destination qu’en milieu de matinée le lendemain de son arrivée en Angleterre.

    Enfin, après s’être renseignée dans le village, elle stoppa devant une énorme grille derrière laquelle serpente une allée gravillonnée. Les côtés du chemin sont tirés au cordeau et pas une herbe ne dépasse. Elle ne voit rien du manoir parce qu’un immense parc boisé semble l’isoler du monde, aussi Charlotte se sent-elle légèrement oppressée.

    Un garde se présente bientôt, sortant de la maisonnette située à l’entrée et lui demande avec un fort accent ce qu’elle veut. Elle répond dans un anglais manquant d’assurance, qu’elle est attendue pour un entretien d’embauche de fille au pair. D’un mouvement de la tête il lui fait comprendre qu’il ouvre le portail, puis lui indique, geste à l’appui, de suivre l’allée et de se garer devant le bâtiment du fond où quelqu’un viendra la chercher.

    Le cœur battant, Charlotte se dirige vers la maison. Le parc traversé est beau et incite à la promenade. Assez vite, elle aperçoit une énorme bâtisse ancienne en pierres taillées, gris clair. Sa première impression est de ne pas la trouver très harmonieuse, comme si les générations successives avaient rajouté une aile, un pignon, une tour, une terrasse, sans grand souci de cohérence ou d’esthétique. Malgré sa grimace devant cette sorte de château, elle est époustouflée par la taille du bâtiment, la foison de couleurs éclatantes dans les parterres et la mer bleu marine jusqu’à l’horizon, en contrebas de la terrasse. Tous ces éléments conjugués confèrent à l’endroit, une sorte de majestueuse beauté.

    Un homme, en costume noir sortit sur le perron et s’approcha. Sans se présenter, il lui indiqua d’un signe, où se garer puis lui proposa en deux mots de le suivre.

    Intimidée, Charlotte l’accompagna après avoir fermé sa voiture et pris son sac. Elle se demanda un bref instant, si sa tenue de voyage, jean et tee-shirt, conviendraient pour cet entretien d’embauche. Tout en rectifiant l’emprise de son chouchou sur sa queue de cheval blonde, elle monta les quelques marches avant d’entrer dans un hall immense très lumineux. Son œil admiratif, fût immédiatement attiré par un gigantesque lustre gondole, certainement en cristal, brillant de mille feux dans le rayon de soleil qui lui parvenait au travers du grand dôme voûté en verre. De nombreux éclats de couleur dansent sur le sol et les murs du hall et rendent l’ambiance de la pièce presque féérique.

    Subjuguée, elle ne pût s’empêcher de se demander comment faisaient les employés pour tenir propre cette coupole impeccablement transparente. C’est très impressionnant !

    Elle suivit l’homme encore jeune, un peu raide à la mine neutre qui la précédait. Il s’arrêta au fond du hall, devant une lourde double porte à laquelle il frappa puis il annonça un peu cérémonieux :

    Puis il s’effaça, la laissa entrer et referma le battant derrière elle.

    Charlotte a les mains moites et son cœur frappe fort dans sa poitrine quand elle pénètre dans cette grande pièce, très haute de plafond. Il s’agit d’un bureau-bibliothèque, dont les murs sont tapissés de livres recouverts de cuir pour bon nombre d’entre eux. Le soleil ne pénètre pas par les baies vitrées mais l’endroit est lumineux. Une odeur de papier, de cigare et d’alcool avec un zeste de feu de bois flotte dans l’air. Une grande table aux pieds chantournés sur laquelle trône un ordinateur portable barre l’espace et fait face à une porte fenêtre donnant sur un jardin. Charlotte enregistre tout en un clin d’œil, lorsqu’un homme, jusque-là silencieux, se lève d’un coin organisé en petit salon et l’invite à s’approcher et à s’asseoir dans un fauteuil en velours plus près de lui.

    Son interlocuteur est grand et semble posséder des épaules musclées. Elle est surprise par son aspect, il lui parait avoir à peine plus d’une trentaine d’années mais ses cheveux, portés courts, sont totalement blancs, à moins d’être d’un blond très clair, comment savoir car Il a vite reculé son siège dans l’ombre d’un rideau occultant et se tient de biais, comme s’il préférait contempler le jardin que de la regarder en face.

    Etonnée par cet étrange comportement, elle s’assoit sur le siège qui se trouve de l’autre côté de la table, assez loin de son interlocuteur. Intimidée par l’enjeu, la jeune femme commence, en anglais, par le remercier de prendre le temps de la recevoir.

    Il lui répond sèchement, qu’il n’aurait pas délégué la tâche de choisir la personne qui détiendra la responsabilité d’éduquer sa fille. Le ton glacial fait frémir Charlotte qui n’ose plus dire un mot et se demande où elle est arrivée et si elle ne devrait pas déjà envisager de repartir.

    Le maitre des lieux annonce sans s’attarder, qu’elle aurait totalement la charge de l’enfant et rendrait compte de ses journées tous les soirs dans son bureau à dix-huit heures trente précises. Si le poste l’intéressait, la gouvernante lui ferait visiter la maison afin de satisfaire sa curiosité mais son domaine serait davantage la nurserie que les salons.

    Son assistant ouvre la porte. L’employeur s’adresse à lui dans un anglais rapide :

    -      Demandez à Mary de conduire mademoiselle Charlotte à son appartement et qu’elle la présente à Joy. Ce soir, elle rencontrera le personnel au moment où il sera rassemblé pour le repas. Mademoiselle Charlotte et Joy seront servies dans la nurserie où elles dîneront. Avez-vous compris mademoiselle ?

    -      Parfaitement monsieur. Je vous suis, ajoute-t-elle pour l’assistant.

    « Pff, quel abruti et quel accueil ! » ajoute-t-elle in petto.

    Le père de Joy regarde songeur Peter et la nounou quitter le bureau.

    « Bon sang, quelle superbe jeune femme ! Elle risque de faire sauter la poudrière ! » Pense-t-il.

    Charlotte est soulagée lorsqu’elle quitte le bureau. Son employeur n’est pas sympathique, il est aussi glacial qu’un iceberg et a une façon étrange de ne pas regarder ses interlocuteurs lorsqu’il s’adresse à eux, tout ce que sa mère lui a toujours déconseillé de faire !

    -      Monsieur, me permettez-vous d’aller chercher mes affaires dans ma voiture avant de monter ?

    -      Non, confiez      -moi vos clés et un valet vous apportera vos valises.

    -      Je peux le faire vous savez, je n’ai pas besoin qu’un serviteur s’en occupe.

    -      Mademoiselle sera servie tout comme Joy, conformément aux ordres de monsieur, répond-il sèchement.

    Charlotte répond d’un signe de tête résigné et reste un pas derrière l’homme en noir.

    -      S’il-vous-plait, monsieur, quelle est votre fonction dans cette maison ?

    -      Je suis Peter, le majordome de monsieur, j’exécute et transmets ses directives à Mary, la gouvernante. Elle organise le planning du personnel mais vous échapperez à son contrôle, monsieur supervisera lui-même vos activités.

    « Quelle chance ! se dit-elle en faisant une grimace, puis elle remarque à voix haute :

    -      Dix-huit heures trente, ce n’est pas le meilleur horaire pour remettre le rapport de la journée car il y a le bain et le dîner de l’enfant à ce moment-là.

    -      Vous verrez cela avec Monsieur et pourrez demander à changer les horaires du programme si ceux-ci ne vous conviennent pas.

    Il frappe à une porte avant d’ouvrir et une grande femme fine et sèche, vêtue de noir, au chignon impeccablement coiffé, d’une petite quarantaine d’année s’avance à la rencontre des nouveaux venus.

    Elle s’adresse à Peter tout en se tenant de façon presque majestueuse. Elle fait un signe de tête lorsqu’elle comprend qu’elle doit présenter la fille au pair à la fillette et au personnel puis tourne le dos pour signifier que l’entretien est terminé.

    Charlotte attend Mary, après avoir donné ses clés de voiture à Peter.

    « Oula, la ! Bonjour l’ambiance ! ils ont tous avalé un manche à balai, ils échangent sans un sourire, sans signe de sympathie. Sont-ils en lutte de pouvoir ou est-ce la mauvaise humeur du patron qui déteint sur le personnel ? » ajoute-t-elle in petto.

    Rapidement, elle aperçoit un homme d’une vingtaine d’années qui porte ses deux valises et monte les marches avec beaucoup de vélocité malgré sa charge. Mary se décide à emprunter le même chemin et se contente d’un royal « Suivez-moi », adressé à la jeune femme.

    Elles se retrouvent au deuxième étage dans une chambre immense.

    -      Un appartement toulousain de trois pièces tiendrait facilement dans tout cet espace, remarque la jeune femme en souriant.

    Une large porte fenêtre donne sur un balcon et de grands arbres. Le valet qui attendait qu’elles arrivent dépose les valises près d’une commode et repart sans dire un mot, après avoir ostensiblement laissé les clés de la voiture sur la sellette située à côté de l’entrée.

    -      Vous ferez le tour de votre logis plus tard. Allons voir l’enfant. Une porte à l’intérieur du dressing, communique avec sa chambre. Autrefois, il s’agissait des appartements des maitres mais monsieur a opéré quelques changements. Je pense qu’il a commis une erreur.

    Elle manipule bruyamment les anciennes clenches forgées, comme pour marquer son mécontentement et entre dans la pièce mitoyenne en clamant :

    -      Mademoiselle, il n’est pas l’heure de la sieste. Vous avez assez dormi. Venez ici que je vous présente votre bonne. C’est une Française, termine-t-elle dédaigneusement.

    Si Charlotte sursaute piquée par le ton plus que par la dénomination, elle ne répond rien mais se demande toutefois si Mary n’aurait pas fait exprès de chercher à la vexer. Elle n’ignore pas que l’on dit que de nombreux anglais construisent des a priori à partir de ce qu’ils savent de l’histoire de la conquête de l’Angleterre par Guillaume et de l’épopée napoléonienne, plus que de la connaissance qu’ils possèdent de la France actuelle et elle se demande si Mary en est un exemple.

    Son regard se focalise aussitôt sur une minuscule petite fille aux grands yeux bleus et aux boucles blondes emmêlées. Elle regarde Charlotte et ébauche une révérence comme si elle n’était pas sûre d’elle ou de la façon d’agir.

    -      Monsieur exige beaucoup de fermeté avec cette fille, il est nécessaire d’extirper d’elle tout ce qui peut lui remémorer sa mère.

    L’agressivité de la remarque choque Charlotte qui voit des larmes envahir le regard de l’enfant. Joy baisse la tête immédiatement pour les cacher.

    -      A dix-huit heures trente, vous irez au bureau faire votre compte rendu et ensuite vous demanderez à Peter de vous conduire à la cuisine. Vous rencontrerez le personnel et récupérerez votre dîner ainsi que celui de Joy. N’espérez pas être servie.

    -      Bien madame. Pourrai-je organiser les journées comme je l’entends ?

    -      Vous êtes libre d’occuper votre temps comme vous le souhaitez, c’est Peter qui vous accordera les autorisations nécessaires, vous ne faites pas partie de mes effectifs, déclare-t-elle avant de quitter la pièce brusquement.

    D’une certaine façon, Charlotte respire mieux, l’attitude agressive de cette Mary ne lui a pas donné l’envie de travailler avec elle. Elle tend la main à Joy et lui propose de l’accompagner dans sa chambre pour l’aider à ranger ses affaires. L’enfant sourit et glisse sa menotte dans celle offerte par l’adulte, elles repassent la porte de communication et s’arrêtent pour contempler le vaste espace qui s’ouvre à elles.

    -      Ce n’est pas très intime, n’est-ce pas ? Nous allons nous organiser. Dis-moi ma puce aurais-tu une salle de jeu et d’étude et parlerais-tu le français ?

    -      Je connais un peu de français, papa Rhys commençait à m’enseigner la langue mais je crois que j’ai un peu oublié. La salle d’étude est à côté de ma chambre. C’est trop grand et tout vide comme ici.

    -      Peut-être est-ce parce que ton père ignore ce dont tu as besoin ?

    -      Il n’est pas mon papa, entend-elle marmonner.

    Charlotte ne relève pas la remarque mais suppose une histoire douloureuse ou embrouillée derrière ce propos. Ses vêtements sont rapidement pendus et sa trousse de toilette rangée dans la salle de bain.

    Elle décide qu’il est encore tôt et qu’il fait assez beau pour se promener dans le parc et demande à Joy si elle possède un ballon. L’enfant secoue la tête, l’air malheureux en répondant qu’elle ne dispose d’aucun jeu et entraine sa nounou dans sa chambre pour qu’elle en fasse le constat. La pièce comme les placards sont vides, seuls de vieux livres poussiéreux sont rangés sur une étagère.

    -      Il n’y a rien ici qui donne envie de jouer ! Prenons ma voiture et allons acheter un ballon et quelques jouets ; une balle, c’est indispensable à la vie d’une petite fille ! J’ai aperçu un supermarché à la sortie de la ville. Veux-tu venir avec moi pour m’aider à choisir tes affaires ?

    Joy ravie hoche la tête et attrape la main de Charlotte pendant qu’elle se saisit de son sac et de ses clés.

    Elles descendent et traversent le grand hall d’un pas assuré. Elles s’apprêtent à quitter la maison quand Peter les intercepte et s’enquiert de l’endroit où elles se rendent.

    -       Nous allons au supermarché acheter un ballon pour jouer et quelques bricoles indispensables à une petite fille.

    -      Je dois demander à Monsieur,

    -      Certainement pas, je suis parfaitement capable de conduire jusqu’au bourg et de revenir sans me perdre ; c’est tout droit, à cinq minutes d’ici ! Ne vous occupez pas de moi, dit-elle en riant.

    -      Je ne peux pas…

    -      Que se passe-t-il ici ? demande le maitre des lieux en sortant d’une pièce tout en restant dans l’ombre.

    -      Monsieur, j’allais partir au supermarché acheter un ballon à Joy mais votre majordome me l’interdit.

    -      Joy n‘a pas de balle ?

    L’enfant rougit, serre la main de Charlotte, prend sa respiration et répond à son père d’une voix claire :

    -      Il n’y a aucun jouet là-haut, juste des livres sales et plein de poussière mais je suis trop petite pour les attraper et je ne sais pas encore lire.

    -      Que diable fais-tu toute la journée ?

    -      Rien, j’ai l’interdiction de quitter ma chambre, je dors jusqu’à ce que Mary me secoue en criant que je suis une vilaine paresseuse.

    Un silence écrasant s’abat sur le groupe.

    -      Peter, accompagnez Charlotte et Joy.

    -      Monsieur, je suppose que Peter a des tâches importantes à effectuer. Nous pouvons prendre ma voiture, je serai très prudente. Nous ferons quelques achats raisonnables et vous me rembourserez le montant des tickets, ce sera parfait et personne ne bouleversera son agenda à cause de nous.

    -      Bien tenez, répond-il, voilà des espèces, si cela ne suffisait pas, réglez la différence et Peter vous la restituera.

    -      Monsieur, vous me donnez beaucoup trop…

    -      Partez avant que je change d’avis, dit-il avec un geste de la main.

    -      Peter, avez-vous un siège auto dans votre voiture ?

    -      Non, nous n’avons pas prévu de fauteuil pour l’enfant.

    -      J’en achèterai un, cela coûtera moins cher que de payer des amendes parce que sa sécurité n’est pas assurée. Nous pourrons ensuite aller nous promener sans souci de cette façon.

    -      Génial Charlotte ! s’exclame Joy en sautant et en battant des mains.

    Son père la reprend aussitôt :

    -      Joy, mademoiselle Charlotte, ta nounou n’est pas ton amie.

    L’enfant baisse

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