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Le Secret de Mischa
Le Secret de Mischa
Le Secret de Mischa
Livre électronique266 pages3 heures

Le Secret de Mischa

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À propos de ce livre électronique

Mischa, le jovial chauffeur de taxi, n’eut pas le temps de libérer son client. Une épouvantable déflagration, une vive douleur dans le dos, puis le trou noir. L’inspecteur Derval est envoyé sur la scène de crime pour mener l’enquête. Il se heurte très vite aux questions habituelles pour identifier le meurtrier. Mais surtout, quel secret le taxi a-t-il emporté dans sa tombe ?
LangueFrançais
Date de sortie8 nov. 2022
ISBN9782312132976
Le Secret de Mischa

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    Le Secret de Mischa - Yves Gillet

    cover.jpg

    Le Secret de Mischa

    Yves Gillet

    Le Secret de Mischa

    LES ÉDITIONS DU NET

    126, rue du Landy 93400 St Ouen

    Du même auteur

    Aux Éditions Sydney Laurent :

    Meurtre au Faubourg-Raines, 2014

    Te souviens-tu de Ludo ? 2015

    Kir royal au cyanure, 2017

    Mortelle Saint-Didier, 2018

    L’Alcazaba, 2019

    Aux Éditions Édilivre :

    Un joli panier de crabes, 2015

    Aux Éditions Écrits Noirs :

    Troisième larron, 2016

    Aux Éditions Chapitre.com :

    La mort aux Trois Mares, 2019

    Hôtel des Agapanthes, 2020

    Inquiétante Coulée Verte, 2021

    © Les Éditions du Net, 2022

    ISBN : 978-2-312-13297-6

    Chapitre 1

    Un mois plus tôt.

    Le soleil avait disparu depuis une bonne demi-heure et la rue Lafayette avait pris son apparence nocturne de tous les jours. Petite rue excentrée, essentiellement bordée de modestes pavillons anciens, elle semblait s’être endormie en même temps que ses riverains. Pas un bruit, pas le moindre mouvement, de profondes ténèbres à peine trouées par quelques réverbères poussifs. Seule discrète manifestation humaine, une silhouette se dissimulait dans l’obscurité de sa voiture, anonymement garée le long du trottoir. Aux aguets, à l’affût du moindre bruit, du moindre mouvement, le regard fixé sur le portail d’un pavillon situé à une trentaine de mètres.

    « Mais qu’est-ce que je fais là, à jouer aux espions dans le noir, à cette heure indue ? À fouiner comme un sale petit gamin préparant un mauvais coup ? »

    Malgré l’inconfort de la situation, cette réflexion à voix haute fit fleurir un sourire sur le visage impassible. La Fouine ! Ce surnom qui lui collait à la peau depuis sa plus tendre enfance, depuis l’époque où son passe-temps favori consistait à espionner les grands qui ne lui témoignaient que dédain ou mépris. Ce surnom qui l’avait poursuivi pendant de longues années, au collège, et même au lycée. La Fouine ! « Finalement, c’est vrai, je suis toujours la Fouine ! Mais les temps ont changé. Je fouine peut-être encore mais on me respecte, maintenant. Peut-être même qu’on me craint aussi. La Fouine ! Elle vous salue bien, la Fouine ! »

    La Fouine regarda sa montre. Bientôt 22 heures ! Sa silhouette sombre traversa la chaussée, parcourut les trente mètres qui la séparaient du pavillon, s’arrêta devant la boîte aux lettres et y glissa l’enveloppe habituelle. Sans jeter le moindre regard, la Fouine revint à sa voiture et s’installa derrière le volant, pour une nouvelle période de veille.

    Cela faisait déjà plusieurs mois que la Fouine jouait à cache-cache avec son bourreau. Plusieurs mois qu’un sale type avait eu l’impudence de la prendre en défaut, preuves à l’appui, et la tourmentait par un horrible chantage qui commençait à peser lourd sur ses nerfs et sur son compte en banque. Consciencieusement, et lâchement, à l’abri d’un anonymat que la Fouine essayait désespérément de percer. Sans succès jusqu’à ce jour. Le seul indice à sa disposition, c’était cette boîte aux lettres où elle déposait tous les mois l’enveloppe contenant le prix de ses errements. Bien sûr, elle avait facilement découvert la propriétaire des lieux, mais ce chantage n’était certainement pas l’œuvre d’une petite vieille de plus de 90 ans, handicapée de surcroît et en maison de repos depuis plus d’un an. « Alors, quel est l’enfoiré qui profite de l’absence de cette brave dame et qui squatte sa boîte aux lettres pour exercer sa funeste besogne ? »

    À minuit, la Fouine dut se faire une raison. Ce n’était pas encore ce soir qu’elle démasquerait son tortionnaire !

    La Fouine reprit le volant, une nouvelle fois dépitée. Elle conduisait doucement, absorbée par cette recherche désespérée de l’identité de l’inconnu qui lui pourrissait la vie. Et elle ne pouvait que constater amèrement le bilan de ses longues veilles où, après avoir déposé son enveloppe, elle tentait désespérément de repérer celui ou celle qui viendrait relever le courrier. Subitement, il lui vint une idée. Après tout, la consigne stipulait le jour du dépôt de l’enveloppe, mais pas l’heure. Donc, le maître chanteur devait attendre le jour suivant pour être certain de trouver l’enveloppe. Plein d’un nouvel espoir, la Fouine décida de revenir le lendemain.

    La Fouine revint le lendemain, misant toujours sur les heures plus discrètes de la nuit. À 21 heures, elle reprenait son poste d’observation, à l’abri des regards et d’une petite pluie sournoise autant que désagréable. Et la Fouine vit enfin ses efforts récompensés. Une voiture ralentit à sa hauteur et se gara juste en face du pavillon sous surveillance. Frémissant à l’idée de coincer enfin l’ignoble salopard et de lui faire entrevoir les dangers de la vie de maître chanteur, la Fouine saisit la portière et s’extirpa de sa voiture tout en restant attentive aux agissements de sa future victime. Quelle ne fut pas sa surprise lorsque cette dernière, loin d’ouvrir la boîte aux lettres pour en retirer le contenu, sortit une enveloppe de sa poche et la glissa dans la fente. Changement de programme et retour précipité à la posture de guet. Seule explication, le quidam, qui venait de faire une halte au pavillon sous surveillance, n’était pas le maître chanteur mais plus probablement une autre victime de chantage. Il fallait en savoir plus sur ce nouveau personnage, qui lui fournirait peut-être une piste pour démasquer l’ignoble maître chanteur. Abandonnant tout espoir de repérer sa cible, la Fouine passa la première et pris en filature son infortuné confrère en chantage.

    Chapitre 2

    La Fouine était dans un état d’excitation incroyable. Elle avait remué ciel et terre pour identifier son affreux maître chanteur Elle avait maintes fois effectué un guet inconfortable et indigne devant cette boîte aux lettres qui avait refusé de dévoiler son secret. Elle avait pris en filature un quidam qui s’était révélé n’être qu’une autre malheureuse victime d’un prédateur commun. Devant la vanité de ses efforts, la Fouine avait alors décidé de démasquer l’ignoble individu d’une autre façon, à la manière d’un détective. En mettant à contribution ses neurones. D’abord, elle avait examiné de plus près les photos qui la mettaient à la merci d’une dénonciation absolument terrifiante. Où avaient-elles été prises ? Et quand ? Et dans quelles conditions ? En faisant appel à ses souvenirs, pouvait-elle en déduire qui se cachait derrière l’objectif ? Plus elle avait approfondi cette piste, plus elle avait resserré le nœud autour de deux suspects possibles, et même probables. Des suspects insoupçonnables ! Non, ce n’était pas possible ! Pas eux ! Et pourtant, ce ne pouvait être que l’un des deux, mais lequel ? À moins qu’ils ne fussent complices ! Mais comment être certain ?

    À ce stade de ses réflexions, la Fouine se souvint de ce collègue d’infortune, celui qu’elle avait repéré en train de déposer sa propre enveloppe. Quand elle l’avait abordé, discrètement, son interlocuteur avait joué les innocents, ignorant de quoi la Fouine pouvait bien lui parler. Après de longues explications, un peu sous l’effet d’une solidarité nouvelle entre victimes, il avait fini par accepter d’échanger leurs informations. Ils n’avaient abouti à aucune identification véritable, mais la Fouine avait recueilli deux informations essentielles, qu’elle avait enregistrées sans laisser transparaître le moindre intérêt. La première lui confirmait très probablement l’identité du maître chanteur. La deuxième lui révélait une mystification qu’elle n’aurait jamais pu imaginer, même dans ses pires cauchemars. La surprise et l’abattement n’avaient pas duré très longtemps, immédiatement remplacés par une froide colère exprimée au travers d’un verdict sans appel.

    « Pour la trahison, il n’y a qu’une sentence ! La mort ! »

    Chapitre 3

    La terrasse du Météore avait revêtu des allures estivales. Après de longs mois de ciel gris, de pluies anémiques mais ô combien désagréables, de vent froid et pénétrant, de brouillard aussi, la météo avait enfin décidé, en ce jeudi de début mai, de laisser s’exprimer le soleil, avec tous ses attributs de couleurs, de température et de luminosité. Patrick Derval et Laurence Villanueva étaient installés à la terrasse, dans une position de touristes en pleine action. Les jambes allongées, le buste en arrière, le visage serein de celui qui profite de l’instant présent, Derval savourait ce moment de détente en compagnie du demi bien frais que venait de déposer la jeune serveuse. Sa compagne, Laurence, de retour d’un congrès de légistes à Paris, avait profité des circonstances pour effectuer une halte à Dijon, avant de rejoindre sa Provence natale et son poste à l’institut médico-légal de Marseille. Derval consulta sa montre. Ils avaient largement le temps de profiter de leurs rafraîchissements et de la douceur estivale de la terrasse. Le train de Laurence devait partir à 16 h 34.

    « C’est bien la première fois que je passe plusieurs jours avec toi sans que tu t’éclipses toutes les cinq minutes ! prononça la jeune femme, avec un sourire quelque peu forcé.

    – C’est aussi la première fois que tu viens à Dijon et qu’il ne se produit pas un meurtre sur ton passage ! continua Derval sur un ton hilare. Ce n’est pas ma faute si tu inspires les meurtriers !

    – Oh, ça va ! Tu sais bien ce que je veux dire ! »

    La table la plus proche était occupée par deux jeunes gens, sans doute autour de la trentaine, lancés dans une discussion animée. Manifestement, ils prenaient du bon temps eux aussi et semblaient profiter pleinement de ce jour béni, avant-garde d’un été qui ne pouvait manquer de prendre enfin le dessus. Le plus grand des deux, arborant chemise et casquette rouges, se leva et s’approcha de Derval.

    « Excusez-moi, monsieur, mais est-ce que vous auriez du feu ? dit-il en montrant sa cigarette éteinte.

    – Vous avez de la chance, mon ami ! Je ne fume pas, mais il se trouve que j’ai ramassé cette pochette d’allumettes hier ou avant-hier. Tenez, je vous la laisse, je n’en aurai pas besoin.

    – C’est sympa, ça ! Dites, vous ne chercheriez pas un taxi, des fois ? s’aventura-t-il.

    – Non, pas du tout. En fait j’accompagne mon amie qui prend le train pour Marseille, répondit Derval en rigolant.

    – Ah ! Je comprends. Alors je suppose que, d’ici une vingtaine de minutes, nous prendrons tous les deux le chemin de la gare.

    – Probablement, acquiesça Derval. Nous, côté Départs, et vous côté Arrivées, je suppose. »

    Le taxi rejoignit son ami er reprit sa place, tout en jetant un dernier regard à Derval. Face à lui, son copain lui montra sa montre avec insistance.

    « Eh ! Mischa ! Ne te laisse pas aller ! Le boulot va bientôt arriver, avec armes et bagages !

    – Les bagages me suffiront ! plaisanta Mischa. Mais en attendant, Léo, tu devrais faire comme moi et apprécier à sa juste valeur ce cher soleil qui n’a pas été aussi généreux depuis fort longtemps.

    – Ça, c’est bien vrai, je dois reconnaître. Ma dernière séance de terrasse remonte à… je dirais octobre, ou même septembre. En tout cas, c’était avant ce putain d’hiver. Et ça ne les empêche pas de nous rabâcher leur réchauffement climatique ! Ça se voit que c’est pas eux qui se les gèlent en attendant le client au vent et au froid !

    – Au fait, Léo, c’est toujours d’accord pour ce soir ? J’ai eu Hugo et Samir, ils seront là.

    – Moi aussi, pas de souci !

    – On s’est mis d’accord pour 22 heures, ça te va ?

    – C’est bon pour moi. Et tu peux préparer la monnaie ! N’oublie pas que vous vous attaquez au roi du poker ! »

    Les deux amis se décidèrent à vider leurs verres. 16 heures ! Plusieurs TGV allait bientôt libérer leurs cargaisons de piétons en quête de taxis. Mischa referma l’ordinateur portable qui était ouvert devant lui, le prit sous son bras et suivit son ami. Au moment où ils quittaient le Météore, Derval et Laurence faisaient de même et ils se retrouvèrent à marcher ensemble, dans la même direction. Derval et Mischa ne purent réprimer un grand rire spontané.

    Derval se planta face au tableau des Départs, découvrant que le train de Laurence était annoncé au quai numéro 1. Après l’inévitable compostage, ils se retrouvèrent vite sur le quai, au niveau annoncé de la voiture de Laurence. Derval, peu enclin aux effusions ou aux adieux larmoyants, préféra se cantonner à des sujets neutres jusqu’à l’arrêt du TGV. Après un ultime baiser, Laurence rejoignit sa place, fit un petit signe de connivence auquel répondit Patrick. Le train s’ébranla et Derval prit aussitôt le chemin de la sortie. Un bref coup d’œil à la file d’attente des taxis lui suffit. Pas de casquette rouge à l’horizon ! Son voisin de terrasse en panne d’allumettes avait embarqué un client.

    Chapitre 4

    Mischa venait de reprendre sa place derrière le volant de sa Mégane et attendait patiemment que les deux collègues placés devant lui chargent leurs clients pour en faire autant. Occupé à observer le premier s’acharner assez maladroitement sur une valise apparemment très lourde, il ne vit pas venir le client suivant qui s’installa derrière lui sans autre formalité. Il avait juste une petite valise qu’il posa sur la banquette à côté de lui, ce que Mischa apprécia au plus haut point. Pas besoin de descendre pour ouvrir le coffre. Juste un petit coup d’œil dans le rétroviseur pour entrapercevoir une silhouette complètement emmitouflée dans un manteau d’hiver, derrière une large écharpe de laine et des lunettes de soleil.

    « Vous désirez aller où ? s’enquit-il.

    – À Chenôve, lui répondit une voix rauque. Tenez, voici l’adresse exacte ! poursuivit le client en lui tendant un morceau de papier chiffonné. Vous en aurez pour longtemps ?

    – Je vais vous dire ça, c’est une rue que je ne connais pas. »

    Mischa eut une pensée circonspecte pour ce passager, ou cette passagère après tout, qui avait l’audace d’investir son taxi sans même lui demander son avis, tout en étant possiblement contagieux. Et dans un accoutrement digne du plus fort de l’hiver, avec ça ! Il entra l’adresse dans son GPS et démarra en lui signalant qu’ils seraient arrivés en moins de vingt minutes. « Le plus vite tu descendras de ma voiture et le mieux ça sera ! », ne put-il s’empêcher de gamberger. La réponse sembla satisfaire le client qui se concentra alors sur la découverte d’une ville qu’il semblait découvrir. Devant le silence de son passager, seulement perturbé par une respiration caverneuse, Mischa se sentit obligé de faire la conversation en signalant, sur son parcours, l’ancien hôpital, la place du 1er mai, et surtout la route des grands crus.

    « Vous voyez, ici, c’est le départ pour le parcours de nos vins les plus célèbres. Nous nous arrêterons à Chenôve mais, en continuant sur cette route, vous pourriez découvrir les plus belles étiquettes de notre Bourgogne. Gevrey-Chambertin, Vosne-Romanée, le Clos-Vougeot, Nuits-Saint-Georges, Beaune, et j’en passe. Mais là, je dois la quitter pour aller à votre adresse. »

    Mischa, suivant les consignes de son GPS, s’engagea dans une sorte d’impasse, entre deux alignements de pavillons en construction.

    « Vous êtes sûr que c’est là ? Ça a l’air inhabité.

    – Oui, c’est la dernière maison, au fond de l’impasse, lui répondit la voix rocailleuse. Je crois que c’est la seule qui est terminée.

    – Ma foi, si vous le dites… »

    Mais Mischa se retrouva face à une dernière construction en plein chantier, dont la toiture n’était même pas en place. Il était sur le point de se retourner vers ce client si mal renseigné lorsqu’il entendit une détonation assourdissante, en même temps qu’il ressentait une vive douleur au milieu du dos. Puis ce fut le trou noir.

    Chapitre 5

    Derval avait prévu de faire un petit tour pour la forme au commissariat, mais aucune enquête digne d’intérêt ne justifiait qu’il accélérât sa marche nonchalante. Il décida que personne ni rien ne l’attendait et il opta pour le chemin des écoliers. Remontant l’avenue du maréchal Foch en direction de la place Darcy, il longea plusieurs bars ou restaurants, parmi lesquels se trouvait le Météore. Un rapide coup d’œil lui confirma que ses voisins taxis avaient disparu de la terrasse. Arrivé en haut de la rue de la Liberté, il hésita sur la suite de ses déambulations. Oubliant son projet initial, il quitta l’artère centrale de Dijon et tourna sur sa droite en direction de la cathédrale Saint-Bénigne. Choix non innocent ni anodin, car il se retrouva très vite devant la librairie de son amie Michèle Bernard.

    « Patrick ! Quel bon vent vous amène ? s’exclama joyeusement la libraire.

    – En fait, je viens de reconduire Laurence à la gare. Elle a passé quelques jours à Dijon et s’en retourne dans sa chère Provence. Et comme rien ne me presse à cette heure, j’en profite pour me tenir au courant des dernières sorties auprès de ma libraire préférée.

    – Toujours aussi flatteur, capitaine ! Mais vous avez raison, c’est une excellente idée ! Surtout si la police judiciaire est à même de se passer des lumières du plus illustre de ses inspecteurs ! »

    La conversation prit tout de suite un tour plus sérieux autour des sorties littéraires pour lesquelles Michèle Bernard, qui avait appris à connaître les goûts de Derval, était d’excellent conseil. Aucun client ne vint interrompre cette longue discussion animée, jusqu’à ce que le téléphone de Derval les ramène à une réalité plus concrète. Derval décrocha et écouta son interlocuteur sans mot dire. Mais au fur et à mesure que la conversation se prolongeait, le visage du policier se fermait. Derval raccrocha sur un laconique « Bon, j’y vais de ce pas ! »

    Michèle Bernard avait compris l’origine de l’appel dès qu’elle avait pu constater la transformation du visage de son ami.

    « C’était le commissaire Portes ! lui confirma Derval. Les autres n’ont pas osé m’appeler ! On a un cadavre sur les bras ! Abattu dans sa voiture ! Michèle, excusez-moi de vous lâcher aussi brutalement, mais il faut vraiment que j’y aille.

    – Pas de problème, capitaine. Plus vite vous serez sur les lieux, plus vite vous bouclerez le méchant adepte de la gâchette ! »

    Il fallut un bon quart d’heure au policier pour parvenir à l’adresse indiquée par le commissaire. Alors qu’il se garait sur le côté boueux de l’impasse, il observa longuement les lieux, d’un air étonné. Mais il eut la satisfaction de voir Sandrine venir à sa rencontre. Lieutenant Sandrine Perrot, jeune inspectrice ayant depuis peu passé la trentaine, et considérée par le capitaine comme son bras droit.

    « Le coin n’est plus du tout le même que dans mes souvenirs. Quand je suis venu ici la dernière fois, c’était une petite rue étroite avec des pavillons anciens et de grands jardins potagers agrémentés d’arbres fruitiers de toutes sortes. Regarde-moi ça ! Bientôt, il n’y aura plus que quelques pavillons et une multitude de petits immeubles. Du béton partout ! Même la rue a été coupée et transformée en impasse !

    – C’était au siècle dernier ? ironisa Sandrine.

    – Peut-être bien, après tout. Tu as sans doute raison. »

    Ils rejoignirent un petit groupe qui s’était formé près de la voiture arrêtée au milieu de la voie. Deux policiers en uniforme veillaient à ce que personne ne franchisse la rubalise jaune qu’ils avaient tendue autour de la scène.

    « Tiens, remarqua le capitaine, c’est un taxi ?

    – Exactement, mais le chauffeur n’avait pas de client au moment de l’agression.

    – À moins que le client ne se soit métamorphosé en agresseur et qu’il ait pris la fuite !

    – Tu m’as coupé l’herbe sous le pied, chef ! Car je ne vois pas ce que ce taxi serait venu faire dans ce coin paumé si on ne le lui avait pas demandé. Et qui peut choisir la destination d’un taxi, sinon le client ?

    – Tu as probablement raison mais il pouvait aussi avoir rendez-vous et être tombé dans un traquenard. »

    Auprès du taxi, une silhouette était penchée à hauteur de la porte ouverte du conducteur, silhouette que Derval reconnut immédiatement comme étant celle du docteur Houzny. L’inspecteur s’avança un peu, sans interférer dans le travail du légiste, attendant sagement que ce dernier se redresse et livre ses premières constatations. Lorsqu’il fut prêt, le médecin adressa un sourire entendu au capitaine.

    « Capitaine Derval, quelle agréable surprise ! Comme on se retrouve !

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