Campagne du Crimée, l'Alma: Souvenirs d'un zouave
Par Ligaran et Louis Noir
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Avis sur Campagne du Crimée, l'Alma
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Aperçu du livre
Campagne du Crimée, l'Alma - Ligaran
EAN : 9782335068771
©Ligaran 2015
Souvenirs de la campagne de Crimée
Silistrie
Un torrent humain. – Une digue vivante. – Une armée en guenilles. – Des gueux sublimes. – Judith en Circassie. – L’homme au carquois. – Nos rations ou la mort. – Les souliers du lieutenant C ***. – Les anglais après trois jours de marche. – Riposte à un écossais. – Les zouaves à Stamboul. – Heureux mortels. – Le sultan au galop. – La négresse mâle.
Lorsque nos premiers régiments débarquèrent en Turquie, une consternation profonde s’était emparée de Constantinople. On venait d’y recevoir la nouvelle du désastre de Sinope, dans lequel la marine ottomane avait été anéantie ; quelques jours plus tard, on apprenait que cent cinquante mille Russes marchaient vers le Danube. Le sultan ne pouvait opposer à cette formidable invasion que soixante et dix mille soldats, commandés par Omer-Pacha. C’était une bien faible digue pour arrêter le torrent qui descendait du Nord sur la Turquie et menaçait de l’envahir tout entière.
Les Français, trop peu nombreux encore, étaient concentrés à Gallipoli, loin du théâtre de la guerre. Personne n’avait confiance dans les troupes turques, malgré la réputation d’habileté de leur général en chef ; une seule victoire remportée par l’ennemi suffisait pour lui ouvrir le chemin de Constantinople, et chacun s’attendait à voir les faibles bataillons d’Omer-Pacha écrasés par la puissante armée du czar.
Le maréchal Saint-Arnaud et lord Raglan, commandants en chef des armées alliées, résolurent d’aller visiter en toute hâte les positions occupées par les Turcs à Schumla, afin de combiner avec eux un plan de résistance, si toutefois la résistance était possible. Tout le monde en doutait. Le premier aspect des troupes musulmanes ne devait pas rassurer les officiers européens. Lorsque nos états-majors inspectèrent le camp de Schumla, ils furent péniblement affectés de la tenue des Turcs ; on ne saurait imaginer un délabrement plus complet : les soldats se drapaient avec une ridicule fierté dans des lambeaux d’uniforme dont la coupe et la couleur n’étaient plus reconnaissables ; d’ignobles lanières de cuir brut et souvent de simples ficelles remplaçaient les différentes pièces du fourniment ; les coiffures consistaient en de petites calottes sordides et usées jusqu’à la corde ; les armes rouillées semblaient être hors de service ; les canons de la plupart des fusils étaient retenus contre le bois par des fils de fer, beaucoup faisaient long feu ; la crosse en était faussée ; une baguette de bois remplaçait souvent celle d’acier ; quand une gâchette ne fonctionnait plus, on mettait le feu à l’amorce avec un morceau d’amadou ajusté au bout d’un jonc. Les baïonnettes étaient sans tenons ; nous en avons vu qui, ayant été rompues par le milieu, n’avaient pas été remplacées pour si peu, on s’était contenté de les limer et de les aiguiser. Les sabres s’étaient transformés dans les mains de leurs propriétaires, affectant tantôt la forme d’un yatagan, tantôt celle d’une flissa, tantôt même celle d’un couteau de chasse ; la majorité des fourreaux était en bois. Le tout recouvert d’une couche d’oxyde à laquelle on ne pouvait toucher sans se salir les mains.
À l’allure de hommes, il ôtait facile de voir qu’un pareil état de choses résultait, non des fatigues d’une campagne pénible, mais de l’incurie évidente des chefs et de la paresse innée des soldats.
Les fantassins turcs paraissaient avoir à peine l’énergie de se porter eux-mêmes ; ils ne marchaient pas, ils se traînaient, ils n’aspiraient qu’à dormir et n’étaient jamais complètement éveillés.
Leur administration était mal organisée ; elle les nourrissait à peine, ne les payait pas, prétendait que le linge est un luxe, et on lui a reproché officiellement d’avoir des employés infidèles.
Entre autres détails, citons-en un qui a son prix. On annonça devant nos officiers que l’on allait distribuer des chaussures à un bataillon. Cette munificence est rare ; mais elle arrive pourtant quelquefois. Les soldats se disposèrent sur un rang, et l’on plaça devant eux un certain nombre de grandes peaux, tannées tant bien que mal ; chaque soldat vint en tailler un morceau et reprit son rang d’un air satisfait.
Quand la répartition fut finie, les rangs se rompirent.
– Eh bien ! demanda un de nos officiers, quand donnez-vous les souliers ?
– Mais nous venons de le faire.
– Quoi ! ces morceaux de cuir ?
– Seront d’excellentes chaussures dans une heure ; avec deux courroies et de larges semelles on improvise rapidement une paire de sandales.
– Vos hommes marchent avec cela ?
– Encore sont-ils bien heureux de l’avoir ; il y en a beaucoup qui vont nu-pieds.
Tout le reste était à l’avenant.
Dans les hôpitaux, les blessés et les malades gisaient, abandonnés, sans médicaments, sans médecins, sans infirmiers ; il en mourait neuf sur dix. C’était un lamentable spectacle.
Omer-Pacha comprit l’impression pénible que nos généraux éprouvaient ; sourit et il donna quelques ordres.
– Vous venez de voir une des faces de l’armée, dit-il, vous allez voir l’autre.
Le clairon retentit, et aussitôt deux bataillons prirent les armes, s’alignèrent et attendirent.
– Voulez-vous assister à quelques manœuvres ? demanda le généralissime turc aux généraux alliés.
– Volontiers, répondirent ceux-ci.
– Lord Raglan, se penchant vers le maréchal Saint-Arnaud lui dit avec une expression de dédain :
– Hélas ! quels auxiliaires nous allons avoir !
– Attendons, répondit le maréchal : ces gens-là sont peut-être meilleurs qu’ils n’en ont l’air.
Le vieux général africain avait été frappé de l’ensemble avec lequel les Turcs s’étaient formés en bataille ; ces misérables fantassins se redressèrent fièrement sous les armes. Bientôt les commandements résonnèrent sur toute la ligne, les compagnies s’ébranlèrent, les mouvements les plus difficiles s’exécutèrent avec une précision et une sûreté admirables.
Omer-Pacha souriait toujours.
Sans donner à ses alliés le temps de revenir de leur étonnement, il déploya dans la plaine plusieurs escadrons de cavalerie. Ils chargèrent et défilèrent avec un admirable entrain. Une batterie prit ensuite position et commença le feu contre des cibles que les canonniers criblèrent de boulets avec une merveilleuse adresse.
Ces épreuves firent grande impression sur les officiers français, et modifièrent singulièrement leur opinion au sujet de l’année turque. Le maréchal Saint-Arnaud serra la main d’Orner-Pacha, en lui disant :
– Je vois que l’on peut compter sur vous !
L’avenir justifia cette parole, et une grande cordialité régna dès lors entre nos soldats et les troupes musulmanes.
Mais, excepté lord Raglan et quelques autres officiers supérieurs, les Anglais continuèrent à mépriser les Turcs malgré les prodiges de courage et d’abnégation qui signalèrent la défense de Silistrie. Cela explique la haine que l’armée du sultan a toujours eue contre l’armée anglaise. Les soldats anglais croyaient du reste être venus à Constantinople non pour sauver cette ville, mais pour s’en emparer. À Gallipoli, ils s’amusaient souvent à arrêter un bourgeois turc sur la plage ; ils traçaient un cercle autour de lui et indiquaient que ce cercle était la Turquie, puis ils l’en faisaient sortir, partageaient le cercle en deux parties et montraient au Turc un des côtés, en prononçant le mot Angleterre, et l’autre côté en prononçant le mot France ; enfin ils terminaient cette pantomime en poussant le Turc vers les côtes d’Asie qu’on apercevait.
On conçoit que toute cette mimique n’était pas faite pour faire plaisir aux musulmans.
Désormais rassuré par ce qu’il avait vu, le maréchal Saint-Arnaud prit des mesures pour appuyer au plus tôt Omer-Pacha qui, retranché solidement à Schumla, attendit le résultat du siège de Silistrie. Le général turc comptait arrêter et battre les Russes sous les canons de ses redoutes, dans le cas où Silistrie tomberait au pouvoir de l’ennemi. Le maréchal Saint-Arnaud résumant son opinion sur les troupes turques, écrivait au ministre de la guerre la lettre suivante :
« Les divisions que j’ai examinées sont mal armées, mal habillées, mal chaussées surtout ; mais leur ensemble est militaire ; l’artillerie est ce qu’il y a de mieux… J’ai été surpris, par des essais faits devant moi, de la justesse du tir. »
Il nous a semblé curieux de produire ce témoignage officiel sur l’armée la plus étrange qui existe en Europe ; une armée dont on n’attendait rien et qui fit des miracles d’héroïsme. Le général Clerc, habile à renfermer une appréciation dans une phrase spirituelle, disait souvent : Les Turcs sont des gueux sublimes !
Les généreux alliés retournèrent à Constantinople avec la certitude que la garnison de Silistrie tiendrait au moins pendant quelques semaines ; elle tint si bien que la ville ne fut pas prise. Les Russes échouèrent dans tous leurs assauts, et, malgré la supériorité des moyens d’attaque sur les moyens de défense, ils furent forcés de se retirer après avoir essuyé de grandes pertes.
Lors du passage des troupes françaises à Constantinople, on y racontait l’anecdote suivante, qui a rapport au siège de Silistrie :
Quelques jours avant l’investissement de la ville, des bandes de cosaques en mirent les environs à feu et à sang.
Une jeune esclave, originaire du Caucase, se signala contre une de ces troupes de pillards par un acte d’une énergie sauvage. Ce trait donne une idée du courage farouche des Circassiennes, qui ont la réputation d’être les plus belles femmes de la terre, et de pousser la bravoure jusqu’à la férocité.
La Circassienne dont nous parlons faisait partie du harem d’un haut fonctionnaire musulman, qui l’avait installé dans une villa située assez loin des remparts de Silistrie. Cette villa, en l’absence du maître, fut prise par un peloton de cosaques, qui, après avoir pillé les richesses de cette demeure, se partagèrent les esclaves, dont on trouve toujours un bon prix en Turquie. La Circassienne échut à l’officier qui commandait cette bande. La nuit approchant et aucune patrouille turque ne paraissant, les cosaques s’installèrent dans la villa ruinée dont ils firent un poste d’observation. Vers minuit, les sentinelles virent leur officier sortir de la maison, reconnurent son uniforme et le laissèrent passer. À l’aube, comme un corps de bachi-bouzouks s’avançait, les cosaques, croyant que leur chef était rentré, coururent à sa chambre pour le réveiller. Ils ne trouvèrent que son cadavre décapité. La prisonnière circassienne, décapitant l’officier, avait renouvelé l’exploit de Judith, puis elle avait endossé l’uniforme de sa victime ; mais au lieu d’emporter la tête du Russe dans un sac, elle l’avait cachée sous les plis d’un ample manteau d’ordonnance. Les bachi-bouzouks turcs arrivaient au galop, ayant à leur tête l’intrépide jeune femme ; ils exterminèrent les cosaques.
La jeune esclave devint ensuite l’épouse unique et légitime du riche fonctionnaire
