La bataille de Strasbourg est sans doute l’une des mieux documentées de l’Antiquité tardive. C’est à cet engagement entre Romains et Alamans, survenu à l’été 357, que l’historien Ammien Marcellin (voir encadré p. 72) consacre le plus long développement de son oeuvre narrative, les Res Gestae: environ 8 800 caractères dans le texte latin original contre moins de 4 000 pour la bataille d’Andrinople, dont la notoriété est pourtant bien plus grande aujourd’hui. Cette victoire romaine montre que l’Empire romain tardif, acculé par les peuples barbares et à peine remis d’un siècle de crises militaires, était encore capable d’organiser efficacement sa défense et même de remporter des combats en rase campagne contre des ennemis largement plus nombreux.
Le magister militum (maître des milices, ou plutôt « maître des soldats », milites) est le plus haut gradé au sein de l’armée romaine tardive. Chaque magister militum est le général en chef d’une armée mobile régionale (Orient, Illyrie, Gaules…).
Tout commence dans les années 350, quand les Alamans, peuple barbare que ses raids de pillage avaient mené parfois jusqu’au nord de l’Italie, décident de passer la frontière rhénane. Plus question d’incursion: il s’agit de s’installer de façon pérenne sur les territoires du Nord-Est de la Gaule. Les Alamans s’emparent des villes rhénanes et de la rive gauche du Rhin, ce que l’empereur Constance II ne peut accepter. Pour repousser les intrus, il dépêche le Barbatio avec 25 000 soldats pour renforcer le prince impérial Julien, nommé en 356 commandant de l’armée des Gaules. Mais les deux généraux ne parviennent pas à s’entendre, et le maître des milices finit par partir, laissant son rival seul contre les
