Le 25 juillet 1944, après un enlisement de six semaines, les Américains percent et leurs chars déferlent en Bretagne. De leur côté, les Anglo-Canadiens piétinent toujours au sud de Caen. Quand le général (et bientôt field marshal) britannique Bernard Montgomery comprend l’ampleur du succès américain, il voit rouge : il est temps de « sortir aussi les Britanniques » du bourbier caennais. Percer vers l’Est pincerait les armées allemandes au sud de la Seine et redorerait son blason dégradé. Montgomery met en branle ses deux armées. À l’attaque de la 2nd Army en direction de Vire et Falaise (opération Bluecoat), doit se joindre dans la nuit du 7 au 8 août celle de la 1st Canadian Army, le long de la route nationale Caen-Falaise (opération Totalize). Une fois à Falaise, située à 30 km au sud, les deux armées fonceront vers la Seine pour y devancer les Allemands.
Innovations tactiques
La planification de Totalize est confiée à l’un des plus jeunes, et sans doute le plus talentueux, des officiers canadiens, le général Guy Simonds, qui vient de prendre le commandement du second corps. Simonds sait qu’il va frapper du fort au fort, sans pouvoir compter sur l’effet de surprise. En face de lui campent trois divisions Panzer SS. Le paysage de plaine agricole, considéré à tort comme un charodrome, se révèle un piège mortel. Les grenadiers SS sont retranchés dans une chaîne de hameaux et de fermes fortifiées, et battent les intervalles – abondamment minés – de leurs puissantes armes antichars, de leurs mitrailleuses et d’une artillerie nombreuse. Quelques panzers, camouflés, se tiennent prêts à contrer. Six kilomètres en retrait, des groupements blindés