Pour appâter les armées franco-britanniques vers le piège imaginé par le général Manstein, il est indispensable de monter une démonstration de force convaincante en Belgique. La 6e armée de von Reichenau en est chargée avec, pour jouer le rôle de la Panzerwaffe dans son entier, le seul corps motorisé du General der Kavallerie Hoepner. Ses ordres sont ambitieux : franchir la Meuse et le canal Albert, chevaucher à travers la plaine belge en direction de Bruxelles pour mordre au mollet le gros de l’armée française et l’empêcher de décrocher. Hoepner est condamné à être agressif puisqu’il ne dispose que des 3e et 4e divisions de panzers (650 chars dont 132 modernes de type III et IV).
Le 10 mai, par des opérations audacieuses, la 4e Panzer passe la Meuse et le canal Albert. Derrière, c’est l’embouteillage. Il faudra deux jours pour en extraire la 3e Panzer. C’est donc seule que la 4e progresse de vingt kilomètres le lendemain, à peine ralentie par quelques accrochages avec les forces belges et… quelques automitrailleuses françaises. Les Français sont déjà là! Hoepner s’en inquiète et, à son supérieur qui lui enjoint d’accélérer, il rétorque qu’il a besoin de rassembler son corps et de se ravitailler en essence avant de se frotter à ce qu’il a identifié comme des divisions mécaniques françaises.
Un corps de cavalerie pour un freinage d’urgence
Cette présence tricolore si précoce s’explique. Le généralissime Gamelin attend le déferlement allemand de pied ferme depuis des années et pour le contrer, il a peaufiné sa manœuvre « Dyle-Breda ». Ses meilleures armées (les 1 et 7 et le corps expéditionnaire britannique) sont prêtes à entrer en Belgique pour aller se retrancher derrière la Dyle et la Meuse. Gamelin prend le risque d’une périlleuse bataille de rencontre. Il sait que ses « gros » – ses divisions d’infanterie et leur artillerie d’accompagnement – ont besoin de six jours pour correctement se retrancher. Il faudra donc freiner les Allemands le temps nécessaire. Après avoir un temps espéré la collaboration de Bruxelles, Gamelin se tourne vers une ». Un corps de trois divisions légères mécaniques (DLM, en fait de véritables divisions blindées) ferait parfaitement l’affaire « ». À deux réserves près : les mettre sur pied rapidement car le projet végète depuis 1933, et les doter d’un char puissant.