Discours sur la servitude volontaire
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Texte incontournable de la philosophie politique, Étienne de La Boétie (1530-1563) interroge ici avec acuité les rapports de domination et soulève cette idée, fort moderne, selon laquelle l’asservissement des peuples est d'autant plus fort que la soumission est vécue comme étant légitime par les dominés, l’analyse développée par l’auteur préfigurant, en un sens, les travaux menés par Pierre Bourdieu sur la violence symbolique. Plus de quatre cent ans après la publication des pages qui suivent, le sociologue explique en effet les ressorts complexes d’une oppression contre laquelle il est extrêmement difficile de lutter dans la mesure où elle est le plus souvent, dans ses fondements mêmes, à la fois invisible et incorporée au fil de la socialisation, la soumission étant alors perçue comme allant de soi. Partant, l’Etat et ses institutions, quand bien même fussent-elles démocratiques, deviennent presque inévitablement les vecteurs d’une violence au sujet de laquelle nous avons le devoir de rester critiques et vigilants.
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Aperçu du livre
Discours sur la servitude volontaire - Étienne de La Boétie
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Copyright © 2014 - FV Éditions
Image de la Couverture : hodihu@pixabay.com
ISBN 978-2-36668-953-2
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Étienne de La Boétie
Texte incontournable de la philosophie politique, Étienne de La Boétie (1530-1563) interroge ici avec acuité les rapports de domination et soulève cette idée, fort moderne, selon laquelle l’asservissement des peuples est d'autant plus fort que la soumission est vécue comme étant légitime par les dominés, l’analyse développée par l’auteur préfigurant, en un sens, les travaux menés par Pierre Bourdieu sur la violence symbolique. Plus de quatre cent ans après la publication des pages qui suivent, le sociologue explique en effet les ressorts complexes d’une oppression contre laquelle il est extrêmement difficile de lutter dans la mesure où elle est le plus souvent, dans ses fondements mêmes, à la fois invisible et incorporée au fil de la socialisation, la soumission étant alors perçue comme allant de soi. Partant, l’Etat et ses institutions, quand bien même fussent-elles démocratiques, deviennent presque inévitablement les vecteurs d’une violence au sujet de laquelle nous avons le devoir de rester critiques et vigilants.
FVE
INTRODUCTION¹
Dans sa brève existence de trente-deux ans, si La Boétie eut le temps de composer plusieurs opuscules, fort divers d’allure et de ton, il ne put en publier aucun. Montaigne lui-même, héritier des papiers de son ami disparu, imprima, dès 1571, les vers latins ou français de La Boétie et ses traductions de Xénophon et de Plutarque, mais il ne jugea pas à propos de divulguer ni le Discours de la Servitude volontaire, ni les Mémoires de nos troubles sur l’édit de janvier 1562, dont Montaigne confesse formellement la paternité à La Boétie, mais à qui il trouvait « la façon trop délicate et mignarde pour les abandonner au grossier et pesant air d’une si malplaisante saison ».
Ainsi, l’histoire de l’œuvre de La Boétie débutait sur une double obscurité : Montaigne, qui imprimait les ouvrages de son ami ne pouvant soulever aucune difficulté, se taisait au contraire délibérément, sur tous ceux qui pouvaient prêter à controverse ; et ce silence offrait de la sorte, au contraire, matière à commentaires dont on ne devait pas se priver. Essayons d’expliquer ce que Montaigne a fait et comment il a compris son devoir : le commentaire de l’œuvre même de La Boétie s’ensuivra naturellement.
le discours de la servitude volontaire
Étienne de La Boétie naquit à Sarlat, le mardi 1er novembre 1530. Son père, lieutenant particulier du sénéchal de Périgord, mourut prématurément. Il fut élevé par son oncle, curé de Bouillonnas : c’est à celui-ci « qu’il doit son institution et tout ce qu’il est et pouvait être », comme il le rappelle plus tard, à son lit de mort. Où cette institution eut-elle lieu ? Probablement dans la famille même, à Sarlat, où le souffle de la Renaissance se faisait sentir, à l’instigation de l’évêque, le cardinal Nicolas Gaddi, parent des Médicis et véritable humaniste, dont le logis était voisin de celui de La Boétie. On ignore également où ces études se firent, peut-être à Bordeaux ou à Bourges. En tout cas, elles s’achevèrent à Orléans, où La Boétie prit son grade de licencié en droit civil, le 23 septembre 1553, et acquit dans un milieu aussi docte que généreux l’information juridique nécessaire à un futur magistrat.
Son précoce mérite ouvrit avant l’âge à La Boétie les portes du Parlement de Bordeaux. Le 20 janvier 1553, des lettres-patentes du roi Henri II autorisaient Guillaume de Lur, conseiller, à résigner « son état et office en ladite cour », en faveur de Maître Étienne de La Boétie, qui n’avait alors que vingt-deux ans et quelques mois. L’âge requis était vingt-cinq ans. Aussi, le 13 octobre suivant, quelques jours seulement après la délivrance du diplôme de licencié, le roi octroyait de nouvelles lettres-patentes, pour pourvoir La Boétie à l’office de conseiller et y joignait des lettres de dispense, permettant au jeune homme d’occuper sa charge. Le postulant était admis à l’exercice de sa fonction et prêtait serment le 17 mai 1554, toutes chambres assemblées. Il n’avait alors que vingt-trois ans et demi, et l’exception, flatteuse assurément, n’était pas exceptionnelle. Elle rapprochait ainsi, dès l’origine de leurs relations, deux noms qui devaient se joindre davantage : Guillaume de Lur, sieur de Longa, docte humaniste qui allait venir au Parlement de Paris, et Étienne de La Boétie, humaniste lui aussi non moins fervent et qu’agitaient déjà, si l’on en croit Montaigne, de nobles ambitions.
« C’est, dit celui-ci, au chapitre XXVIII du livre I de ses Essais, à l’endroit où il parle pour la première fois de l’opuscule de La Boétie, dix-huit ans après sa perte, c’est un discours auquel il donna le nom : De la Servitude volontaire ; mais ceux qui l’ont ignoré l’ont bien proprement depuis rebaptisé : Le contre un. Il l’écrivit par manière d’essai, en sa première jeunesse, n’ayant pas atteint le dix-huitième an de son âge, à l’honneur de la liberté contre les tyrans. Il court piéçà ès mains des gens d’entendement, non sans bien grande et