Le Temple, prototype des ordres militaires
Pâques 1119. Toute la chrétienté médiévale célèbre la résurrection du Christ. Pourtant le roi Baudouin II de Jérusalem, deuxième héritier du trône fondé dix ans plus tôt, fait grise mine. Il vient d’apprendre qu’une caravane de 700 pèlerins a été surprise près du Jourdain, 300 ont été massacrés… Mais que peut-il y faire? La grande majorité des chevaliers venus avec Godefroy de Bouillon, le conquérant de la Ville sainte en 1099, sont repartis en Occident, leur promesse de libérer le tombeau du Christ tenue. Il ne reste pour tenir les quatre États croisés – les comtés d’Édesse et de Tripoli, la principauté d’Antioche et le royaume de Jérusalem (voir carte p. 42) – que quelques centaines de chevaliers éparpillés dans des dizaines de places. Les routes sont loin d’être sûres: bédouins locaux, mais aussi Égyptiens au sud et Turcs seldjoukides au nord, multiplient les raids.
Toujours plongé dans ses réflexions, Baudouin reçoit en audience quelque temps après deux chevaliers, jusque-là membres d’une confrérie laïque vouée à la protection du Saint-Sépulcre. Hugues de Payns, petit seigneur champenois, et Godefroy de Saint-Omer, chevalier flamand, sont venus lui demander, à lui et au patriarche latin de Jérusalem Gormond de Picquigny, de constituer avec d’autres camarades une milice combattante pour protéger les pèlerins, tout en s’astreignant à une vie religieuse, toute de pauvreté, chasteté et obéissance.
L’offre ne va pas de soi: jamais l’Église n’a compté d’hommes de guerre dans ses rangs. Même les croisés de 1099 n’étaient que des guerriers participant à une expédition patronnée par Rome… Verser le sang est-il licite lorsqu’on voue sa vie à Dieu? Certains théologiens crieront au scandale; le cistercien Isaac de l’Étoile dénoncera bientôt la création d’un monstre. Pour l’heure,
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