Un roi sans reine
Par Martin Daneau
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À propos de ce livre électronique
Yrarn doit faire face à la trahison.
La relique de Berzé, une croix ayant trempé dans le sang de nombreux prêtres qui se sont sacrifiés pour lui conférer un pouvoir surnaturel, devient un précieux objet de convoitise. Il est dit que, sur un vampire, elle agit comme un soleil ardent.
La tragédie s’acharne sur les Réognan, fragilisant les alliances avec les deux autres grandes familles royales qui s’isolent et revoient leurs stratégies.
L’apparition d’une cohorte de vampires sème l’affolement. Le dernier signalement d’un groupe aussi imposant remonte à plus d’un siècle. Les vampires frôlent-ils l’extinction? Leurs ennemis jurés, les Orderles, sont-ils réellement éteints?
Et, dans cette histoire, une femme, Léana, s’immisce dans les rouages des plus grandes
machinations. Elle est un grain de sable pour plusieurs, mais, pour Yrarn, elle n’est rien d’autre qu’une perle.
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Aperçu du livre
Un roi sans reine - Martin Daneau
Tristan
PERSONNAGES PRINCIPAUX
ET LIEUX IMPORTANTS DANS
LE ROYAUME DE KALAROK
Lyvia : vampire de l’armée des Esseulés
Éléazar : vampire de l’armée des Esseulés
Zrébert : vampire de l’armée des Esseulés
Yrarn : roi Vampire
Léana : combattante au service du roi Sicard
Pael : vieil homme famélique
Le château Portfort appartenant à la famille Réognan, situé sur l’équateur du royaume de Kalarok
Sicard : roi
Mérovée : reine
Menica et Philicité : princesses
Geothe : scribe influent
Ruthven : scribe influent
Calnet : jeune scribe apprenti de Ruthven
Le château Puydoré appartenant à la famille Monguenard, situé au sud
Ridgard : roi
Valera : reine
Nael : prince
Laurienda : princesse
Isen : intendant
Holham : conseiller respecté
Dama : mairesse d’une petite communauté vivant sous la férule des Monguenard
Basept : assistant de Dama
Le château Montclair appartenant à la famille Lontosse, situé au nord
Leorion : roi
Célestienne : reine
Sogan : prince
Ganna : princesse
Mateil : conseiller respecté
Ardroc : scribe influent
Seanan : autre scribe (bon ami d’Ardroc)
Verses : autrefois, unité d’élite des Lontosse
Sarts : unité de géants des Orderles revêtant une armure noire
Jodryt : capitaine des Orderles
La tour des Cieux : lieu où résident les trois vampires de l’armée des Esseulés
Les terres maudites de Calefor bordées par la gorge de Bragan : endroit où les Orderles se sont exilés
Les terres-sur-Brume
Les tertres RoseSainte
Les montagnes de Roquenoire
Les marécages Roncefer
1
Durant les affrontements contre les vampires, les humains démontrèrent une grande résilience face à des adversaires les surclassant par leur force et leurs habiletés psychiques. Les Monguenard, gouvernant le peuple du Sud, voyaient les vampires comme l’ennemi de la lumière, et les Lontosse, dirigeant les populations du Nord, les définissaient comme une cohorte de damnés.
Autrefois, aussi déterminés que fussent les humains, ils n’étaient pas de taille pour éliminer les vampires qui ne cessaient de s’accroître. Jusqu’au jour où ils développèrent une résistance naturelle à leurs morsures pour prévenir la contamination. Toutefois, les vampires étaient suffisamment nombreux pour préserver leur domination et conquérir la race humaine.
Ce fut à cette époque que les Orderles apparurent.
Bien qu’ils soient mortels, ils étaient plus rapides et plus forts que n’importe quel des bataillons des trois grandes familles royales. Ils résistèrent aux vampires et réduisirent considérablement leur rang. Dix humains tombaient au combat pour un seul vampire tandis que, du côté des Orderles, le ratio était de un pour un.
Le vent tournant en leur faveur, les Réognan, les Monguenard et les Lontosse créèrent une alliance. Avec l’union de leur armée et la contribution des Orderles, ils triomphèrent des vampires et les acculèrent à l’extinction. Les survivants se disséminèrent dans le royaume de Kalarok.
Les vampires frôlaient bel et bien l’anéantissement.
Après cette victoire, les relations entre les trois familles ne tardèrent pas à s’envenimer. Maintenant que les effectifs réunis n’étaient plus requis pour combattre un adversaire familier, la suprématie du royaume fut l’objet de convoitise pour les plus puissants. Les échanges par bateaux se réduisaient, et bientôt les cités gardaient jalousement leurs possessions plutôt que de privilégier un système d’entraide. Les cités s’isolèrent les unes des autres, et de petits combats éclatèrent pour départager les lignes territoriales.
Les vampires n’étant plus une préoccupation, les Orderles regagnèrent les terres maudites de Calefor. Ils ne furent pas signalés pendant plus de 150 ans. Les tensions entre les Réognan, les Monguenard et les Lontosse troublaient la paix, un germe de guerre latent, comme des braises qui pourraient se changer en cendres avec la quasi-disparition d’un ennemi commun.
Toutefois, ce qui unissait les hommes n’était jamais aussi fort que ce qui les divisait. Une possible trêve permanente devint plutôt une solidarité fragile prête à éclater en conflits dès l’ébauche d’une négociation. Les querelles s’amplifiaient et, en l’absence de menaces généralisées, il semblait impossible d’arbitrer les litiges entre les grandes familles. Les monarques et leurs conseillers se montraient suspicieux. Ils s’isolaient et conspiraient plutôt que d’honorer l’entraide qui poussa les vampires à l’extinction. Terminée l’époque où les foirails s’alignaient aux portes des châteaux pour le partage de denrées et de marchandises.
Vampires et Orderles étaient un embranchement de l’homme. Et lorsque le temps de s’unifier ne pouvait être plus parfait, l’esprit de division prédomina.
Pendant ces démêlés futiles, les vampires, limités en nombre, retrouvèrent une prospérité ; leur longévité éternelle renforçait leurs pouvoirs surnaturels.
Après les guerres impliquant les Orderles apparut un trio de puissants vampires, composant l’armée des Esseulés, à la tour des Cieux. Longtemps, ils furent indifférents aux enjeux du royaume et à la décimation de leur race.
Et leur mort entraîna une série d’événements sans précédent.
2
Àson premier jour d’occupation au château Portfort, Yrarn avait rencontré le plus habile forgeron de cette contrée. Le roi Vampire ordonna la confection d’armes particulières ayant constitué sa signature lorsqu’il décimait ses adversaires sur les champs de bataille entre les vampires et les humains.
Il s’agissait de deux gigantesques faucilles. N’importe quel homme peinerait à soulever l’une de ces armes. Elles étaient maintenues en baudrier dans son dos avec une solide lanière en cuir.
Le jour où il les récupéra, Yrarn avait complimenté le forgeron qui, tremblotant, avait poussé un soupir de soulagement. Il avait tant craint de déplaire au roi Vampire et d’en subir les conséquences. Il s’était épongé le front avec un tissu chiffonné et, épuisé, dut s’asseoir pour récupérer de cette rencontre alors que le souverain était retourné au château en se téléportant.
Une fois à Portfort, Yrarn détailla longuement ses nouvelles acquisitions. Elles étaient sublimes. Avec sa force, les lames incurvées en demi-cercle pourraient fendre une cotte de mailles ou une pièce d’armure.
Le roi Vampire les tint fièrement puis il susurra des mots tendres comme s’il s’adressait à une amoureuse invisible et consolidait l’aparté devant une foule désireuse de connaître les secrets de leur intimité.
Il songea à Asema, et l’éclat dans ses yeux devint aussi brillant que la lumière miroitant sur la lame de ses faucilles.
— Bientôt, vos services seront requis.
Yrarn continuait à murmurer d’une voix onctueuse.
À l’extérieur, la grisaille s’intensifiait, et le roi Vampire sourit en imaginant la tempête approcher. Le regard rivé sur ses nouvelles acquisitions, il accentua son sourire à l’idée de céder à l’intempérance.
3
Philicité occupait un banc dans les jardins royaux du château Portfort. Autour d’elle, des plantes vivaces, dont des orchidées et des fougères, rivalisaient d’espace.
Philicité portait un collier de grosses perles d’une blancheur immaculée. C’était un présent remis par Sicard pour son dernier anniversaire. Le bijou fut confectionné à l’époque où les bateaux sillonnaient les mers pour favoriser les échanges entre les grandes familles durant les guerres. Depuis ce temps, les navires et les quais tombaient en ruine, et la pêche fut délaissée. Les perles prirent beaucoup de valeur dans le royaume. Qu’il s’agisse de bourgeois bien nantis ou de membres royaux, Philicité ne vit jamais un collier comparable au sien. Son père affirmait que les perles étaient un symbole de pureté. Elle s’était prise d’affection pour ce bijou et elle le portait fièrement pour toutes les occasions.
La princesse posa une main sur sa poitrine et soupira bruyamment. Lorsqu’elle songeait à Menica, ses pensées lui échappaient pour mieux endurer ses émotions. Philicité se sentait abandonnée et elle ignorait vers qui se tourner pour confesser ses angoisses.
Sa grande sœur avait toujours été sa confidente. Mérovée était attentive et conciliante, mais Philicité ressortait insatisfaite de leurs discussions, comme si les accords tacites et la bonté de la reine l’empêchaient de saisir la profondeur de ses états d’âme. C’était tout le contraire avec son père.
Philicité avait appris à tempérer son humeur avec lui. Si elle se montrait bornée et farouche, il devenait le roi. Ses paroles délétères frappaient une pierre, une façade impénétrable. Mais si elle considérait la réprimande et l’élevait au niveau d’un témoignage de sagesse, une brèche se créait, et le monarque redevenait son père. Le mécanisme était tellement prévisible que la jeune fille connaissait son rôle à la perfection lors de disputes.
Secrètement, Philicité était souvent en désaccord avec Sicard. Mais que pouvait-elle faire ? Il était le roi. Il était facile pour lui de brouiller les bornes du contentement lorsqu’on en érigeait soi-même les limites.
Elle respectait son père même si parfois, lui, plongé dans un rôle de figure bienveillante, une discussion se transformait en épreuve en sa compagnie. Philicité en ressortait épuisée, mais elle ne l’aimait pas moins pour autant.
Tu aurais dû le lui dire.
La jeune femme serra les poings.
Le roi Vampire avait écarté cette possibilité. La venue de Yrarn affectait tout le monde, mais la famille royale en était la plus touchée. Mérovée était continuellement sur ses gardes, ne sachant trop comment composer avec ce nouveau souverain se qualifiant d’honorable. Difficile pour la reine de compter sur l’aide de Sicard ou de ses conseillers pour l’appuyer.
Philicité était cloîtrée dans une prison de malheurs, et plus elle cherchait à s’en extraire, plus les barreaux l’étouffaient.
Elle tangua, mais ce ne fut pas la tristesse qui l’ébranla. La colère montait, et elle supportait très mal ce sentiment.
Grognant, la princesse sortit des jardins royaux et s’engagea dans les couloirs sombres en marchant avec une résolution opiniâtre. Pourtant, si une personne l’avait interrogée sur les raisons de son mécontentement, elle serait restée coite et aurait fondu en larmes.
4
Il s’appelait Basept. Larges épaules, il avait les sourcils et les cheveux broussailleux. C’était une personne généreuse qui vous accueillait toujours avec un sourire. Sa voix était douce, un instrument tempéré jamais dissonant selon la tourmente de ses émotions.
Basept s’entretenait avec Dama. Elle était la mairesse d’un petit village situé à la limite du territoire appartenant aux Monguenard. C’était un endroit paisible, retranché du reste du monde et regroupant de modestes constructions équarries. La forêt dense entourant les habitations créait une clôture naturelle.
Les femmes occupaient rarement le poste de mairesse, et Basept lui était toujours d’une grande aide. Son avis était très important pour Dama. Parmi ses fonctions, elle servait d’intermédiaire entre sa petite communauté et les messagers de Ridgard pour transmettre ses instructions.
— Le roi prend extrêmement au sérieux les rumeurs concernant l’apparition de vampires, dit Dama. Il dépêchera tout un bataillon pour inspecter le village et les alentours, et postera des sentinelles partout. Sa férule sera absolue et elle étouffera nos libertés.
— Notre liberté ne sera pas sacrifiée pour autant, et nous bénéficierons de la protection des hommes de Ridgard, répliqua Basept.
Depuis que la missive provenant du château Portfort annonçait la prise du pouvoir par un vampire, l’inquiétude du monarque le conditionnait à envoyer des soldats en patrouille pour vérifier si ces immondes créatures n’occupaient pas son territoire. Ces mesures de sécurité légitimes n’étaient pas sans conséquence.
Des soldats campés dans un petit village cédaient parfois à des méfaits. Viols, pillages, intimidation : la liste de délits était longue et devenait aussi répréhensible que les crimes dont ils étaient mandatés de prévenir.
Si Ridgard redoutait la présence de vampires sur son territoire, il ne