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KA NIKANITET : pour une pratique culturellement sécuritaire de la protection de la jeunesse en contextes autochtones
KA NIKANITET : pour une pratique culturellement sécuritaire de la protection de la jeunesse en contextes autochtones
KA NIKANITET : pour une pratique culturellement sécuritaire de la protection de la jeunesse en contextes autochtones
Livre électronique504 pages5 heures

KA NIKANITET : pour une pratique culturellement sécuritaire de la protection de la jeunesse en contextes autochtones

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À propos de ce livre électronique

À partir de l’exploration des visions autochtones de la famille et de l’histoire, de l’organisation sociopolitique des peuples autochtones de même que de leurs droits particuliers, KA NIKANITET : pour une pratique culturellement sécuritaire de la protection de la jeunesse en contextes autochtones propose une réflexion sur les pratiques d’évaluation et d’intervention en protection de la jeunesse. En se fondant sur les valeurs de dignité humaine, de justice sociale et d’autodétermination qui sont au cœur de la discipline du travail social, ce livre met de l’avant des repères théoriques, des pistes de réflexion et des exemples concrets d’interventions sociales qui correspondent aux valeurs, aux visions du monde et aux savoirs des peuples autochtones au Québec. Il vise à répondre aux appels à l’action de plusieurs commissions d’enquête qui soulignent l’urgence de mettre fin à la surreprésentation des enfants autochtones en protection de la jeunesse tout en soutenant la pratique des acteurs sociojudiciaires dans l’application de la Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis (Loi C-92).

Ce livre s’adresse à toutes les personnes qui travaillent avec des enfants et des familles des Premières Nations et des Inuit, ainsi qu’aux personnes étudiantes ou aux professionnelles plus aguerries. Ka Nikanitet (celui ou celle qui avance) permet d’imaginer, ensemble, un avenir bienveillant pour les enfants et les familles autochtones.
LangueFrançais
Date de sortie3 août 2022
ISBN9782760557215
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    Aperçu du livre

    KA NIKANITET - Christiane Guay

    FONDÉE PAR HENRI DORVIL (UQAM) ET ROBERT MAYER (UNIVERSITE DE MONTRÉAL)

    L’analyse des problèmes sociaux est encore aujourd’hui au cœur de la formation de plusieurs disciplines en sciences humaines, notamment en sociologie et en travail social. Les milieux francophones ont manifesté depuis quelques années un intérêt croissant pour l’analyse des problèmes sociaux, qui présentent maintenant des visages variables compte tenu des mutations des valeurs, des transformations du rôle de l’État, de la précarité de l’emploi et du phénomène de mondialisation. Partant, il devenait impératif de rendre compte, dans une perspective résolument multidisciplinaire, des nouvelles approches théoriques et méthodologiques dans l’analyse des problèmes sociaux ainsi que des diverses modalités d’intervention de l’action sociale, de l’action législative et de l’action institutionnelle à l’égard de ces problèmes.

    La collection Problèmes sociaux et interventions sociales veut précisément témoigner de ce renouveau en permettant la diffusion de travaux sur divers problèmes sociaux. Pour ce faire, elle vise un large public comprenant tant les étudiants, les formateurs et les intervenants que les responsables administratifs et politiques.

    Cette collection était à l’origine codirigée par Robert Mayer, professeur émérite de l’Université de Montréal, qui a signé et cosigné de nombreux ouvrages témoignant de son intérêt pour la recherche et la pratique en intervention sociale.

    DIRECTEUR

    HENRI DORVIL, PH. D.

    École de travail social, Université du Québec à Montréal

    CODIRECTRICE

    CAROLYNE GRIMARD, PH. D.

    École de travail social, Université de Montréal

    Diffusion / Distribution:

    Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

    Titre: KA NIKANITET: pour une pratique culturellement sécuritaire de la protection de la jeunesse en contextes autochtones / Christiane Guay, Lisa Ellington et Nadine Vollant.

    Noms: Guay, Christiane, 1964- auteur. | Ellington, Lisa, auteur. | Vollant, Nadine, 1970- auteur.

    Collections: Collection Problèmes sociaux & interventions sociales; 107.

    Description: Mention de collection: Problèmes sociaux et interventions sociales; 107 | Comprend des références bibliographiques.

    Identifiants: Canadiana (livre imprimé) 20220004803 | Canadiana (livre numérique) 20220004811 | ISBN 9782760557192 | ISBN 9782760557208 (PDF) | ISBN 9782760557215 (EPUB)

    Vedettes-matière: RVM: Service social aux autochtones–Québec (Province) | RVM: Jeunesse autochtone–Services–Québec (Province) | RVM: Protection de la jeunesse–Québec (Province) | RVM: Autochtones–Services–Québec (Province) | RVM: Autochtones–Québec (Province)–Conditions sociales. | RVM: Sécurisation culturelle–Québec (Province) | RVM: Autochtones–Québec (Province)–Relations avec l’État.

    Classification: LCC E78.Q3 G83 2022 | CDD 362.84/970714–dc23

    Révision

    Isabelle Pauzé

    Correction d’épreuves

    Anik Demers-Pelletier

    Conception graphique

    Richard Hodgson

    Mise en page

    Interscript

    Illustration de couverture

    L’illustration en couverture a été créée par les enfants innus de l’école Tshishteshinu de la Première Nation Uashat mak Mani-utenam.

    Dépôt légal: 3e trimestre 2022

    ›Bibliothèque et Archives nationales du Québec

    ›Bibliothèque et Archives Canada

    © 2022 – Presses de l’Université du Québec

    Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés

    Imprimé au Canada

    D5719-1 [01]

    Dédicace

    À nos enfants, Étienne, Julianne, Édouard, Éli, Catherine, Magali et aux enfants de toutes les Nations à qui nous souhaitons de grandir en étant fiers de leur identité

    À la mémoire de Caroline Vollant, mère de Nadine et mère spirituelle des oursons ambassadeurs innus des droits de l’enfant Puamun (rêve) et Ka Nikanitet (celui ou celle qui avance), pour lesquels elle a confectionné les habits traditionnels

    Crédit photo: Nadine Vollant.

    Photo prise lors de la cérémonie du nom des oursons ambassadeurs innus des droits de l’enfant de la Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada à l’école Tshishteshinu, Uashat mak Mani-utenam.

    Épigraphe

    KA NIKANITET: qui signifie celui ou celle qui avance en langue innue

    PRÉFACE

    Ghislain Picard

    MOT D’UNE AÎNÉE

    Laurette Grégoire

    REMERCIEMENTS

    NOTE AUX LECTEURS

    LISTE DES FIGURES

    LISTE DES TABLEAUX

    LISTE DES SIGLES ET ACRONYMES

    AVANT-PROPOS

    PARTIE 1

    DES CLÉS DE LECTURE CULTURELLES, HISTORIQUES ET CONTEMPORAINES

    CHAPITRE 1

    DES MODES DE VIE ANCRÉS DANS UNE REPRÉSENTATION CIRCULAIRE ET RELATIONNELLE DU MONDE

    1.1.La relation au territoire

    1.1.1.La source des savoirs autochtones

    1.1.2.Lancrage identitaire et culturel

    1.2.Le cercle des relations familiales

    1.2.1.Limportance des liens familiaux et sociaux

    1.2.2.Des pratiques éducatives qui valorisent l’autonomie et le respect des enfants

    1.3.Une vision holistique de la santé et de la guérison

    Conclusion

    CHAPITRE 2

    L’ÉTAT ET L’ÉGLISE DANS LA VIE DES FAMILLES AUTOCHTONES Les visages de l’assimilation

    2.1.Des alliances à la domination

    2.2.Les pensionnats autochtones – «tuer l’Indien au cœur de l’enfant»

    2.3.Les tentatives de l’État pour dépasser l’idéologie d’assimilation

    2.3.1.La rafle des années 1960 – une volonté d’intégration qui échoue

    2.3.2.La stratégie d’adaptation des lois relatives à la protection de la jeunesse

    2.4.L’échec des systèmes de protection de la jeunesse

    2.4.1.Des principes de la LPJ à l’opposé des visions du monde autochtones

    2.4.2.Les biais culturels dans l’intervention en protection de la jeunesse

    Conclusion

    CHAPITRE 3

    COMPRENDRE LES RÉALITÉS CONTEMPORAINES ET LES BESOINS DES FAMILLES

    3.1.Le phénomène de la discrimination raciale et du racisme

    3.2.Un portrait des inégalités socioéconomiques

    3.3.Survol des problématiques sociales associées aux motifs de compromission

    3.3.1.La négligence

    3.3.2.Les problèmes de dépendances

    3.3.3.Les troubles de comportement chez les jeunes

    3.3.4.La violence en contextes autochtones

    3.4.La résistance, l’affirmation identitaire et la résilience des peuples autochtones

    Conclusion

    PARTIE 2

    LE CONTEXTE SOCIOPOLITIQUE, JURIDIQUE ET ORGANISATIONNEL

    CHAPITRE 4

    L’ORGANISATION POLITIQUE AUTOCHTONE

    4.1.L’organisation politique locale des Premières Nations

    4.1.1.Le statut et la «bande»

    4.1.2.Le conseil de bande

    4.1.3.La réserve

    4.2.Les autres niveaux d’organisation politique autochtone

    4.2.1.Les organisations provinciales et régionales

    4.2.2.Les nations signataires de la Convention de la Baie James et du Nord québécois

    4.2.3.Les Premières Nations et les Inuit en milieu urbain

    4.2.4.Les autres groupes autochtones

    4.3.Les droits des peuples autochtones

    4.3.1.La Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones

    4.3.2.L’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982

    4.3.3.L’égalité et le respect des différences

    Conclusion

    CHAPITRE 5

    LE FINANCEMENT ET L’ORGANISATION DES SERVICES

    5.1.Les rôles respectifs des gouvernements fédéral et provincial

    5.2.Les services de protection de la jeunesse

    5.3.Un panorama des services et programmes destinés aux peuples autochtones

    5.3.1.Les services de santé et les services sociaux courants

    5.3.2.Les services en matière de dépendances

    5.3.3Les services en santé mentale

    5.3.4.Les services liés au Principe de Jordan

    5.3.5.Les services spécifiques é la petite enfance

    5.3.6.Les services entourant la violence conjugale et familiale

    5.3.7.Les Services parajudiciaires autochtones (SPAQ)

    5.3.8.Les services en milieu urbain .

    5.4.Des services qui ne sont pas à la hauteur des besoins

    Conclusion

    CHAPITRE 6

    UN NOUVEAU CADRE LÉGAL EN MATIÈRE DE PROTECTION DE L’ENFANCE

    La Loi C-92

    6.1.L’origine et les objectifs de la Loi C-92

    6.2.La portée des normes minimales

    6.2.1.L’évaluation de l’intérêt de l’enfant

    6.2.2.La prévention des placements

    6.2.3.Les règles concernant les placements

    6.2.4.L’avis et la représentation

    6.3.La Loi C-92 et la gouvernance autochtone en matière de protection de la jeunesse

    6.3.1.La gouvernance: un droit qui produit des résultats concrets

    6.3.2.Les lois autochtones et les accords de coordination

    6.3.3.Un modèle de gouvernance culturellement enraciné: l’exemple des Innus d’Uashat mak Mani-utenam

    6.4.Les défis de la mise en œuvre de la Loi C-92

    Conclusion

    PARTIE 3

    L’INTERVENTION SOCIALE

    AVEC LES FAMILLES AUTOCHTONES

    CHAPITRE 7

    VERS UNE PRATIQUE D’INTERVENTION

    CULTURELLEMENT SÉCURITAIRE

    7.1.Adopter une posture de décolonisation

    7.1.1.S’engager dans la réconciliation

    7.1.2.Opter pour le cadre d’analyse du traumatisme historique

    7.1.3.S’approprier l’approche de sécurisation culturelle

    7.2.Développer une pratique professionnelle orientée vers la sécurisation culturelle

    7.2.1.S’inspirer des conceptions et des modalités autochtones de l’intervention sociale

    7.2.2.Séinspirer des conceptions et des modalités autochtones de léintervention sociale

    Une pratique centrée sur la relation

    Une pratique guidée par l’éthique de non-ingérence

    Miser sur la collaboration et le lien au territoire

    Conclusion

    CHAPITRE 8

    LE PROCESSUS D’INTERVENTION EN PROTECTION

    DE LA JEUNESSE

    8.1.L’évaluation et l’analyse de la situation

    8.1.1.Prendre le temps de préparer, de se présenter et d’expliquer

    8.1.2.Explorer le point de vue des membres de la famille et cartographier les relations familiales

    8.1.3.Centrer l’analyse sur les forces et les facteurs de résilience

    8.2.L’orientation: le choix des moyens vers le mieux-être et la guérison

    8.2.1.S’appuyer sur des modes de décision consensuels

    8.2.2.Coconstruire un plan de bienveillance

    8.3.L’accompagnement et le suivi des familles

    8.3.1.Assurer la continuité culturelle des enfants placés en milieu substitut allochtone

    8.3.2.Soutenir la transition à la vie adulte des adolescents autochtones

    8.4.La révision

    Conclusion

    BIBLIOGRAPHIE

    ANNEXE 1

    Les modifications législatives à la LPJ spécifiques aux peuples autochtones

    ANNEXE 2

    Rapport d’évaluation, d’orientation et rapport complémentaire

    ANNEXE 3

    Plan de bienveillance

    ANNEXE 4

    Plan de continuité culturelle

    Chez les Premières Nations, les enfants sont des êtres sacrés. Ils sont une source de renouvellement; en d’autres mots, ils sont l’avenir des communautés. Or, pendant longtemps, l’État colonial a voulu nous priver de cet avenir. Les événements récents ont mis en relief la cruauté des pensionnats où nos enfants étaient envoyés.

    Même si les pensionnats sont fermés depuis plusieurs années, l’État continue de retirer les enfants des Premières Nations de leurs familles et de leurs communautés. Dans son rapport publié en 2015, la Commission de vérité et réconciliation, présidée par le juge Murray Sinclair, a souligné que les services de protection de la jeunesse «ne font que poursuivre le processus d’assimilation entamé sous le régime des pensionnats». Ses appels à l’action soulignent l’urgence de réformer le système actuel et de reconnaître le pouvoir inhérent des peuples autochtones de prendre soin de leurs enfants.

    Nous sommes à l’aube d’une nouvelle ère. La Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis, que le gouvernement fédéral a développée en collaboration avec l’Assemblée des Premières Nations, reconnaît l’autonomie gouvernementale des peuples autochtones en matière de protection de la jeunesse et met de l’avant le principe de la continuité culturelle. À la suite d’un jugement historique du Tribunal canadien des droits de la personne, l’Assemblée des Premières Nations et le gouvernement fédéral ont conclu une entente prévoyant une compensation de 20 milliards de dollars pour les enfants des Premières Nations retirés de leur famille et l’injection de 20 milliards de dollars additionnels afin d’offrir de meilleurs services. Ces montants peuvent donner le vertige, mais ils sont la mesure de l’urgence et de l’ampleur des défis auxquels nous devons faire face.

    Le livre que vous tenez entre les mains est le guide idéal pour relever ces défis et parcourir le chemin qui nous conduira vers un système de protection de la jeunesse plus juste envers les enfants autochtones. Il regarde à la fois vers le passé et vers l’avenir. Il résume ce que tout citoyen devrait savoir au sujet des politiques coloniales. Il offre un tour d’horizon du système actuel. Il éclaire les objectifs des réformes en cours et les moyens de les atteindre. Fondé autant sur la recherche scientifique que sur la parole des membres de nos communautés, il propose des outils permettant de tabler sur les forces des familles et des communautés afin d’assurer une intervention bienveillante auprès de nos enfants.

    Ce livre est le fruit d’une collaboration entre trois femmes d’exception, qui se sont fermement engagées, chacune à sa manière, envers le bien-être des enfants autochtones.

    Travailleuse sociale émérite et professeure à l’Université du Québec en Outaouais (UQO), Christiane Guay est une pionnière en matière de travail social en contextes autochtones. Elle a développé un programme de recherche fondé sur l’écoute de la parole des membres de nos communautés. Ses publications sont devenues des références incontournables dans le domaine. En 2017, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec lui a décerné le prix Droits et Libertés, soulignant sa contribution à la gouvernance autochtone des services de protection de la jeunesse.

    Professeure en travail social à l’Université Laval, Lisa Ellington est une étoile montante de la recherche collaborative avec les peuples autochtones. Respectueuse de nos valeurs, elle a su tisser des liens privilégiés avec des communautés et des organisations autochtones. Elle possède également une connaissance intime de la gamme des services sociaux qui y sont offerts, qu’elle a acquise lorsqu’elle travaillait pour la Commission de la santé et des services sociaux des Premières Nations du Québec et du Labrador.

    Nadine Vollant a consacré sa carrière à la protection des enfants de sa communauté, Uashat mak Mani-utenam. Pendant plusieurs années, elle a été la directrice d’Uauitshitun, le centre de services sociaux de la communauté. Que ce soit sur le plan local ou provincial, elle a œuvré sans relâche à l’amélioration des services de protection de la jeunesse destinés aux enfants des Premières Nations. Elle a joué un rôle crucial dans la reconnaissance du ne kupaniem/ne kupanishkuem (garde coutumière) et la conception d’un système innu de protection de la jeunesse à Uashat mak Mani-Utenam.

    Engagées dans la recherche et dans l’action, Christiane Guay, Lisa Ellington et Nadine Vollant ont apporté une contribution marquante en vue de rendre le système de protection de la jeunesse davantage bienveillant envers les enfants autochtones. Le livre qu’elles vous offrent aujourd’hui est une source précieuse d’informations et d’enseignements. Sa lecture est indispensable pour quiconque œuvre de près ou de loin auprès des enfants autochtones et de leur famille.

    Ghislain Picard

    Chef régional

    Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador

    Quand je pense au bien-être et à la sécurité des enfants, je pense à la présence des Aînés et à celle de la communauté. Quand un enfant vit des difficultés, les membres de la famille élargie viennent tempérer les choses et l’enfant peut toujours compter sur la présence des membres de la communauté. Dans une petite communauté, tout le monde se connaît. On fait tous partie de la famille d’un enfant.

    Je me souviens quand j’étais enfant. Malgré les difficultés, il y avait une sécurité dans ma vie en raison de la présence des Aînés et des gens de la communauté. J’ai été solidifiée par le rôle que mon grand-père a joué auprès de moi et soutenue aussi par mes tantes et par mes oncles ou encore par des gens de la communauté qui ont souvent eu le mot juste pour m’aider à me relever. Ils font partie de ma famille. La communauté est une grande famille élargie. Même s’ils ne m’ont pas amenée vivre avec eux, je savais que je pouvais vraiment compter sur eux. C’était important pour moi. J’avais le sentiment que j’existais.

    Je trouve extrêmement difficile de voir des enfants partir de la communauté. C’est comme si on coupait les liens avec leurs frères et sœurs et leur famille élargie: leurs tantes, leurs cousins, leurs grands-parents, etc. Quand un enfant part ailleurs, quand on le déracine, l’enfant existe pour qui ? Malgré toutes les difficultés qu’un enfant peut vivre, il vaut toujours mieux le laisser dans la communauté. Il y a peut-être des situations où on n’a pas le choix, mais il faut garder les enfants avec nous le plus possible.

    Quand on place un enfant, il faut s’assurer de donner des pistes à la famille qui l’accueille pour lui permettre de maintenir le lien affectif de l’enfant avec sa famille biologique. Il faut lui permettre de sentir qu’il existe encore pour quelqu’un, qu’il fait encore partie de la communauté et qu’il n’est pas déraciné. Il a encore une place auprès des siens.

    À partir de mon expérience, j’ai adopté quatre enfants, et tous connaissent leurs parents biologiques. Connaître sa lignée, c’est aussi très important dans le quotidien des enfants. Pour moi, les racines sont très importantes. Mon père aussi a été adopté et, même si je ne les connais pas beaucoup, je sais que j’ai des racines chez les Naskapis. Quand je me retrouve avec eux, je sais que j’ai des liens d’appartenance. L’appartenance à une communauté, c’est l’un des fondements de l’identité.

    Quand on accueille un enfant, il faut donc l’accueillir avec toute son histoire, avec tous ses liens. C’est parfois difficile comme parent adoptif ou parent d’accueil de se sentir mis à l’écart quand l’enfant remet en question son lien avec nous et qu’il va à la recherche de ses autres liens premiers. Quand ça m’est arrivé, ça m’a donné un coup, mais je me suis dit, qu’après tout, l’enfant avait raison de remettre en question notre lien, de me dire que je n’étais pas sa mère biologique ou sa grand-mère biologique. Au fond, quand on adopte ou que l’on accueille un enfant, il faut laisser à l’enfant la liberté de nous adopter à son tour.

    Quand je fais des ateliers sur la culture et la langue dans nos écoles, j’utilise souvent le collier intergénérationnel pour parler de l’importance des liens familiaux avec les enfants. Dans ce collier, chaque nœud ou chaque perle représente quelqu’un. Par exemple, je leur montre que, dans mon propre collier, il y a une perle pour chacun de mes enfants adoptés, une perle pour la mère de chacun d’eux, une perle pour chacun de leurs enfants et ainsi de suite. Je leur explique ma démarche, l’importance que ces liens ont pour moi et comment ces liens ont une valeur extrêmement importante pour ma propre famille. Que les enfants soient adoptés ou non, il n’y a aucune différence.

    C’était aussi comme ça pour mon père qui a été adopté. Je trouve que c’est vraiment important de garder des liens parce qu’il faut qu’un enfant soit attaché à une famille. Après avoir présenté mon collier aux enfants, je les invite à faire leur propre bracelet, même les tout-petits. Ils peuvent y mettre tous ceux et celles qui jouent un rôle auprès d’eux, qui les soutiennent et qui marchent avec eux. Je trouve que le simple fait de faire ça libère le cœur des enfants. Ils se font dire: «Tu as le droit d’aimer ta belle-mère. Tu as le droit d’aimer...»

    Je dis souvent aux enfants que si leurs parents se séparent ou qu’ils divorcent, ils ne se séparent pas d’eux pour autant. Ce sont les parents qui se séparent du lien avec la personne qu’ils ont aimée un jour. Ce sont des liens qui parfois se brisent, mais pas le lien avec les enfants. Je pense que mettre un enfant au monde, ça nous poursuit toute notre vie. Quel que soit le père qu’on a eu, quelle que soit la mère qu’on a eue, le lien que les parents ont avec leur enfant, c’est quelque chose d’éternel. On ne peut pas enlever ça à l’enfant. Même si, parfois, il y a eu des brisures, la valeur familiale est importante. C’est la base de tout. C’est sacré.

    C’est donc important de toujours protéger ce lien. Comme le font les outardes qui prennent soin avec bienveillance les unes des autres, il faut créer et maintenir le lien d’attachement avec l’enfant. Ainsi, dans les formations d’outardes en vol vers leur territoire, si l’une d’entre elles est blessée ou affaiblie, elle va s’arrêter, accompagnée par une ou deux autres outardes qui vont prendre soin d’elle. Après le rétablissement, elles rejoignent les autres et continuent la route ensemble. L’outarde, c’est le modèle, le symbole de la bienveillance pour nous.

    Pour bien prendre soin des enfants de notre communauté et assurer leur sécurité, je pense qu’il faut d’abord faire confiance à l’enfant, lui dire la vérité sur sa propre famille, selon son âge, lui faire confiance et surtout être quelqu’un de soutenant par le regard, par des gestes. Il faut s’approcher des enfants, se mettre à leur niveau pour leur parler. Il faut entourer l’enfant.

    Comme membre de la communauté, notre rôle est donc d’être quelqu’un qui supporte, qui accompagne et qui peut dire à l’enfant: «Je comprends. Je suis là si tu en as besoin.» Toute la communauté peut accompagner un enfant souffrant. On peut tous devenir le parent ou le grand-parent d’un enfant en difficulté. Il suffit de se faire adopter. On peut le faire même avec des jeunes que l’on ne connaît pas.

    Je dis souvent à des jeunes: «J’aimerais ça que tu m’adoptes. Il me semble qu’on irait bien ensemble.» Les jeunes réagissent toujours positivement. Ils ont simplement besoin d’avoir un contact. Quand un enfant révèle un peu d’où il vient et qu’on l’écoute, il sait qu’il y a au moins une personne qui connaît sa situation. Ce n’est pas de la magie. C’est seulement être là pour l’enfant comme on voudrait que quelqu’un soit là pour nous.

    Il ne s’agit pas de vouloir changer les choses ou de trouver une solution. Non. Il s’agit d’abord d’être là, de l’accompagner, d’avoir un attachement pour l’enfant. C’est le principe de la racine de l’amour. Ça ne prend pas de diplôme ni de baccalauréat. Ça prend seulement du cœur, et ça prend du temps.

    Il faut se faire confiance, faire confiance aux parents et aux membres de la communauté. Il faut aussi faire confiance à la vie. Accueillir des enfants, ça rend heureux et ça nous garde jeunes.

    Laurette Grégoire

    Aînée de Mani-utenam

    Nous tenons à remercier tous ceux et celles qui nous ont accompagnées, soutenues ou qui ont contribué, d’une manière ou d’une autre, à la production de ce livre.

    Nos remerciements vont d’abord aux Innus d’Uashat mak Mani-utenam. En particulier aux Aînés, aux intervenants sociaux, aux parents, aux familles d’accueil et aux enfants innus qui ont généreusement accepté de partager leur expérience personnelle et leurs savoirs dans le cadre de différentes recherches.

    À mesdames Marie-Andrée Michel et Héléna Grégoire-Fontaine, complices dans l’action, pour leur soutien amical et professionnel.

    Aux assistantes de recherche, notamment Catherine Delisle-L’Heureux, Fanny Jolicoeur et Emmanuelle Garcia, qui ont grandement contribué à faciliter notre quotidien et à nourrir nos réflexions.

    Aux professeurs Pierre Noreau et Ghislain Otis pour leur confiance dans le cadre de notre participation dans leur projet respectif, notamment le projet ADAJ – Conseil de recherche en sciences humaines du Canada (CRSH) et le projet Legitimus – Fonds de recherche du Québec – Société et culture (FRQSC).

    À Sébastien Grammond pour son esprit critique et son encouragement sans faille. Ses questionnements, ses commentaires et ses réflexions ont grandement contribué à l’élaboration du texte.

    À nos proches pour leur patience et à nos enfants pour toutes les concessions qu’ils ont dû faire au cours des dernières années.

    Les auteures sont conscientes que la pratique du travail social est menée en grande majorité par des femmes. Afin de ne pas alourdir le texte, elles ont fait le choix de témoigner de cette réalité en utilisant des termes neutres là où c’est possible et en employant le genre féminin lorsqu’elles parlent de ce type d’intervention.

    Les auteures sont également conscientes que la pratique d’intervention sociale en protection de la jeunesse est menée par des personnes qui ne portent pas nécessairement le titre de travailleuse sociale. Par conséquent, afin d’être plus inclusives et pour témoigner de cette diversité, les auteures utilisent les expressions «travailleuse sociale» et «intervenante sociale».

    Dans le respect des langues autochtones, les auteures ont fait le choix de respecter le caractère invariable de certains mots (p. ex. Inuit) et d’utiliser la terminologie et l’orthographe préconisées par les peuples autochtones eux-mêmes pour désigner les communautés des Premières Nations et des villages nordiques. Les expressions «peuples autochtones» et «Autochtones» désignent quant à elles les Premières Nations, les Inuit et les Métis collectivement.

    Enfin, le présent ouvrage est à jour au 1er janvier 2022. Il faut cependant souligner qu’à l’automne 2021, le gouvernement du Québec a déposé à l’Assemblée nationale le projet de loi 15, visant à modifier la Loi sur la protection de la jeunesse (LPJ), en y introduisant notamment un chapitre qui regroupe les «dispositions applicables aux Autochtones». Par le fait même, le lecteur devrait garder à l’esprit que ce projet de loi entraînera certains changements dans l’application de la LPJ auprès des familles autochtones, notamment en ce qui a trait aux délais de placement et à la mise en place de conseils de famille. Il entraînera également le regroupement et la renumérotation des dispositions actuelles de la LPJ qui concernent les enfants autochtones, alors que notre ouvrage renvoie aux numéros d’articles actuels.

    Le présent ouvrage est le fruit d’une collaboration de longue date entre trois travailleuses sociales œuvrant dans le champ de l’intervention en protection de la jeunesse et de la recherche avec les Premières Nations au Québec. Il est le reflet des connaissances acquises au fil du temps, des expériences personnelles et professionnelles et des résultats de recherches menées, entre autres, au sein de la communauté d’Uashat mak Mani-utenam.

    Cet ouvrage témoigne de réflexions, de questionnements et d’échanges menés avec des Aînés et des membres des Premières Nations, ainsi qu’avec des collègues, des étudiantes et des intervenantes sociales. La pratique de l’intervention en contextes autochtones n’étant pas neutre, ce livre témoigne également de notre posture professionnelle et d’un parti pris pour la décolonisation des pratiques d’intervention sociale quand celles-ci sont menées auprès des enfants et des familles autochtones.

    L’intervention sociale en contextes autochtones,

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