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À l'ombre des saules: Roman policier
À l'ombre des saules: Roman policier
À l'ombre des saules: Roman policier
Livre électronique237 pages3 heures

À l'ombre des saules: Roman policier

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À propos de ce livre électronique

Suivez l'aventure du Commissaire Dewiquet, qui vous plongera dans le monde de la Belle Epoque !

En 1900 à Marquise dans l’arrière-pays, à quelques kilomètres de la mer, c’est déjà la campagne avec ses paysans taiseux, mais aussi les ouvriers des carrières et des usines métallurgiques. C’est dans ce décor que le commissaire Gaston Dewiquet se voit confier la recherche d’un anarchiste en fuite. L’homme aurait pu trouver asile dans un village vers Wimereux, où il a de lointains cousins.

Découvrez le troisième roman historique de Michel Bouvier et soyez transportés dans la belle région de la Côte d'Opale

À PROPOS DE L'AUTEUR

Ancien professeur à l’université catholique de Lille, Michel Bouvier est l’auteur de plusieurs romans policiers. Aujourd’hui retraité, il consacre son temps à l’écriture et anime une émission littéraire sur l’antenne lilloise de RCF. À l’ombre des saules est son troisième roman historique après L’Emasculé du Cran-aux-Œufs (Pôle Nord, 2017) et La Folle de la rue Guyale (GG, 2019).
LangueFrançais
Date de sortie6 juil. 2021
ISBN9782491114336
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    Aperçu du livre

    À l'ombre des saules - Michel Bouvier

    Image de couverture

    Dans la collection Belle Epoque

     1. Un Américain sur la Côte d’Opale, Jean-Christophe Macquet

     2. Le Secret de la petite demoiselle, Jess Kaan

     3. Amandine et les brigades du Tigre, Lucienne Cluytens

     4. Les 400 Coups du Kronprinz, Jacques Thelen

     5. Le Diamant jaune, Philippe Valcq

     6. L’Emasculé du Cran-aux-Œufs, Michel Bouvier

     7. Le Trésor perdu des Rothschild, Jean-Christophe Macquet

     8. Amandine à la cour du Tsar, Lucienne Cluytens

     9. La Folle de la rue Guyale, Michel Bouvier

    10. Echec à Raspoutine, Jean-Christophe Macquet

    11. A l’ombre des saules,  Michel Bouvier

    12. Rapts à Malo, Philippe Waret

    Gilles Guillon

    BP 11 287

    59014 Lille Cedex

    www.gillesguillon.com

    ISBN : 978-2-491114-19-0

    ISBN numérique : 9782491114336

    © Gilles Guillon 2021

    Reproduction même partielle interdite sans autorisation écrite de l’éditeur.

    Du même auteur

    Lambersart-sur-Deuil (Ravet-Anceau, 2012)

    Le Silencieux (Ravet-Anceau, 2013)

    Sous les ponts (Ravet-Anceau, 2015)

    L’Emasculé du Cran-aux-Œufs (Pôle Nord, 2017)

    La Folle de la rue Guyale (GG, 2019)

    Prologue

    Cyrille Frédun poussa la porte et sentit aussitôt une odeur qui lui déplut. Chaque matin, quand il entrait dans sa grange, il humait l’odeur de ses foins, de sa paille, qu’il aurait reconnue en n’importe quelle saison et par n’importe quel temps. Aujourd’hui, il faisait calme et doux, et il y avait une odeur d’homme des chemins derrière la porte. Il prit machinalement la fourche qui était appuyée au premier poteau, et il s’avança vers la ligne de paille. Il vit tout de suite la forme sombre : un drôle dormait là, dans sa grange, sans même avoir eu la convenance de demander l’asile. Parce que chez les Frédun, on acceptait que des gens de passage dorment dans la paille, pourvu qu’ils n’aient pas trop sale trogne ; on leur offrait même le pain graissé de lard et l’eau. Mais il fallait demander, le chapeau à la main. Celui-ci avait manqué à la règle, de quoi donner au fermier de la mauvaise humeur. Il fit pivoter la fourche dans sa main pour réveiller le bonhomme du bout pommé du manche. L’homme étendu se releva d’un coup, s’agrippant au manche de la fourche pour l’écarter tout en s’en servant pour s’équilibrer. Il ne s’était pas rasé depuis des jours, et ses vêtements crasseux jetaient dans l’air matinal toutes sortes d’humeurs suries.

    – Du calme ! ordonna le fermier, tout en essayant de reprendre la maîtrise de son ustensile.

    Mais au lieu de le laisser contrôler sa fourche, le gaillard la manœuvra avec un grand ahan afin de tourner les pointes vers le fermier, puis il poussa sur le manche pour l’en piquer. Surpris par ces façons inhabituelles – d’ordinaire, les chemineaux interpellés par les paysans s’excusaient bassement et filaient – le fermier réagit maladroitement, et il sentit les pointes de la fourche lui griffer la poitrine.

    Lorsqu’il vit un peu de sang sur la chemise du paysan, le bougre lui arracha l’outil des mains, se jeta de toutes ses forces contre lui en le visant des quatre pointes, qui s’enfoncèrent dans sa poitrine en la faisant craquer. Puis il ramassa son bissac, sortit, repoussa la porte. L’aurore attisait ses braises dans un ciel rayé par l’ébouriffement d’une ligne de saules têtards. Il leur tourna le dos, vérifia que personne n’approchait, se pressa vers la barrière de l’enclos, s’engagea d’un pas farouche sur le chemin de terre et de cailloux qui rejoignait la route.

    Chapitre 1

    Morgane croyait aux fées, mais elle avait une façon bien à elle d’y croire. Les fées étaient capables de se rendre toutes petites afin de se cacher sous les cailloux des chemins secs, sous les brins d’herbe les plus fins qui les bordaient. Il fallait les chercher en soulevant délicatement les éclats de pierre, en peignant de ses doigts l’herbe fine, celle qui vient tout juste de sortir de terre. Il fallait retenir son souffle, parce que les fées filaient à la moindre haleine. Mais si on en voyait une, si on avait le temps de la voir avant qu’elle ne file, alors on pouvait lui demander tout ce qu’on voulait. Elles n’en faisaient qu’à leur tête, mais justement, on pouvait toujours penser qu’elles seraient gentilles, puisqu’elles étaient des fées. Le signe qu’elles avaient envie de l’être, c’était qu’elles grandissaient jusqu’à devenir de la taille de Morgane, qu’elles s’asseyaient sur la mousse et qu’elles lui souriaient, comme madame la comtesse quand la petite fille portait le beurre et les œufs au château.

    Morgane avait été recueillie par sa marraine à la mort de ses parents, le père disparu en mer en novembre 1894, la mère piétinée dans une émeute de la faim sur le port de Boulogne, peu après. La fillette avait dû quitter le bord de mer, les odeurs de marée pour celles du fumier et de la terre labourée. Sa marraine était fermière à Wierre-Effroy. Elle s’appelait Hictrude, prénom descendu d’une aïeule flamande, mais tout le monde lui donnait du Madame George, du nom de son mari, un fort gaillard au ventre débordant, qui conduisait ses chevaux à la longe comme un cocher de manège, en faisant des « hue » et des « ho » qui lui montaient de la gorge avec des roulements de crachats rocailleux. Marraine avait déjà trois fils, Jean, Gilles et Romain, qui traitaient Morgane en intruse, la regardant avec des yeux méchants, ne lui adressant la parole que pour lui donner des ordres, ou la poursuivre en prétendant jouer.

    Son plaisir était de porter le beurre et les œufs au château. Ils n’en avaient pas besoin, du beurre et des œufs des George, puisqu’il y avait une immense ferme derrière le château ; mais madame la comtesse l’avait exigé, qu’on envoyât la petite Morgane au château avec son panier, parce qu’elle s’était éprise de cette enfant, elle qui ne parvenait pas à en mettre au monde, et avait inventé que les œufs et le beurre des George étaient les meilleurs du canton afin de se donner un prétexte solide. La comtesse n’était que l’épouse du maire, qui n’était pas comte, mais on lui avait toujours donné ce titre dans le village, avec du respect, parce qu’elle connaissait les simples et en cultivait une grande variété dans son jardin médicinal. Elle était aidée dans cette tâche par un jardinier qui ne parlait pas plus que les carpes de l’étang devant le château, et qui faisait peur à Morgane, parce qu’il s’arrêtait pour la regarder se diriger vers la bâtisse blanche, les mains croisées en appui sur la potence de sa bêche. Morgane avait peur des hommes qui la regardaient avec cette insistance, comme faisait aussi Guillaume Sautieux, le maréchal-ferrant du bourg, qui, lui, l’obligeait à faire un détour en allant à l’école, parce qu’il avait toujours l’air de vouloir l’attraper en lui faisant les cornes. Pour éviter le jardinier, elle aurait pu traverser la grande prairie, mais il y avait des trous remplis d’eau boueuse et de petites grenouilles qui sautaient dans tous les sens ; alors, elle préférait suivre l’allée sableuse qui contournait le jardin des simples, baissant les yeux et pressant ses pas. Ce qui lui donnait du courage, c’était l’accueil de madame la comtesse, dont elle gardait tout un cahier d’images dans sa mémoire enluminée.

    Le sourire de cette dame était large comme un pain, elle avait la bouche toute ronde pour le former, comme si elle y avait tenu un œuf, pas un gros œuf de poule, un petit œuf de caille avec des points dorés. Elle tenait ses mots entre ces lèvres si bien arrondies qu’on avait envie de les y cueillir. Et sa robe envoyait des odeurs de fleurs dans toutes les directions quand elle se mettait en marche pour inviter Morgane à la suivre dans le grand salon. Parce que madame la comtesse avait cette gentillesse distinguée de recevoir la fillette avec son panier de ferme dans le grand salon, où elles s’asseyaient côte à côte sur la banquette de reps bleu pour tenir une conversation de dames, sur les travaux des champs, les jeux des cochons, des lapins, des veaux, dont la grande dame voulait avoir des nouvelles comme si les bêtes des George avaient été de sa famille.

    Elle aimait aussi évoquer sa belle-mère, qui vivait au château dans une suite du premier. Impotente, elle ne quittait le lit que pour un fauteuil mécanique, dont Madame la Comtesse imitait les bruits que faisaient les différentes manivelles qui permettaient de l’actionner. Elle tournait une manivelle imaginaire et couinait de diverses façons ; puis elle disait qu’il allait falloir ajouter un peu d’huile sur les pignons, ce qui la faisait rire.

    – Ernest ne supporte pas l’idée qu’on puisse graisser le fauteuil de sa mère ! confiait-elle. Il prétend que cela risquerait de tacher ses tapis. Il faut donc que nous supportions les grinchouillis de cette machine infernale. Tu as bien de la chance de ne pas devoir habiter cette grande maison, tu sais, ma gentille Morgane.

    Disant cela, elle lui passait la main le long des joues. Morgane trouvait cela bien agréable, ces longs doigts parfumés qui glissaient sur sa peau. Pour mieux en profiter, elle laissait ses paupières descendre sur ses yeux, se rejoindre en croisant les cils du haut avec ceux d’en-bas. Sa marraine ne la touchait jamais, ni personne d’autre. Son corps n’existait agréablement que pour madame la comtesse, qui sentait bon et parlait avec de la crème sur la langue. La crème qu’on faisait à la ferme, on en mangeait peu, tandis qu’à la cuisine du château, on en faisait une grande consommation. Morgane pensait que c’était d’en manger qui donnait aux phrases de madame la comtesse leur douceur extraordinaire.

    Ce jour-là pourtant, madame la comtesse sentait le sur, comme de la crème qui aurait traîné dans une jatte sur l’évier, une odeur qui venait de ses jupons et qui ressemblait à celle de la Rousse, la vache qui venait de vêler et dont le veau était mort au matin. Ce qui avait fait jurer George. La voix de George roulait sur de la boue granuleuse avant de sortir, elle dispersait des odeurs de fiente de canard et toute une bruine collante. Morgane avait dû la recevoir sur les joues, sur les paupières, sur le menton une fois qu’elle avait écrasé un œuf dans son tablier, en glissant sur les pavés souillés. Elle avait dû laver elle-même son tablier au baquet, avec la grosse brosse de chiendent qui était énorme pour sa main, et lui échappait à tout instant. Mais George ne l’avait pas frappée, il s’était contenté de tenir la main levée au-dessus de sa tête et de brailler des phrases noires, dans cette langue sauvage qu’il employait quand il était en colère.

    En sentant cette odeur dans les jupons de madame la comtesse, Morgane avait pensé qu’elle était peut-être malade, qu’elle avait mis au monde un enfant mort la nuit dernière. Comme elle avait le ventre toujours rond, difficile de juger si elle était grosse ou non. Tout le village savait qu’elle ne mettait au monde que des enfants morts, qu’elle ne les gardait pas assez longtemps dans son ventre. Que le maire en était malheureux, mais qu’il croyait en remettant ça que la nature finirait par lui obéir, ou céder au docteur Fonsicourt, qui essayait incessamment des nouveaux remèdes, jusqu’ici sans effets. Morgane espérait attraper une fée qui donnerait un enfant à sa bienfaitrice, mais elle n’y arrivait pas. Elle n’osait rien dire de ce qu’elle sentait, mais elle parla de la Rousse et de son veau. Madame la comtesse l’écouta gentiment comme elle savait si bien faire, puis elle lui dit de ne pas se tracasser, que la Rousse ferait un autre veau, que c’était un accident comme il en arrive. Que c’était embêtant pour sa marraine, mais qu’elle avait d’autres vaches. Morgane rentra plus contente à la ferme, cependant, elle n’osa quand même pas prendre par la grande prairie, dont les flaques étaient habitées par les petites grenouilles.

    Chapitre 2

    Gaston Dewiquet descendit de cheval d’un ample mouvement de la jambe droite, il flatta l’encolure de sa jument Soyeuse, passa le bout des rênes dans l’anneau accroché au mur du presbytère, et fit un nœud qu’il serra énergiquement. Il aurait aimé un peu plus de lumière dans l’air, mais au moins, il n’y avait ni vent ni pluie, ce qui était déjà bien agréable. Il heurta violemment le marteau de porte, ce qui fit résonner le couloir qu’il devina long et vide. Il n’était jamais venu chez le curé de Wierre-Effroy, dont on lui avait dit qu’il était jeune et aimable. Catholique attiédi, le commissaire avait de moins en moins de goût pour les choses de la religion, mais il restait curieux des hommes d’Église, dont il appréciait le savoir peut-être plus encore que la bienveillance. Il pratiquait irrégulièrement, mais il recherchait le calme particulier qu’on trouve dans les églises et les bâtiments religieux. Quand on lui avait annoncé qu’un dangereux anarchiste pourrait s’être caché dans ce gros bourg et qu’on le chargeait de le trouver, il avait tout de suite pensé rendre visite au curé plutôt qu’au maire, pour la raison, qu’il ne reconnaissait pas, que la piété du petit Pierre le tracassait, et que peut-être il pourrait en parler avec ce prêtre.

    Depuis qu’il l’avait recueilli et mis à l’école de Marquise, l’enfant était devenu plus angélique encore qu’il n’était lorsque le commissaire l’avait tiré de la grande ferme de Waringzelle, au-dessus du Cran-aux-Œufs ¹. L’influence de Germaine, la gouvernante dévote dont le commissaire avait fait sa femme, n’y était sans doute pas pour rien, mais il avait découvert peu à peu que cela venait de plus loin. Il avait cru sortir du petit Pierre une manière de chef-d’œuvre en l’éduquant selon son ambition, et voilà qu’il rencontrait une âme aimable qui lui résistait, s’en allait avec entêtement sur des voies qui le troublaient. Il en avait vaguement parlé au baron d’Estrainette, qui avait une fille religieuse dont il n’était pas bien fier, mais le baron avait détourné la conversation, comme il avait l’habitude de faire quand on lui proposait un sujet qui le mettait mal à l’aise, préférant les assauts de l’escrime à ceux de la réflexion.

    Une vieille femme ouvrit, qui portait un tablier d’un noir si usé qu’il s’en éclaircissait dans la lumière du jour ; elle sourit au commissaire en chiffonnant ses rides, lui proposa d’entrer dans le salon où le jour glissait une lumière molle, « pariant sur la descente fort prochaine » de monsieur le curé, qui finissait ses prières « là-haut, dans son oratoire clos ». Dewiquet remarqua plaisamment ses façons de dire, les savoura. Elle accompagnait toutes ses paroles de mouvements de ses mains longues et grises, sans trop remuer les bras qu’elle maintenait au long du corps, quoique sans raideur. Elle se déplaçait en claudiquant d’une hanche plus faible, ce qui remuait dans ses vêtements des parfums de savon noir et de cendres ; parfois elle s’essoufflait à tenter de se débarrasser d’un chat qui lui venait dans la gorge. Cette gêne fit remarquer au commissaire que le presbytère était frais, à la limite de l’humide, ce qui lui donna un frisson, fit tourner ses pensées vers l’image d’une belle flambée dans la haute cheminée de pierre d’Honglevert, bien qu’il sût qu’il ne devait pas l’espérer ici, dans cette bâtisse mal vieillie.

    Le curé Grimont lui plut dès qu’il le vit sur le seuil du salon, avec son sourire brutal, qui vous forçait à la sympathie, ou à la haine, sans possibilité d’hésiter. Pour Gaston Dewiquet, ce serait la sympathie. Ce qui rendait ce sourire brutal, c’était la puissante mâchoire du jeune prêtre, noire d’une barbe que le rasage le plus soigneux ne pouvait effacer. Une lourde mèche de cheveux de charbon coupait le front haut et bombé comme un chaudron, attirant si fortement le regard qu’on n’en voyait d’abord ni les yeux ni le nez, lesquels se révélaient ensuite successivement, le nez d’abord, long, droit, serré, puis les yeux, qui grésillaient comme des morceaux de lard dans une poêle de fer. Curieusement, le cou était mince, n’emplissant pas le col romain de la soutane, mais les épaules rondes gonflaient le vêtement noir, d’un noir qui absorbait toute velléité d’éclat, toute tentative de reflet.

    – Monsieur le commissaire de Marquise, soyez le bienvenu dans mon presbytère frisquet. Voulez-vous que nous passions dans la cuisine ? Pauline y entretient grand feu.

    – Volontiers, répondit sans manière le commissaire, en se demandant cependant à quoi ce prêtre avait vu qu’il était gêné par l’humidité.

    Quand ils entrèrent dans la cuisine, Pauline en sortit, habituée à la discrétion obligée de la servante d’un homme qui confesse. Ils s’installèrent à la grande table centrale, le jeune prêtre plaça ses coudes de telle manière qu’il pût poser son menton sur ses mains aux doigts imbriqués, et plongea son regard dans les yeux du commissaire, qui se tortilla un peu sur le siège de paille où ses fesses ne trouvaient pas tout de suite leur place.

    – Mon confrère de Marquise, l’abbé Crampion, m’a vaguement expliqué le sujet de votre visite, mais je n’y ai pas compris grand-chose, à part que vous aviez des inquiétudes quant à un homme dangereux qui pourrait se cacher sur le territoire de ma paroisse. Vous savez, je ne suis pas informé de toutes les allées et venues, et je n’ai pas une âme d’espion, mon secours donc…

    – M. le curé, je sais que ce n’est pas dans vos fonctions de surveiller vos

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