Le grand bal
Toute la ville était en émoi en ce beau dimanche de mai. Et pour cause, l’école de cavalerie, la fierté de Saumur, l’illustre Cadre noir, la plus belle école du monde, défilerait dans les rues ce même jour en début d’après-midi.
Le défilé serait suivi d’un concours d’attelage et de dressage sur un vaste terrain dans l’enceinte de l’école. Les réjouissances s’achèveraient par un bal donné en soirée dans la salle de réception de l’école – bal auquel étaient conviées les personnalités de Saumur, dont le notaire, sa femme et ses deux filles, le banquier et le président du tribunal.
Un événement attendu par les citoyens de la ville mais aussi par Constance Dupré, la fille du tailleur qui n’aurait manqué les festivités pour rien au monde.
Deux heures que Constance se parait dans sa jolie chambre, se contemplant avec une admiration naïve et satisfaite dans la psyché en bronze, telle une girouette tournicotant sur son clocher. Néanmoins il fallait se hâter, son amie Julie arrivait bientôt et il fallait être prête.
Constance avait 22 ans. Elle était la fille de Bernadette Bramont, décédée quinze ans plus tôt, et de Robert Dupré, tailleur de métier.
Comme toutes les jeunes filles de son âge, elle rêvait d’amour. Un mystère pour elle. D’ailleurs le mot – amour – rosissait les joues rondes de la jeune fille dès qu’il était prononcé.
Robert Dupré et sa fille habitaient une ancienne demeure du vieux Saumur. La belle bâtisse comprenait une cour arrière donnant sur un jardinet et sur l’atelier de couture de M. Dupré. Au rez-de-chaussée, débouchant dans une rue à petits pavés caillouteux dominée par les remparts, se tenait la boutique Dupré pourvue d’une jolie devanture bien achalandée. Une enseigne en fer, grinçant les jours de grand vent, pendait au-dessus de la porte d’entrée :
Robert Dupré, Tailleur pour hommes et femmes.
Une vaste pièce séparait l’atelier et la
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