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La stratégie du perroquet: Un roman touchant
La stratégie du perroquet: Un roman touchant
La stratégie du perroquet: Un roman touchant
Livre électronique431 pages6 heures

La stratégie du perroquet: Un roman touchant

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À propos de ce livre électronique

Que cache Fabrice à son épouse Jo ?

Jo part à Dakar pour rejoindre Fabrice, son mari, qui y travaille depuis deux ans en tant que cadre dans une entreprise. Elle fait connaissance avec la vie d’expatriée. Mais très vite, le comportement de Fabrice l’intrigue. Que lui cache-t-il ? La rencontre avec un jeune ingénieur va rebattre les cartes et lui redonner courage et espoir. De découvertes en révélations, la voilà entraînée malgré elle dans un périple qui lui donnera la clé de l’énigme.

Suivez les aventures de Jo, femme d'expatrié à Dakar, entraînée malgré elle dans une périple qui la mènera de découvertes en révélations.

EXTRAIT

En trois ans de mariage, nous n’avons habité que six mois ensemble. Très vite l’Afrique me l’a ravi. Je l’entends encore entrer dans la cuisine, de son grand pas assuré, une lueur maline dans l’œil :
— J’ai une promotion inespérée. Dakar ! Ça te dit ? Nous partons dans trois mois…
— Quoi ! Mais… Je ne peux pas quitter mon poste comme ça.
Le premier moment de stupeur passé, j’avais vaguement protesté contre la soudaineté de la nouvelle, contre ce virage que je n’avais pas prévu. Il avait balayé mes pauvres petits arguments d’un haussement d’épaules assorti d’un baiser ardent :
— Jo, c’est la chance de ma vie ! L’occasion ne se représentera pas, il ne faut pas la laisser passer ! Tu demanderas un poste au lycée français de Dakar…
— Mais… je ne peux pas partir en cours d’année.
— Au début, j’irai seul, en éclaireur. Le temps de trouver un logement décent. Tu me rejoindras ensuite. »

À PROPOS DE L'AUTEUR

Christine Antheaume a travaillé dans le secrétariat, la publicité et l’enseignement. Elle vit à Port Sainte Marie, village du Lot et Garonne dont elle est la correspondante de presse.
LangueFrançais
ÉditeurEx Aequo
Date de sortie20 févr. 2017
ISBN9782359627350
La stratégie du perroquet: Un roman touchant

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    Aperçu du livre

    La stratégie du perroquet - Christine Antheaume

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    Table des matières

    Résumé

    La stratégie du perroquet

    Dans la même collection

    Résumé

    1981 : Jo part à Dakar pour rejoindre Fabrice, son mari, qui y travaille depuis deux ans en tant que cadre dans une entreprise. Elle fait connaissance avec la vie d’expatriée. Mais très vite, le comportement de Fabrice l’intrigue. Que lui cache-t-il ? La rencontre avec un jeune ingénieur va rebattre les cartes et lui redonner courage et espoir. De découvertes en révélations, la voilà entraînée malgré elle dans un périple qui lui donnera la clé de l’énigme.

    Christine Antheaume a travaillé dans le secrétariat, la publicité et l’enseignement. Elle vit à Port Sainte Marie, village du Lot et Garonne dont elle est la correspondante de presse.

    Christine Antheaume

    La stratégie du perroquet

    Roman

    ISBN : 978-2-35962-735-0

    Collection Blanche

    ISSN : 2416-4259

    Dépôt légal mai 2015

    ©couverture Ex Aequo

    ©2015 Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction intégrale ou partielle, réservés pour tous pays.

    Toute modification interdite.

    Éditions Ex Aequo

    6 rue des Sybilles

    88370 Plombières les bains

    www.editions-exaequo.fr

    Bibliographie

    Tsunami - Éditions du Bord du Lot - 2010

    Crimes à Temps perdu - éditions Ex æquo - 2010

    Cache-cache, Tome 1 -  éditions du Net - 2013

    Cache-cache, Tome 2 - éditions du Net - 2013

    La stratégie du perroquet - éditions Ex æquo - 2015

    ***

    1

    Il n’est pas là.

    Mes yeux fébriles fouillent du regard la guirlande de têtes agglutinées derrière les vitres du hall des arrivées. Un camaïeu de visages noirs, blancs, bistres. Pas de Fabrice. Sans doute n’a-t-il pas pu se frayer un chemin à travers la matière humaine. Sans doute m’attend-il, le cœur battant, derrière la cohue.

    Les bagages commencent leur manège grinçant sur le tapis roulant. Les costumes croisés et boubous bariolés se précipitent le long du ruban de caoutchouc pour leur faire une haie d’honneur.

    Dans quelques minutes, je me jetterai dans ses bras. Nos retrouvailles seront-elles à la hauteur du cinéma intime que je me suis projeté tout au long de ces interminables mois de séparation ? Je suis tout près de cette minute parfaite, si souvent vécue par anticipation, où sa grande silhouette se détachera de la foule, fondra vers moi, me soulèvera et m’arrachera au monde. Il me conduira dans l’appartement qu’il a loué dans le centre de Dakar. Il me l’a tellement décrit qu’il m’est déjà familier. Notre nid d’amour désormais. Nous nous écroulerons sur le grand lit d’une chambre blanche et nous nous emmêlerons corps et âme dans la même fête. Et lorsque la brûlure de nos désirs sera apaisée, il m’emmènera dîner à la lueur des chandelles, dans un restaurant du bord de mer. Fin du premier épisode. Ensuite, commencera notre vie enfin commune, tissée d’habitudes tendres et d’ajustements joyeux.

    En trois ans de mariage, nous n’avons habité que six mois ensemble. Très vite l’Afrique me l’a ravi. Je l’entends encore entrer dans la cuisine, de son grand pas assuré, une lueur maline dans l’œil :

    — J’ai une promotion inespérée. Dakar ! Ça te dit ? Nous partons dans trois mois…

    — Quoi ! Mais… Je ne peux pas quitter mon poste comme ça.

    Le premier moment de stupeur passé, j’avais vaguement protesté contre la soudaineté de la nouvelle, contre ce virage que je n’avais pas prévu. Il avait balayé mes pauvres petits arguments d’un haussement d’épaules assorti d’un baiser ardent :

    — Jo, c’est la chance de ma vie ! L’occasion ne se représentera pas, il ne faut pas la laisser passer ! Tu demanderas un poste au lycée français de Dakar…

    — Mais… je ne peux pas partir en cours d’année.

    — Au début, j’irai seul, en éclaireur. Le temps de trouver un logement décent. Tu me rejoindras ensuite. »

     Je m’étais rangée à ses raisons à contrecœur. Comme redouté, les embarras administratifs de l’éducation nationale avaient empêché mon exil immédiat. J’avais continué à enseigner le français dans un collège d’Agen, espérant une hypothétique mutation, puis j’ai demandé une période de disponibilité pour pouvoir rejoindre mon époux.

    J’aperçois ma valise sur le carrousel. Je me faufile pour l’attraper. Guichet des douanes, contrôle des passeports… Passé la guérite et la haie des uniformes, je suis livrée à la folie du grand hall, où virevolte la grande chorégraphie des voyageurs : familles hagardes, hommes d’affaires impassibles et couples harassés.

    Toujours pas de Fabrice.

    Je vais un tour aux toilettes. La glace impitoyable me renvoie mon reflet fatigué, qui me confirme que six heures de voyage n’ont jamais sublimé ma beauté naturelle. Par ailleurs, l’efficacité de mon déodorant « 24 h » est largement surestimée. Pas grave, je me rafraîchirai une fois à la maison.

    À la maison ! L’expression me plait. Je la tourne entre mes dents, je la déguste mot par mot, je me la suçote comme une confiserie.

    Des porteurs en maraude tournoient autour de moi comme des mouches. Certains me harcèlent, je décline leur offre d’un sourire las. Mais qu’est-ce qu’il peut bien fabriquer ? J’ai hâte qu’il me sauve de cette foire brâillante. Il ne va certainement pas tarder. Il doit être coincé dans les embouteillages.

    La sueur me coule entre les omoplates. Mon t-shirt me moule comme une seconde peau, et mon pantalon me fait un enveloppement brûlant.

    Ou alors, il s’est trompé dans les horaires de vol. Il a été victime d’un accident de la circulation. Ou d’un ennui mécanique. Il a crevé. Il est malade. Il a perdu ses clés de voiture. Mon cerceau aux abois me propose une ribambelle de bonnes raisons pour expliquer son absence.

    Un bout d’un quart d’heure d’attente inquiète, un malaise accentué par la fatigue me submerge. Les porteurs se font de plus en plus pressants. Ils se rapprochent en cercles concentriques. On commence à me lorgner d’un air bizarre, à me considérer comme une proie potentielle. Je me plaque sur le visage l’expression blasée de la voyageuse patentée que rien n’étonne ni n’indispose, mais quelque chose en moi se met à branler dangereusement. L’intérieur de ma boîte crânienne n’est occupé que par une unique question : pourquoi l’homme de ma vie n’est-il pas là pour m’accueillir ?

    Un quadragénaire grassouillet s’avance vers moi à pas décidés. Il me donne une poignée de main. Sa peau est moite comme une nageoire.

    — Excusez-moi… Vous êtes madame Jocelyne Labarthe ? gazouille-t-il d’une voix de fausset.

    Je le considère, un peu méfiante. Il a un ventre proéminent emballé dans une chemise à palmiers verts, et une haleine de gnou. Son sourire satisfait s’encadre entre deux joues poupines, prises en tenaille par deux favoris roux en broussaille. Deux paquets de varechs s’agrippent désespérément de chaque côté de son crâne. Il personnifie l’image même de l’insouciance, une désinvolture qui contraste furieusement avec mon anxiété galopante.

    — C’est bien ça.

    — C’est Fabrice qui m’envoie. Je suis Félix Chabot, un ami de votre mari.

    — Où est-il ?

    — Il n’a pas pu venir. Un incident de dernière minute à la fabrique. Il est désolé. Il m’a chargé de vous ramener chez vous, en attendant son retour.

    Je maquille d’un sourire contraint ma déception trop visible. Il s’empare de ma valise, libérant au passage une sulfureuse odeur de dessous de bras. C’est dans ce malodorant sillage que je trottine jusqu’à la sortie. Une chaleur d’étuve me cueille derrière les portes vitrées. Mon guide me conduit au parking et s’arrête devant une Opel Manta rouge du plus parfait tape-à-l’œil, dont il m’ouvre galamment la portière.

    Un soleil blanc se délaye dans le pare-brise, diffusant dans l’habitacle une température de haut fourneau. Il ne me faudra que quelques minutes pour être cuite à point.

    Le postérieur confortablement posé sur des braises ardentes, nous quittons l’aéroport puis, après quelques kilomètres de brousse, nous nous enfonçons dans le grouillement de la capitale, les concerts de klaxons et les relents de gasoil.

    Félix me nomme les monuments à l’enfilade des grandes avenues ; ambassades, édifices publics défilent derrière les vitres… Les noms s’emmêlent dans ma tête, j’ai l’esprit ailleurs. Soudain, tout me paraît hostile. La vision même de l’océan, miroitant derrière son écrin de roches brunes, est ternie par le filtre de ma déception. À chaque feu rouge, des bana-banas assaillent la voiture, déployant leurs guirlandes de montres à quartz derrière la vitre. Félix les rembarre avec une brusquerie virile, qu’on n’attendrait pas de sa voix d’oiseau.

    Enfin, la Manta se gare au pied d’un immeuble de deux étages, situé dans une venelle poussiéreuse, dont une partie est occupée par une mosquée. La rue est presque déserte, hormis une poignée d’enfants sales qui jouent avec un pneu. Une forte odeur d’arachide plane dans la touffeur de l’air.

    — Votre nouvelle adresse : 12 rue Braconnier

    Devant la porte d’entrée, deux jeunes fument un joint, le regard absent.

    Félix monte ma valise au premier étage et me tend une clé.

    — Bienvenue chez vous. Vous voulez que je vous aide à vous installer ?

    — Non, merci, ça ira. Merci de m’avoir accompagnée.

    — Fabrice ne devrait pas tarder, maintenant. Je vous laisse, alors. À bientôt.

    Il me tend une main moite de phoque et descend l’escalier. Avant de fermer la porte, j’entends son souffle court et son pas lourd scander chaque marche. Soulagée qu’il n’ait pas insisté. Je préfère rester seule pour cuver mon désappointement en toute tranquillité, et découvrir les lieux.

    Que dirai-je quand Fabrice rentrera ? Lui reprocherai-je ce ratage dans mon scénario en technicolor ? Non, je me tairai, je ne veux pas gâcher la fête, et puis ce n’est certainement pas de sa faute.

    ***

    2

    L’appartement est vaste, bien agencé. Deux chambres, dont une transformée en bureau. Un salon aux dimensions confortables, une cuisine dont l’unique fenêtre donne sur une petite terrasse surplombant la ruelle, air conditionné. Je jette un regard circulaire sur le décor, que l’absence de Fabrice rend froid et inamical. Il émane de cet ordre implacable une bizarre sensation de vide. Chaque chose est trop bien à sa place, l’espace d’une netteté suspecte. D’habitude, Fabrice laisse toujours tout traîner. L’explication de cette propreté n’est pourtant pas difficile à deviner : il emploie un boy ou une femme de ménage, c’est l’usage ici.

    Mes yeux courent sur les murs, les meubles, à la recherche de bibelots familiers, de photos de moi, d’objets de notre ancienne vie. J’en n’en trouve aucun. Si, pourtant. Sur le buffet du salon, un petit cliché encadré de notre mariage se dissimule derrière une corbeille de mangues. Minable piqûre de rappel. Mais pour le reste… Les fauteuils, la petite table en rotin, le buffet, la lampe, le tapis, tout m’est étranger. J’aurais aimé tomber sur une babiole qui aurait évoqué les souvenirs partagés.

    Mais qu’est-ce que je me suis imaginé ? Mon mari a loué cet appartement meublé. Il attend évidemment mon arrivée pour l’arranger à mon goût.

    Dans le bureau, tout de même, dans la bibliothèque de contreplaqué s’alignent de vieilles connaissances. Toute sa collection de livres sur l’aéronautique, sa passion, dont il n’a pas voulu se séparer, même temporairement ; quelques romans policiers, ses préférés ; le canif que je lui ai offert pour son anniversaire, il y a trois ans. Et, dans la penderie, parmi les costumes de toile légère et les chemises inconnues à mon bataillon, je reconnais le blouson de tergal que nous avions acheté ensemble boulevard Carnot, avant son départ pour l’Afrique. Je leur souris comme à des amis de longue date, vaguement attendrie.

    Sur un panneau de liège, au-dessus de sa table de travail, sont épinglées des photos en couleur, sur lesquelles Fabrice figure en présence d’inconnus. Tout un pan de sa vie qui m’a échappé, un bout de chemin que nous n’avons pas parcouru ensemble, et dont je me sens malgré moi devenir jalouse. Ce mélange de choses familières et étrangères fait naître dans mon arrière-cuisine un sentiment bizarre, où la curiosité le dispute à l’amertume. Nous allons rattraper le temps perdu, je me le jure !

    Je prends une douche, pour ne pas mariner dans mes idées noires.

    J’enfile une robe jaune, que Fabrice apprécie particulièrement. Dans la glace, une femme fatiguée me regarde. Des rides m’ont poussé pendant le voyage. Il y a du flou dans le rimmel, de la déprime dans le cheveu.

    J’essaie de réparer les dégâts en deux coups de crayon, puis m’étends sur le lit, les bras en croix, et ferme les yeux.

    Une voix vient de déchirer mon demi-sommeil. Je n’ai pas reconnu celle de Fabrice. Il y a quelqu’un dans l’appartement. Est-ce bien une voix, d’ailleurs ? Plutôt une logorrhée indistincte, aux accents métalliques. Mon cœur s’arrête. Le son étrange se reproduit. Je me lève.

    — Qui est là ?

    Pour toute réponse, l’épaisseur du silence. Je frissonne malgré la chaleur. Il y a quelqu’un, j’en suis sûre. Soudain, le gargarisme insolite se fait de nouveau entendre. Cela vient de la cuisine.

    J’avance à pas de louve. Un gong sourd résonne à mes tempes. Par la porte, doucement entrebâillée, je risque un œil. Personne. J’avance encore, et explose d’un rire libérateur.

    Le perroquet, vexé, me décoche une nouvelle salve de borborygmes indignés. C’est un youyou jaune et vert, au bec peu aimable. La cage trône sur une table basse, partiellement cachée par le buffet, ce qui explique que je ne l’ai pas remarquée au premier abord. Le volatile penche la tête de droite à gauche, d’un petit coup sec, en émettant des sons presque humains. Il m’examine de son petit œil rond et sévère d’institutrice jaugeant une nouvelle élève. Je ne dois pas être dans ses petits papiers, car il se cache le bec sous l’aile, sans autre commentaire.

    — Salut à toi, heureuse de faire ta connaissance. Ce qui ne semble pas partagé. En tout cas, tu peux te vanter de m’avoir flanqué une trouille mémorable.

    — Je vois que tu as fait connaissance avec Sékou.

    Fabrice. Dans mon exploration animalière, je n’ai pas entendu le bruit de la porte d’entrée.

    Sa haute silhouette s’encadre dans l’embrasure. Quelque chose me frappe au cœur. Un choc. Je ne m’étais pas attendue à un tel changement d’allure. Il a maigri. Une barbe noire lui ronge les joues. Il porte un t-shirt d’un bleu passé et un pantalon froissé. Je songe que c’est une tenue bien négligée pour accueillir sa femme. Une petite voix intime me murmure perfidement : il aurait pu faire un effort ! Ce laisser-aller m’étonne de sa part. Dans notre vie d’avant, je le taquinais souvent sur le soin scrupuleux qu’il apportait à sa mise… Il faut croire que sa coquetterie légendaire a fondu au soleil de l’Afrique. Le climat local incite à la décontraction. Qu’importe, il est là, enfin ! Et derrière ses lunettes, ses yeux clignotent d’un éclat malicieux. Je fonds dans ses bras, et plus rien n’existe, que sa peau, son odeur, ses grandes mains intelligentes.

    Une épée de soleil transperce les persiennes closes et vient se ficher sur les murs de la chambre. Répandus sur le remous des draps moites, nous dérivons, cœur contre cœur. Nos corps se sont reconnus d’emblée. Nos mains ont retrouvé le chemin des gestes d’autrefois. Nous emmêlons nos âmes et soudain il n’y a plus de passé, d’imparfait encore moins, seulement le présent simple, qui est devenu plus que parfait.

    Ma tête a retrouvé sa place attitrée, au creux de sa clavicule, dans ce nid fabriqué sur mesure pour moi. Lovée contre lui, je lui pose mille questions dont je n’attends pas la réponse, gourmande du simple son de sa voix. Ma fébrilité, mon impatience le font sourire.

    Je m’agace de ne pas tout savoir de la vie qu’il s’est fabriquée sans moi. Je prends conscience que le temps perdu ne se rattrape pas. Trop de choses à dire, et si peu de mots pour le faire…

    Mais tout va changer désormais, jamais plus nous ne laisserons cette distance entre nous.

    Il va falloir nous réapprivoiser, réapprendre à parler le « nous deux ». Ma seconde langue désormais. L’avenir s’annonce radieux, pavé des mêmes émotions, des mêmes expériences, il ressemble enfin à mes rêves en couleur.

    — Tu n’as pas soif, à tant parler ? Que dirais-tu d’un petit verre de quelque chose ?

    — J’ai envie de me noyer dans un grand verre de n’importe quoi, si tu as…

    — Oui, j’en ai. Ou du moins, nous en avons, rectifie-t-il. Tu es ici chez toi, tu l’avais oublié ?

    C’est vrai. Il me faudra du temps pour m’habituer à cette caserne sans âme. Je me promets d’y imprimer ma marque. Des rideaux aux fenêtres, des reproductions de tableaux aux murs, des photos, des fleurs, des tas de coussins, une nappe, enfin des couleurs, des couleurs, des tas de couleurs, pour nous illuminer la vie…

    Fabrice m’attire de nouveau vers lui. Je n’ai pas le temps d’imaginer ce que je ferai encore.

    Il m’a emmenée dîner dans un restaurant de la petite Corniche, dont le site enchanteur a assis la réputation. Au-delà des jardins bien ordonnés, on devine l’immensité noire de l’océan. Terrasse comble, des Européens pour la plupart. Des couples d’amoureux se profilent dans la lueur des lampions, baignant dans une musique sirupeuse et le bourdonnement des conversations. Des serveurs à nœud papillon tourbillonnent en un ballet savamment orchestré entre les nappes immaculées.

    Fabrice a commandé deux mulets grillés et du champagne, pour célébrer nos retrouvailles. C’est l’un de ces instants rares où la vie ressemble à une publicité pour le bonheur. Tout se déroule à merveille. Les événements épousent de nouveau la trame de mon scénario. Son absence à l’aéroport n’a été qu’une erreur de script, un petit raté qui n’a plus d’importance, et que je vais vite oublier.

    — Ce bouge est le rendez-vous traditionnel des couples illégitimes, a chuchoté Fabrice à mon oreille.

    La flamme du photophore lui sculpte un visage juvénile. J’ai envie de le taquiner.

    — Et tu y vas souvent ?

    — Tous les week-ends.

    Bien fait pour moi. Une étincelle malicieuse danse derrière l’écran de ses lunettes. Il attend que je lui demande avec qui, il en sera pour ses frais.

    — Tu me le paieras.

    Il évite la boulette de pain que je lui lance et me sourit. Mon mari se montre plein d’entrain. Je constate que son sens de l’humour a résisté aux féroces températures africaines. Je le retrouve enfin. Le poisson dans mon assiette provient en ligne directe du paradis, onctueux, épicé, grillé à point. Oubliant toute bienséance, je lèche mes doigts avec délectation.

    Un chanteur papillonne autour des tables avec sa kora. Il nous demande nos prénoms, et psalmodie une longue litanie dans laquelle les noms de Fabrice et de Jo reviennent toutes les cinq secondes.

    — Il chante nos louanges, me murmure Fabrice, amusé. Prépare tes CFA.

    Bercée par la lancinante mélodie, je me fais la réflexion que cette soirée parfaite me récompense de ma si longue attente, lorsqu’un élément dérangeant s’introduit soudainement dans mon champ de vision. À l’entrée de la terrasse, entre deux halos de lampions, vient d’apparaître Félix Chabot. Il nous aperçoit et fond sur nous avec l’élégance d’un éléphant de mer. Oubliant qu’il m’a vue quelques heures auparavant, il me tend sa main de cétacé.

    — Bonsoir, les amoureux. Je peux m’asseoir ?

    — Bien sûr, fait Fabrice en avançant une chaise. Merci d’avoir récupéré Jo à l’aéroport. Tu veux dîner ? Je t’invite.

    — Je ne veux pas vous déranger, fait l’intrus en s’asseyant lourdement avec un empressement qui contredit ses paroles.

    — Mais non, ça me fait plaisir.

    Ce qui n’est pas mon cas. Je masque ma déconvenue en étirant mes lèvres dans un sourire contraint. Qu’est-ce qui a pris à Fabrice ? Qu’a-t-il besoin de l’inviter dans notre dîner d’amoureux ? Et de son côté, Félix devrait comprendre que sa présence à notre table n’était pas exactement ce dont nous rêvons pour fêter notre intimité retrouvée. Le tact le plus élémentaire exigerait qu’il décline l’offre et qu’il s’efface discrètement après quelques échanges amicaux. Une délicatesse qu’il ne faut apparemment pas attendre du lourdaud qui me fait face, et qui se tape le ventre d’un air finaud, en nous informant que justement, « il crève la dalle ». Mais d’ailleurs, que vient-il faire ici ? Ce n’est certainement pas le hasard qui l’a mené jusqu’à nous. Comment savait-il que nous dînions sur la petite Corniche ? Fabrice a dû le lui dire, sans se douter que l’importun s’incrusterait dans notre soirée de retrouvailles.

    J’en veux secrètement à mon mari pour cette invitation déplacée, je voudrais l’avoir tout à moi, au moins ce soir, pour qu’il me raconte tout ce qui avait fait sa vie depuis notre séparation. Maintenant, la fête est gâchée. Plus encore que la colère, c’était la tristesse qui me submerge, à la pensée qu’il n’accorde pas autant d’importance que moi à ce moment précieux.

    Félix ne paraît pas se formaliser de mon sourire crispé. Tout en enfournant la nourriture dans sa bouche grasse, il accapare la conversation, totalement imperméable au malaise qu’il suscite. Au contraire, il se comporte comme si sa présence nous comblait de joie. Sa face ronde de bébé réjoui se détache sur la noirceur du ciel, adoucie par la lumière gaie des lampions, telle une lune pleine de dessin d’enfant. Il me faut à peu près trente secondes pour qu’elle m’insupporte.

    Il parle bruyamment, rit plus fort encore à ses plaisanteries aussi fines que son tour de taille, en tapant la nappe du plat de la main, et s’adresse sans cesse à Fabrice, qui lui fait bonne figure, le traître. Au lieu de lui faire comprendre ce que sa compagnie a d’importun, il évoque avec lui des personnes dont j’ignore l’existence, des lieux où je ne suis pas allée… La fête tourne au fiasco.

    — Félix tient un magasin de fleurs, laisse tomber Fabrice, qui vient enfin de s’apercevoir simultanément de mon existence et de mon désarroi.

    — Ah.

    Mon commentaire à peine poli ne le fait pas tiquer. J’ai du mal à imaginer les gros doigts adipeux de l’encombrant convive fignolant de délicats bouquets.

    — Je gère un dépôt de plantes destinées à l’exportation, me précise l’intéressé, en essayant de déloger du bout de la langue un débris alimentaire coincé entre deux molaires. Il faudra que vous veniez voir mes serres.

    — Absolument, dis-je poliment.

    La conversation bifurque sur les différentes espèces de dracénas et les multiples façons de les bouturer. Mon sorbet fond en grosses larmes sucrées au fond de ma coupe, qui me renvoie mon image grotesquement déformée par l’arrondi du métal.

    Le chanteur de kora est passé à l’abordage de la table voisine, où deux tourtereaux attendent leur commande. La femme arbore un sourire béat. J’envie soudain son air d’imbécile heureuse et étouffe un bâillement. Il est près de minuit.

    — Jo est fatiguée, il est temps de rentrer, décide Fabrice.

    Félix nous quitte enfin.

    Je suis presque soulagée de mettre un terme à cette soirée dont j’ai tant rêvé. Mes dérapages de scénario deviennent décidément trop nombreux.

    Dans la voiture, je ne dis pas un mot. Fabrice lance quelques réflexions qui tombent comme des pierres dans le puits de mon silence. Il se tourne vers moi.

    — Qu’est-ce qu’il y a ? Tu boudes ?

    Difficile de le contredire. Je hausse les épaules.

    — J’aurais préféré qu’on dîne tous les deux. Qu’est-ce qui t’a pris d’inviter ce gros lard ?

    Il me jette un regard perplexe.

    — Enfin, Jo, ce gros lard, comme tu dis, a eu la gentillesse d’aller te réceptionner à l’aéroport.

    J’admets.

    — Tu lui avais donc dit de venir nous rejoindre ?

    — Oui, a répondu Fabrice d’un air gêné, mais c’était par pure politesse. Je ne pensais pas qu’il le ferait. Tu comprends, il est célibataire, il s’ennuie, au fond, c’est un brave garçon.

    —… qui manque singulièrement de savoir-vivre.

    — Peut-être. Mais il m’était difficile de le rembarrer, après le service qu’il m’avait rendu.

    L’idée que Fabrice était à l’origine du parasitage de la soirée m’injecte une giclée d’amertume.

    — Mon amour, nous n’allons tout de même pas nous disputer le premier soir ! Ça n’en vaut pas la peine. Peut-être que je n’aurais pas dû, en effet. Moi aussi, j’aurais préféré qu’on reste seuls. Excuse-moi. Tu m’en veux ?

    Je mens.

    — Non.

    Il passe son bras libre derrière mon épaule et scelle mes lèvres d’un baiser, une façon de clore le sujet.

    Je ne suis pas certaine de vouloir pardonner. Il aurait ressentir le besoin d’un tête-à-tête sans que j’aie à le formuler.

    Mais la nuit est si douce et si tiède qu’il est impossible de rester sur un ressentiment. Les nuits tièdes sont faites pour l’amour.

    Nous roulons toutes vitres baissées et je sens malgré moi mes rancœurs se ramollir. La faute de Fabrice est-elle si grave ? D’autres occasions se représenteront. Nous allons apprendre à jouer l’accord parfait, chacun avec sa partition.

    Les rues pétillent d’animation. Sur les trottoirs, les inévitables bana-banas essayent de fourguer aux touristes leurs crânes de geckos, leurs dents de lions ou quelque autre gris-gris aphrodisiaque. Nous quittons le peuple de la nuit pour nous réfugier dans la quiétude de l’appartement.

    L’odeur d’arachide est toujours prégnante, épaisse et insistante. Le perroquet, dérangé dans son sommeil, nous accueille par des invectives de mégère.

    Ce soir, malgré ma fatigue et le décalage horaire, je ne dors pas. Un kaléidoscope d’images, de sensations a pris possession de mon cerveau et tient le sommeil en respect. Je réalise seulement que pas une seule fois, Fabrice ne s’est excusé de son absence à l’aéroport, ni ne s’est étendu sur sa cause. Pas une seule fois, il ne m’a complimentée sur ma robe jaune. Arrête ton cinéma, ma vieille, tu vas chercher la petite bête. Détends-toi. Si tu n’y prends garde, le climat d’ici aura vite fait de te faire virer à l’aigre.

    ***

    3

    Les jours suivants ont dessiné les contours de ma nouvelle existence. Fabrice part tôt, et ne rentre pas déjeuner, ce qui me laisse de longues plages de loisirs. J’ai toujours travaillé, et je n’ai jamais eu de ma vie autant de temps devant moi. Au début, la perspective de cette liberté m’a semblé follement séduisante. J’irai à la plage, pratiquerai un sport, me ferai des amies avec lesquelles je partirai en virée. Mais une semaine vient de s’écouler, et je ne fais rien de tout cela. Sans amis, sans voiture, puisque Fabrice l’utilise toute la journée, je tourne en rond. J’ai ramené de France quelques romans, et je lis, vautrée dans le sofa.

    Dakar m’impressionne, je n’ai pas envie de l’affronter. Je me colle au carreau et contemple la ville drapée dans ses voiles de chaleur. La ligne d’horizon est hérissée de buildings. En fin de journée sa laideur vibrionnante se maquille d’or et de rouge, et lorsque le soleil plonge derrière les immeubles, Fabrice rentre du bureau et je n’ai rien à répondre à son éternelle question : « Qu’est-ce que tu as fait aujourd’hui ? »

    Force m’est d’admettre que je ne sais que faire de ce trop-plein de temps. Par manque de pratique, sans doute.

    Parfois, je délivre Sékou de sa cage et entreprends de lui apprendre les rudiments de la langue française. Sans beaucoup de succès, je dois dire. Mon élève m’oppose une mauvaise volonté flagrante, et s’obstine à expectorer des vocalises atroces qui me glacent les sangs. Il se montre plus docile avec Fabrice, qu’il a apparemment dans la peau, ou plutôt dans les plumes, alors qu’il m’a dans le nez, ou dans le bec en l’occurrence. Mon mari a réussi à lui faire régurgiter quelques grands airs d’opéra. Pendant le dîner, il le laisse picorer dans son assiette et grimper sur le rebord de son verre. Jamais l’emplumé ne touche à mon couvert.

    Aujourd’hui encore, me voilà livrée à moi-même, ne sachant comment occuper cette éternité vertigineuse qui me sépare du retour du guerrier.

    Abdoulaye, le boy, promène sa nonchalante efficacité d’une pièce à l’autre, ses grands bras prolongés d’un balai, d’un aspirateur, ou d’une poêle à frire. Il assure toutes les tâches que nécessite l’entretien d’une maison, si bien que je n’ai plus grand-chose à faire pour remplir les longues heures brûlantes.

    Hier, j’ai émis la suggestion de nous passer de ses services, puisque désormais, je peux me charger des corvées quotidiennes, mais Fabrice a poussé des cris d’orfraie.

    — Tu n’y penses pas ! C’est quasiment obligatoire pour les expats, d’avoir un employé de maison. On ne comprendrait pas que tu fasses les basses besognes. Ce serait très mal vu par les Africains, ils se foutraient de toi, même…

    Notre statut d’expatriés étant figé dans le marbre, il semble exclu d’y faire la moindre entorse.

    — On peut peut-être alors l’employer moins de temps, je peux faire la cuisine…

    — Non, pas question. Et puis avec ce qu’il gagne chez nous, Abdoulaye fait vivre toute sa famille.

    L’argument économique et humanitaire, plus que celui ne notre position sociale à tenir, m’a fait renoncer à mes ambitions ménagères. Je me suis sentie coupable d’avoir fomenté de telles idées. Je me suis donc résignée, au prix de mon intimité, à voir la longue silhouette dégingandée du boy fourgonner à longueur de journée dans tous les coins de la maison.

    Dans un instant d’égarement, je me suis tout de même aventurée à proposer à Abdoulaye de me charger des courses, mais il a roulé de gros yeux indignés comme si j’avais voulu le dépouiller de ses prérogatives. Mon offre a dû lui paraître une critique déguisée. Je l’ai rassuré en lui affirmant que j’étais très contente de son travail, et n’ai plus osé aborder la question.

    Quelque part, c’est lui, le véritable maître de maison. Sa présence continuelle me pèse, elle m’empêche de me laisser aller, de m’approprier complètement les lieux. Je suis chez moi sans l’être. Dépossédée des tâches que j’ai toujours eu l’habitude de faire, je n’éprouve aucun soulagement à en être exemptée, bien au contraire. Je vaque, comme en apesanteur, à des choses futiles.

    Ce matin, faute de pouvoir jouer à la fée du logis, j’ai décidé de tuer mon ennui par une expédition dans la faune colorée du marché Kermel.

    C’est une chose de rêver à l’Afrique, du fond d’un fauteuil moelleux d’un appartement agenais. C’en est une autre, bien différente, de se retrouver immergée au milieu d’une foule bruyante, agressée par les cris stridents, les odeurs piquantes, la puanteur des caniveaux, les sollicitations insistantes des vendeurs et des mendiants. Ma peau blanche me désigne immédiatement comme une proie. Je pourrais écrire « gibier » sur ma robe qu’ils ne viendraient pas plus nombreux m’assaillir de leurs harangues. Au bout d’un moment, terrassée par la chaleur et l’agitation fiévreuse de la rue, je suis rentrée, vaguement insatisfaite de mon errance sans but.

    La journée s’est étirée en longueur et lorsque Fabrice est rentré et s’est assis comme de coutume derrière son whisky en me demandant de lui raconter « ce que j’avais fait de beau », je me suis creusé la cervelle pour en extraire une anecdote pourvue de la moindre parcelle d’intérêt. Faute d’en trouver, je lui ai retourné la question. Il m’a parlé du bon chiffre des ventes du dernier trimestre, du nouveau modèle de mocassin qui faisait fureur, du marché à l’export qu’il comptait développer.

    — Je vais d’ailleurs devoir faire des déplacements réguliers en Casamance. La semaine prochaine, je serai absent trois jours.

    — Je pourrai venir avec toi ?

    — Ma Jo, c’est un voyage d’affaires, pas du tourisme. Je n’aurai pas une minute à te consacrer et tu t’ennuierais à mourir.

    « Pour ce que cela va changer », me suis-je retenue de dire. Gentiment renvoyée dans mes cordes, en l’occurrence les quatre murs de l’appartement, je n’ai pas insisté.

    Pour se détendre, mon travailleur a appuyé sur le bouton du radiocassette, et les trilles de Carmen ont déferlé dans le salon, succédant à l’appel du muezzin de la mosquée d’en face. Abdoulaye était parti. Enfin seuls.

    Oui, enfin pas pour longtemps. Le carillon de la porte a coupé court à notre brève solitude. Deux couples, amis de Fabrice, se bousculaient sur le palier. Ils passaient à l’improviste pour faire ma connaissance et prendre un verre par la même occasion. Fabrice a fait les présentations.

    — Annie et Henri Fontaine, Sophie et André Sérézat.

    La première nommée a fondu sur moi. Deux baisers retentissants ont claqué sur ma joue. Le temps que je me remette, elle s’était déjà précipitée sur le canapé et m’abrutissait de questions. J’ai dû l’interrompre pour dire quelques mots aimables au reste de la troupe, puis les hommes ont bavardé entre eux tandis que Sophie Sérézat s’asseyait en face de moi. Nous avons ainsi fait plus ample connaissance.

    Annie est une grande cheftaine tonitruante, désespérément positive et affligée d’un mauvais goût très sûr en matière vestimentaire, à en juger d’après sa tenue inattendue, d’un vert exécrable, à la coupe désavantageuse. Tout en rabattant du plat de la main la bâche caca d’oie qui lui tenait lieu de jupe, elle m’a vanté, pendant un

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