Une tante formidable
Derrière la baie vitrée de l’aéroport, je suis des yeux l’avion à bord duquel se trouve ma sœur Marina. Destination : Palma de Majorque. L’instant que j’appréhende est arrivé. Me voici seule face à mon neveu et mes deux nièces, dont j’aurai la responsabilité pendant quinze jours. Autant dire une éternité. Pour être tout à fait honnête, primo, je n’ai jamais eu la vocation d’être tante et deuzio, je n’ai jamais su m’y prendre avec les enfants. Ce n’est pas un hasard si moi, Lizzie Leroy, je suis toujours célibataire à trente-cinq ans passés. Je n’ai rien contre eux, du moment que leur vie interfère le moins possible avec la mienne. Si ma plume de romancière devait les décrire, elle dirait que ce sont des petits êtres étranges et bruyants venus d’une autre planète, sorte d’extraterrestres ou d’aliens.
Ces créatures déroutantes possèdent un mode de fonctionnement mystérieux qui me laisse perplexe. Leur seule promiscuité suffit d’ailleurs à me rendre mal à l’aise et à me faire perdre mes moyens. Je ne sais pas pourquoi, mais à leur contact je développe une espèce d’intolérance invisible, à l’image d’une personne allergique au lactose. Pourtant, à partir de maintenant, je vais devoir composer, deux longues semaines durant, avec trois de ces extraterrestres, prénommés Évangeline, Milo et Chloé, respectivement âgés de quatorze, dix et cinq ans. Tout un programme !
J’en suis toujours à me demander comment j’ai pu accepter de me fourrer délibérément dans un tel pétrin ! Je revois encore Marina débarquer chez moi à l’improviste. En temps ordinaire, elle me prévient à l’avance de sa visite pour être certaine de me trouver à mon domicile et s’épargner ainsi un aller-retour inutile de deux cents kilomètres. Je la revois donc, avec dans les mains un saint-honoré, mon gâteau préféré. Ma sœur espérait sûrement que je serais plus sensible à sa requête en misant sur mon incorrigible gourmandise. Elle n’avait pas tort.
Installées face à face à la table du coin cuisine, tandis que je me délectais coup sur coup de deux choux caramélisés fourrés d’une délicieuse crème pâtissière, elle est entrée sans détour dans le vif du sujet.
– Lizzie, tu sais que je ne suis pas du genre à demander de l’aide. Même quand le père de mes enfants nous a quittés pour partir en Australie, j’ai réussi à faire face toute seule, moralement et financièrement. Cela
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