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L’extinction
L’extinction
L’extinction
Livre électronique453 pages6 heures

L’extinction

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À propos de ce livre électronique

Une seule espèce intelligente peut régner sur Terre.

Devant la menace qui pèse sur l’humanité, Catherine part à la recherche de nouveaux alliés. Sa quête s’avère toutefois plus périlleuse que prévue. Si elle échoue, le monde s’en sortira-t-il?

La base rebelle est attaquée. Alexis est abandonné, présumé mort. Pour survivre et sauver l’homme qu’il aime, il devra se découvrir une force et une volonté jusqu’ici insoupçonnées.

Karl est aux premières loges de l’apocalypse. Il a peut-être une chance de faire une différence… s’il prend les bonnes décisions.
Malgré elle, Keisha se voit confiée le commandement d’une nouvelle troupe.
Elle est déterminée à survivre, mais la situation semble désespérée. Sera-t-elle à la hauteur?

Grandiose saga dystopique, la trilogie Le prix de l’immortalité explore un univers riche et futuriste dans lequel d’inoubliables protagonistes découvriront qu’une lutte contre la mort n’est pas sans conséquence…
LangueFrançais
Date de sortie9 oct. 2020
ISBN9782898190322
L’extinction
Auteur

Johanne Dallaire

Avant de se lancer dans l’écriture, Johanne Dallaire a eu la chance de toucher à plusieurs domaines: construction, criminologie, droit… sans oublier le précieux métier de maman. Ce bagage diversifié lui a permis de pondre un récit futuriste puissant, très humain et riche en émotions. Le prix de l’immortalité est sa première oeuvre littéraire.

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    Aperçu du livre

    L’extinction - Johanne Dallaire

    C843/.6—dc23

    1

    16 ANS PLUS TÔT…

    L’entité assistait à sa mort, impuissante. Terrifiée. Le soulier immaculé d’un homme s’abattait sur elle, sur sa puce-processeur – le petit objet métallique d’apparence insignifiante qui renfermait sa conscience. Son programme. Elle serait pulvérisée, disparaîtrait dans le néant.

    Son existence aurait duré à peine quelques minutes.

    — Will ! Non !

    Une femme arrêta le dénommé Will dans son élan. Elle lui arracha des mains la chaussure meurtrière. Il étira son bras pour la reprendre, mais elle la lança à l’autre bout de la pièce. Elle le foudroya du regard :

    — Tu as perdu la tête ? !

    — Cette aberration ne peut pas exister, Colleen !

    L’entité ne voyait aucune issue possible. Elle avait tenté de fuir par le passage qui reliait la puce-processeur à la Trame, mais avait échoué. Elle était destinée à être un vulgaire animal de compagnie, un anima ; rien dans son programme ne lui indiquait comment se déplacer dans le réseau informatique des Citoyens.

    — Si tu fais ça, Will, ils vont me foutre à la porte !

    — Colleen, tu vois aussi bien que moi le code dérailler ! Ce truc… ça… ça réfléchit ! Ça ne devrait pas exister !

    — Oui ! Mais si ça se sait, Victor Monk me fera jeter à la rue !

    — Laisse-moi le détruire, et personne ne saura !

    — C’est la puce-processeur commandée par Emma Zerberg ! Ça ne passera pas inaperçu !

    Pendant qu’ils parlaient, Will avait retiré son second soulier. Il le tenait déjà au-dessus de sa tête, prêt à récidiver. Il soupira, baissa son bras.

    — Hé, merde ! Tu as une meilleure idée ?

    Zoé

    11 SEPTEMBRE 2298

    « Miss Cameron, it’s been five minutes since you’ve made any progress in your exercise. You need to focus. » (Mademoiselle Cameron, cela fait cinq minutes que vous n’avez pas progressé dans votre exercice. Vous devez vous concentrer.)

    — Fuck you, Socrate, murmura Zoé entre ses dents. Socrate était l’intelligence artificielle qui surveillait les étudiants Senior de la prestigieuse Dunbar-Hewitt Academy. Il s’était exprimé via les micropuces auditives de Zoé, situées sur ses tragus – le bout de chair obstruant partiellement le conduit auditif –, mais n’avait pas manqué de prévenir l’enseignant. Le petit homme aux cheveux châtains séparés sur le côté s’approcha d’elle, les mains sur les hanches. Il exécuta un soupir théâtral avant de parler en anglais, seule langue convenable dans une telle institution :

    — Zoé Cameron, je vous expulserai à la prochaine insolence. Comme ce sera la sixième fois en deux semaines, j’imagine que vous serez renvoyée de l’Académie – et ce, même si votre mère est devenue la personne la plus importante de la TrY City.

    Il avait insisté sur les derniers mots, provoquant un murmure de rigolade parmi les étudiants. Sans attendre de réponse, Darren Goddard se dandina de manière fort peu virile jusqu’au prochain élève qui nécessitait son attention. Dans la Dunbar-Hewitt Academy, le programme d’intelligence artificielle accomplissait tout le travail, mais l’enseignant demeurait maître de sa classe.

    La perspective du renvoi, alléchante, faillit convaincre Zoé d’insulter Goddard. Les nouvelles voyageaient vite, dans les hautes sphères de la TrY City ; l’image de ses parents serait ternie. Ils seraient furieux. Or, cette vengeance ne rendrait pas justice à ce que sa mère avait fait à Lucas.

    « Miss Cameron ? »

    Zoé planta ses incisives dans sa lèvre inférieure pour se contraindre au silence, se promettant de réfléchir à cette idée plus tard. Puis, elle se pencha sur l’exercice de génomique affiché en trois dimensions sur son pupitre :

    « Rosalind Watson et Dewey Franklin souhaitent que leur enfant ait les iris verts, les cheveux blonds, soit de sexe féminin et mesure au moins cent soixante-dix centimètres. Laquelle de ces séquences génétiques répond à toutes ces requêtes ? »

    Elle soupira, exaspérée. Lucas avait été conçu de façon naturelle, lui. Il n’en était pas moins l’incarnation de la perfection : chevelure couleur de miel tombant devant ses yeux bleus perçants, lèvres pulpeuses, nez bien droit. Toutefois, elle avait avant tout été conquise par son sourire espiègle, son regard qui cachait toujours quelque surprise… et le fait qu’elle ne se sentait réellement libre qu’avec lui. Elle examina les élèves de la grande salle de classe : traits fins, visages symétriques, corps élancés, peaux lisses. Nous sommes tous des fucking rats de laboratoire.

    — Including me, grommela-t-elle avec amertume. (Moi incluse.)

    Ses parents avaient opté pour le teint clair de son père – il était prouvé que les gens pâles réussissaient mieux en Amérique Indépendante –, mais lui avaient transmis la volumineuse chevelure de sa mère, quoique moins foncée. Ils avaient choisi jusqu’à son grain de beauté sur sa joue droite, près de l’œil. Pour lui donner du charme. Tout, sur son corps, avait été pensé, de la forme de ses hanches à la taille de ses seins – « ni trop gros ni trop petits, on ne voulait pas que tu aies l’apparence d’un programme sexuel », avait dit sa mère.

    Or, plus on choisissait de variables, plus l’embryon s’avérait dispendieux. La plupart des parents se contentaient du forfait de base, assez abordable. Sans ajout, modification ou sélection spéciale, il ne permettait que de s’assurer de l’absence de déficiences génétiques pouvant mener à des troubles physiques, mentaux ou intellectuels dont Zoé, pour la plupart, ne savait même pas le nom. Les enfants devraient s’occuper de leur beauté extérieure à leurs propres frais, au cours de leur existence.

    Mais la Dunbar-Hewitt Academy n’acceptant que les élèves issus des familles au sommet de la hiérarchie sociale, chacun de ceux-ci avait bénéficié d’une onéreuse sélection génétique – à un point tel qu’ils étaient tous ennuyants à regarder. Zoé, à elle seule, avait dû coûter quelques millions de Libertys – l’équivalent de plusieurs années de loyer dans un penthouse ultra-luxueux. Avant la récente promotion de sa mère, le salaire annuel combiné de ses parents, bien que substantiel, était loin de se mesurer à celui de certaines familles de l’Académie. Toutefois, avec des investissements intelligents – pour utiliser le terme de son père – ils étaient parvenus, au courant de leur siècle de vie commune, à accumuler une véritable fortune. Pour eux, elle représentait davantage leur réussite financière que le fruit de leur amour.

    Et Emma Zerberg n’avait pas aimé que Lucas vienne souiller sa possession la plus précieuse.

    « Miss Cameron ? », tenta à nouveau Socrate.

    Goddard la regarda de biais. Zoé baissa les yeux et s’affaira à comparer les séquences d’ADN aux modèles qu’ils avaient étudiés.

    — Hé ! Cameron ! chuchota une voix.

    Zoé se tourna vers sa voisine, une grande blonde aux dents trop blanches : la fille de Joel Hewitt, l’un des deux fondateurs de l’école. Elle colla son majeur sur sa tempe, mima l’impulsion d’un pistolet, puis roula des yeux et sortit la langue de sa bouche.

    La respiration de Zoé s’accéléra, ses doigts fourmillèrent. Goddard s’approcha d’elles. Sa voix nasillarde avait grimpé d’une octave :

    — Miss Cameron ! This is my last warning. I received clear instructions from… (Mademoiselle Cameron ! Ceci est mon dernier avertissement. J’ai reçu des directives claires du…)

    Jasmine Hewitt avait le regard fixé sur son pupitre, sourire aux lèvres. Depuis une semaine, ce petit geste, il semblait à Zoé que chaque élève de la Dunbar-Hewitt Academy le lui avait adressé, dans une tentative cruelle de lui rappeler que Lucas avait été massacré avec les Indigents. En effet, huit jours plus tôt, les nouvelles autorités de la TrY City (sa mère, en l’occurrence) avaient pris cette mesure pour protéger les Citoyens de la menace causée par le virus qui courait dans les rues et par la folie conquérante de Karl Monk.

    Cette fois, c’en était trop ! Zoé laissa la rage qui brûlait dans son ventre se répandre dans tout son être. Elle bondit sur son hypocrite voisine, l’entraînant sur le plancher. Les exclamations de surprise et les cris effrayés s’élevèrent tout autour. Zoé frappa, ayant à peine conscience de ce qu’elle faisait – seulement, qu’enfin, ce n’était plus elle qui avait mal, mais quelqu’un d’autre. Un bruit strident, conçu pour réprimer la violence physique dans l’Académie, fusa dans ses oreilles. Zoé s’en moquait. Avant que Goddard n’ait pu l’arrêter, Jasmine avait le nez cassé, une lèvre fendue, et son visage idyllique était tuméfié. Rien que les nanodocs ne pourraient effacer en une heure ou deux, mais la satisfaction était quand même là.

    Zoé se débattait dans les bras de l’enseignant quand la porte s’ouvrit sur le personnel d’urgence. Deux employés en blouse pastel se précipitèrent vers Jasmine, tandis que les gardes se jetèrent sur elle comme si elle pesait trois fois son poids. Ils la couchèrent à plat ventre, lui écrasèrent la poitrine et le visage sur le plancher pour la menotter, puis la remirent sur pied sans douceur. Ils parlaient en la dévisageant avec un air agressif, mais Zoé, assourdie par l’alarme de sécurité, n’entendait qu’un acouphène suraigu.

    Goddard lissa ses cheveux en désordre et s’adressa au reste de la classe, probablement pour lui demander de reprendre les exercices. Or, tous les regards demeuraient fixés sur Zoé. Elle pouvait lire les insultes sur les lèvres pendant qu’on la poussait vers la sortie. Certains osèrent même imiter le pistolet sur leur tempe. Elle serra les dents et continua d’avancer ; elle s’était assez donnée en spectacle pour aujourd’hui.

    Une fois dans la salle de confinement – qu’elle avait l’impression d’être la seule à avoir visitée pendant les cinquante-deux années d’existence de l’établissement –, on lui retira ses contentions et l’abandonna à elle-même.

    Zoé se défoula sur l’unique chaise, puis s’assit à même le sol et examina ses jointures. Elle tenta de frotter ses mains sur son pantalon pour nettoyer le sang qui avait coulé du nez de Jasmine, mais une vive douleur la dissuada de s’acharner. Retenant son souffle, elle ouvrit et ferma les poings. Rien ne semblait cassé, mais l’enflure était plus impressionnante qu’elle l’imaginait, même si elle avait déjà soigné Lucas à la suite d’un combat – pour une histoire de territoire, se rappela-t-elle.

    Ses pensées étaient à présent tournées vers son copain. Elle n’avait pas eu de nouvelles depuis la fin du mois d’août, alors que l’épidémie sévissait dans les rues. Il avait de toute évidence accès à une tactile trafiquée, puisqu’il lui avait transmis un message pour la rassurer : un médecin citoyen l’avait guéri à l’aide de nanodocs, et son clan était en sûreté dans un bunker souterrain. Peu après, elle avait pu voir, d’en haut, les Indigents être exterminés. Elle était bien la seule à s’en être préoccupée. À plusieurs reprises, elle avait tenté de joindre sa mère pour la forcer à entendre raison, mais Emma s’était contentée de l’ignorer.

    Malgré son échec, Zoé nourrissait l’espoir que Lucas avait survécu. Il avait dû rester caché dans son bunker. Il le fallait.

    Si seulement le fait d’avoir défiguré Jasmine Hewitt pouvait lui garantir d’être descendue dans les rues, Zoé aurait l’occasion de vérifier son hypothèse… Mais elle n’avait pas encore dix-huit ans. C’était donc impossible. Elle risquait davantage d’être envoyée dans un centre de détention comme celui où résidait Lucas, à l’époque où elle l’avait connu. Cette idée était presque attrayante. Sauf que ses parents ne la laisseraient pas les disgracier à ce point.

    À moins qu’ils ne s’en aperçoivent pas, songea-t-elle avec une pointe d’ironie, sans vraiment y croire.

    En effet, depuis que sa mère avait été promue à la tête de la TrY City, elle était différente, distante. Elle ne venait même plus dormir à l’appartement familial. Son père, pour sa part, était parti plusieurs semaines plus tôt en voyage d’affaires à travers l’Amérique Indépendante, et n’était toujours pas revenu. Il ne restait que son amie Ivy, de même que Cléo, pour partager son quotidien.

    Lorsqu’un visage féminin à l’air sévère apparut sur le mur intelligent, Zoé avait repris le contrôle de ses émotions. Sa respiration s’était apaisée. Le bourdonnement dans ses oreilles avait également diminué, ce qui lui permit d’entendre la voix de la directrice, qui s’adressa à elle en anglais :

    « Mademoiselle Cameron, votre père vous attend dans mon bureau. Êtes-vous prête à sortir calmement ? »

    Le cœur de Zoé manqua un battement. Son père était ici, et elle ne le savait pas encore ? Elle regarda l’état de ses mains, soudain déchirée entre l’envie de les cacher dans ses vêtements et celle de les exhiber pour l’obliger à réagir.

    — Oui.

    « Bien. Des gardes vont vous escorter. »

    La porte coulissa sur ceux qui l’avaient conduite en isolement. Elle les suivit, sentant son cœur accélérer à mesure qu’elle approchait de son paternel. Ils s’arrêtèrent devant un bureau où l’inscription virtuelle indiquait « Georgia Mills ». Zoé franchit seule le seuil.

    À l’intérieur, ses illusions fondirent, remplacées par une nouvelle colère ; elle aurait dû se douter que son père ne serait présent qu’en réalité augmentée. Il était debout, bras croisés, vêtu d’un veston noir et d’une cravate lustrée plutôt sobre, et affichait l’air contrarié qu’il avait lorsqu’elle le dérangeait au cours d’une réunion importante – ce qui devait être le cas, puisqu’il semblait toujours en réunion importante. Il portait un petit rectangle doré sur ses vêtements : « Trans corp., Stephen Cameron, Vice President InterCities Relations ». Emma Zerberg, quant à elle, ne s’était pas donné la peine d’assister à la déchéance de sa progéniture.

    Zoé, la tête haute malgré le poids du regard de son père, avança jusqu’à une chaise libre et s’assit de manière aussi détachée que possible. La directrice prit un air contrit :

    — Monsieur Cameron, votre fille est une cause perdue.

    Stephen répondit comme si Zoé ne pouvait pas l’entendre :

    « Georgia, vous savez qu’elle vit une période difficile. Nous compenserons généreusement l’école – et mademoiselle Hewitt – pour les inconvénients, mais… »

    — L’argent ne vous servira plus à rien. À présent, c’est mon emploi qui est en jeu pour avoir toléré Zoé aussi longtemps. Joel nous a déjà avisés qu’il saisirait le Tribunal Inter-Conglomérat des dommages causés à Jasmine et à la réputation de l’institution.

    « Allons, Georgia, soyez raisonnable… »

    — Raisonnable ? ! Des enregistrements de ce… de ce… (Elle pointa un doigt tremblant de rage vers Zoé.) danger public circulent sur la Trame. Bientôt, tout le monde aura vu l’humiliation subie par l’héritière Hewitt. Et c’est sans compter les graffitis de la semaine dernière, les insultes répétées aux enseignants, les comportements agressifs. À présent, impossible d’étouffer tout ça. L’Académie sera la risée de la TrY City ! On se reverra au tribunal, Stephen.

    D’un geste impatient, la directrice indiqua la porte, qui s’ouvrit aussitôt. Dans le silence le plus total – ce qui n’était pas dans ses habitudes –, Stephen se volatilisa, abandonnant ledit danger public à son étonnement. Cette rencontre avait dégénéré plus rapidement que prévu.

    Les gardes entrèrent dans le bureau et empoignèrent Zoé, chacun par un bras. Surprise par la force utilisée, elle hoqueta, puis se laissa traîner à travers les corridors. Les élèves, alors en pause, s’immobilisèrent pour la dévisager. Plusieurs en profitèrent pour l’injurier une ultime fois. Au passage, Ivy se limita à lui adresser un sourire triste ; se porter à sa défense aurait signé son arrêt de mort social.

    Zoé était habituée à ce traitement. Le statut de sa mère lui avait toujours attiré l’opposé de la sympathie. Elle avait parcouru à maintes reprises ces couloirs, sous ces mêmes regards et ces mêmes insultes. Au départ, les autres élèves gardaient une distance prudente, mais ils avaient vite compris qu’Emma Zerberg n’interviendrait pas pour protéger sa fille. « C’est comme ça que tu deviendras aussi forte que moi », prétendait-elle pour justifier son inaction. Ça ou « Tu dois apprendre à te défendre seule. »

    Et elle m’en veut quand je prends les choses en main à ma manière…

    Une fois le hangar atteint, les gardes poussèrent Zoé dans un taxi-drone public, qui décolla aussitôt. L’habitacle était affreux et minuscule comparé à celui du drone privé des Cameron. Ç’aurait été beaucoup trop risqué d’attendre qu’il vienne me chercher, songea-t-elle, sarcastique. En dix minutes, j’aurais pu ruiner encore plus la réputation de l’Académie… L’intérieur sentait un mélange de renfermé et du parfum floral de la précédente occupante, et le sol était parsemé de gouttelettes brunes séchées. Zoé grogna, accota sa tête et ferma les yeux, secouée par le vol irrégulier du vieil appareil. Le voyage ne serait pas très long, de toute manière.

    Le véhicule la conduisit dans l’appartement familial, situé dans le massif Weapon Building – la tour appartenant à Trans corp. dans la TrY City. La richissime entreprise contrôlait la Trans City sur la côte ouest, mais possédait au moins une bâtisse dans chaque cité. Elle fabriquait et distribuait les technologies militaires les plus avancées de l’Amérique Indépendante, mais surtout, elle était la seule à avoir les moyens de produire les transhumains.

    Zoé avait à peine mis les pieds chez elle que, sous la gouverne de sa micropuce occipitale, ses oculaires affichèrent l’image virtuelle de son père, tandis que ses tragus se chargèrent de lui transmettre la fureur de sa voix :

    « Why the hell did you do that ? Come on, you’re smarter than that ! » (Pourquoi diable as-tu fait ça ? Tu es plus intelligente que ça !)

    — C’est votre faute ! s’indigna Zoé dans la même langue. Si maman n’avait pas envoyé Lucas dans les rues…

    « Zoé Cameron ! Ce garçon était un voyou ; il a couru après son sort. Il n’est pas une victime, contrairement à ce que tu t’imagines… »

    — C’est faux ! Maman ne lui aurait pas enlevé son statut de Citoyen si elle ne s’était pas mise dans la tête qu’il avait une mauvaise influence sur moi ! Comme si j’avais besoin de lui pour…

    « Ça suffit ! Tu es en train de devenir incontrôlable ! Ça m’attriste, mais tu vas devoir vivre avec la réalité : Lucas est mort. Ça ne sert plus à rien d’essayer de le rejoindre. Tu veux vraiment finir ta vie toute seule, en bas ? »

    Des larmes lui montèrent aux yeux, à la fois de colère et de tristesse. Elle serra les poings et se laissa choir sur le banc derrière elle. Son père parut se calmer.

    « Sweetheart, ta mère et moi… »

    Zoé éclata d’un rire exagéré.

    — Ma mère ? ! Elle se fiche de moi, maman. Elle ne s’est même pas donné la peine de…

    « C’est faux, Zoé. Tu connais le travail de ta mère… il peut être très prenant. Surtout par les temps qui courent. Alors, laisse-moi terminer. Nous avons décidé d’arrêter de gaspiller de l’argent pour ton éducation tant que tu n’auras pas appris ta leçon. Il te faudra trouver un emploi, parce qu’à partir de maintenant, tu devras payer pour habiter ici. »

    Elle n’en croyait pas ses oreilles : ses parents avaient toujours préféré qu’elle se concentre sur ses études plutôt que de travailler.

    — Quoi ? ! C’est une blague ? Comme si vous manquiez de Libertys !

    « Non, Zoé. C’est très sérieux. Et ce n’est pas une question de Libertys. »

    N’ayant aucune envie d’être confinée à l’appartement – sa punition habituelle lorsqu’elle envoyait paître son père –, elle réprima ses insultes.

    « Je m’attends à ce que tu aies trouvé un emploi d’ici une semaine. »

    Puis, il disparut.

    Zoé jura en bondissant sur ses pieds. Elle n’avait jamais travaillé de son existence ! Qui accepterait de l’employer ? Elle n’allait certainement pas s’abaisser à offrir des voyages virtuels à ses anciens collègues de classe ! Enragée, elle s’enfonça dans l’appartement pour rejoindre l’ascenseur. Cléo s’interposa à mi-chemin, ses immenses iris bleu océan fixés sur elle.

    — Pousse-toi. Je m’en vais.

    L’anima ne bougea pas d’un poil. Son anatomie était inspirée d’une espèce éteinte de félin, qu’on appelait jadis lynx. Son pelage était blanc, sauf pour quelques accents du même bleu que ses yeux se retrouvant principalement sur la pointe de ses oreilles et de sa courte queue et formant un V dans son cou. Sa mère lui avait offert Cléo le jour de son premier anniversaire de naissance – soit seize ans et demi plus tôt.

    « Qu’est-ce qui s’est passé ? Qu’est-ce que ton père voulait ? », demanda Cléo par ses micropuces auditives.

    Les mots se bousculèrent dans la bouche de Zoé :

    — J’ai été renvoyée de l’école. Il veut que je me trouve un emploi !

    « Ne souhaitais-tu pas davantage d’autonomie ? Pourquoi ça te fâche autant, alors ? »

    Elle se crispa, déterminée à ne pas laisser ces réflexions l’atteindre :

    — Parce que tout le monde pense que Lucas est mort !

    Sur ce, elle contourna l’anima et poursuivit son chemin.

    — Reste ici ! Je veux être seule !

    Mais Cléo lui emboîta le pas.

    Comment faisait-elle pour enfreindre un ordre direct de son maître ? Zoé l’ignorait. Elle avait longtemps soupçonné ses parents, qui avaient priorité sur les contrôles de Cléo, de donner des consignes contraires aux siennes à l’anima – jusqu’à ce qu’elle la voie leur désobéir. Zoé avait compris des années auparavant que Cléo était spéciale (même si Ivy prétendait que tous les propriétaires d’animas s’illusionnaient de la sorte) : elle était capable de jouer avec des données sur la Trame – de les faire disparaître, notamment – et de commander d’autres programmes. Zoé s’était toutefois gardée de le mentionner à qui que ce soit.

    Elles descendirent sur l’étage de la place publique hyper luxueuse du Weapon Building. Puis, Zoé emprunta des passerelles et des escaliers, traversa davantage de places publiques, toujours suivie par Cléo, qui avançait sans produire le moindre son. Zoé laissa ses pieds la guider sur ce chemin familier, sans se soucier des splendeurs architecturales qu’elle rencontrait. Elle ne s’arrêta qu’en arrivant dans un espace décrépit où planait une odeur âcre, dans le quartier le plus malfamé de la TrY City – le Mary Tudor (mieux connu sous son surnom de Bloody Mary). Les Citoyens les plus démunis étaient regroupés ici, dans quelques vieux immeubles d’habitation invendables, que les propriétaires avaient renoncé à entretenir et dont les maigres revenus suffisaient tout juste à couvrir les dépenses.

    Zoé s’installa sur le seul banc qui n’était ni brisé ni recouvert d’une substance douteuse, et observa les alentours. Rien n’avait changé depuis la dernière fois où elle y avait mis les pieds – soit la journée où Lucas avait été arrêté.

    La plupart des commerces étaient fermés. Il ne restait qu’un comptoir à nourriture synthétique, protégé par un garde à l’air blasé. Un ancien parc, au sol bruni et desséché, avait été laissé à l’abandon. Les jeux dans lesquels les enfants avaient dû jouer, plus d’un demi-siècle auparavant, avaient tous été vandalisés. Le seul mur intelligent fonctionnel affichait sans relâche des publicités vantant des produits inutiles pour les habitants des lieux. De plus, personne n’ayant mis à jour les microns de coloration virtuelle des murs, on n’en distinguait que le béton fissuré dont la peinture, jaunie et sale, s’effritait.

    Il y avait davantage de têtes blanches dans les environs que n’importe où ailleurs dans la cité ; les gens du Bloody Mary n’avaient pas les moyens de se payer des rajeunissements. On y voyait aussi beaucoup de jeunes, qui provenaient en grande majorité du centre de détention Eleanor-Teresa. La plupart des « détenus », considérés inoffensifs, possédaient une autorisation de sortie. Le sort avait voulu qu’ils se retrouvent sans parents ni famille avant leurs dix-huit ans – âge à partir duquel ils pouvaient être descendus. Les autorités géraient de cette manière ceux qu’on appelait les « orphelins des rues ». Ils étaient perçus comme des causes perdues, même si, après leur majorité, certains réussissaient à trouver un emploi et à partager les frais de logement avec d’autres.

    C’était le quartier de la dernière chance : les habitants avaient presque déjà un pied dans les rues. C’était également l’endroit où elle avait connu Lucas, un an plus tôt. Elle avait alors seize ans, et lui, dix-sept.

    L’année scolaire venait tout juste de commencer et, pour une raison mystérieuse, Ivy ne lui parlait plus. Zoé avait l’impression que son monde s’écroulait. Après les cours, elle s’était mise à flâner, seule, dans la TrY City. Ses pas l’avaient conduite jusqu’au Bloody Mary. Elle s’était installée sur ce même banc et avait observé les jeunes du coin. Enviant, sans comprendre pourquoi, leur liberté.

    Ils étaient mal habillés : vêtements trop grands ou trop petits, troués, décorés de symboles peints à la main. Évidemment, leurs guenilles n’étaient pas teintées par les micropuces oculaires. De toute manière, ils ne possédaient que l’occipitale de base, imposée par le gouvernement central de l’Amérique Indépendante. Ils traînaient dans le parc (ce que certains faisaient d’ailleurs en ce moment), à vandaliser ce qui pouvait encore l’être ou à jouer à des jeux qu’elle ne comprenait pas. Ils buvaient même de l’alcool artisanal – ce qui était interdit sur la place publique, mais aucun agent de sécurité ne se donnait la peine de les avertir.

    Deux jeunes femmes s’étaient approchées pour l’insulter, en français. Zoé, qui, sous les conseils de sa mère, avait étudié cette langue pendant son sommeil, n’avait pas manqué de répliquer. Bien vite, ses adversaires avaient commencé à la battre, sachant – contrairement à Zoé, à l’époque – que le programme défectueux de gestion de l’immeuble ne préviendrait pas les autorités. Elle était persuadée qu’elles allaient la tuer lorsque Lucas était intervenu. Il l’avait par la suite ramenée chez elle, payant le taxi-drone avec ses maigres économies. Lui aussi communiquait en français. Sorti de la bouche du jeune homme, ce langage avait paru tellement exotique à Zoé.

    En apercevant Lucas, sans prendre la peine d’écouter l’histoire de sa fille, Emma Zerberg avait fait venir ses transhumains. Par chance, il n’était pas encore majeur, sinon il aurait été descendu sur-le-champ.

    Zoé était revenue au parc le lendemain – sans manquer de d’abord passer chercher Cléo pour assurer sa sécurité. Mais elle n’avait pas vu Lucas. Ni les jours suivants. Elle avait fini par trouver le courage d’interroger ses amis et avait compris que son autorisation de sortie avait été révoquée. Furieuse, elle était retournée voir sa mère. Au terme d’une discussion animée, elle avait marchandé la libération de Lucas contre la promesse de ne plus jamais mettre les pieds dans le Bloody Mary. Emma avait ensuite ordonné à Cléo de veiller à ce que sa fille tienne parole.

    Moins de vingt-quatre heures plus tard, Zoé avait brisé sa promesse. Elle avait même réussi à convaincre son anima non seulement de la suivre, mais également de cacher sa désobéissance dans la Trame.

    Lorsque Lucas l’avait vue, il lui avait demandé de partir, furieux. Après s’être confondue en excuses, elle avait éclaté en sanglots. Pris au dépourvu, il avait maladroitement tenté de la consoler. Sans qu’elle comprenne trop comment, ils s’étaient retrouvés assis côte à côte, à se partager leur histoire respective. Lucas était un orphelin des rues, il se souvenait à peine de ses parents. Quelle chance, avait-elle alors pensé, avant de se raviser.

    En peu de temps, il l’avait initiée à son mode de vie. Il lui avait appris à déjouer les microns de surveillance pour voler des biens ou de la nourriture, à fabriquer de l’alcool artisanal et à le revendre dans les quartiers moins nantis, à faire le commerce d’objets trafiqués (dont toutes traces des anciens propriétaires avaient été effacées de la Trame). Zoé avait vite compris que les surveillants corrompus du centre Eleanor-Teresa finançaient ainsi l’institution. Les détenus les plus talentueux, s’ils s’avéraient jetés à la rue, avaient la certitude d’être récupérés par un clan respectable – ce qui, dans bien des cas, était mieux qu’une vie de misère chez les Citoyens.

    En dépit de tous les efforts de Zoé, les amis de Lucas ne toléraient pas davantage sa présence que les étudiants de la Dunbar-Hewitt Academy. Elle n’avait sa place nulle part : ni avec les riches ni avec les pauvres. Ni avec ses parents. Le seul endroit où elle se sentait acceptée, c’était dans les bras de Lucas.

    Mais son bonheur avait brusquement pris fin le vingt et un avril dernier. Quelques jours après les dix-huit ans du jeune homme, alors qu’il s’était pourtant déniché un appartement pas trop miteux, Emma Zerberg lui avait retiré son droit de citoyenneté.

    — Il faut que tu m’aides à descendre, Cléo. Je dois aller voir si Lucas est encore vivant.

    De manière automatique, elle caressait la tête de son anima, posée sur ses genoux.

    « Non, Zoé. Ton père a raison. Tu devrais te chercher un travail, te responsabiliser. Penser à autre chose. C’est ce qui te ferait le plus de bien. »

    — Mais ça ne m’intéresse pas, tout ça !

    « Alors, trouve ce qui t’intéresse. »

    — C’est Lucas qui m’intéresse.

    « C’est ma faute. Je n’aurais pas dû te laisser le voir, vous protéger. Tu semblais enfin heureuse, et je ne voulais pas t’en priver… mais j’aurais dû. C’était voué à… »

    — Alors, aide-moi ! Je sais que tu en serais capable !

    « Zoé… »

    — Allez. On descend, puis on remonte dès qu’on l’a vu. Promis. Ma mère ne le saura jamais…

    « Zoé… »

    — J’ai besoin de toi !

    Elle laissa les larmes lui monter aux yeux. Pour une rare fois, Cléo ne parut pas sensible à sa peine. L’anima se raidit, remua ses oreilles pointues et s’éloigna de sa maîtresse tout en la fixant de son regard perçant cerclé de noir.

    « N’essaie pas de me manipuler, Zoé. Je ne te conduirai pas en bas. C’est trop dangereux. S’il y a vraiment des gens qui ont survécu, ils seront méfiants et pourraient te blesser ou, pire, te tuer. Je suis prête à bien des choses pour ton bonheur, mais pas à ça. »

    Furieuse, Zoé se leva, botta un débris et rebroussa chemin, déterminée à trouver un autre moyen pour parvenir à ses fins.

    2

    Keisha

    Keisha se tenait devant l’entrée de la salle d’entraînement, les bras pendants, découragée.

    Les Indigents, reconnaissables aux informes vêtements gris que les rebelles avaient daigné leur fournir, étaient indisciplinés, incapables de suivre quelque consigne que ce soit. Ils étaient tellement émerveillés par leurs nouvelles facultés qu’ils se moquaient des rebelles qui tentaient de les évaluer, et compétitionnaient pour savoir lequel était le plus fort. Maintenant qu’ils étaient immortels, leur corps guérissait par lui-même, leur cœur ne se fatiguait plus, leur puissance musculaire était accrue. Ils se sentaient tout puissants. Ils soulevaient des poids impressionnants, certes, mais refusaient d’exécuter les exercices de la manière prescrite. Certains, même, se battaient juste pour le plaisir.

    Mais Keisha pouvait-elle vraiment leur en vouloir ?

    Ils n’avaient pas demandé à être infectés par HERO-1 – la première souche virale du nouveau procédé de rajeunissement de Karl Monk –, fatal pour les habitants des rues. Ni à être attaqués par une femme-intelligence-artificielle qui s’était donné pour mission de remplacer l’humanité par une nouvelle espèce. Pas plus qu’à être enfermés dans la base rebelle pour leur protection. À présent, ils étaient devenus les sujets tests de HERO-2 au bénéfice de Susan, la chef des rebelles, qui refusait de contaminer ses soldats avant d’être convaincue de l’efficacité et de l’innocuité du virus. Pas surprenant que ces hommes et ces femmes, habitués à la liberté, contestent toute autorité.

    Parmi les anciens Indigents, ceux qui avaient été membres de l’armée d’Immortels sortaient toutefois du lot. Ils avaient pris part au massacre, avaient déjà suivi les ordres de Keisha, savaient que, sans elle, ils seraient tous morts. À sa grande surprise, ils étaient prêts à coopérer. Or, ce n’était pas eux que Susan voulait évaluer, puisqu’ils avaient reçu HERO-2 avant même d’arriver. Visiblement, la chef des rebelles se méfiait de Karl Monk et craignait que la fiole rapportée de la TrY City ne contienne un virus différent.

    Et Keisha, qui s’était frottée trop souvent à l’homme d’affaires peu scrupuleux, ne pouvait que saluer cette prudence.

    Les tentatives des rebelles pour recouvrer le contrôle de la salle d’entraînement demeuraient vaines. Le ton montait. Les deux clans étaient sur le point de s’entre-déchirer. Keisha soupira ; elle n’aurait pas le choix de prendre les choses en main. Elle s’avança, mais, avant qu’elle n’ait pu rappeler les Indigents à l’ordre, Ado, son ancien chef de clan, se planta devant elle :

    — J’en ai assez que tu te gardes la gloire pour toi toute seule, Keisha ! Tu vas dire à tes petits copains que je veux devenir plus fort, moi aussi !

    Susan avait décidé d’utiliser les premières doses issues de la réplication pour guérir uniquement les Indigents infectés par HERO-1. Or, Ado ayant marchandé sa protection de l’hôpital d’Oliver en échange de nanodocs, il était immunisé contre la maladie. Et n’avait donc pas reçu HERO-2. Cela ne l’avait pas empêché de suivre avec une jalousie évidente le rajeunissement des siens, puis la démonstration de leurs prouesses physiques.

    — Ado, tu vas…

    Un bruit strident, assourdissant, l’interrompit. Elle leva les yeux, comprenant qu’il provenait des haut-parleurs au plafond.

    L’espace de quelques battements de cœur, la salle parut se figer : les Immortels et les hommes de Susan arrêtèrent de se quereller pour se dévisager. Les premiers n’avaient aucune idée de ce qui

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