Résurrection
Par Rain Oxford
5/5
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À propos de ce livre électronique
Derek, un homme solitaire en voyage et sans destination, s’arrête brièvement dans une petite ville du nom de Cider Springs. Avant qu’il ne puisse reprendre la route, des forces d’un autre temps se réveillent et le propulsent dans une succession d’évènements aux racines vieilles de plusieurs siècles. Lorsque les habitants commencent à mourir, Derek doit endosser une destinée dont il ne connaissait rien, et faire face à un Mal intemporel et abyssal.
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Aperçu du livre
Résurrection - Rain Oxford
Résurrection
Rain Oxford
Traduit de l’anglais par Maude Gillet
Résurrection
Écrit Par Rain Oxford
Copyright © 2015 Rain Oxford
Tous droits réservés
Distribué par Babelcube, Inc.
www.babelcube.com
Traduit par Maude Gillet
Babelcube Books
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sont des marques déposées de Babelcube Inc.
Pour mon père, pour tout.
Sommaire
Prologue
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Epilogue
A propos de l’auteur
Prologue
– Mon Seigneur ?
Les yeux du jeune soldat trahissaient sa douleur et son inquiétude, non pas pour ses propres blessures, mais pour celles de son maître. Que les blessures de son seigneur fussent mortelles était une certitude, l’épée de son ennemi ayant déchiré le cuir et le fer de sa tunique pour plonger en profondeur dans ses organes vitaux. Son large torse était enveloppé dans des bandages de fortune qui s’imbibaient d’un peu plus de sang à chaque pénible bouffée d’air. Le seigneur releva sa tête hirsute, un sourire sombre lui tordait le coin des lèvres.
– Le coût de la victoire est terrible.
Ses yeux se promenèrent sur les collines stériles en dent de scie où bon nombre de ses hommes gisaient, morts ou agonisants, et il en ressentit une forte douleur à la poitrine dont aucune arme ne pourrait égaler l’intensité. Ses hommes, ses amis, mourir ici ! Ici, en cette terre hostile, si loin de chez eux. Ses yeux gris étaient durs et moroses lorsqu’ils fixèrent à nouveau le jeune soldat.
– Leur bâtard de chef vit-il encore ?
– Oui, mon Seigneur.
– Amène-le-moi. Je veux parler à ce monstre avant sa mort.
Le soldat s’éloigna précipitamment et le laissa tenter de trouver un maigre confort, assis sur des rochers brûlés par le soleil. Il résista à la tentation de s’allonger, sachant bien qu’il ne se relèverait jamais. Il dut néanmoins s’endormir un moment, puisqu’il s’éveilla au son de la voix et au léger contact du même jeune soldat.
– Mon Seigneur, nous vous l’avons amené selon vos ordres.
Le seigneur de guerre ouvrit les yeux sur le visage de son ennemi, visage cruel et moqueur, ridé par l’incarnation du mal et si malveillant et tordu que rien d’humain n’y avait subsisté. Lentement, sous le regard méprisant de ses conquérants, son air de défi se mua en expression de peur et de haine.
– Je ne ferai pas la liste de tes crimes, commença le seigneur. Tu les connais mieux que moi, et aucun de nous ne vivra assez vieux pour lui rendre justice. Nous t’avons poursuivi à travers la Terre entière afin de te détruire, toi et ceux qui te suivent, pour débarrasser le sol de cette chair infâme et pourrissante, de la maladie que tu propages.
Une quinte de toux fit trembler son corps. Lorsqu’il releva la tête, un filet de sang luisait au coin de sa bouche.
– L’humanité ne peut exister avec ceux de ta race en son sein. Tu as choisi de vénérer le Mal Ancien dans ta cupidité et ta luxure, de suivre les rituels anciens, de boire le sang et manger la chair des hommes. Tu erres la nuit, tu as été allaité dans les ténèbres. On t’attribue de nombreux noms, et ils sont tous maudits !
« Comme tu as veillé sur tes partisans dans le Mal, tu veilleras sur eux dans la mort. Tu seras dans la tombe de tes morts et tu y resteras pour y attendre la tienne, dans les ténèbres, et ton âme distordue sera prisonnière des sceaux et sorts de la Lumière pour l’éternité. Tu es une maladie qui se propage et dont on doit se débarrasser à jamais.
D’un geste las, il indiqua aux gardes de renvoyer le prisonnier. Mais le prisonnier n’était pas prêt à être renvoyé. Il était immense, presque autant que le seigneur lui-même ; chaque trait de son corps malformé trahissait sa haine endiguée. Il lança un regard furieux à l’homme qui l’avait condamné.
– Toi et tes hommes faibles et stupides ! lâcha-t-il d’une voix obscène, gutturale et sifflante. Tu gagnes aujourd’hui, mais aujourd’hui seulement ! Fais selon ton désir, cela importe peu ; tu souffriras et je rirai. Tu ne connais rien de mon pouvoir. Tu apprendras. Je reviendrai te l’enseigner.
Le seigneur observa les gardes emporter le prisonnier. Il se retourna en sentant la pression qu’exerçait la main du jeune soldat sur son épaule, et lut de l’anxiété sur son visage enfantin.
– Es-tu soucieux ?
– Oui, à propos de nombreuses choses, mon Seigneur. Il est puissant et dangereux.
– Oui, il ne faut pas l’oublier, soupira-t-il avant de fermer les yeux.
Le jeune homme prit la main de son aîné dans la sienne et s’agenouilla à ses côtés, à l’écoute de ses inspirations, chacune plus faible que la précédente. Les yeux gris s’ouvrirent et transmirent leur douleur en croisant les siens.
– Il était de mon devoir de mettre un terme à ce Mal. Au prix de beaucoup de douleur et de morts ai-je effectué ma mission, et bien que mon chagrin soit lourd, je ne peux rien regretter. Pas même ma mort ne m’empêcherait de le refaire.
Il secoua doucement la tête et soupira. Sa voix devint un murmure qui ne s’adressait à personne.
– J’espère trouver le repos, à présent.
Ses yeux se fermèrent, ses lèvres furent plongées dans le silence ; c’était comme si les efforts de ses dernières paroles avaient dérobé les dernières secondes de sa vie.
Plein d’un mélange de rage et de désespoir, le soldat pressa ses paupières pour lutter contre les larmes brûlantes. Il reposa doucement la main de son maître sur sa poitrine désormais inerte. La grande hache de guerre qui épousait si bien la main du seigneur gisait à ses côtés ; il la leva lentement et observa les rayons du soleil se refléter sur sa tranche.
Un cri attira son attention en bas et le poussa à cheminer à flanc de coteau, entre les rochers, jusqu’à atteindre le petit groupe d’hommes qui travaillaient dans la bouche sombre d’un tunnel. Le tunnel traversait une colline à sa base et se terminait sur une chambre sculptée dans la pierre. La porte de fer qui servait d’entrée était fermée. Un grand soldat roux, un de ceux qui surveillaient le prisonnier, le salua à son approche.
– C’est fait, monsieur, dit-il nerveusement, dans l’impatience d’en avoir fini et de pouvoir partir.
– Bien.
Il sentit un poids dans ses mains et réalisa qu’il portait encore la hache ; il la leva et en lut l’inscription gravée sur le métal. Il ferma les yeux un moment, et jeta l’arme dans le tunnel.
– Scellez le tunnel ! Et qu’il ne soit jamais plus ouvert !
Bien après que les hommes aient fermé la porte en fer et le tunnel, le jeune soldat se tenait encore devant. Il laissa son amertume couler lentement. C’était terminé, du moins pour le moment, mais il voyait encore les mots gravés sur la lame en métal : Que le Mal succombe devant Moi.
Le jeune soldat fut parcouru d’un frisson. Il se détourna du tunnel et se dépêcha de rejoindre les autres.
* * *
Des siècles durant, rien ne troubla la tranquillité de la tombe, embaumée par la magie, inconsciente des changements apportés par le temps qui avaient modifié le paysage. Les contours des montagnes se muèrent et s’adoucirent. Les rivières, les lacs, se formèrent et s’asséchèrent, pour s’établir à nouveau. Lentement, ils créèrent de nouvelles curiosités terrestres.
Et les hommes vinrent sur cette nouvelle terre et la trouvèrent bonne ; le seul Mal qu’il y avait était celui qu’ils avaient apporté avec eux. Mais leurs péchés étaient petits, humains.
Chapitre 1
Les pneus de la vieille Plymouth décapotable creusaient des sillons de quelques centimètres dans l’épaisse couche de poussière qui s’éparpillait en nuages, et projetaient quelques cailloux dans cette chaude après-midi de juillet. La route terreuse, défigurée par des trous et des nids-de-poule, présentait une gamme de risques allant du simple agacement au réel danger.
Derek Hanen serrait le volant de la main gauche tout en essayant de déchiffrer la carte routière froissée qu’il tenait dans la droite. La voiture rebondissait à chaque fois qu’il parvenait à trouver la bonne route sur la carte, ce qui perturbait son attention et le faisait perdre son repère. Ecœuré après plusieurs essais, il jeta la carte sur le siège passager.
Prendre à gauche sur la route 8-A, avait dit l’employé de la station essence. Tu arriveras droit sur la 395.
Derek fulminait. Le type avait vu juste, oui, mais il avait oublié de mentionner que le raccourci n’était rien de plus qu’un chemin de terre.
La carrosserie verte de la Plymouth trahissait les signes d’une longue et pénible utilisation. Ce que les accroches perdaient en taille, elles le rattrapaient par leur nombre, et le pare-chocs arrière se trouvait maculé de stickers divers collectionnés comme souvenirs par Derek pendant environ un mois avant qu’il ne s’en lasse. A ça pouvait s’ajouter l’année et demie de voyages et d’errances indénombrables.
Ce n’était pas comme si Derek s’en inquiétait réellement. Il lui restait encore quelques centaines de dollars de son dernier job, qui avait consisté à poser des tuyaux pour un petit entrepreneur en surpoids qui aimait pointer du doigt, crier, et fumer des cigares. Le petit escroc se complaisait aussi à payer ses employés à mi-temps au noir et à hauteur de la moitié du salaire minimum. Mais rien que cela constituait aux yeux de Derek une somme suffisante pour être satisfait. Quand l’argent de ce job commencerait à s’épuiser, il s’arrêterait quelque part pour en trouver un autre. Certains étaient plus agréables que d’autres, mais c’était sans importance ; dès qu’il avait amassé assez d’argent pour tenir un petit moment, il démissionnait et reprenait la route.
Par moment il songeait que sa vie n’était qu’une existence hasardeuse et sans but, et pensait que, peut-être, il pourrait se ressaisir et recommencer à zéro. Peut-être même éviter les erreurs passées. Alors le doute et la peur le prenaient, l’empêchaient d’essayer, et il laissait passer sa chance pour se laisser aller à la sécurité que les voyages lui procuraient. C’était pour lui un moment régénérateur.
Un lièvre suicidaire sauta sur la route, en face de lui, le forçant à donner un coup de volant pour l’éviter. Il le manqua, se sentit soulagé, et jeta un œil dans le rétroviseur. Il n’y avait rien à voir si ce n’était de la poussière et du plastique jauni et rayé. Il se détendit sur son siège, soupira, et reporta son attention sur le paysage qui défilait.
Des arbres, majoritairement des épicéas et des pins, regroupés en massifs broussailleux, parsemaient les basses collines comme des soldats avant la bataille ; de vieilles clôtures posaient les frontières entre les domaines. Les quelques fermes que Derek vit ne semblaient pas à leur place, comme si elles étaient imperceptiblement tombées de la poche d’une rafale qui passait par là.
Un panneau poussiéreux et battu par les vents s’approchait doucement sur le côté de la route pour remplir sa mission et informer (ou prévenir) les voyageurs de ce qui les entourait :
Bienvenue à
Cider Springs
Pop. 724
Derek freina la Plymouth et s’approcha au plus lentement qu’il pouvait, précautionneux de ne pas enfreindre une quelconque limite non-indiquée, et entra la ville à allure d’escargot. Un vieux pickup rouge le dépassa dans un bruit de ferraille semblable à des gémissements maladifs, des nuages de poussière le talonnant.
Cider Springs ne se distinguait pas beaucoup de la centaine d’autres petites villes campagnardes par lesquelles il était passé. La route nationale la coupait en son centre et servait de rue principale, avec ses quelques magasins et boutiques qui s’y agglutinaient dans l’espoir d’attirer le peu de business qu’ils pouvaient saisir. Le premier à attirer l’attention de Derek était une fausse façade d’immeuble avec un panneau peint à la main indiquant « Le magasin de Parker ». Les mots « Bière fraîche » étaient inscrits en dessous, et il ne put résister à l’annonce. Il tourna et entra sur le petit parking à côté du magasin.
Quelques allées de cannettes et de tissus l’accueillirent à l’intérieur du magasin, où il faisait frais. Dans un coin éloigné, une vitrine exposait une sélection de bières et de sodas, son compartiment réfrigéré fredonnant une chanson d’amour mécanique peu inspirée à la caisse enregistreuse. Derek s’empara d’une des cannettes de bière de la vitrine, puis traversa la boutique jusqu’au comptoir où il se pencha sur la caisse. Il était apparemment seul dans le magasin.
– Eh oh, il y a quelqu’un ?
Derek s’appuya sur son autre jambe et ouvrit sa cannette. La bière se fraya un chemin à travers la poussière dans sa gorge, laissant sur son passage un froid douloureux.
– Vous avez un client ! héla-t-il d’une voix plus forte.
Une porte derrière le comptoir s’ouvrit de quelques centimètres en oscillant, révélant une paire d’yeux larmoyants sur une