Tel est pris qui croyait prendre
Chirurgien esthétique, Marc ne comptait plus les femmes qui défilaient sur sa table d’opération, parfois de très belles – selon son avis et son expérience de praticien –, et qui souhaitaient se soumettre à son bistouri. que s , confrères l’accepteraient. Aussi Marc avait-il depuis longtemps envoyé au diable ses scrupules. La grande partie de sa clientèle se composait de femmes mûres, voire très mûres, décidées à ne pas baisser les bras devant cet ennemi sans pitié qu’était la vieillesse. Ces femmes cherchaient, à l’encontre de Jézabel dans Athalie de Jean Racine, à réparer, autrement que par du maquillage, « des ans l’irréparable outrage ».
Il les accueillait avec le sourire rassurant de l’artisan des petits miracles qu’il était. Il savait s’y prendre avec elles.
Il commençait par les décomplexer en leur affirmant qu’elles ne paraissaient pas leur âge, puis se livrait à un examen minutieux de leur visage avant de confirmer sa première impression : elles avaient traversé le temps sans grands dommages, à l’exception de quelques légères dégradations qu’il saurait corriger avec une ou plusieurs interventions, cela dépendait…
Cela dépendait en fait du porte-monnaie de la cliente auprès de laquelle il prenait soin de se renseigner dès la première consultation. Etaient-elles vraiment déterminées à subir cette délicate opération ? Auraient-elles le courage de supporter les bandages, telles des momies, durant la longue période de cicatrisation ?
Pour finir, il glissait insidieusement : en auraient-elles également les moyens ?
La réponse était toujours celle qu’il attendait.
Elles venaient le consulter sachant pertinemment qu’il ne s’agirait pas d’une simple extraction de dent et que la note serait élevée. Il leur assurait alors qu’il ferait le maximum pour les satisfaire, songeant en jubilant à ce qu’allait lui rapporter ce maximum.
La femme qui venait de pénétrer dans son cabinet n’avait certainement
