Kaliderson 1: Les yeux de Taronaka
Par Laurent Combaz
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À propos de ce livre électronique
Il y a très longtemps, dans un royaume lointain, le pouvoir du guerrier Taronaka fut transmis à un enfant et futur seigneur, Souen. Mais à l’âge de ses 11 ans, Souen découvrit qu’on l’avait trompé. Le pouvoir de Taronaka ne s’était pas éveillé en lui. Souen et son père découvrirent que ce pouvoir avait été envoyé très loin et scindé en cinq. C’est pourquoi Kaliderson se mit à avoir ses premières visions. Des visions qui lui faisaient mal. Très mal.
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Avis sur Kaliderson 1
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Aperçu du livre
Kaliderson 1 - Laurent Combaz
Il paraît que le pouvoir n’est rien tant qu’on ne l’utilise pas. J’ignore qui a dit cela, mais ce que je sais de ma propre expérience, c’est que lorsqu’on détient le pouvoir, il est parfois sage de ne pas l’utiliser… On peut me prendre pour un fou. Tant pis.
Il était une fois deux frères : Nazaï et Chaï Nu. Complices et fusionnels, ils étaient les fils du Seigneur de l’Est, une province prospère et puissante.
Le premier-né des deux, Nazaï, était destiné à prendre un jour la succession de leur père. Aussi fut-il appelé très tôt aux responsabilités politiques tandis que son frère, insouciant, profitait de la vie et courait les jupons.
Chaï Nu connut très vite l’amour et eut une fille. Belle comme le matin, avec des yeux aussi sombres que ses cheveux, elle fut baptisée So Leng, contraste entre le jour et la nuit.
Devenu Seigneur à son tour, Nazaï était beaucoup moins intéressé par l’amour que par le pouvoir politique. D’autant plus que, comme tout Seigneur de cette province de l’Est, il devait allégeance à l’Empereur, aussi invisible que puissant. Nazaï s’enticha néanmoins d’une jeune fille qui lui donna un fils, un héritier.
— Maman, c’est quoi ? s’enquit So Leng.
— C’est ton cousin, ma chérie. Le fils de ton oncle Nazaï.
— Il dort ?
— Oui. C’est comme ça : quand on est petit, on a besoin de dormir.
— Jouer avec !
— Pas encore, So Leng, mais ne t’en fais pas : bientôt, vous pourrez jouer ensemble.
— Jouer avec papa, alors ?
— Ton père n’a pas le temps, ma chérie, répondit-elle en passant une main dans les cheveux ébène de sa fille. Quand on est une grande personne, on est très occupé.
— Il m’entend ? demanda-t-elle en fixant de nouveau le nouveau-né endormi.
— Pourquoi ma puce ? Tu veux lui dire quelque chose ?
So Leng se mit sur la pointe des pieds tout en s’appuyant sur le rebord du berceau afin de passer sa tête par-dessus. Elle sourit.
— Je t’aime, cousin !
— Il s’appelle Souen, ma chérie.
— Je t’aime, Souen, chuchota la petite fille.
Il paraît que le pouvoir n’est rien tant qu’on ne l’utilise pas… L’Empereur, Lui, était bien conscient du sien et décidé à en user ! Mais à rêver de conquêtes et d’extension d’un empire, on oublie très vite les besoins de son peuple. Beaucoup trop vite…
La misère gagnait les campagnes et l’inquiétude, ses habitants. Même le Seigneur Nazaï était contrarié : les affaires n’allaient pas bon train et il délaissait son nouveau-né pour se consacrer pleinement à ses responsabilités féodales.
— Mon frère, n’en fais pas toute une histoire !
— Tu ne comprends pas, Chaï Nu ! On court à la catastrophe. Les champs ne produisent plus autant qu’avant, les récoltes sont mauvaises, la famine et la misère progressent. Et l’Empereur qui en demande toujours plus ! Nous ne pouvons plus tenir le rythme !
Nazaï était affalé dans le grand fauteuil de velours et de soie qui lui servait de trône. Boudeur, il soutenait sa tête de sa main droite, son coude reposant sur l’accoudoir. Debout, face à lui, son frère tentait de le raisonner.
— L’Empereur est certes très exigeant, mais cela ne sert à rien de te mettre en colère. Essayons plutôt de trouver des solutions calmement.
— Tu ne comprends pas. Tu n’as jamais rien compris aux affaires du royaume ! Mes propres sujets ne me respectent plus ! Ils ne donnent pas le meilleur d’eux-mêmes !
— Ne t’es-tu jamais dit qu’ils ne pouvaient peut-être pas donner plus ? Cela fait des années qu’ils croulent sous ton propre désir d’expansion. Mais ce ne sont que des hommes : on ne peut pas leur en demander plus !
— Décidément, tu ne comprends rien, Chaï Nu. Tu es trop sentimental. Je les contraindrai par la force s’il le faut, mais ils travailleront davantage ! Je ne peux pas m’arrêter maintenant : mon royaume doit s’accroître encore !
— Nazaï, tu perds la raison, le gronda des yeux son frère. Calme-toi, tu sais très bien que tu prends de mauvaises décisions lorsque tu agis sous le coup de la colère !
— Laisse-moi tranquille ! s’énerva-t-il, se levant d’un bond, las de la morale faite par Chaï Nu. Tu n’imagines pas un seul instant le poids qui pèse sur mes épaules ! Tu ne sais pas ce que c’est que d’être à ma place !
— À ta place ?
— Tu n’es que le second, ce n’est pas toi le Seigneur ! Tu n’es que son frère cadet alors je te dispense de cette morale !
Nazaï se laissa choir sur son trône et reprit sa position de boudeur. Chaï Nu soupira tandis que ses épaules s’affaissaient. Le silence s’était installé. Au bout d’un moment, Chaï Nu le brisa :
— Écoute, ta femme est en train de coucher ton fils. Tu devrais aller les rejoindre et te détendre auprès d’eux.
Nazaï le fixa droit dans les yeux pendant quelques secondes avant de se lever sans un mot et de se diriger vers la porte.
Arrivé vers l’entrebâillement de la porte, il se figea et mit en garde son frère sans se retourner, une sombre colère contenue dans la voix :
— Je serai un grand seigneur, un jour. Je serai respecté et craint comme aucun autre avant moi, du paysan jusqu’à l’Empereur lui-même ! Même si je dois m’imposer par la force ou la terreur ! Et je léguerai ce royaume à mon fils qui sera, à son tour, craint et respecté. Oui ! Mon fils sera le plus grand seigneur de tous les temps !