Le site de l’amour

Noémie remonta le col de son manteau et sortit de son immeuble.

Après trois jours de déluge non-stop, de gouttières crachant leur trop-plein d’eau sur les pavés des ruelles pentues de la vieille ville, le ciel était encore plombé mais enfin sec. On pouvait à nouveau déambuler dans la rue sans devoir slalomer entre des parapluies dégoulinants ou maladroitement pointés vers soi comme un bouclier. C’était un plaisir. Noémie l’apprécia en souriant aux passants qu’elle croisait. Certains lui rendaient son sourire ; d’autres avaient dans le regard une lueur traduisant leur surprise, voire un reproche muet pour cette gaieté affichée. Elle songea que le monde était un peu trop à l’image de la grisaille. Elle sourit de plus belle pour en chasser la morosité. Noémie était en retard. Elle accéléra l’allure en remontant la ruelle. Chez elle, Léa devait commencer à fulminer. Elle ne supportait pas d’attendre.

Léa était une maniaque de l’exactitude. Toujours en avance à ses rendez-vous, une minute avant l’heure fixée, elle commençait à frétiller et à regarder à droite et à gauche, prête à grogner un « J’aurais dû m’en douter » qui, s’il ne faisait pas apparaître celui ou celle qui excitait son impatience, la soulageait autant qu’une bonne expiration. Hormis ce petit travers, Léa était une jeune femme délicieuse. Noémie l’avait rencontrée grâce à un site Internet proposant des randonnées autour de la ville. Les deux jeunes femmes avaient sympathisé et ensemble, réunies par leur même passion de la marche, elles avaient crapahuté un peu partout, du Pic Saint-Loup à Saint-Guilhem-le-Désert, le long du canal du Midi.

Noémie suivit Léa jusqu’à son bureau.

Enfin, son amie, même si elle restait dubitative, se décidait à franchir le pas : elle allait s’inscrire sur un site de rencontre !

Léa lui avait demandé un coup de main pour établir son profil. Elle alluma son ordinateur et ouvrit le dossier dans lequel se trouvaient