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Huit variations autour de l’amour, de l’amitié et de la mort
Huit variations autour de l’amour, de l’amitié et de la mort
Huit variations autour de l’amour, de l’amitié et de la mort
Livre électronique203 pages3 heures

Huit variations autour de l’amour, de l’amitié et de la mort

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À propos de ce livre électronique

Huit variations autour de l’amour, de l’amitié et de la mort est une compilation de huit nouvelles sur l’amour, l’amitié, les hasards de la vie et la mort. Construites à partir de souvenirs, de rencontres et d’expériences, ces nouvelles sont largement fantasmées et reliées par un fil conducteur, le détective privé Henri de Montraigues. Certaines d’entre elles, très courtes, sont d’un réalisme macabre, d’autres, plus longues, sont d’un anachronisme assumé.


À PROPOS DE L'AUTEUR


Enseignant à la retraite, docteur en épistémologie et en histoire des sciences, Jean André continue son travail de chercheur en histoire des mathématiques. Lecteur éclectique, il a développé une passion pour le théâtre, mais le genre littéraire qu’il préfère est la nouvelle. C’est après la lecture de Nos gloires secrètes de Tonino Benacquista qu’il a eu envie d’écrire les huit récits courts qui composent ce recueil.
LangueFrançais
Date de sortie20 juil. 2023
ISBN9791037794772
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    Huit variations autour de l’amour, de l’amitié et de la mort - Jean André

    Ma Loute

    Ma Loute est mon voisin. Il est peintre. Il ne peint pas des tableaux. Oh, non ! Il est peintre en bâtiment. À chacun son métier. Il peint uniquement en blanc, comme Soulages peint uniquement en noir. Il est un spécialiste du blanc, un spécialiste des murs blancs. Il peinture toute la journée du sol au plafond. À l’occasion, si elle se présente, il blanchit aussi les poutres et les marches d’escalier en bois. Ma Loute est un peintre bâtisseur, mais aussi un peintre blanchisseur. Tous les matins, à 6 h 30, il sort de chez lui, la maison voisine, vêtu d’un costume de peintre, éclatant de blanc, passé la veille au soir à la machine à laver le linge blanc, séché dans un sèche-linge blanc, et impeccablement repassé. Ma Loute a beaucoup d’allure, le matin, dans son uniforme immaculé, droit comme un if repeint en blanc. Seule sa barbe légèrement grisonnante détonne. Longtemps il a été imberbe, mais de guerre lasse, un jour, il lui a laissé carte blanche. Seulement voilà, il n’a pas joué la bonne carte. La traîtresse s’est défaussée et n’a pas arboré la couleur escomptée : ni le noir de Soulages dont ses cheveux parsemés ont encore l’éclat, ni le blanc neigeux de sa tenue d’artisan. Une couleur entre les deux, qui n’en est pas vraiment une. Une couleur bâtarde, fade et terne. Un blanc cérusé par le temps. À force, je m’y suis habitué et sans doute lui aussi, car il ne l’a pas rasée. L’if n’est pas blanc jusqu’à la cime. Progressivement, j’ai trouvé cette touche de gris, de moins en moins triste, de plus en plus mélancolique. Je lui ai même trouvé un intérêt. Elle tempère la blancheur virginale du tableau.

    Ma Loute revient de son travail à 16 h 30, en général à pied, alors que le matin une camionnette, également blanche, passe toujours le prendre devant son pas de porte. Son retour en fin d’après-midi est moins glorieux que son départ aux aurores. Son costume est fatigué comme lui et est parsemé de taches blanches rondes comme sa barbe. Des taches de peinture qui font comme de vilaines croûtes craquelées sur le tissu. Il est légèrement voûté et tient dans sa main droite un pack de bières. Sa démarche est mécanique, un peu somnambulique. Il traverse la rue en biais, les yeux rivés sur sa porte d’entrée. Sa moue inexpressive ne le rend pas abordable. Il claque la porte et puis, plus rien.

    Sans doute, ma Loute se douche. Je pense. Tout au moins, je l’espère. En tout cas, il se change et met son blanc de travail dans la machine. Je perçois le ronronnement à travers le mur. Il réapparaît sur sa terrasse, en général une demi-heure plus tard, en short, souvent torse nu, une bière à moitié vide dans une main et une autre encore pleine dans l’autre, non décapsulée. Si j’en crois sa démarche zigzagante, son allure plus enjouée et son visage moins sombre, il en a déjà siphonné quelques-unes. Même à quatre degrés, même en demi-pintes, les petites bouteilles pétillantes sont rapidement à l’œuvre. Elles mettent sens dessus dessous un esprit déjà fatigué. Il s’affale dans sa chaise longue et fixe un point droit devant lui, un point bien réel, pas un point imaginaire. Car à ce stade, d’imagination il n’est plus question. Il peut rester facilement une bonne heure à siroter les bulles, dans la même position. Quand il a terminé une bière, il prend la suivante qu’il décapsule avec les dents. Chaque fois que je le vois faire de ma fenêtre du premier étage, j’ai un frisson qui me parcourt l’échine. Celui-ci remonte jusque dans mes mâchoires et déclenche une rage de dents aussi subite qu’éphémère. Je suis incapable de regarder jusqu’au moment où il recrache la capsule. Cela me glace le sang. À l’avant de la mâchoire supérieure, il ne lui reste qu’une dent sur deux. J’ai pu m’en apercevoir une fois qu’il souriait, de toutes ses dents. Un vrai choc ! J’ai détourné alors pudiquement mon regard et ai pensé soudainement au château fort de mon enfance et au chemin de ronde le long duquel je disposais mes petits soldats de plomb à l’abri des merlons. Je me suis demandé un instant si des plombages se cachaient derrière les chicots jaunis par la nicotine. Ma question n’a malheureusement pas trouvé de réponse. Je n’ai pas osé en effet lui demander comment il prenait soin de sa dentelure crénelée. J’ai craint qu’il ne la trouvât peu amène. Je veux dire ma question. Et qu’il ne la comprît pas. Pourtant, elle me démangeait. J’aurais aimé être son dentiste pour observer la face cachée de ses chicots. Pur phantasme, car il ne devait pas y avoir de dentiste. Donc, pour ouvrir la bouteille de bière, il cale le goulot dans sa bouche, sur le côté, il la serre fortement entre ses molaires, il l’incline lentement vers le haut et la rabat d’un coup sec et précis vers le bas. Le crissement du métal contre l’émail qui se fait entendre me terrorise plus que la roulette du dentiste. La capsule à demi-pliée finit par céder, libère la bague et, dans un souffle prodigieux, est expulsée manu militari. Elle rejoint sur le sol ses congénères tordues, immolées sur l’autel de soirées alcoolisées. Ma Loute, satisfait, s’octroie en général une gorgée qui n’en finit plus. La moitié de la bouteille y passe, mousse non comprise. Ma Loute est un puits sans fond. Ce qu’il fait des bulles est un mystère pour moi. Tout témoin sensé et attentif comme je le suis doit s’attendre à une éructation salvatrice. Même s’il n’avale pas d’air en buvant, ce qui est déjà en soi une performance vu la précipitation avec laquelle il étanche sa soif, il n’en reste pas moins que la bière est une boisson gazeuse et que ce gaz doit bien ressortir quelque part. J’ai beau tendre l’oreille, je ne perçois pas le moindre rot. Ma Loute ne cesse pas de me surprendre.

    Quasimodo arrive toujours casqué de rouge sur sa vespa piaggio gris dolomite au look délicieusement désuet. Il la gare de façon immuable en face de chez moi et l’attache à la barrière, installée par la mairie non pas pour protéger les piétons, mais pour interdire aux voitures de stationner sur le trottoir démesurément large à ce niveau de la rue étroite que j’habite. Il range son casque rouge avec précaution dans le compartiment fixé à l’arrière de son scooter qu’il condamne avec une petite clef. S’il est de petite taille et s’il porte sur un visage prématurément vieilli par l’abus d’alcool des traits disgracieux et empâtés, Quasimodo ne peut être affligé du triple B, bossu, borgne et boiteux, comme le personnage de Victor Hugo. Non, son surnom, qui finalement lui va comme un gant, lui vient de son utilisation immodérée et incongrue du mot quasiment. Lors de la seule conversation que j’ai eue avec lui et à laquelle je n’ai pu échapper, nous nous sommes trouvés tous les deux devant nos portes respectives au même moment, j’ai cru distinguer dans un flot ininterrompu de paroles étranges et étrangères à ma compréhension ce mot une bonne dizaine de fois. Je ne peux raconter précisément ce qu’il m’a dit durant les quelques minutes interminables que dura cette discussion, enfin ce monologue, puisque je me contentais de sourire bêtement et d’acquiescer machinalement. En y repensant, j’ai jugé mon comportement peu glorieux. Mais ce qui m’a stupéfait le plus est que j’ai été incapable de me souvenir de ce qu’il m’avait raconté. De cette logorrhée, m’est revenu un seul mot sorti de contextes totalement oubliés : quasiment. Quasiment est devenu, sans que je sache vraiment pourquoi, Quasimodo ! À la mode de quasiment. Le jeu de mots peut paraître facile, mais il s’est imposé à moi naturellement. Pourtant, je n’ai jamais eu de vénération particulière pour le roman de notre grand écrivain français. À vrai dire, je l’ai lu trop jeune, et je n’en ai pas un bon souvenir. Le bossu m’avait terrifié. J’ai vu aussi trop jeune le film Notre-Dame de Paris. La sensuelle Gina Lollobrigida avait certes troublé le jeune garçon que j’étais, mais le visage tordu d’Anthony Quinn avait encore plus troublé mon sommeil. J’ai fait depuis une recherche sur l’origine du mot Quasimodo et j’ai appris qu’il désigne la messe célébrée le premier dimanche après Pâques pour les pèlerins arrivés trop tard et privés de la résurrection du Christ. Cette messe commençant par les mots latins quasi modo geniti infantes, comme des enfants nouveau-nés, l’expression Renvoyer à quasimodo est l’équivalent catholique du païen Renvoyer aux calendes grecques. C’est sûrement plus compliqué que cela, mais cela me convient. Notre Quasimodo ne se fiche pas mal de l’origine du surnom que je lui ai donné et a déjà rejoint son frère, une bouteille de pastis à la main. Son frère qui en est à sa quatrième bouteille de bière et qui, à mon grand étonnement, n’a toujours pas éructé le moindre gaz.

    Les deux frères ne se ressemblent pas du tout physiquement. Ma Loute dépasse quasiment d’une tête Quasimodo. Il est très mince, presque trop, il frise la maigreur et, au retour de son travail, évoque un arbre sec sans vie, tandis que l’autre, sans être grassouillet, est disons un potelet nerveux. Le petit gabarit de celui-ci et son agitation perpétuelle renforcent cette impression. De loin, je l’aurais dit râblé. Mais en fait, je me suis aperçu lorsque je l’ai observé durant notre unique conversation rapprochée qu’il était moins trapu que je ne l’avais pensé au premier abord. Du coup, juste après, m’est venue l’idée de troquer le rabelaisien râblé dont je l’avais affublé au départ, pour le plus suggestif Quasimodo. J’étais pourtant content du premier surnom, car le bonhomme est égrillard surtout lorsqu’il est sous l’emprise de l’alcool. Finalement, l’universalité du second a eu raison de la gaieté gaillarde trop gauloise du premier, Hugo a eu raison de Rabelais. Non, vraiment, j’ai beau chercher, je ne leur trouve aucun signe extérieur de ressemblance. Autant le premier est osseux, autant le second est arrondi. Un peu à la manière des deux héros de Cervantès. Ma Loute en Don Quichotte non pas de la Mancha, mais de la botella de cerveza et Quasimodo en Sancho Panza non pas sur son grison, mais sur sa vespa gris dolomite. J’extravague un peu. C’est juste une image. Pour ce qui est du reste, la comparaison ne tient pas plus la route que l’ex-râblé rabelaisien passablement imbibé ne tient son scooter lorsqu’il tente de rentrer chez lui en zigzagant, après s’être fait mettre à la porte par une madame ma Loute excédée par le caquetage de l’alcoolique Quasimodo.

    Ma Loute a une compagne qui vient régulièrement passer la nuit avec lui. Je l’ai souvent aperçue sur la terrasse. C’est une personne discrète, ne cherchant pas le contact, mais à l’occasion ne s’interdisant pas non plus d’échanger quelques mots. En fait, quand elle ne peut pas faire autrement, c’est-à-dire lorsque nous arrivons tous les deux en même temps, elle chez sa Loute et moi chez moi, et qu’elle ne peut plus se dérober, elle fait face et nous bavardons de la pluie et du beau temps pendant une minute ou deux ou même trois, mais rarement plus. Comme nous ne sommes ni l’un ni l’autre des ingénieurs météorologues et encore moins des spécialistes de la frontologie des masses d’air, nous avons vite fait le tour de notre sujet principal de discussion. Nous constatons seulement, en pauvres spectateurs impuissants, que les anticyclones et les dépressions jouent au chat et à la souris et se jouent de nous. Mais la dernière fois que je me suis trouvé nez à nez avec elle, cela s’est passé différemment. Elle portait un sac à provisions. Il était plus de vingt heures et la chaleur du soleil laissait la place à une petite brise agréable. Ses yeux fixaient le scooter de Quasimodo, parqué contre la barrière de trottoir de l’autre côté de la rue, lorsque je lui ai adressé la parole. Un court instant j’ai cru voir dans son regard une dureté qu’elle chassa aussitôt et qui laissa la place à une indifférence polie. Nous nous souhaitâmes une bonne soirée comme pour prendre congé, alors que nous n’avions encore rien dit. Je pensais qu’elle voulait en rester là, et, je ne sais pas quelle mouche m’a alors piqué, si tant est qu’une mouche pique, je l’ai presque agressée verbalement. Enfin, agresser, le mot est un peu fort. Disons que je l’ai vivement interpellée au sujet d’une pizza surgelée dont l’emballage dépassait de son cabas et qui n’avait d’italien que le i final de la marque. Cela ne me regardait absolument pas et je trouve rétrospectivement mon intervention particulièrement déplacée. J’aurais mieux fait de me taire. Sans doute, j’avais sauté sur l’occasion qui m’était offerte pour engager une conversation que je souhaitais plus réussie que les précédentes. Et je dis méthodiquement tout le mal que je pensais de cet ersatz de Margherita, et je me vantai d’en avoir mangé d’excellentes en Italie, et même une délicieuse à San Francisco, et je ne lui laissai pas le temps d’en placer une, pas une pizza, mais une parole. Elle aurait pu m’envoyer promener, elle aurait dû m’envoyer promener. Non, elle attendit sagement que je finisse ma diatribe. Quand, après m’être tué à démolir sans pitié son repas, je me tus enfin, elle me sourit et me souhaita un bon dîner. Purée, j’étais vraiment honteux et je restai une bonne minute, la clef à la main, avant de l’introduire dans la serrure. Ce fut la dernière fois que je lui adressai la parole, et qu’elle m’adressa la parole, et que nous échangeâmes quelques mots. Non, qu’elle disparut du paysage, je l’apercevais parfois du premier étage en compagnie des deux frères, mais simplement à partir de ce que j’appelle l’affaire de la pizza Margherita, il ne se trouva pas une nouvelle occasion que nous soyons en présence l’un de l’autre. Sans doute, avais-je conclu, elle s’arrangeait pour ne plus me croiser. Mais comment pouvait-elle savoir quand je sortais et quand je rentrais ? Je ne trouvais pas de réponse plausible. La question me tourmenta quelque temps jusqu’à ce que l’hiver arrive et que ses apparitions sur la terrasse cessent tout à fait.

    Durant l’hiver, ma Loute hiberne. Il déserte sa terrasse qui, en général, reste dans l’état où il l’a laissée à la fin de l’automne. Un coin est jonché de capsules, de bouteilles de bière et d’alcools divers, témoins des soirées automnales où les deux frères se sont paqueté la fraise, comprendre se bourrer la gueule. Je préfère l’expression québécoise que j’ai entendue dans le quartier montréalais d’Hochelaga-Maisonneuve, car je la trouve infiniment moins vulgaire et infiniment plus délicate que la française. Un tuyau d’arrosage bien fatigué et poreux traverse la terrasse dans le sens de la longueur, comme une ligne de fuites. Vers quoi, mystère ? Au milieu trône une table ronde en fer rouillé, qui devait être verte à l’origine, sur laquelle gisent, isolées, deux tasses ébréchées et crasseuses, au fond desquelles des traces marronnasses de café ont fini par sécher malgré les averses. Sur le côté, des branches de bois mort jamais ramassées depuis le jour tardif de printemps où l’envie lui avait pris de tailler les quelques arbustes poussant le long du mur mitoyen. Évidemment, il avait trop tardé et trop coupé. Par miracle, les arbustes avaient survécu à cette taille sauvage, mais n’étaient pas au mieux de leur forme. Et puis, au fond, sur le rebord de la fenêtre de l’abri de jardin, cette tête de poisson séchée, macabre, ultime vestige d’un brochet péché dans la Loire. Ma Loute est en effet un pécheur accompli. C’est l’aveu qu’il m’a fait un jour de grosse cuite. Ma Loute ne me parle que lorsqu’il est beurré. Lorsqu’il est à jeun, il répond à mes salutations par un grognement. Au début, cela m’étonnait, puis cela m’a irrité et maintenant, j’y suis habitué et je ne me formalise même plus. Mais reconnaissons-lui au moins une qualité : il a le vin gai, ce qui n’est pas donné à tout le monde. En fait, c’est un introverti et il lui faut un désinhibiteur, en l’occurrence l’alcool, pour se lâcher un peu, disons pour s’adresser naturellement à une personne inconnue, en l’occurrence moi. Sa terrasse, pour revenir à elle, reste ainsi pétrifiée jusqu’au printemps.

    De mon jardin, en général le samedi soir, j’entrevois des ombres à travers le rideau de couleur indéfinissable, de mauvaise facture, dont les bords gondolent et qui est censé occulter la porte-fenêtre de la véranda. Les ombres se trémoussent au son d’un bruit incertain. Je devine les silhouettes en surimpression, si caractéristiques des deux frères Dalton, surtout celle d’Averell, mais je distingue difficilement les contours du corps de madame Ma Loute. Souvent, un des battants est entrouvert et, en tendant l’oreille, je perçois, entre les désaccords de la musique et les éclats de voix nasillarde de Quasimodo, des intonations féminines. Je suis presque rassuré par l’anormalité touchante de la scène. J’ai du mal cependant à imaginer la cohabitation du trio dans un lieu aussi petit, dont la surface habitable ne doit guère dépasser 40 m². Il est vrai que l’appartement s’ouvre sur la vaste terrasse, mais l’hiver, cette dernière

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