L' ENFANT DE PERSONNE: Orpheline
Par Nicole M
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À propos de ce livre électronique
Puis l’adoption, cet enlèvement, ce déracinement du jour au lendemain. Mal adaptée, déficiente, angoissée, j’ai fait mes premiers pas vers l’Amour conditionnel. Que de portes à franchir sans avoir de guides. Il n’est pas facile de me développer et de trouver ma raison de vivre. La blessure de l’abandon est perpétuelle. Réussirais-je un jour ma quête ? Où est la vérité ?
Je suis une enfant perdue sans droit légitime, au nom effacé et mon histoire est embrouillée. Ma mission est une recherche identitaire. Me suivez-vous avec votre cœur ? Je touche votre main pour vous sensibiliser, en vivant avec moi, MA VIE D’ORPHELINE…
JAI SOIXANTE–DIX PRINTEMPS
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Aperçu du livre
L' ENFANT DE PERSONNE - Nicole M
PROLOGUE
DÉRACINÉE
Je vous accueille sur mon lit de papiers, celui qui décrit ma vie. L’urgence d’écrire pour moi, c’est comme si la peur de mourir subitement laisserait mon histoire invisible. Je suis une orpheline sans parents pour l’accueillir au monde, sans photos-souvenirs, sans papiers de filiation.
Le lien a été brisé avec ma maman dans les pleurs et le sang. Dans des bras inconnus, on m’a volée et déposée nue dans le berceau froid. Personne ne m’a vue grandir dans cette crèche sans « miséricorde », débordée d’enfants. Je suis une orpheline disparue sans avis de recherche…
Je vous invite à suivre les traces de ma plume dans cette autobiographie. Dans mon livre, je ferai renaître mon enfant intérieur pour lui donner une histoire. Donnez-moi la main pour m’accompagner dans la chaleur de votre empathie et du soutien dont j’ai besoin.
Mon chemin n’a pas été facile. De la souffrance et du vide de l’abandon et le manque d’amour parental. Mon identité impersonnelle crée par la crèche…
La peur et l’angoisse ressenties lors de mon adoption à l’âge de trois ans. La porte vers les retrouvailles qui ont changé ma vie.
Sous ma plume imaginaire, j’écris mon histoire qui m’a été racontée par mon père biologique. Les souvenirs partagés de ma famille retrouvée. J’ouvre ma porte, la page blanche apparaît. Vous suivez mes pas un à la fois. Je me tiens en équilibre dans ma résilience. Vous pénétrez dans mon cerveau aux multiples alvéoles gravées. Vous allez découvrir mon âme d’orpheline qui porte la blessure existentielle. Elle est invisible à l’œil, mais tatouée sur mon cœur.
Écrire et peindre ma vie me permet de guérir. Je revois mon enfant intérieur, je me penche vers lui et je lui redonne son image originelle. J’apprends à l’aimer. Mon inspiration m’emmène vers ma venue au monde sous le regard douloureux et aimant de ma mère.
Les lois ont tué en moi le droit d’exister et d’être reconnue légalement dans ma famille biologique. Je porte le bagage de tous les orphelins que je connais. J’écris pour nous libérer. Je vous donne la clef qui ouvrira la porte de la justice. Celle de nous faire respecter, de nous donner le droit à la filiation biologique et à l’accès total de notre dossier d’origine.
AU NOM DE L’AMOUR… Tous les enfants sont égaux dans nos familles biologiques… Nous ne sommes pas des ILLÉGITIMES…
Image 5L’EMBRYON
Je suis là, ils ne le savent pas. Madeleine est dans les bras de mon père Jacques…
— M’aimeras-tu toujours.
— Oui, ma chérie.
Je ressens la douceur de leur amour. Je frissonne dans la mer amniotique qui m’entoure. La lune illumine le visage de Madeleine.
— Tu es belle.
Jacques admire ses longs cheveux noirs et soyeux. Le reflet lunaire brille dans ses magnifiques yeux. Il se rappelle leur premier baiser langoureux.
— À quoi penses-tu Jacques ?
Il n’ose pas lui avouer cette attirance qui surgit chaque fois qu’il la revoit. Il lui sourit.
— Je suis heureux d’être avec toi.
Ils se sont connus vraiment à la danse du dimanche au village de Rivière-du-Loup. Déjà un mois est passé. C’est l’été 1950, le plus merveilleux pour eux.
— Je t’aime toujours plus fort.
Madeleine est d’une nature douce et chaleureuse. Jacques est un homme passionné et émotif.
— Je me suis donnée à toi de tout mon cœur, murmure Madeleine.
Jacques est surpris de cette confidence si rapide. C’est un amour tellement intense. Dans son enfance et adolescence, il a vécu difficilement. Parfois, Madeleine, qui l’observe, le voit se battre à la sortie d’un bar. Cette violence l’inquiète et lui fait peur. Mais, elle est rassurée quand il l’enlace dans ses bras musclés. Elle se sent protégée.
La douceur de Madeleine l’apaise. Il cache son secret dans son cœur blessé. Il ferait tout pour la garder près de lui. Il a cherché ce grand amour pendant vingt-deux ans. Enfin, il se sent vraiment aimé. Elle ferme les yeux et dort collée près de son corps. Ils vivent le bien-être du moment présent avant de retourner chez eux.
Madeleine a eu, elle aussi, une vie compliquée. Son père, Isidore, est décédé accidentellement alors que sa mère Arzélie était enceinte d’elle en 1927. Madeleine et sa sœur Rita âgée d’un an de plus vivaient pauvrement. La vie avait changé lorsque leur mère avait rencontré Albertino et l’avait marié.
Ils ont eu cinq autres enfants ensemble et la dernière fille, Francine est née en 1948. Les deux sœurs, Madeleine et Rita avaient perdu leur place dans la maison ainsi que l’attention de leur maman. La présence d’un nouveau père les rendait craintives. Dans ce milieu, Madeleine s’est sentie insécure toute sa vie. Elle retrouve le réconfort auprès de Jacques.
Leurs rencontres deviennent de plus en plus fréquentes ainsi que leurs contacts intimes.
Madeleine semble soudainement préoccupée, en septembre 1950. Jacques est inquiet de la voir s’éloigner de lui.
— Que se passe-t-il, Madeleine ?
— Un grand malheur, mon chéri.
— Quoi ? s’écria-t-il nerveusement.
Madeleine se leva et s’éloigna, apeurée.
— Je ne te comprends plus. Tu ne m’aimes plus, dit Jacques.
—Ce n’est pas cela, c’est encore plus grave, gémit-elle Jacques retint son souffle, prêt à exploser. Elle fit des pas en arrière et s’écria :
— JE SUIS ENCEINTE…
Jacques ne peut plus respirer. Il s’effondre sur le plancher et crie :
— NON ! NON !
Madeleine pleure à chaudes larmes, tapie dans le coin de sa chambre.
— Es-tu sûre ?
— Oui, répond-elle d’une voix étouffée par le désespoir.
Jacques se relève et se dirige vers la sortie. Il est bouillant de rage. Il a le regard perdu. Il met la main sur la poignée de la porte et se retourne. Il voit Madeleine affaissée dans le lit, pâle et tremblante. Son amour pour elle est trop grand. Il revient et la prend dans ses bras.
— Nous nous en sortirons ensemble…
Recroquevillée dans la matrice, je ne bouge pas. Je me sens coupable d’être là…
Je suis cet embryon, suspendu malgré lui au cordon de ma mère…
— Ouvre ton cœur, maman, m’entends-tu ? Je m’accroche à la vie, je suis dans ton ombre. Je ressens ton désespoir,
j’entends encore papa crier, j’ai peur. Je n’étais pas désirée, je le réalise…
Mon papa se veut rassurant, mais il n’y a aucune solution.
Ils demeurent chacun chez leurs parents, sans emploi fixe.
Elle est le support familial pour ses demi-sœurs et frères. Il travaille au garage de son père. Comment annoncer cela à leur famille ?
Madeleine sait que sa mère ne peut pas la garder avec son bébé. Elle sera tellement peinée et honteuse de sa fille.
Albertino n’acceptera pas d’avoir un autre enfant à nourrir, surtout de cette fille qui n’est pas la sienne.
— Je partirai loin d’eux…
Jacques la comprend, mais il se sent tellement impuissant.
Il rencontre ses parents pour leur en parler.
— DEHORS !!! hurle Jeanne, sa mère.
— Tu ne déshonoreras pas ma famille, clame Napoléon, son père. Je ne veux plus te voir !
Jacques, atterré par cette dure réalité, se retrouve dehors avec Madeleine enceinte. Ils n’ont pas d’argent pour vivre très longtemps dans cette situation. Ce soir-là, je dors avec eux, cachés dans le garage non chauffé et humide.
— Allons-nous mourir, maman ? J’ai froid, je suis blottie dans son corps fiévreux. Le monde n’est pas fait pour nous les sans-abris de l’Amour. Nous sommes condamnés sans jugement, au nom d’une fausse justice…
— Nous ne sommes pas tous égaux dans ce monde, papa ?
Il a l’air renfrogné et songeur. Jacques dit à Madeleine :
— Les autres membres de ma famille ne connaissent pas notre situation. Allons voir ma grand-maman.
— Que lui diras-tu ? réplique Madeleine.
Elle m’a souvent hébergé quand maman et moi on se disputait. Elle était cruelle, elle me forçait à battre mes frères désobéissants. Mon cœur crevait de peine, en les voyant pleurer, lui confie Jacques, les yeux détournés par la honte.
Grand-maman Louise est tellement heureuse de voir son petit-fils. Elle est surprise de cette visite inattendue.
— Un bon repas chaud et deux bons lits vous remettront en forme. On dirait que vous avez couché dehors.
Jacques et Madeleine se regardent, complices et souriants.
Après quelques jours, Louise s’inquiète qu’ils ne parlent pas de repartir.
— Tu ne travailles pas avec ton père aujourd’hui ?
— Non, je suis en vacances.
Louise sait bien que les vacances n’existent pas dans le garage de son fils. Elle se doute que quelque chose ne va pas.
— Je sors faire l’épicerie, les enfants.
Elle se dirige vers la maison de Napoléon. C’est sa belle-fille qui la reçoit.
— Je me doute que ça ne va pas bien par chez vous.
— Pourquoi dites-vous ça, Louise ?
— Ton Jacques est chez moi avec sa blonde, depuis une semaine.
— Je n’en reviens pas qu’ils ont osé vous embêter.
Imagine-toi que Madeleine est enceinte et que notre fils nous
a déshonorés ! Heureusement que personne ne le sait au village. Quelle honte ! Renvoie-les-moi ici. Je dois parler avec Napoléon pour trouver une solution.
Jacques est contrarié d’avoir à rencontrer ses parents. Il sait que ça va brasser. Il se sent coupable. Sa colère grandit en lui. Il faut qu’il s’éloigne de Madeleine pour se défouler. Elle retient ses larmes, car ça lui tombe sur les nerfs, il devient plus impatient.
— Ne m’abandonne pas, souffle-t-elle à voix basse.
L’a-t-il entendue ? Il passe la porte et la ferme à grand bruit.
Nous sommes seules, ma mère et moi, à porter un fardeau trop lourd. La pression de son angoisse devient intra-utérine, je suis en danger…
Jacques est allé se chercher un peu de courage en noyant sa détresse à la taverne du coin. Il marche en chambranlant, l’air baveux, vers la maison familiale.
— Rentre, mon niaiseux ! crie, exacerbée, sa mère Jeanne.
Il n’a pas le temps de braver. Pour la première fois, il voit son père très en colère. Son père l’agrippe par le collet et le colle au mur.
— À cause de