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Livre électronique180 pages2 heures

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À propos de ce livre électronique

Ce texte est le récit testamentaire des dernières divagations mémorielles et imaginatives d’un brave homme ordinaire. Âgé de soixante cinq ans, virtuose anonyme de l’échec de sa propre existence, ancien fracassé d’Algérie, cet homme se retrouve sous pompe à morphine, étendu sur un lit dans une chambre d’hôpital, avec pour seul compagnon objectif un téléviseur poussé aux deux tiers de sa capacité sonore. Ce texte se déroule dans le silence de sa tête et dans un temps suspendu à la nécessité ultime de l’écrire au fur et à mesure que les mots et les images s’effaceraient ; juste pour saluer le principe des choses qui ne restent pas.
LangueFrançais
Date de sortie22 nov. 2013
ISBN9782312016436
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    EXIT - Marc-Azad Nioré

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    EXIT

    Marc-Azad Nioré

    EXIT

    LES ÉDITIONS DU NET

    22 rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes

    © Les Éditions du Net, 2013

    ISBN : 978-2-312-01643-6

    Avant-Propos

    Ce texte est le récit testamentaire des dernières divagations mémorielles et imaginatives d'un brave homme ordinaire. Âgé de soixante cinq ans, virtuose anonyme de l'échec de sa propre existence, ancien fracassé d'Algérie, cet homme se retrouve sous pompe à morphine, étendu sur un lit dans une chambre d'hôpital, avec pour seul compagnon objectif un téléviseur poussé aux deux tiers de sa capacité sonore. Ce texte se déroule dans le silence de sa tête et dans un temps suspendu à la nécessité ultime de l'écrire au fur et à mesure que les mots et les images s'effaceraient ; juste pour saluer le principe des choses qui ne restent pas.

    1

    Un racé pas pur qui fouettait macchabée le chien vieillard qu’on ne lave plus. Pareil que moi. Romuald, c’était, et demeurerait mon cher jeune cracra, cordon, adulte, vieux cabot ombilical ; prétexte unique pour ne se sentir possessif qu'en étendant chaque jour par projection cérébrale dans sa couche de chien, l’enfant pas fini qu’il m’est impossible d’arrêter d’être. N’importe quand, n’importe où. Jusqu’au bout, de la représentation de soi. C'est pas que je ne le lavais plus comme en ce qui me concerne l'hygiène générale, mis à part la propreté entretenue maniaque de mon orifice anal et de ma protubérance tantôt verticale. Non. Je ne le lavais jamais. Qui ça  ? Mais Romuald, mon vieux cabot ombilical, toujours. Le nez des autres, il n’avait qu’à trinquer dans l’immeuble et ailleurs. L’habitude contraire de le savonner sous la douche avec du qui « sent bon » qui mousse m’aurait fait plutôt creuser un trou d’absence de plus en plus caverneuse dans sa compagnie indispensable d’âme de chien. Valait mieux que j’attende pour cela qu’il décède ; ce qui refilerait au nez des voisins les plus récalcitrants une joie pas longue parce que fausse et qui me réjouirait d'autant plus que je me ferais le devoir de perpétuer la mauvaise odeur du cabot vieillard à moi tout seul dans la cage d’escalier qui monte à ma chambre sous les toits. C'est vrai, quoi. Réjouir malgré soi son entourage par la mort logique de l'être que l'on jauge plus méritant qu'un autre pour recevoir notre affection dans sa dimension la plus conséquente, puis rattraper ce malgré soi en assombrissant le paysage du même entourage avec le bâton du devoir de conscience, cela compense la tristesse que produit une mémoire de soi qui est en train de s'éventer dans le vieillissement fatal d'un corps de bête. De toute façon, faut pas que le voisinage se bile jaune ou noire à propos des odeurs mauvaises que traînent derrière eux les hommes et les bêtes, je décèderai juste après Romuald, en laissant des poils partout. Le cœur paisible, mis au poids mort des remords, des regrets, de la peur inventée de disparaître. Sans la mise en scène de présence caricaturale par nature d’une concubine décampée depuis des lustres avec grand copain Tartempion, revenue là quelques minutes à votre chevet pour pleurnicher sur elle-même par anticipation identificatoire de se savoir elle aussi charogne à devenir sans coquetterie, un de ces jours. C’était juré ; craché par le destin des personnes ordinaires ; ou, si vous préférez, par son ordonnance divine : ce cher âpre et tendre échec rémunératoire.

    La négligence hygiénique de toute carcasse humaine se doit d'être tranquillisée par psychotropes et sous alcoolémie comme il faut quotidienne pour que l’homme râleur, détestable et sûrement plus pauvre en argent que misérable en esprit s'éclate un maximum dans cette forme réduite d'auto pouvoir restant. La preuve. Soixante-cinq ans jubilatoires de petite comédienne déchéance physique passée à être jouée dans du sang de conscience, qui, depuis quelque temps, risquait à tout moment de se mélanger à mon urine — quoiqu’il y eût un système de dialyse bon marché agrafé le long de ma jambe — c’était un problème de maître-esclave que son serviteur-esclave chien Romuald devait subir en se mettant lui aussi à sentir le cadavre qui se prépare. Car, quand il est question vitale de partager les dernières semaines de sa propre solitude avec un animal, qu’il soit animal-homme ou animal tout court, il est des affections qui ne s’entretiennent pas autrement. Donc, concernant ma figure d'Anastasius baptisé subjectif – Anastasius vient du prénom grec Anastas qui veut dire résurrection – social-être-isé en tant que par la régulation morale du silence, de la cécité et de la surdité, il est dans mon droit comportemental de me sentir catholique infaillible ; descendant probable d’une heureuse partouze lointaine entre Akkadiens et Sumériens déguisés en gréco-romains parmi les viandes grillées, le vin, le sang païen des menstrues bibliques et les grappes de raisin, je pense que le serviteur-esclave chien se doit de schlinguer comme son maître-esclave homme. N’afficher que les mêmes yeux résignés, tristes, foireux, énormément coupables de rien du tout. La même queue basse des croyances irréversibles dont on croit chaque fois être revenu par la rancœur vaniteuse que l’on en éprouve. La même fatigue étonnée, vague à l’âme, d’être encore en survie d’apnée cérébrale parmi des centaines de milliers de cerveaux nettoyés qui marchent au pas cadencé des militaires d’une junte quelconque dans une odeur industrielle plus proche de la nauséeuse prise d'habitude de l'odeur que de la puanteur de l'odeur elle-même. L’un, tout recouvert de poils, animal calé contre l’autre, animal-homme, celui-là ; imaginatif et amnésique au point d'avoir été et d'être encore plus divin délirant créatif que son propre concept de provenance originelle de sa personne ; rasé de temps à autre et raide défoncé tout le temps ; affalé ventru sur un pucier dans une chambre de bonne mise en foutoir d’encombrement de ces choses matérielles qui ne lui servent plus à rien, mais qu’il conserve sous la dépendance d’une nostalgie vascularisée par un encerclement poussiéreux de placenta métaphysique et dans l’occupation d’un cœur déserté qui se morose en permanence d’aimer se regarder en personne penaude.

    Fantôme escroqué par sa propre chair maladive, planté au milieu de cet éternel rendez-vous manqué avec la réalisation de ses rêves, même les plus sombres. Vide glacial intérieur — appelé aussi monde intérieur par tous les surmouah à revendre qui réchauffent — et qui ne cesse pas de m’étreindre, de me pousser à ricaner devant les cafards qui trottinent comme des cocottes délicieuses d’être bébête après un joli bout de chiffon de marque sur le linoléum déchiré devant ma grosse téloche mémère qui braille et qui casse les oreilles de tous ceux qui, tellement rarissimes, d'en ne pas posséder jusqu'à présent l'objet, s'imaginaient être passés au travers. D'ailleurs, à ce propos d'envahir à tout prix de gratuité télévisuelle le silence des uns avec le tintamarre des autres, ça me connaissait et spécifiait sans que je le susse, pour rendre siphonné jusqu’à la perfection un voisin méditatif éventuel. Jamais, mon Dieu, mon cher ami lecteur, je ne me suis gêné, embarrassé du volume sonore ; je parle du pire : celui qui vomit la bornerie dans son universalité démagogique.

    Alors, il est sûr attristant que ça n’ait pas eu le culot de trucider ma personne d’une manière ou d’une autre, ce jeune homme charmant et silencieux comme une image de papier qui résidait d’en dessous mon étage. Quoique, silencieux comme une image de papier, faut le dire plus vite qu'une ânerie, parce que... ou plutôt, non... précisons que son vacarme à lui, je l’entendais remontant par les murs comme la manifestation d'une présence d’homme qui rassure ; vous anoblit la dépression permanente comme un bienveillant long silence ; allège le poids crucifixion de vos ténèbres existentielles sur le parcours métropolitain des stations mortifères. Car l'intelligence du coeur — au même titre que la bêtise de l'abruti de base sociétale — a elle aussi ses bruitages. Croyez-moi, sans vous en obliger. Quel bonheur inversé ça est d’innocence impitoyable de se complaire à se laisser porter en tant que huitième étage écrasant de vieillerie enfantine par un septième étage de jeunesse paternelle qui vous élève. Et cependant, ce cher ami d'en dessous l’a dut y réfléchir un moment me précipiter dans l'au-delà pour cause téloche de tapage sonore intempestif ; surtout quand je piquais du nez avec le doigt écrasé sur la touche de la télécommande qui augmente le volume, jamais sur celle qui le diminue ; affalé en tailleur de nuque brisée par trop grand chargement de psychotropes et jajas premier prix, menton scotché au buste et bave aux commissures d'une bouche entrouverte par la contrainte de ne pas respirer normalement par les narines et à des heures de terreur aléatoire comme un minuit deux secondes et quelque chose qui fut nommé dixième, centième, millième éléphantesque par l'humanité de la fourmi travailleuse, symbolique, exemplaire, sortie de sa fable pour résignés et dans sa présence numérique comme dans sa capacité mémorielle post-industrielle. Bon, ça va, ça va. Mis à part que j'ai toujours rêvé d'être une araignée sous ma peau d'homo sapiens fourmillant, je reconnais que ma télévision se met à hurler d'un seul coup. Mais je me sens beaucoup moins coupable, quand, me réveillant en sursaut et baissant aussitôt le volume, je remarque qu'il y a la dictature tabagique des mondains « accrochés » qui gagnent encore de l'argent parmi les gens qui ont cessé d'en gagner et qui tergiversent dehors aux terrasses des cafés par étatique commandement négatif et aussi fort en alcoolémie que des vendeurs à la criée législative : Tu ne fumeras pas dans la figure enfermée de ton prochain. Même systématique à trois heures du matin avec la dictature du néo prolétariat de la mondialisation qui fraternise en se couvrant d'insultes un peu plus loin parmi les ordures volontaires sous un humble réverbère entre froissements de boites de bière vides et bruits de verre brisé de mauvais rhum, gin, vodka, whisky -  et tandis qu'un pot trafiqué de scooter monté par un Casqué-Mac-Ado-Sugarisé depuis gros ventre à sa mère massacre en toute innocence analphabète et à lui tout seul le sommeil de trois cent mille personnes entre les longues enfilades murales des immeubles.

    Et le tintamarre, quoique nécessaire, au ramassage zélé des ordures ménagères qui prend tout l'espace en otage à cinq heures du matin et quelques minutes. Sept heures trente indiqueraient la manifestation sans banderoles des moteurs à explosion et des regards résignés des chauffeurs et passagers qui dorment encore un peu, le nez de leurs voitures planté dans l'cul des autres voitures. Huit heures et le quart de l'heure qui suit sera le temps du marteau piqueur qui éventre un trottoir pour la énième fois au même endroit pour rectifier une négligence ou récupérer l'objet d'un oubli comme l'exemple de ce chirurgien désabusé qui par la plainte douloureuse et répétée d'un client décidait enfin de rouvrir le ventre de ce dernier afin d'y récupérer, entre foie et pancréas, la petite culotte de l'infirmière qu'il avait pris pour habitude antidépressive de tringler entre deux charcutages. De midi pile jusqu'à une heure et au moins trente millièmes de seconde, faut bien que les terrasses de bistrot se remplissent de travailleurs et de travailleuses qui se chassent à coups chastes implicites de capotes anglaises et se croisent en pépiements plus fournis que dans une volière. Quatre heures de l'après-midi, et des mesdames qui ressemblent à des mamans pour préparer le goûter à des milliers d'enfants qui s'expriment aussi gueulards que le complexe instinctif de considérer leurs poumons trop petits. Et enfin dix heures du soir vingt-cinq minutes trente-deux secondes et six centième de rien du tout, pour symboliser la notion de bonheur éphémère.

    Donc, n’importe quelle fragmentation métaphysique du jour et de la nuit où ma grosse téloche mémère qui braille n'aurait pas elle aussi bombardé, fracassé, affligé le patrimoine sensoriel de ce jeune homme avec des intervalles à figure d’armistices sonores qui ne serviraient qu’à le rendre un peu plus obnubilé bilieux par préfiguration sur l’explosion du prochain viol acoustique  ? Ben, quoi. Je reconnais ma putain faute, Seigneur ; et putain faute, euh... parce qu'en dehors de la faute elle-même, jamais je n'ai rencontré une seule putain sur terre.

    Même que par empathie, j'aurais presque imaginé ce jeune homme l’oreille plaquée contre le mur conducteur dont on ne sait jamais quand est-ce qu’il va se mettre à trembler, celui-là, gronder, vous pétrir la boule d’angoisse à l’hypoglycémie supportable et tout en se ruminant — avec principe de relativité morale qui sclérose l’instinct meurtrier — qu’on est toujours le salopard innocent de quelqu’un quelque part au fond de sa propre moiteur civique, ou sueur de faute retournée contre soi ; et que la grosse téloche mémère qui braille, il n’y a pas à tergiverser, c’est vraiment l’esprit de la meute qu'a perdu ses canines. À ce sujet de terrorisme sonore et néo dictature prolétarienne et moyenne classe par le boitier télévisuel, je me rappelle de tête pour l’avoir appris par cœur le petit mot suggestif que ce jeune homme délicat m’avait glissé sous la porte et qui disait, paraphraseur.

    Un jour, évadé d'un asile d'aliénés, il est arrivé un directeur de conscience. Cet homme avait l'air tellement sympathique que c'est sans lui demander les papiers de sa mission véritable qu'on l'a laissé entrer dans chaque foyer familial ; chaque foyer s'entendant avoir été marqué par le sceau générique et quelque peu ensanglanté de Nation sacrifiée pour maintenir la structure harmonique de l'Histoire. Depuis, ce directeur de conscience résolument publique et qui dès lors qu'il vous dit bonjour vous donne l'impression d'avoir toujours quelque chose à vous vendre aurait tellement appris à occuper l'espace privé en se subdivisant en membres intimes dans la bouche et la tête de chaque même famille, que même le Bon Dieu il reconnaîtrait qu’il n’aurait pas pu mieux pénétrer son prochain. L'espace public qui revêt la peau de l'espace privé à travers l'objet télévisuel que l'esclave modernisé a acheté pour son plaisir aussi passif que morbide et qui diffuse sa propagande protéiforme au rythme infernal de sa propre insatiabilité des parts de marché de ceci et de cela est un contournement de la loi séparatiste de l'église et de l'état qui force l'admiration de tout profiteur patenté. Finalement, c’est l’esclave qui commande au maître d’être ce qu’il est et non le contraire

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