Petites fables affables: Des champs d'en face
Par Christian Satgé
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À propos de ce livre électronique
D’abord, parce que « rien n’est plus ridicule que de vouloir interdire un genre du moment où il a produit des chefs-d’oeuvre. On a fait des poèmes après Homère, des tableaux après Raphaël, et nous ne sommes pas fâchés que l’on fasse des comédies et des tragédies après Molière et Racine. Sans sortir de l’apologue, nous sommes bien forcés de convenir qu’on a fait des fables charmantes depuis La Fontaine, et que plusieurs fables de La Fontaine ne sont pas dignes de lui » comme l’écrivait François-Benoît Hoffman (Fables russes).
Ensuite car cette littérature, hélas tombée en désuétude ou dans le cartable de nos chers bambins, a toujours été des plus prisées. Esprit faible ou forte tête, qui n’aime voir ici les petits travers de son prochain ou entrevoir là les gros défauts de ses proches dans des récits moins édifiants que clairvoyants, plus plaisants que méchants ?
Critiques bon enfant produites par de sales gosses, ces contes courants, souvent animaliers mais jamais bêtes, patinés par une langue vieillie, riche de mots d’hier et parfois de la veille, ne sont ni infantiles ni puérils. Ils composent, « une ample comédie à cent actes divers / Et dont la scène est l’univers » (Jean de La Fontaine, Le bûcheron et Mercure) car sous la métaphore perce l’éternel et point l’universel.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Quinqua’ quinteux d’un quintal ayant vu le jour dans la ville rose, Christian Satgé, moins écrivain qu’écrivant, est un rimeur solidaire aimant ces brèves de conteur nommées apologues, pas toujours poétiquement corrects. Plus humeuriste qu’humoriste, après avoir roulé sa bosse plus que carrosse, ce drôle de professeur d’histoire(s) vit en famille depuis plus de vingt ans dans les Pyrénées dont il aime à photographier la faune et la flore.
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Petites fables affables…: des villages du coin Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationHors cadre: Recueil de poésie Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluation
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Aperçu du livre
Petites fables affables - Christian Satgé
Christian SATGÉ
PETITES FABLES AFFABLES…
DES CHAMPS D’EN FACE
Aux lecteurs et aux amateurs
Qui penseraient, avec l’auteur,
Que les fabuleux fabulistes
– Esope, Phèdre, La Fontaine
Et Florian en tête de liste –
Trop vite mis en quarantaine,
Sont plutôt aimables docteurs
Qu’affables affabulateurs…
Pourquoi bâtir des châteaux de fables ?
Toute en simplicité, la fable se présente comme une histoire courte qui en conte plus long que n’en racontent d’épais opus prétendant offrir la saveur du savoir ou vendre l’essence de la connaissance. À ce titre c’est un conte… et quand le conte est bon, il a ses lettres. Replongez-vous avec plus ou moins de nostalgie les apologues de J. de La Fontaine ou ceux, malheureusement plus oubliés, de J.-B. Claris de Florian, découvrez les méconnus R. N. du Houllay ou Cl. J. Dorat. Sans parler des autres. De tous les autres qui, posant leur prose sur la commode fiction ou poétant plus haut que leur Q.I., sous tous les tropiques de notre mappemonde, parlent de l’Homme avec plus de sagesse que de philosophie car ils n’ont point de système à prôner, de thèse à défendre et encore moins d’idée(s) à imposer. Sans prétendre l’expliquer, la fable entend dire le monde comme il va et, peut-être, drapant la nudité de sa petite vérité dans de gros mensonges souvent rapetassés, rappeler quelques valeurs qui ne sont plus cotées en nos temps ô combien boursicoteurs.
À ce titre, cet affable genre littéraire et les ouvrages qui s’y dédient demeurent considérés comme mineurs par d’aucuns qu’ils touchent sans doute alors qu’ils ne sont pas visés car on médite plus qu’on ne m’édite dans notre hexagone qui se veut un pré carré. Il se trouve pourtant parmi les plus anciens et les plus prisés des exercices d’écriture que nous connaissons, et qui nous offrent une foultitude de nouvelles irremplaçables. Pour tous les goûts. Dans tous les genres. N’en déplaise au plus banal sens commun, ces brèves histoires, plus souvent animalières que bestiales, ne sont pas spécialement destinées à l’édification des jeunes générations de France, de Navarre et autres lieux circonvoisins – Que pareil sort me soit épargné ! – ni propres à un hier totalement révolu : il est un moyen agréable d’ouvrir les yeux sur le monde et ses entours pauvres d’atours, sur l’Humanité et ses banalités dont le fond change souvent hélas moins vite que la forme.
Conscient des difficultés que cela suppose, sans pédanterie ni cuistrerie, mais non sans plaisanterie(s), moins écrivain qu’écrivant, au matin d’un des soirs de mon Midi, je me suis proposé modestement mais sûrement d’emprunter le sinueux et buissonneux chemin des écoliers pris par les fantasques moralistes et fantastiques écrivains des siècles passés. Je ne voulais alors qu’offrir à qui le souhaitait une série de chroniques terriennes, tout en philosophie de conteur, avec l’ambition de les amuser sans leur âme user. Voilà pourquoi, à mon tour, je fabule moins qu’affabule avec des êtres pas si bêtes que cela à travers lesquels on n’a parfois pas de mal à se reconnaitre. N’ayant pas l’ego – ce « je » en construction – surdimensionné, je me sens la fibre d’un félibre libre qui rimaille à l’endroit, qui rimaille à l’envers, un petit tourneur-phraseur qui aède autrui et autres bestiaux avec force rime et déraison. Pécheur pêcheur plus que prêcheur lançant à tout vent ses lignes à vers, je ne m’érige donc pas en juge et encore moins en censeur, ne me sentant que précepteur sans préceptes, juste un peu auteur, sans hauteur, à césure… voire un peu plus tard.
Parce que « la fable est la soeur aînée de l’Histoire » (Voltaire) dont elle suit et souffre les aléas, entre vos doigts vont donc s’écouler quelques grains de fables de mon fablier, doctes anecdotes ou ineffables tableaux. Souvent modestes et gais, parfois cruels comme la vie, ces morceaux choisis prêtent à (sou)rire pour mieux donner à penser car « un fabuliste (est) par définition, souriant / Et aimable », comme l’affirmait J. Anouilh (Le fabuliste improvisé, Fables, 1962) soit-il un vil et vain « méchant écriveur de lignes inégales » comme disait le Cyrano d’E. Rostand. Ces fabuleuses gestes agrestes se veulent donc autant de sketches sur notre société bien-pensante que de saynètes bien pensées (?) sur notre époque… avec un style d’un autre temps car
« Le monde est vieux, dit-on. Je le crois – Cependant
Il le faut amuser comme un enfant.¹ »
Mussé dans ce muscle frontalier de bien des lieux obscurs que l’on nomme Pyrénées, où l’on ne trouve pire aîné que montagnard, composant depuis lurette de bluettes à satiété, j’ai osé en compiler quelques-unes et commettre ce livre qui a eu le bonheur de vous rencontrer. Cet insigne opuscule ne se veut pas un bréviaire moralisateur – bien au contraire – mais plutôt le témoignage d’un regard sur ce poison que l’on appelle le quotidien avec son train-train de sénateur, ses petites joies, ses grandes peines et tous ses travers les plus banals sans fausse pruderie ni pudibonderie. Et Cela, sans « faire la leçon » à qui que ce soit, à moins que ce ne soit, un peu, à tout un chacun. À commencer par votre humble serviteur, incurable obsédé textuel et coureur d’océans poétiques.
Parfois je rêve que cet art antique, livresque ô combien, « scolaire » selon d’aucuns qui le déprisent, soit porté au rang d’art scénique car, je le crois, il convient, sans véhémence dans le discours ni brusquerie dans l’attaque, au savant le plus érudit comme à celui dont on dit l’esprit engourdi. Bref il va à tous ceux qui vivent libres en équilibre entre « le beau », « le bon » et « le bien », et le reste… Pourvu que vous en soyez !
Fabuleusement vôtre !
DANS LES PRÉS & LES LABOUR
DES CHAMPS D’EN FACE
LOUP TÊTU, M’ENTENDS-TU ?
Un jeune loup entra, hier, en ma bergerie,
Voulant à coups de crocs s’y tailler un royaume.
De la griffe et du mufle il joua, le Guillaume,
Ne la ménageant pas plus que ménagerie.
Sans rien voir ni savoir, il s’en fit le Messire,
Devisant des détails, divisant le bétail,
Mettant vite le branle et le feu au bercail ;
Il prit tout le cheptel pour des bêtes à occire.
Mais les placides brebis sont, ici, cornues
Et ne suivent pas le premier berger venu ;
En cela plus déliées d’esprit que de langue.
« Le respect se mérite, il ne s’impose pas ;
C’est tout pareil pour l’Autorité, n’est-ce pas ? ! »
Telle fut leur position sans plus de harangue…
LE MULET FIER DE SES PARENTS²
Sous des nuages dégorgeant leur chagrin,
Un mulet, un brin doucet, malgré le grain,
Au corral du Carol, partout caracole
Et toute bête l’approchant il racole
Pour évoquer sans fin toute sa lignée :
« Par mon père, mes ancêtres sont tous nobles.
Ma dynastie remonte, cela est consigné
Dans les annales, à Lucius, point ignoble
En son temps, et compte aussi Aliboron,